Jurisprudence : CE 7/8 SSR, 22-02-1989, n° 89081

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 89081

GIRAULT

Lecture du 22 Février 1989

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. James GIRAULT, demeurant 23, vallée des Pierres Brunes, Smarves à Ligugé (86240), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1° annule le jugement du 17 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1980 à 1983 dans les rôles de la ville de Poitiers ; 2° lui accorde la décharge des impositions contestées,

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;

Après avoir entendu : - le rapport de M. Abraham, Maître des requêtes, - les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que les différends qui opposent M. GIRAULT à l'administration fiscale sont relatifs, d'une part, à la question de savoir de quelle catégorie de revenus relèvent, pour le calcul de ses impositions à l'impôt sur le revenu, les rémunérations qu'il a reçues de la société "Doux et Cie" au cours des années 1980 à 1983, d'autre part à la question de savoir si une rémunération de 75 000 F inscrite en 1981 en compte courant ouvert à son nom dans les écritures de la société James Girault doit être regardée comme ayant été à sa disposition au cours de ladite année, alors que ce compte courant a été bloqué par décision de cette société ; que des différends de cette nature, qui ne supposent, en l'espèce, qu'une appréciation en droit ne sont pas au nombre de ceux qui peuvent être soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cette commission n'a pas été saisie des désaccords, alors que le vérificateur avait, à tort, informé M. GIRAULT, dans sa réponse aux observations du contribuable en date du 22 octobre 1984, de la faculté que celui-ci avait de saisir la commission et que M. GIRAULT avait fait la demande, est inopérant ;

Sur la nature des rémunérations reçues par M. GIRAULT de la société "Doux et Cie" :

Considérant qu'aux termes de l'article 62 du code général des impôts : "Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes rémunérations alloués ... aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée ... sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôts sur les sociétés par application de l'article 211, même si les résultats de l'exercice social sont déficitaires. - Le montant imposable des rémunérations visées à l'alinéa précédent es déterminé sous déduction des frais inhérents à l'exploitation sociale et effectivement supportés par les bénéficiaires dans l'exercice de leurs fonctions" ;

Considérant que l'administration a regardé M. GIRAULT comme co-gérant de fait de la société à responsabilité limitée "Doux et Cie" et a, en conséquence, imposé dans la catégorie, définie à l'article 62 précité, des rémunérations de gérant majoritaire les rémunérations qu'il avait reçues de cette société au titre des années 1980 à 1983 et qu'il avait déclarées en tant que traitements et salaires ;

Considérant que M. GIRAULT soutient, sans être contredit sur ces points, que les fonctions qu'il exerçait dans la société pendant les années d'imposition étaient exclusivement techniques, le gérant statutaire étant seul chargé de l'administration de la société ; que, si l'administration oppose à ces données que M. GIRAULT détenait la moitié des parts sociales de l'entreprise, percevait une rémunération équivalente à celle du gérant statutaire, disposait d'une procuration sur certains comptes de la société et avait signé certaines des déclarations fiscales en raison d'une indisponibilité temporaire du gérant statutaire, elle n'établit pas, par ces seules indications, que le contribuable, qui n'exerçait au demeurant ses fonctions qu'à mi-temps, participait en fait à la gestion de la société avec les pouvoirs d'un gérant et devait ainsi être regardé comme gérant de fait de celle-ci ; que, dès lors, c'est à tort que l'administration a imposé les rémunérations dont s'agit dans la catégorie des rémunérations des gérants majoritaires et non dans celle des traitements et salaires ; qu'il suit de là que M. GIRAULT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt qui lui ont été assignés à ce titre ;

Sur les sommes inscrites au compte courant de M. GIRAULT en 1981 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a regardé comme ayant été à la disposition de M. GIRAULT au cours de l'année 1981 et a en conséquence réintégré dans le revenu global de celui-ci au titre de cette année des rémunérations qui ont été allouées par la société anonyme "James Girault" et qui ont été inscrites au compte courant que le contribuable détenait dans les écritures de cette société ;

Considérant qu'eu égard aux fonctions de président-directeur général qu'exerçait alors M. GIRAULT, la circonstance que cette somme aurait été bloquée sur son compte courant par décision de la société afin de garantir un emprunt souscrit par cette dernière ne permet pas, comme il le soutient, de regarder cette somme comme n'ayant pas été à sa disposition en 1981 ; que, si l'instruction de la direction générale des impôts FB 214-6 du 1er juillet 1978, dont le requérant demande le bénéfice sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts reprises à l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales, indique que "la présomption de disponibilité peut être détruite par la preuve contraire, qui peut résulter ... du blocage d'un compte courant", cette même instruction précise que ce blocage doit résulter d'une décision indépendante de la volonté du contribuable, telle que la décision d'un administrateur judiciaire, et que, lorsque le compte a été bloqué volontairement par le contribuable lui-même, en sa qualité de dirigeant, pour permettre la constitution de garanties par l'entreprise, la somme bloquée doit être regardée comme ayant été à la disposition du contribuable au cours de l'année d'imposition ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé, pour faire échec à l'imposition, à soutenir que celle-ci méconnaît l'interprétation de la loi fiscale qui a été donnée par l'instruction susmentionnée ;

Article 1er : Pour le calcul de l'impôt sur le revenu dû par M. GIRAULT au titre des années 1980 à 1983, les rémunérations quilui ont été versées par la société "Doux et Cie" seront imposées dansla catégorie des traitements et salaires.

Article 2 : M. GIRAULT est déchargé de la différence entre le montant des impositions à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1980 à 1983 et le montant qui résulte de ce qui est dit à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 17 juin 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. GIRAULT est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. GIRAULT et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.

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