Jurisprudence : CE 8/7 SSR, 02-06-1989, n° 66604

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 66604

DE SAINT PERN

Lecture du 02 Juin 1989

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 mars 1985 et 4 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. de SAINT PERN, demeurant "le Chant d'Oiseau" à Faveraye Machelles (49380), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule un jugement en date du 31 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1975, 1976, 1977 et 1978 dans les rôles de la commune de Faveraye Machelles ; 2°) lui accorde la décharge des impositions contestées,

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales publiée au Journal Officiel du 4 mai 1974 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code général des impôts ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu : - le rapport de M. Challan-Belval, Maître des requêtes, - les observations de Me Guinard, avocat de M. Pierre de SAINT PERN, - les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la requête relatives à l'année 1975 :

Considérant que par une décision en date du 26 septembre 1988 postérieure à l'introduction du pourvoi, le directeur des services fiscaux a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle mises à la charge de M. de SAINT PERN au titre de 1975 ; que dans la limite des dégrèvements ainsi prononcés, les conclusions de la requête sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions de la requête relatives aux années 1976 et 1977 :

Sur le moyen tiré de la Convention européenne des Droits de l'Homme : Considérant, que si aux termes de l'article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, ratifiée par la France en vertu de la loi du 31 décembre 1973 et publiée au Journal Officiel par décret du 3 mai 1974 : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle", le juge de l'impôt ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestations sur des droits et obligations de caractère civil ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article 6-1 de la convention européenne susvisée ne sont pas applicables aux procédures relatives aux taxations fiscales ;

Sur le principe de l'application de l'article 168 du code général des impôts : Considéant que l'article 168 du code général des impôts permet, en cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et les revenus qu'il déclare, de l'imposer sur le revenu en prenant pour base une somme forfaitaire obtenue en appliquant à certains éléments du train de vie un barème déterminé par ce texte ; que cet article n'est toutefois applicable que si la somme ainsi obtenue excède d'au moins un tiers le revenu déclaré ; Considérant, en premier lieu, que M. de SAINT PERN ne peut utilement soutenir devant le juge administratif que les dispositions dudit article seraient contraires à un principe général du droit fiscal ; Considérant, en second lieu, que la réponse du ministre du budget à une question écrite de M. Lauriol, député, en date du 8 octobre 1975 rappelant qu'il convient d'apprécier avec le plus grand discernement la possibilité de la mise en oeuvre de l'article 168 constitue le rappel d'une simple recommandation au service dont le contribuable ne peut utilement se prévaloir sur le fondement de l'article 1649 quinquies E repris à l'article L. 80 A du Livre des procédures fiscales ; Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition de l'article 168 du code général des impôts ne subordonne son application à l'existence de revenus imposables dissimulés par le contribuable ou à la condition que ce dernier soit de mauvaise foi ;

Sur l'application du barème :

Considérant que si, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts repris à l'article L. 80 A du Livre des procédures fiscales, M. de SAINT PERN invoque une instruction du 9 avril 1959 qui permet d'assimiler, pour l'application du barème la ou les résidences utilisées par les enfants du contribuable pour les besoins de leurs études à la résidence principale du contribuable, l'administration fait valoir sans être contestée que l'appartement dont a disposé le contribuable à Angers pour l'ensemble de la période d'imposition et la résidence dont il a disposé à Paris pour les années 1977 et 1978, n'ont pas été utilisés dans les conditions prévues par l'instruction précitée ; que l'intéressé n'est, par suite, pas fondé à demander qu'elles soient assimilées, pour l'application du barème, à des résidences principales ;

Considérant que la circonstance que le droit de chasse acquis par l'intéressé ait été d'un montant modique et aurait été souscrit dans un simple souci de solidarité locale ne fait pas légalement obstacle à ce que cet élément de train de vie soit pris en compte pour la détermination des bases forfaitaires d'imposition et l'application des majorations prévues au 2 de l'article 168 ;

Sur les conclusions de la requête concernant l'année 1978 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les revenus forfaitaires agricoles pour 1978 ont été fixés par décisions de la commission centrale en date du 22 août 1979 pour la polyculture et du 30 décembre 1979 pour les cultures spéciales ; que, dès lors, à la date de la notification du redressement intervenue le 23 mai 1979, la disproportion entre les revenus déclarés et la base forfaitaire d'imposition résultant de l'application du barème qui conditionne la mise en euvre des dispositions de l'article 168 du code général des impôts, ne pouvait pas être établie par l'administration ; que, par suite, M. de SAINT PERN est fondé à soutenir que l'administration a fait une irrégulière application des dispositions de l'article 168 du code général des impôts pour l'établissement de son imposition au titre de l'année 1978 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. de SAINT PERN est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1978 ;

Article 1er : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. de SAINT PERN relatives aux impositions de l'année 1975 dont le dégrèvement a été prononcé par décision du 26 septembre 1988.

Article 2 : M. de SAINT PERN est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujettiau titre de l'année 1978, dans les rôles de la commune de Faveraye Machelles.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 31 octobre 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. de SAINT PERN et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.

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