Jurisprudence : CE 9/7 SSR, 15-04-1988, n° 58907

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 58907

Mme EXCOFFON

Lecture du 15 Avril 1988

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 mai 1984 et 31 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme EXCOFFON, demeurant 8 avenue du Maréchal Leclerc, à Chambéry (73000), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : °1 annule le jugement du 29 février 1984 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles elle a été assujettie respectivement au titre des années 1974 et 1975 et au titre de l'année 1975 et à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1976 et 1977 ; °2 lui accorde la décharge des impositions contestées,

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des tribunaux administratifs ;

Vu le code général des impôts ;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

Après avoir entendu : - le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes, - les observations de Me Jacoupy, avocat de Mme EXCOFFON, - les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme EXCOFFON, domiciliée à Chambéry, a été, jusqu'au 30 juin 1975, monitrice salariée d'auto-école et a ouvert, à compter du 1er août 1975, une entreprise individuelle d'auto-école pour laquelle elle relevait du régime de la déclaration contrôlée ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble portant sur les années 1974 à 1977 et d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er août 1975 au 31 décembre 1977 ; qu'à l'issue de ces contrôles, elle a été imposée à l'impôt sur le revenu au titre des années 1974 à 1977 et à la majoration exceptionnelle au titre de 1975, par voie de taxation d'office en ce qui concerne les années 1974 et 1975, à raison des salaires perçus jusqu'au 30 juin 1975, des bénéfices non commerciaux réalisés à compter du 1er août 1975, que le service a évalués d'office, et de revenus d'origine indéterminée perçus en 1974 et 1975 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition : Considérant, en premier lieu, que, si Mme EXCOFFON soutient avoir régulièrement déclaré son revenu global de 1974, elle ne justifie pas, en produisant une photocopie de sa déclaration adressée aux services fiscaux de Chambéry-Est le 3 janvier 1979, qu'elle en aurait adressé l'original dans le délai légal aux services fiscaux de Grenoble ainsi qu'elle prétend l'avoir fait par erreur ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration l'a taxée d'office au titre de l'année 1974 en application des articles 175 et 179 du code général des impôts, alors applicables ; Considérant, en deuxième lieu, que l'administration, qui s'était bornée en première instance à faire état, pour l'année 1975, de l'évaluation d'office des bénéfices non-commerciaux de Mme EXCOFFON, se prévaut en outre en appel e la situation de taxation d'office qui est encourue par la requérante, comme celle-ci ne le conteste pas, pour n'avoir pas déposé la déclaration de son revenu global de ladite année ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à l'intéressée une mise en demeure et lui a fait connaître, par notification du 8 février 1979, les bases et les éléments ayant servi au calcul des impositions d'office ; qu'elle a ainsi respecté la procédure prescrite par les dispositions de l'article 3 de la loi °n 77-1453 du 29 décembre 1977, repris depuis à l'article L. 67 du livre des procédures fiscales ; que l'administration est, dès lors, en droit d'invoquer, par voie de substitution de base légale, la taxation d'office du revenu global de 1975 ; Considérant, en dernier lieu, que Mme EXCOFFON, en ce qui concerne les années 1976 et 1977, ne conteste pas qu'elle n'a pas souscrit dans le délai légal les déclarations des bénéfices non commerciaux réalisés par son entreprise ; que, dès lors, c'est à juste titre que ceux-ci ont été évalués d'office par le service en application des dispositions des articles 97 et 104 du code ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les procédures d'imposition d'office invoquées devant le Conseil d'Etat ne procèdent pas des constatations effectuées par l'administration lors des vérifications dont la requérante a fait l'objet ; que, par suite, les moyens tirés de ce que tant la vérification de la situation fiscale d'ensemble de Mme EXCOFFON que la vérification de la comptabilité de son entreprise auraient été irrégulières sont inopérants ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme EXCOFFON ne peut obtenir, par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction des impositions litigieuses qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases d'imposition arrêtées par le service ; En ce qui concerne les salaires perçus en 1974 :

Considérant qu'il ressort des bulletins de salaires produits que les salaires de 18 147 F que l'administration a pris en compte pour l'année 1974 étaient les salaires nets, après déduction des cotisations ouvrières aux assurances sociales et des cotisations au régime complémentaire de retraites ; qu'ainsi le moyen pris de ce que les salaires taxables auraient été calculés d'après les salaires bruts, charges sociales comprises, manque en fait ; En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux réalisés en 1975, 1976 et 1977 :

Considérant que, pour évaluer les bénéfices non commerciaux de l'entreprise, le vérificateur, qui a écarté la comptabilité comme dépourvue de valeur probante, ce qui n'est pas contesté, a estimé que les dépenses mensuelles de train de vie de la requérante atteignaient respectivement 1 500 F, 2 000 F et 2 500 F, soit au total 7 500 F pour 1975, 24 000 F pour 1976 et 30 000 F pour 1977 ; que Mme EXCOFFON ne justifie d'aucune façon qu'elle aurait en réalité prélevé dans la caisse de son entreprise, pour faire face aux dépenses dites de train de vie, les sommes de, respectivement, 11 506 F, 37 002 F et 36 118 F ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que ses bases d'imposition devraient être réduites des sommes retenues par le service ; En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Considérant que le vérificateur a reconstitué les revenus d'origine indéterminée de Mme EXCOFFON d'après les versements en espèces que celle-ci a effectués au crédit de son compte bancaire ; que, si la requérante soutient que ce compte aurait été alimenté notamment par les versements d'un tiers avec lequel elle vivait, elle n'apporte, à l'appui de son allégation, aucune justification ; qu'elle n'apporte pas davantage la preuve, par les pièces produites, qu'un versement de 10 000 F effectué en 1975 aurait eu pour origine un prêt de ce montant consenti par son père ; Considérant, en revanche, qu'eu égard aux éléments concordants tirés de ce que la requérante, lorsqu'elle était salariée, était payée en espèces, ce qui est attesté par son ancien employeur et n'est pas contesté par l'administration, Mme EXCOFFON établit que les versements d'espèces effectués en 1974 et 1975 et retenus par le service en tant que revenus d'origine indéterminée ont eu, pour partie, pour origine les salaires versés par son employeur qui ont ainsi été imposés à deux reprises ; qu'il est constant que la requérante a été imposée dans la catégorie des traitements et salaires au titre des années 1974 et de 1975 sur des montants de 13 067 F et 9 611 F calculés à partir des salaires nets respectifs de 18 147 F et 13 348 F ; que, toutefois, Mme EXCOFFON limitant sa demande au titre de l'année 1974 à 16 591 F, il y a lieu de réduire seulement de ce montant la base taxable d'imposition de l'année 1974 et celle de l'année 1975 de 13 348 F ;

Considérant que, de ce qui précède, il résulte que Mme EXCOFFON est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées en tant que celles-ci portent sur les sommes de 16 951 F et de 13 348 F retenues au titre des années 1974 et 1975 ;

Article 1er : Les revenus de Mme EXCOFFON imposables à l'impôt sur le revenu au titre des années 1974 et 1975 seront réduits respectivement de 16 951 F et de 13 348 F.

Article 2 : Il est accordé à Mme EXCOFFON la décharge de la différence entre le montant des impositions à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre, respectivement, des années 1974 et 1975 et au titre de l'année 1975 et le montant qui résulte des bases fixées à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Grenoble, en date du 29 février 1984, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête susvisée de Mme EXCOFFON est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme EXCOFFON et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.

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