Jurisprudence : CE Contentieux, 20-12-1978, n° 5486

CE Contentieux, 20-12-1978, n° 5486

A4712AID

Référence

CE Contentieux, 20-12-1978, n° 5486. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/949983-ce-contentieux-20121978-n-5486
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 5486

Sieur xxxxx

Lecture du 20 Decembre 1978

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 8ème Sous-Section


Vu la requête présentée pour le sieur xxxxx demeurant à xxxxx, à xxxxx, ladite requête enregistrée au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 1975 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler un jugement en date du 21 octobre 1976 en tant que par ledit jugement le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en dégrèvement des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au tire de l'impôt sur le revenu et de la taxe complémentaire pour l'année 1968, et réformer ce même jugement en tant que le Tribunal lui a accordé pour les mêmes impôts, et au titre des années 1966, 1967 et 1969 des dégrèvements qu'il juge insuffisants;


Vu le Code général des impôts;


Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;


Vu la loi du 30 décembre 1977.


Sur l'imposition des revenus de l'année 1966:

Considérant qu'aux termes de l'article 180 du Code général des impôts "Est taxé d'office à l'impôt sur le revenu des personnes physiques tout contribuable dont les dépenses personnelles, ostensibles et notoires, augmentées de ses revenus en nature, dépassent le total exonéré... ou dont le revenu déclaré, défalcation faite des charges énumérées à l'article 156, est inférieur au total des mêmes dépenses et revenus en nature";

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le sieur xxxxx a déclaré pour l'année 1966 un revenu global de 5990 francs, comportant des revenus fonciers de 3400 francs et un revenu agricole forfaitaire de 2590 francs; que si l'administration tente d'établir que les dépenses du sieur xxxxx s'élèvent à un chiffre supérieur l'estimation desdites dépenses présentée par l'administration et portant essentiellement sur des dépenses de subsistance telles que des dépenses de nourriture et d'habillement, dans la mesure où elle peut être retenue, ne dépasse que faiblement le chiffre susindiqué de 5590 francs; qu'en raison de l'incertitude qui s'attache à l'évaluation des divers postes de dépenses, il ne peut être regardé comme établi que les dépenses personnelles du sieur xxxxx, ostensibles et notoires, ont dépassé le revenu déclaré; qu'il suit de là que le sieur xxxxx est fondé à demander la décharge de l'imposition supplémentaire à laquelle il a été assujetti au titre de 1966;


Sur le revenu des années 1967 à 1969:


Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve:

Considérant qu'aux termes de l'article 176 du Code général des impôts: "en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration vérifie les déclarations du revenu global prévues à l'article 170. Elle peut demander au contribuable des éclaircissements... Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration. Les demandes d'éclaircissements et de justifications doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et assigner au contribuable, pour fournir sa réponse, un délai qui ne peut être inférieur à trente jours"; qu'en vertu de l'article 179 dudit Code, est taxé d'office le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications de l'administration; et qu'en vertu de l'article 181 la charge de la preuve incombe au contribuable qui, taxé d'office, demande la réduction ou la décharge de son imposition;

Considérant que ces dispositions ne font aucune distinction entre les contribuables dont le revenu est imposé sous le régime du bénéfice réel et ceux dont le revenu est imposé sous le régime du forfait; qu'elles doivent donc en principe s'appliquer aussi dans ce dernier ças; qu'il y a lieu cependant de concilier cette application et le principe selon lequel un bénéfice qui a fait l'objet d'une évaluation forfaitaire est opposable à l'administration, dès lors que celle-ci n'a pas mis en oeuvre les procédures dont elle dispose pour réviser les forfaits devenus caducs; qu'il suit de là que l'administration n'est en droit d'adresser à un contribuable, qui a compris dans la déclaration de son revenu global un bénéfice ou revenu forfaitairement fixé, les demandes de justifications prévues à l'article 176 que si elle peut faire état d'indices sérieux pouvant donner à penser que ce contribuable a disposé de revenus d'autres sources que celle à raison de laquelle il est forfaitairement imposé; que de tels indices sérieux sont notamment réunis lorsque l'administration est en mesure d'établir que les différents comptes, bancaires et autres, de l'intéressé ont enregistré des rentrées de fonds excèdant notablement les recettes réelles qui ont pu normalement résulter de l'activité forfaitairement imposée;

Considérant que la circonstance que la charge de la preuve incombe au contribuable par application du 2ème alinéa de l'article 179 du Code, ne dispense pas l'administration d'établir qu'elle était en droit d'avoir recours à la procédure prévue à l'article 176;

Considérant en l'espèce, que le sieur xxxxx a déclaré pour chacune des années 1967 à 1969 des revenus fonciers et un revenu agricole forfaitairement arrêté, s'élevant respectivement à 2690 F et 2970 F pour 1967, 2615 F et 3024 F pour 1968 et 3790 F pour 1969, le montant du forfait agricole restant à déterminer pour cette dernière année; que l'administration n'a pas contesté le montant des revenus fonciers; qu'elle a cependant entendu établir que le sieur xxxxx pouvait avoir eu des revenus d'autres sources et que les indices sérieux dont elle a fait état à cet égard résultent des sommes qui ont été portées au crédit des comptes du requérant et qui s'élèvent à 93 224 F pour 1967, 74 025 F pour 1968, et 100 835 F pour 1969;

Considérant que ces rentrées de fonds, même si on les diminue comme on doit le faire, de celles qui pouvaient provenir des revenus fonciers du sieur xxxxx dont le montant n'est pas contesté, et de celles qui peuvent être rattachées à l'activité agricole, autorisaient l'administration à présumer l'existence de revenus d'autres sources et à avoir recours à la procédure instituée par l'article 176, alors même qu'elle avai déjà mis en recouvrement une imposition primitive;

Considérant qu'une demande de justifications a été adressée au sieur xxxxx le 1er avril 1970 et que ce dernier n'y a pas répondu dans le délai imparti; que c'est par suite à bon droit que l'administration l'a tâxé d'office, par application du 2ème alinéa de l'article 179 du Code général des impôts, au titre des années 1967 à 1969; que, dès lors, le sieur ne peut obtenir par voie contentieuse la décharge ou la réduction de ses impositions qu'en apportant la preuve de leur exagération;


Sur le bien-fondé des impositions:

Considérant que pour apporter la preuve qui lui incombe, le sieur xxxxx se fonde à la fois sur les justifications qu'il a fournies tardivement au service, en réponse à ses demandes, et sur les mémoires qu'il a produits, devant le Tribunal administratif, à l'effet d'expliquer les rentrées de fonds regardées par le service comme provenant d'une activité dissimulée et comme constitutives d'un revenu imposable;

Considérant que l'examen de l'ensemble de ces justifications fait apparaître qu'un nombre important de crédits constatés dans les comptes du requérant s'explique par le remboursement de prêts précédemment consentis à des tiers, par des opérations réalisées par le requérant pour le compte de sa mère ou de sa soeur, et par certaines opérations en capital; qu'il doit être regardé comme établi que le montant global des rentrées de fonds, composé des crédits ainsi justifiés, de ceux qui correspondent aux revenus fonciers et de ceux qui ont été réellement tirés de l'activité agricole, et au sujet desquels le sieur xxxxx apporte également des justifications, est rattachable aux seules activités déclarées ou s'explique par les diverses opérations patrimoniales susindiquées; que le sieur xxxxx apporte ainsi la preuve qui lui incombe et est fondé à soutenir que ses impositions au titre des années 1967, m968 et 1969 devaient être établies uniquement sur la base de son revenu agricole forfaitaire et de ses revenus fonciers;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, outre ce qui a été dit ci-dessus sur l'imposition de 1966 que le sieur xxxxx est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a, pour 1967 et 1968, rejeté ses demandes en décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti et pour 1969 maintenu dans les bases d'imposition des revenus autres que ses revenus fonciers et agricoles.

DECIDE

Article 1er - Il est accordé au sieur xxxxx décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des personnes physiques et de taxe complémentaire, ainsi que des pénalités qui lui ont été assignées au titre des années 1966, 1967 et 1968.

Article 2 - L'impôt sur le revenu des personnes physiques et la taxe complémentaire dus par le sieur xxxxx au titre de l'année 1969 seront calculés sur la base de revenus fonciers s'élevant à 3790 francs, et de bénéfices agricoles s'élevant à 1872 francs, et sous le bénéfice en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des personnes physiques de 54 francs de charges déductibles du revenu global.

Article 3 - Il est accordé au sieur xxxxx, au titre de l'année 1969 décharge de la différence entre les cotisations laissées à sa charge par le Tribunal administratif et celles qui seront calculées en application de l'article 2, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 4 - Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 - Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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