Jurisprudence : CA Paris, 6, 12, 20-01-2023, n° 19/02423

CA Paris, 6, 12, 20-01-2023, n° 19/02423

A91579KD

Référence

CA Paris, 6, 12, 20-01-2023, n° 19/02423. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/94464314-ca-paris-6-12-20012023-n-1902423
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12


ARRÊT DU 20 janvier 2023


(n° , 22 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/02423 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KMK


Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Novembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Paris RG n° 17-01384



APPELANTE

SA [15]

[Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03


INTIMEE

URSSAF ILE DE FRANCE

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 7]

représentée par Mme [E] [Z] en vertu d'un pouvoir général



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre

M. Gilles REVELLES, Conseiller

M. Gilles BUFFET, Conseiller

qui en ont délibéré


Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats


ARRÊT :


- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 04 novembre 2022, prorogé au 18 novembre 2022, puis au 16 décembre 2022, puis au 13 janvier 2023 et au 20 janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.

-signé par Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre et Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


La cour statue sur l'appel interjeté par la S.A. [15] (la société) d'un jugement rendu le 30 novembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à l'Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales d'Île-de-France (l'Urssaf).



FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES


Les circonstances de la cause ont été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé.


Il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle portant sur l'application de la législation de la sécurité sociale pour les exercices 2013 et 2014, le service du contrôle a adressé à la société une lettre d'observations le 5 juillet 2016 envisageant un redressement au titre de 14 chefs pour un montant total 1 692 945 euros ; que par lettre du 5 août 2016, la société a répliqué à la lettre d'observation ; que par lettre du 14 septembre 2016, l'inspecteur du recouvrement a partiellement maintenu le redressement envisagé en ramenant son montant à la somme de 1 655 008 euros ; qu'une mise en demeure en date du 21 octobre 2016 a été adressée à la société pour un redressement du même montant au titre des cotisations, outre la somme de 259 787 euros au titre des majorations de retard ; que la société a saisi le 23 novembre 2016 la commission de recours amiable (CRA) de l'Urssaf ; que le 24 février 2017 la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris sur rejet implicite ; que dans sa séance du 12 mars 2018, cette commission a fait partiellement droit à la requête de la société relative au chef de redressement n°14 en précisant que ce rehaussement ne devait être maintenu qu'à hauteur de 38 739 euros et a rejeté les requêtes présentées pour les autres chefs de redressement.



Par jugement du 30 novembre 2018, le tribunal a :

- Confirmé partiellement le redressement opéré par l'Urssaf pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ;

- Annulé partiellement le chef de redressement n°11 de la lettre d'observations du 5 juillet 2016 relatif aux rémunérations versées à [A] [V] ;

- Annulé partiellement le chef de redressement n°14 de la lettre d'observations du 5 juillet 2016 relatif aux indemnités de rupture versées à [H] [P] ;

- Rejeté les demandes plus amples au contraire des parties.


Le tribunal a rejeté le moyen tiré de la procédure d'abus de droit fondé sur l'argument que l'Urssaf ayant requalifié les rémunérations versées aurait dû appliquer cette procédure au motif que la société n'apportait pas d'éléments supplémentaires permettant de déterminer que le contrôle opéré se fondait sur l'abus de droit implicite nécessitant l'application de la procédure afférente. Relativement à la portée d'un précédent contrôle portant sur les périodes de 2008 et 2009, le tribunal a indiqué que la simple similitude des documents consultés par l'inspecteur à l'occasion du précédent contrôle ne suffisait pas à établir l'existence d'un accord tacite de celui-ci. En effet, l'examen du rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice clos le 31 décembre 2009 fait apparaître des dissemblances avec le rapport spécial pour l'exercice clos le 31 décembre 2014. Les documents consultés par l'inspecteur ne contenaient pas exactement les mêmes informations notamment au regard de la refacturation des honoraires versés à [F] [G]. En particulier, à l'inverse du rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice clos le 31 décembre 2009 qui restait lapidaire, le rapport spécial relatif à l'exercice clos le 31 décembre 2014 précisait les modalités de refacturation. Faute d'avoir bénéficié des mêmes informations pour se prononcer, la précédente décision ne pouvait donc pas constituer un accord implicite.


S'agissant des rémunérations non déclarées de [N] [D] constituant le chef de redressement n°8, le tribunal a relevé que conformément aux dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale🏛, le directeur général délégué d'une S.A. était assimilé à un salarié au sens du droit français de la sécurité sociale. En vertu des dispositions du premier article du règlement (CE) n°883/2004⚖️, [N] [D] devait être considéré comme exerçant une activité assimilée à l'activité salariée au sens du règlement européen. Dès lors que ce salarié exerçait aussi une activité en Suisse en qualité de « Group Chief Financial Officer » pour la société de droit suisse [17] S.A., les dispositions du premier alinéa de l'article 13 de ce règlement européen étaient applicables à sa situation et il convenait de rechercher le lieu de résidence effectif du salarié et de déterminer s'il exerçait une partie substantielle de son activité dans cet État. Le tribunal a relevé que [N] [D] était domicilié à [Localité 22] en Suisse selon le contrat mais qu'il avait conservé son domicile et sa résidence principale à [Localité 24] où il était domicilié fiscalement. Le tribunal a retenu en outre que les certificats de salaire pour l'année 2013 ainsi que les bulletins de salaire pour la même période étaient également adressés à son domicile parisien. L'extrait du procès-verbal de la réunion du conseil d'administration du 14 octobre 2011 désignait aussi le domicile de l'intéressé à [Localité 24]. S'agissant de son activité professionnelle, l'inspecteur a indiqué qu'il bénéficiait à [Localité 24] d'un bureau personnel et de l'ensemble des services associés nécessaires à ses activités. Le tribunal a conclu que [N] [D] exerçait une partie substantielle de son activité en France et qu'il était donc soumis à la législation de sécurité sociale française. Il a au surplus relevé que la société suisse était détenue à 100% par la S.A. [15] et que cette dernière société s'avérait donc être l'employeur effectif du salarié.


S'agissant des rémunérations déclarées de [F] [G] constituant le chef de redressement n°9, le tribunal a considéré que ce dernier occupait la fonction de président-directeur général de la société de droit français et intervenait simultanément en tant que prestataire externe de la société [16] S.A. de droit suisse, et a été rémunéré sous la forme d'honoraires. Le rapport spécial du commissaire aux comptes relatif à l'exercice clos le 31 décembre 2014 précisait que ces honoraires étaient refacturés à la S.A. [17] et donc aux sociétés du groupe [15] qui était signataire de l'annexe au contrat de prestation de service de cette dernière. En application des dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et du règlement (CE) n°83/2004, [F⚖️] [G] était considéré comme exerçant une activité assimilée à une activité salariée au sens du règlement européen. Relativement à son activité en Suisse, il a estimé qu'il s'agissait d'une prestation indépendante en tant que prestataire externe selon le droit suisse. Dès lors les dispositions du point 3 de l'article 13 du règlement précité étaient applicables et [F] [G] était soumis à la législation française de sécurité sociale. Le tribunal a en outre relevé que la société mère n'était pas la société de droit suisse [16] S.A. mais bien la S.A. [15] et que la conclusion de contrats entre les sociétés du même groupe ne faisait pas obstacle à la détermination de l'existence de liens effectifs entre la S.A. [15] et [F] [G]. Le tribunal a considéré que les rémunérations versées devaient donc être réintégrées dans le calcul des cotisations sociales.


S'agissant du chef de redressement n°11 relatif aux rémunérations non déclarées, le tribunal a estimé pour le salarié [C] [R] que ce dernier avait été embauché par la société de droit suisse [14] le 16 juin 2008 puis par un autre contrat du 1er décembre 2008 par la même société pour un travail situé à [Localité 24], sachant en outre que le salarié résidait à [Localité 21]. Il a donc considéré que le salarié, malgré le contrat, travaillait effectivement en France et résidait habituellement en France. Le tribunal a en outre souligné que la société appelante était en réalité la société mère du groupe [15] et en a conclu que ces rémunérations devaient donc être réintégrées dans le calcul des cotisations sociales. S'agissant de [J] [X], le tribunal a relevé la similitude avec la situation précédente, le lieu de travail de ce salarié étant en France avec une adresse située à [Localité 21]. Le nouveau contrat du 16 décembre 2013 qui prévoyait un poste à [Localité 20] indiquait une résidence à [Localité 21] et un nouveau contrat du 31 juillet 2014 situait le lieu de travail à [Localité 24]. L'employeur a délivré une attestation relative au contrat de détachement pour la période du 1er décembre 2008 au 30 novembre 2013. Pour autant, le tribunal a considéré que pour la période postérieure, ce salarié n'était pas en situation de travail détaché et que la société ne pouvait bénéficier de l'exemption de l'application de la législation de sécurité sociale. Il a en effet relevé que le salarié résidait en France et qu'il n'a jamais totalement cessé d'exercer son activité à [Localité 24]. S'agissant de [A] [V], le tribunal a relevé que ce salarié était domicilié à [Localité 22] et que le lieu de travail était situé en Suisse à [Localité 12]. Les pièces versées corroboraient le fait que le salarié travaillait en Suisse et résidait dans ce pays. Dès lors le tribunal a considéré que l'Urssaf avait procédé à tort à la réintégration des rémunérations versées par la société pour le calcul des cotisations sociales dès lors qu'aucun élément ne permettait de considérer qu'il exerçait son activité professionnelle de manière substantielle en France.


S'agissant du point de redressement n°14 portant sur les cotisations relatives à la rupture forcée du contrat de travail, le tribunal a considéré s'agissant de [W] [L]-[B] que ce dernier, qui avait été licencié pour insuffisance professionnelle le 11 juillet 2012 avait bénéficié d'une transaction du 12 septembre 2012 prévoyant une indemnité de licenciement et une indemnité transactionnelle, mais que la société ne produisait pas le bulletin de janvier 2013 dont elle faisait mention pour soutenir que la somme de 50 000 euros avait été soumise aux cotisations sociales et que la somme de 167 951,91 euros l'avait été aussi. S'agissant de [H] [P], le tribunal a considéré que l'indemnité versée à ce dernier était d'un montant inférieur au plafond d'exonération et que, dès lors, l'Urssaf avait procédé à tort à la réintégration de cette indemnité dans le calcul des cotisations sociales.



Le 7 février 2019, la société a interjeté appel de ce jugement, lequel lui avait été notifié à une date ne ressortant pas des pièces du dossier.


Représentée par son conseil qui a repris et développé oralement les conclusions écrites déposées à l'audience, la société demande à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 30 novembre 2018, en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes d'annulation des chefs de redressement n°8, 9, 11 et 14 ;

Et statuant à nouveau,

- Annuler le chef de redressement n°8 relatif aux « rémunérations non déclarées rémunérations non soumises à cotisation » de [N] [D] ;

- Annuler le redressement de chef de redressement n°9 relatif aux « rémunérations non déclarées et rémunérations non soumises à cotisations » de [F] [G] ;

- Annuler le chef de redressement n°11 relatif aux « rémunérations non déclarées rémunérations non soumises à cotisations - application du règlement (CE) 883-2004 », s'agissant des rémunérations versées à [C] [R] et [J] [X] ;

- Annuler le chef de redressement n°14 relatif aux « cotisations - rupture forcée du contrat de travail - limite d'exonération », s'agissant des indemnités de rupture versées à [W] [L]-[B] ;

En conséquence,

- Annuler la décision de la commission de recours amiable de l'Urssaf en date du 12 mars 2018, sauf en ce qu'elle a annulé en totalité le redressement concernant l'indemnité transactionnelle versée à Monsieur [Aa] ;

- Annuler la lettre d'observations en date du 5 juillet 2016 et la mise en demeure du 21 octobre 2016 ;

- Débouter l'Urssaf de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 30 novembre 2018 en ce qu'il a annulé le chef de redressement relatif à [H] [P] ;

En tout état de cause,

- Condamner l'Urssaf au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;

- Condamner l'Urssaf aux dépens.


Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l'audience par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :


- Confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de Paris du 30 novembre 2018 ;

- Condamner la S.A. [15] à payer les sommes de :

* Cotisations dues au titre des rémunérations non déclarées versées à M. [D] : 290 958 euros ;

* Cotisations dues au titre des rémunérations non déclarées versées à M. [G] : 788 285 euros ;

* Cotisations dues au titre des rémunérations non déclarées versées à MM. [R] et [X] : 107 672 euros ;

* Cotisations relatives à la rupture forcée du contrat de travail concernant M. [Ab]-[B] : 2 177 euros ;

* Majorations de retard : 186 652 euros ;

- Débouter la S.A. [15] de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la S.A. [15] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.


Il est expressément renvoyé aux productions écrites des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments, lesquelles ont été visées par le greffe à l'audience.



SUR CE,


I- Sur le point de redressement n°8 relatif aux rémunérations de [N] [D]


a) Sur la procédure de l'abus de droit


La société soutient en substance que l'Urssaf ne rapporte pas la preuve d'un abus de droit sans pour autant avoir mis en place la procédure de l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale🏛. Le redressement opéré, pour autant, en ce qu'il cherche à restituer à une situation litigieuse son véritable caractère, relève par nature de la procédure de répression des abus de droit. En éludant cette procédure, l'Urssaf l'a privée de ses garanties spécifiques. Il s'agit de ce que la doctrine appelle « un abus de droit rampant » qui justifie l'annulation des redressements établis pour irrégularités de la procédure. Au cas d'espèce, l'Urssaf ne pouvait pas, sans suivre la procédure de répression des abus de droit, imposer à la société le versement de cotisations au titre de rémunérations versées par une autre personne morale, quand bien même ferait-elle partie du même groupe de sociétés. Dans ses dernières écritures, l'Urssaf prétend expressément que la convention passée entre elle et la société [16], concernant le versement des rémunérations de mandataire social à la S.A. [15] aurait pour effet d'éluder les obligations déclaratives sur ces mêmes rémunérations au régime français de sécurité sociale, ce qui signifie que l'Urssaf entend écarter un tel acte pour procéder au redressement contesté.


L'Urssaf réplique en substance que le Conseil d'État, par arrêt du 5 mai 2011, a jugé, en matière d'abus de droit fiscal, que la simple requalification d'un contrat par l'administration fiscale ne permet pas de caractériser un abus de droit implicite.


Il résulte de l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale que les organismes de sécurité sociale sont en droit d'écarter comme ne leur étant pas opposables les actes présentant un caractère fictif ou qui sont inspirés, dans la recherche d'une application littérale des textes, par aucun motif que celui d'éluder ou d'atténuer les contributions ou cotisations sociales. Il s'agit donc de restituer leur véritable caractère à ces actes, nonobstant l'utilisation qui en est faite avec comme seul objectif de minorer les charges sociales. La mise en œuvre de la procédure d'abus de droit par un organisme de sécurité sociale n'est initiée que lorsque l'ensemble des conditions, et notamment l'élément intentionnel qui est toujours requis, est considéré comme réuni par l'agent de contrôle et le directeur de l'organisme. Le comité de l'abus de droit a pour seul rôle de permettre la mise en œuvre des pénalités.


Il résulte de l'article R. 243-60-3 du code de la sécurité sociale🏛 que lorsque cette procédure est envisagée, l'organisme de sécurité sociale doit informer le cotisant de la possibilité de saisir le comité de l'abus de droit et les délais impartis dans la lettre d'observations.


Il ressort de ces textes qu'en présence d'un acte juridique qu'elle estime fictif ou inspiré par le seul objectif d'éluder ou de diminuer les cotisations sociales, l'Urssaf est tenue de déclencher la procédure des abus de droit.


En droit, en l'absence d'invocation même implicite de l'abus de droit par l'Urssaf, il a été jugé que la divergence d'appréciation des règles d'assiette des cotisations n'est pas au nombre des contestations susceptibles de donner lieu à la procédure d'abus de droit prévue à l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale (Cass., civ. 2e, 12 octobre 2017, 16-21469⚖️, publié au bulletin), peu importe que cette divergence se manifeste dans la requalification d'un contrat ou l'interprétation d'une chaîne de contrats entre différentes sociétés d'un même groupe multinational et les conventions passées entre celles-ci et leur dirigeant social dès lors qu'aucune intention d'utiliser ces contrats à des fins qui leur sont étrangères n'est invoquée ni même recherchée par l'Urssaf.


En l'espèce, la société se borne à prétendre, sans l'établir, qu'à l'occasion de redressements opérés au titre d'une divergence d'appréciation sur les règles d'assiette des cotisations dans le cadre d'une chaîne de contrats conclus entre sociétés d'un même groupe multinational ayant eu pour effet d'éluder les obligations déclaratives au régime français, l'URSSAF a implicitement mais nécessairement invoqué des éléments caractérisant un abus de droit, dit « rampant », sans mettre en œuvre les dispositions protectrices du justiciable prévues par la procédure de répression des abus de droit.


Or, il ressort de la procédure de redressement contestée que s'il ne s'agit pas seulement de requalifier le contrat liant la société [15] et [N] [D] mais bien d'analyser la chaîne des contrats conclus entre les différentes sociétés du groupe et les conventions passées entre celles-ci et leur dirigeant social afin de dire que le véritable employeur de [N] [D] est la S.A. [15], pour autant l'Urssaf n'a nullement retenu comme réunies les conditions de l'abus de droit, et en particulier l'élément intentionnel qui est impérativement requis et qu'elle n'a pas recherché à caractériser, n'ayant pas même remis en cause la bonne foi de la société, un abus de droit par l'intention d'éluder des cotisations de sécurité sociale et n'a donc pas eu besoin de recourir à cette procédure particulière. En d'autres termes, si la pratique de la société a eu pour effet d'éluder ou diminuer les cotisations sociales cela ne signifie pas que le seul objectif de la société était d'éluder ou de diminuer les cotisations sociales, sauf à confondre l'effet et l'intention.


En tout état de cause, si elle ne recherche pas dans les pratiques de l'entité contrôlée une intention abusive afin de la sanctionner par une pénalité financière, l'Urssaf ne peut pas être contrainte à mettre en œuvre une procédure dont la finalité est répressive. S'étant placée dès lors dans le cadre d'un contrôle usuel, l'Urssaf s'est bornée à procéder, comme elle le devait, à la notification d'un redressement dans les conditions de droit commun sans recourir à la procédure spécifique d'abus de droit et à la pénalité de 20 % qui y est attachée. Elle n'a pas davantage évoqué une situation de travail dissimulé, ni même laissé penser qu'il pouvait s'agir d'une telle situation, ce qui pourrait être le corollaire de l'abus de droit. Dès lors, les droits de la société restent, dans ce contexte, garantis par la possibilité dont elle dispose de soumettre à l'appréciation du juge le caractère justifié ou non d'une part du redressement, d'autre part de l'absence de recours à la procédure spécifique de l'abus de droit. Au cas d'espèce, en l'absence d'un redressement répressif sanctionné par une importante pénalité, la société ne peut pas sérieusement prétendre avoir été volontairement privée de garanties spécifiques lui permettant de se défendre dans le cadre d'une procédure répressive, précisément celle de l'abus de droit.


Le moyen tiré de l'abus de droit ne peut être qu'écarté.


b) Sur l'existence d'un accord implicite


La société oppose à l'Urssaf l'existence d'un accord implicite, pour avoir fait l'objet d'un précédent contrôle en 2010, portant sur les exercices 2008 et 2009. À l'occasion de ce contrôle, l'inspecteur a eu connaissance des rapports du commissaire aux comptes ainsi que du mode de fonctionnement du groupe strictement similaire à celui de la période contrôlée en 2016, si ce n'est que la société de droit suisse [16] est remplacée par la société de droit suisse [17] à compter de juin 2013, dans ses missions de centre de services partagés du groupe. La société soutient que la lettre d'observations du 9 décembre 2010 mentionne explicitement, dans la liste des documents consultés, les rapports du commissaire aux comptes et qu'aucun redressement n'ayant été notifié sur ce point et que le schéma de refacturation n'ayant pas été modifié depuis cette date, il en découle que le non-assujettissement de la rémunération versée par [16], puis à compter de juin 2013 par [17], à [N] [D] n'avait pas été remise en cause. L'argumentation de l'Urssaf est directement contredite par la lettre d'observations du 9 décembre 2010 qui mentionne explicitement, dans la liste des documents consultés, les rapports du commissaire aux comptes, sans que l'inspecteur ait précisé ne pas avoir eu connaissance du rapport spécial au titre de l'exercice 2009. Par ailleurs, il n'est pas allégué une identité de situation avec celle en vigueur au premier semestre 2008, et bien avec celle de 2009, de sorte qu'il ne saurait être reproché à la société de ne fournir aucune explication concernant le changement intervenu à la fin du premier semestre 2008. Enfin, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le rapport spécial du commissaire aux comptes pour 2009 mentionne bien l'existence d'une refacturation, puisque ce rapport précise que l'assistance technique et managériale de [16] S.A., et notamment exercée au bénéfice de [14] [Localité 24], ce qui implique nécessairement une refacturation.


L'Urssaf réplique que la S.A. [15] ne démontre pas l'identité de situation entre les deux contrôles (2008-2009 et 2013-2014) quant aux rémunérations versées en Suisse à [F] [G] et [N] [D] sur le second semestre 2008 et pendant l'année 2009, ainsi que l'exige la jurisprudence, aucun justificatif probant n'étant produit en ce sens devant la CRA. Le fait que la lettre d'observations du 9 décembre 2010 mentionne explicitement dans la liste des documents consultés le rapport du commissaire aux comptes n'est pas un critère suffisant, constitutif d'une acceptation implicite de l'Urssaf, d'autant que l'inspecteur en charge de cette précédente vérification confirme ne pas avoir eu connaissance du rapport spécial des commissaires aux comptes sur l'exercice clos au 31 décembre 2009, mentionnant le contrat-cadre de prestations de services relatifs à l'assistance technique et managériale conclu entre la [16] S.A. et la [14] S.A. La S.A. [15] ne fournit aucune explication concernant le changement intervenu à la fin du premier semestre 2008, période pendant laquelle MM. [G] et [D] étaient respectivement rémunérés en qualité de président du directoire et directeur général et les périodes suivantes, c'est-à-dire le second semestre 2008 et l'année 2009, permettant de constater une modification juridique des différentes sociétés composant le groupe [15]. Elle n'apporte aucune justification sur une stricte identité de situations structurelles et juridiques des relations entre les actionnaires lors des deux périodes contrôlées et ne justifie pas être soumise en qualité de filiale à la société [16], puisque dans les documents présentés pendant le contrôle et dans le rapport annuel des comptes consolidés 2015 du groupe [14], la société [16], qui déclare rémunérer M. [G], président de la S.A. [15], ne détient directement que 38,54% des actions de cette société. De même, aucune justification n'est fournie, tant par la société [16] que par la S.A. [15], concernant la consolidation par intégration globale de la S.A. [15] dans [16] en 2013 et en 2014, au titre d'un contrôle exclusif de [16] sur la S.A. [15], étant rappelé que le contrôle exclusif résulte soit de la détention de la majorité des droits de vote, soit de la majorité des organes de direction, soit du droit d'exercer une influence dominante en vertu de contrat ou de clauses statutaires. Elle n'a produit aucun document permettant de vérifier et de constater, sur les années contrôlées, 2013 et 2014, le pourcentage de contrôle (100%) qu'elle exercerait sur la S.A. [15] alors qu'elle ne détient directement que 38,54% des actions, comme cela ressort du rapport [18] du 3 juin 2016 concernant les comptes consolidés de l'année 2015. En conséquence, la S.A. [15] ne démontre pas l'identité de situation entre les deux contrôles et ne peut donc se prévaloir utilement d'un accord tacite de sa part sur la pratique litigieuse pour faire obstacle au présent redressement.


Les dispositions du dernier alinéa de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale🏛 qui résulte du décret n°99-434 du 28 mai 1999🏛 sont ainsi rédigées : « L'absence d'observation vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observation de la part de cet organisme. »


La charge de la preuve incombe à la matière à la société.


En l'espèce, la simple similitude des documents consultés par l'inspecteur à l'occasion du précédent contrôle invoquée par la société ne suffit pas à établir l'existence d'un accord tacite de l'inspecteur au regard d'une situation connue en toute connaissance de cause.


En effet, comme l'a retenu le premier juge, l'examen du rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice clos le 31 décembre 2009 fait apparaître des différences avec le rapport spécial pour l'exercice clos le 31 décembre 2014.


Les documents consultés par l'inspecteur ne contenaient pas strictement les mêmes informations notamment au regard de la rémunération versée à [N] [D]. Dès lors il importe peu que le schéma de refacturation n'ait pas été modifié depuis le premier contrôle dans la mesure où celui-ci n'apparaissait pas clairement des documents consultés. En particulier, le rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice 2009, dont l'inspecteur du contrôle conteste en outre avoir eu connaissance, se borne à mentionner l'assistance technique et managériale de la [16] S.A., notamment exercée au bénéfice de [14] [Localité 24], ce qui n'implique pas nécessairement, sans mention explicite, une refacturation. Au contraire, le rapport spécial relatif à l'exercice 2014 précisant en outre les modalités de cette refacturation et la rémunération de l'intéressé a permis à l'inspecteur d'apprécier exactement la situation. Ainsi, faute d'avoir bénéficié des mêmes informations pour analyser la situation de la société et se prononcer sur ses pratiques en toute connaissance de cause, l'absence de redressement sur ce point ne peut donc pas constituer un accord implicite.


Le moyen tiré d'un précédent contrôle sera rejeté.


c) Sur le fond du redressement


La société expose que contrairement à ce que prétend l'Urssaf, elle est contrôlée par l'actionnaire principal du groupe, la société de droit suisse [16] S.A. créée en 2008 lors de la reprise du groupe par ses cadres. En 2014, les revenus des sociétés de droit français du groupe [15] ont représenté 33% des revenus consolidés du groupe ce qui démontre l'importance des activités hors de France du groupe et son ancrage pan-européen. Dans le cadre de la création du groupe [15] en 2013, les fonctions de support précédemment exercées jusqu'en juillet 2013 par la société [16] au bénéfice de l'ensemble du groupe [14] ont été apportées à [17] le 12 juin 2013.


La société expose que seule la personne morale qui a la qualité d'employeur est responsable du versement des cotisations et contributions sociales. La seule circonstance qu'une société appartienne à un groupe de sociétés ne suffit pas à lui conférer la qualité d'employeur à l'égard des autres salariés/mandataires sociaux du groupe. Or, le redressement opéré à son encontre sur la base de la rémunération de [N] [D] n'a aucun fondement, dès lors que ce dernier est employé et rémunéré par la société [17] et qu'il est lié à la société seulement par un mandat social non rémunéré de directeur général. La seule appartenance de la société au groupe [15] ne suffit pas à lui conférer la qualité d'employeur des salariés des autres entités juridiques du groupe. Elle précise qu'il occupe, au cours de la période contrôlée, le poste de « Group Managing Director », fonction qu'il exerce dans les locaux de la société [17] situés [Adresse 3] à [Localité 12] en Suisse, et est rémunéré à ce titre par la société [17], qui verse les cotisations sociales afférentes au régime suisse de sécurité sociale. Il réside ainsi en Suisse la semaine dans un appartement loué par la société [17], situé [Adresse 1] à [Localité 22]. [N] [D] est donc salarié avec un contrat de travail suisse d'une société suisse et affilié au régime suisse de sécurité sociale conformément à la législation de cet État. Elle ajoute que l'implantation de la société [17] à [Localité 12] en Suisse n'est nullement virtuelle ou dictée par des objectifs d'optimisation sociale ou fiscale. Le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (remplacée en 2010 par l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution- ACPR), lors de sa séance du 24 octobre 2008, a autorisé explicitement la prise de contrôle de [14] dans le cadre d'une opération de rachat par les cadres dirigeants, dites management buy-out, via une holding suisse en cours de constitution, qui serait détenue par deux structures dédiées respectivement au management et aux salariés actionnaires, à savoir [16] et [14] Management et la diversification du futur groupe [14] vers les activités de courtage obligataire, d'Inter-dealing Brokerage et de conseil en gestion d'actifs, ces activités étant logées dans la filiale suisse, [13].


En droit, la société ajoute qu'il est de jurisprudence parfaitement constante que les faits que des sociétés constituant des entités indépendantes, soient reliées par une entité de direction commune, se situant au niveau de la société-mère, est sans effet sur la détermination de la personne morale redevable des cotisations et contributions sociales. De plus, les comptes consolidés sont établis à la seule fin de disposer d'une image globale de l'activité, du résultat et de la situation d'un groupe de sociétés. Il s'agit ici d'états à vocation purement économique et financière sans effet en matière fiscale ou sociale. Les rapports de l'organe de révision sur les comptes consolidés à l'Assemblée Générale des actionnaires de [16] S.A. précise ainsi expressément que [16] S.A. et la holding qui contrôle le groupe [15], ex [14] (page 10, pièces numéro 8).


L'Urssaf réplique que la S.A. [15], anciennement [14], est une société d'intermédiation sur les marchés d'actions en France et sur les principales places boursières européennes et de conseils aux entreprises (analyse financière), intervenant en sous-traitance des opérations de dénouement auprès d'établissements bancaires spécialisés. Elle est le résultat de la fusion entre [14] et [10] opérée en avril 2013. La S.A. [15] détient des filiales à 100% ou à majorité qualifiée en Suisse ([14] Corporate Finance, [17], [14]), à [Localité 24] ([15] Transition), à [Localité 8] et [Localité 25] ([15] Inc.) et à [Localité 20] ([9]). Elle est détenue par 5 actionnaires : [16] (38,54%), [14] Management (1,46%), [14] Financial (39,77%), CA-CB (15,06%) et [26] (5,17%). En considération de cette répartition, la société [16] établie en Suisse ne peut avoir aucun contrôle direct sur la S.A. [15]. Lors des opérations de contrôle, l'inspecteur du recouvrement a constaté que [N] [D] et [F] [G] exerçaient une partie substantielle de leur activité en France au titre du mandat social qu'ils détiennent dans la S.A. [15].


S'agissant de [N] [D], l'Urssaf ajoute qu'il est directeur général délégué et mandataire social de la S.A. [15] dont le siège social est situé à [Localité 24] ; que cette société est immatriculée au RCS de Paris sous le n° siren [N° SIREN/SIRET 5] et enregistrée au greffe du tribunal de commerce de Paris sous le n° 1997B10253, et donc soumise aux dispositions des articles L. 225-1 et suivants du code de commerce🏛 et détient 100% des actions de la filiale [17] située en Suisse ; que le dirigeant dispose au siège de la société d'un bureau personnel et de l'ensemble des services associés nécessaires à ses activités ; qu'une partie de ses frais professionnels (déplacements en France et en Europe) sont remboursés par cette dernière ; qu'il a déclaré à l'administration fiscale française ses revenus professionnels (salaires) perçues hors de France en 2013 et en 2014, notamment en provenance de [17] ; qu'il conserve son domicile et sa résidence principale à [Localité 24] ; qu'à ce titre, il est domicilié fiscalement en France ; que l'activité de [N] [D] et les rémunérations qui lui sont versées doivent être rattachées à la S.A. [15], puisqu'elle est seule responsable devant ses actionnaires (les filiales et les succursales répondent de leurs actes devant la S.A. [15]) ; que les comptes de l'ensemble des filiales et succursales sont consolidés au sein de la S.A. [15] ; qu'il est difficilement concevable que [N] [D], rémunéré directement ou indirectement par la filiale suisse de la S.A. [15], et qui, par ailleurs est également mandataire social de la société mère, n'ait pas à rendre compte de ses mandats dans cette filiale devant l'ensemble des actionnaires de la S.A. [15] ; que la notion « d'employeur » invoquée par la requérante n'est donc pas fondée juridiquement, [N] [D] devant rendre compte de son mandat devant les associés de la S.A. [15] selon les dispositions du code de commerce ; que la société [17], établie en Suisse et filiale à 100% de la S.A. [15], ne peut être retenue comme l'employeur de [N] [D] ; que l'argument selon lequel la société [17] serait l'employeur de [N] [D] ne saurait donc prospérer, les dispositions des articles L. 243-7 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale🏛 étant bien applicables à la S.A. [15] ; que l'affirmation de la société selon laquelle l'absence de rectification par l'administration fiscale française sur les méthodes de comptabilisation des sommes versées à [N] [D] au titre des années 2013 et 2014, l'emporte sur l'analyse faite par les inspecteurs du recouvrement, ne peut être retenue en raison de l'indépendance des sources de droit applicables aux rémunérations perçues par les intéressés, l'assiette fiscale ne prévalant pas sur l'assiette sociale, ce qui a d'ailleurs été rappelé dans la réponse faite par les inspecteurs à la S.A. [15] dans la lettre du 14 septembre 2016 ; qu'il convient de rappeler que [N] [D], en sa qualité de mandataire social de la S.A. [15], relève des dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, au titre de son activité principale exercée en France, l'intéressé a conservé sa résidence principale en France depuis 2008 (présomption tirées de l'article 4B du code général des impôts) ; que la convention passée par la S.A. [15] et la société [16], concernant le versement des rémunérations de mandataire social de la S.A. [15] ne peut donc avoir pour effet d'éluder les obligations déclaratives sur ces mêmes rémunérations au régime français de sécurité sociale.


Les trois premiers alinéas de l'article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale🏛, dans leur version applicable, disposaient que :

« Sous réserve des traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés, sont affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans le cadre du présent code, quel que soit leur âge, leur sexe, leur nationalité ou leur lieu de résidence, toutes les personnes exerçant sur le territoire français, à titre temporaire ou permanent, à temps plein ou à temps partiel :

« - une activité pour le compte d'un ou de plusieurs employeurs, ayant ou non un établissement en France, et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ;

« - une activité professionnelle non salariée. »


L'article 13 du règlement (CE) n°883/2004 modifié par le règlement (UE) n°465/2012⚖️ prévoit :

« 1. La personne qui exerce normalement une activité salariée dans deux ou plusieurs États membres est soumise :

« a) la législation de l'État membre de résidence, si elle exerce une partie substantielle de son activité dans cet État membre ; ou

« b) si elle n'exerce pas une partie substantielle de ses activités dans l'État membre de résidence :

« i) la législation de l'État membre dans lequel l'entreprise ou l'employeur a son siège social ou son siège d'exploitation, si cette personne est salariée par une entreprise ou un employeur ; ou

« ii) la législation de l'État membre dans lequel les entreprises ou les employeurs ont leur siège social ou leur siège d'exploitation si cette personne est salariée par deux ou plusieurs entreprises ou employeurs qui n'ont leur siège social ou leur siège d'exploitation que dans un seul État membre ; ou

« iii) la législation de l'État membre autre que l'État membre de résidence, dans lequel l'entreprise ou l'employeur a son siège social ou son siège d'exploitation, si cette personne est salariée par deux ou plusieurs entreprises ou employeurs qui ont leur siège social ou leur siège d'exploitation dans deux États membres dont un est l'État membre de résidence ; ou

« iv) la législation de l'État membre de résidence si cette personne est salariée par deux ou plusieurs entreprises ou employeurs, dont deux au moins ont leur siège social ou leur siège d'exploitation dans différents États membres autres que l'État membre de résidence.

« 2. La personne qui exerce normalement une activité non salariée dans deux ou plusieurs États membres est soumise :

« a) la législation de l'État membre de résidence, si elle exerce une partie substantielle de son activité dans cet État membre ; ou

« b) la législation de l'État membre dans lequel se situe le centre d'intérêt de ses activités, si la personne ne réside pas dans l'un des États membres ouÌ elle exerce une partie substantielle de son activité.

« 3. La personne qui exerce normalement une activité salariée et une activité non salariée dans différents États membres est soumise aÌ la législation de l'État membre dans lequel elle exerce une activité salariée ou, si elle exerce une telle activité dans deux ou plusieurs États membres, aÌ la législation déterminée conformément au paragraphe 1.

« 4. Une personne employée comme fonctionnaire dans un État membre et qui exerce une activité salariée et/ou non salariée dans un ou plusieurs autres États membres est soumise aÌ la législation de l'État membre dont relève l'administration qui l'emploie.

« 5. Les personnes visées aux paragraphes 1 aÌ 4 sont traitées, aux fins de la législation déterminée conformément aÌ ces dispositions, comme si elles exerçaient l'ensemble de leurs activités salariées ou non salariées et percevaient la totalité de leurs revenus dans l'État membre concerneì. »


Le premier article du règlement susvisé, intitulé « Définitions » précise aux fins du présent règlement :

« a) le terme « activité salariée » désigne une activité, ou une situation assimilée, qui est considérée comme telle pour l'application de la législation de sécurité sociale de l'État membre dans lequel cette activité est exercée ou la situation assimilée se produit ;

« b) le terme « activité non salariée » désigne une activité, ou une situation assimilée, qui est considérée comme telle pour l'application de la législation de sécurité sociale de l'État membre dans lequel cette activité est exercée ou la situation assimilée se produit ;

« c)' »


La décision n°1/2012 du comité mixte en date du 31 mars 2012 prévoit l'application du règlement (CE) n°883/2004 à la Suisse.


L'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale🏛 dispose que sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.


L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, précise notamment que :

« Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2, même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise, même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail et même s'ils sont rétribués en totalité ou en partie à l'aide de pourboires :

« '

« 12°) Les présidents du conseil d'administration, les directeurs généraux et les directeurs généraux délégués des sociétés anonymes et des sociétés d'exercice libéral à forme anonyme ;

« '

« 23° Les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées et des sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées ;

« ' »


En l'espèce, il est constant comme l'a relevé le premier juge que [N] [D] a été recruté en qualité de « Group Chief Financial Officer » selon un contrat de travail du 1er juillet 2008, par la société de droit suisse [17] S.A., anciennement [14] Equities S.A. jusqu'en 2009 puis [16] jusqu'en juin 2013, mais qu'il occupe également la fonction de directeur général délégué de la S.A. [15], anciennement [14], société de droit français.


Si l'intéressé exerce une activité salariée en Suisse pour la société [17] (Group Ac Ad pendant la période contrôlée), il exerce simultanément une activité assimilée à une activité salariée en France en qualité de directeur général délégué de la S.A. [15], au titre de son mandat social. Ainsi exerçant une activité salariée dans les deux États membres, les dispositions de l'article 13 du règlement (CE) n° 883/2004 sont applicables à cette situation.


Il convient dès lors de savoir quel est son lieu de résidence et déterminer s'il y exerce une partie substantielle de ses activités professionnelles dans l'État de sa résidence.


Si le contrat de travail du 1er juillet 2008 mentionne un domicile à [Localité 22] en Suisse, il n'est pas contesté que l'intéressé conserve son domicile et sa résidence principale à [Localité 24] où il reste domicilié fiscalement. Les certificats de salaire de l'année 2013 ainsi que les bulletins de salaire pour la même période ont été adressés à son domicile parisien. De même, l'extrait du procès-verbal de la réunion du Conseil d'administration du 14 octobre 2011 désigne également le domicile parisien de [N] [D]. En outre, il a déclaré à l'administration fiscale française ses revenus professionnels (salaires) perçus hors de France en 2013 et 2014, notamment en provenance de [17], filiale de [15] à [Localité 12]. Il est donc domicilié fiscalement en France.


Il s'en déduit que l'intéressé réside habituellement en France et non pas à [Localité 22] dont la société précise qu'il s'agit d'un appartement de fonction loué par la société [17] pour lui permettre d'exercer ses fonctions en Suisse pendant la semaine.


Ensuite, il exerce ses activités de mandataire social en France dans la société inscrite au tribunal de commerce de Paris dont il détient son mandat et où il dispose d'un bureau personnel et de l'ensemble des services associés nécessaires à ses activités. IL exerce d'ailleurs tant à [Localité 24] que dans l'ensemble des pays dans lesquels la société [15] intervient par le biais de ses filiales ou de ses succursales, et notamment en Europe (Suisse, Allemagne, Grande-Bretagne, Espagne, Suède, Pays-Bas, Italie, Autriche). Une partie de ses frais professionnels (déplacements en France et en Europe) sont remboursés par la S.A. [15]. Il n'est pas démontré par la société, pour renverser les éléments de preuve retenus par le service du contrôle de l'Urssaf, que l'intéressé n'exerce pas une partie substantielle de ses activités à [Localité 24].


Au surplus, la S.A. [15] détient 100% en Suisse la société [17] domiciliée à [Localité 12] (de même que les sociétés [14] Corporate Finance et [13], également domiciliées à [Localité 12], et dispose d'une succursale [15] à [Localité 27]). La S.A. [15] contrôle ainsi entièrement la filiale avec laquelle [N] [D] a conclu son contrat de travail, de sorte que la S.A. [15] apparaît « l'employeur » direct ou indirect de l'intéressé et rémunère ses services, peu important que ce critère ne soit pas requis par le règlement européen dès lors qu'il corrobore la situation concrète de l'intéressé résidant en France et y exerçant substantiellement ses activités par la société [15] et le groupe auquel elle appartient.


Enfin, les pièces n°6 et 7 versées par la société (certificats de salaire et bulletins de paie) ne sont pas de nature à rapporter la preuve que des cotisations sont effectivement réglées au régime de sécurité sociale suisse par la société [17].


Il s'ensuit qu'au regard de la règlementation européenne applicable en la matière, la S.A. [15] doit être tenue au paiement des cotisations de sécurité sociale en France au titre des rémunérations de [N] [D] telles que calculées par le service du contrôle, leur quantum n'étant pas discuté par la société.


II - Sur le chef de redressement n° 9 relatif aux rémunérations non soumises à cotisation - situation de [F] [G]


La société [15] repend son argumentation relative à l'abus de droit et à l'accord implicite.


L'Urssaf reprend la même argumentation que précédemment.


a) Sur l'abus de droit


En application des articles L. 243-7-2 et R. 243-60-3 du code de la sécurité sociale précités, en présence d'un acte juridique qu'elle estime fictif ou inspiré par le seul objectif d'éluder ou de diminuer les cotisations sociales, l'Urssaf est tenue de déclencher la procédure des abus de droit.


Comme cela a déjà été rappelé, en l'absence d'invocation même implicite de l'abus de droit par l'Urssaf, il a été jugé que la divergence d'appréciation des règles d'assiette des cotisations n'est pas au nombre des contestations susceptibles de donner lieu à la procédure d'abus de droit prévue à l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale (Cass., civ. 2e, 12 octobre 2017, 16-21469, publié au bulletin), peu importe que cette divergence se manifeste dans la requalification d'un contrat ou l'interprétation d'une chaîne de contrats entre différentes sociétés d'un même groupe multinational et les conventions passées entre celles-ci et leur dirigeant social dès lors qu'aucune intention d'utiliser ces contrats à des fins qui leur sont étrangères n'est invoquée ni même recherchée par l'Urssaf, les effets induits d'un contrat ou d'une chaîne de contrats ne se confondant pas avec l'intention des signataires de ces conventions.


En l'espèce, la société se borne à prétendre, sans l'établir, qu'à l'occasion de redressements opérés au titre d'une divergence d'appréciation sur les règles d'assiette des cotisations dans le cadre d'une chaîne de contrats conclus entre sociétés d'un même groupe multinational ayant eu pour effet d'éluder les obligations déclaratives au régime français, l'URSSAF a implicitement mais nécessairement invoqué des éléments caractérisant un abus de droit, dit « rampant », sans mettre en œuvre les dispositions protectrices du justiciable prévues par la procédure de répression des abus de droit.


Or, il a été rappelé qu'il ressort de la procédure de redressement en cause que, qu'il s'agisse de l'analyse d'un contrat ou d'une chaîne de contrats entre des sociétés d'un même groupe et leur dirigeant social, l'Urssaf n'a pas recherché ni retenu comme réunies les conditions de l'abus de droit, l'élément intentionnel qui est impérativement requis n'ayant été ni invoqué ni recherché, pas plus que la bonne foi de la société n'a été remise en cause. L'Urssaf n'était donc pas tenue de mettre en œuvre la procédure particulière de l'abus de droit par l'intention d'éluder des cotisations de sécurité sociale. Si la pratique de la société a eu pour effet d'éluder ou diminuer les cotisations sociales cela ne signifie pas que l'Urssaf a considéré que le seul objectif de la société était d'éluder ou de diminuer les cotisations sociales, sauf à confondre l'effet et l'intention.


Et comme cela a été également rappelé, si elle ne recherche pas dans les pratiques de l'entité contrôlée une intention abusive afin de la sanctionner par une pénalité financière, l'Urssaf ne peut pas être contrainte à mettre en œuvre une procédure dont la finalité est répressive. C'est pourquoi, l'Urssaf qui était restée dans le cadre d'un contrôle usuel, n'était tenue que de notifier un redressement dans les conditions de droit commun sans recourir à la procédure spécifique d'abus de droit et à la pénalité de 20 % qui y est attachée. Dès lors, les droits de la société demeurent, dans ce contexte, garantis par sa possibilité de soumettre à l'appréciation du juge d'une part le caractère justifié ou non du redressement, d'autre part l'absence de recours à la procédure spécifique de l'abus de droit. Au cas d'espèce, en l'absence d'un redressement répressif sanctionné par une importante pénalité, la société ne peut pas sérieusement prétendre avoir été volontairement privée des garanties spécifiques lui permettant de se défendre dans le cadre de la procédure répressive de l'abus de droit.


Le moyen tiré de l'abus de droit ne peut être qu'écarté.


b) L'accord implicite


En l'espèce, la simple similitude des documents consultés par l'inspecteur à l'occasion du précédent contrôle invoquée par la société ne suffit pas à établir l'existence d'un accord tacite de l'inspecteur au regard d'une situation connue en toute connaissance de cause.


En effet, comme l'a retenu le premier juge, l'examen du rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice clos le 31 décembre 2009 fait apparaître des différences avec le rapport spécial pour l'exercice clos le 31 décembre 2014.


Les documents consultés par l'inspecteur ne contenaient pas strictement les mêmes informations notamment au regard de la refacturation des honoraires versés à [F] [G]. Dès lors il importe peu que le schéma de refacturation n'ait pas été modifié depuis le premier contrôle dans la mesure où celui-ci n'apparaissait pas clairement des documents consultés. En particulier, le rapport spécial du commissaire aux comptes pour l'exercice 2009, dont l'inspecteur du contrôle conteste en outre avoir eu connaissance, se borne à mentionner l'assistance technique et managériale de la [16] S.A., notamment exercée au bénéfice de [14] [Localité 24], ce qui n'implique pas nécessairement, sans mention explicite, une refacturation. Au contraire, le rapport spécial relatif à l'exercice 2014 précisant en outre les modalités de cette refacturation a permis à l'inspecteur d'apprécier exactement la situation. Ainsi, faute d'avoir bénéficié des mêmes informations pour analyser la situation de la société et se prononcer sur ses pratiques en toute connaissance de cause, l'absence de redressement sur ce point ne peut donc pas constituer un accord implicite.


Le moyen tiré d'un précédent contrôle sera rejeté.


c) Sur le fond


La S.A. [15] expose que comme pour [N] [D], l'Urssaf procède, sans aucun élément factuel juridique pouvant fonder cette position, un redressement sur le compte de la société, au titre des honoraires versés par une société tierce, la [16] S.A., à [F] [G], bien qu'il ne soit aucunement rémunéré par la société au titre du mandat exercé en son sein. Ainsi, [F] [G] est mandataire social de plusieurs sociétés en France et dans d'autres pays du groupe [15] et fournit également des prestations de services, via une société tierce qu'il détient, la société [19], au profit de [16], laquelle refacture une partie de ses prestations, dans le cadre des conventions de prestations de services intragroupe conclus entre la filiale dédiée [17] S.A. et les autres sociétés du groupe. Il exerce également un mandat social, non rémunéré, au sein de la société. L'Urssaf ne saurait valablement faire peser sur la société, une obligation de paiement des cotisations et contributions sociales au titre d'une rémunération qui n'est ni versée par la société à [F] [G] ni versée en contrepartie de l'exercice du mandat social détenu par celui-ci au sein de la société. Il dispose de son centre de vie en Suisse où il est installé et domicilié depuis 2008 et agit en qualité de prestataire de services de la société [16]. Les rapports des commissaires aux comptes sur les conventions réglementées précisent notamment que le budget de dépenses de [16] comprend les prestations de services facturés par [F] [G] en tant que prestataire externe de la société [16] S.A. À ce titre, les prestations de [F] [G] sont rémunérées sous forme d'honoraires. Contrairement à l'affirmation de l'Urssaf, les rapports des commissaires aux comptes ne contredisent à aucun moment l'absence de rémunération du mandat social de [F] [G] au sein de la société.


En réponse, l'Urssaf expose concernant [F] [G], qu'il est président-directeur général de la S.A. [15] ; qu'il a été salarié de celle-ci jusqu'au 1er juillet 2008, en sa qualité de président du directoire ; que la société [16] S.A. est associée à hauteur de 38% dans le capital de la S.A. [15] en France ; que selon les rapports spéciaux des commissaires aux comptes sur les conventions réglementées, la S.A. [15] détient 100% de la société [17] S.A. basée à [Localité 12] en Suisse, et que la société [16] S.A. a apporté à [17] S.A. filiale de [15], ses activités de services, comprenant notamment la facturation au taux horaire des rémunérations versées par [16] à [F] [G] pour ses activités de gouvernance et managériale sur l'ensemble des sociétés du groupe [14] ; qu'il a déclaré être domicilié fiscalement en Suisse ; qu'il exerce, en France et hors de France, son mandat social et ses missions pour le compte de la S.A. [15] et ses filiales ; qu'il dispose en France d'un appartement pris en charge par la S.A. [15] et que cette dernière prend également en charge ses frais de déplacement ; qu'il dispose également au siège de la S.A. [15] d'un bureau personnel, d'une place de parking et de l'ensemble des services associés aux nécessités de ses activités avec notamment la mise à disposition d'un téléphone portable ; que tous ces éléments de fait attestent de sa présence régulière au siège de la S.A. [15] à [Localité 24] ; qu'en considération des dispositions du code de commerce, [F] [G] est présumé exercer son mandat social à [Localité 24], tant au sein de la S.A. [15], société mère du groupe [15], que des filiales que la S.A. [15] détient en France et hors de France, les dispositions de l'article L. 761-2 du code de la sécurité sociale🏛 relatives au détachement ne pouvant donc être retenues ; que l'article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale est applicable même si [F] [G] est domicilié en Suisse au regard des lois et règlements sur l'assujettissement à l'impôt sur les revenus de source professionnelle, notamment pour la France, l'article 4B du code général des impôts et la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966, modifiée par les avenants des 3 décembre 1969, 22 juillet 1997 et 2 août 2009 ; que de même, le règlement (CE) n°883/2004 modifié par le règlement (UE) n°465/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 est applicable selon les dispositions de l'article 13-b-1, à savoir la personne qui exerce normalement une activité salariée dans deux ou plusieurs États membres est soumise, si elle n'exerce pas une partie substantielle de ses activités dans l'État membre de résidence, en l'espèce la Suisse, à la législation de l'État membre, en l'espèce la France, dans lequel l'entreprise ou l'employeur a son siège social ou son siège d'exploitation, si cette personne est salariée par une entreprise ou un employeur, en l'espèce en France, les présidents du Conseil d'administration, les directeur généraux et les directeurs généraux délégués des sociétés anonymes relèvent du régime général des salariés en application de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale ; quand en effet, d'une part, la société n'apporte pas la preuve que [F] [G] n'exerce pas une activité substantielle dans son pays de résidence, la Suisse, puisqu'il assure l'ensemble des droits et obligations de son mandat social liés à ses fonctions de directeur général de la S.A. [15] dont le siège social est à [Localité 24], et, d'autre part, la pluralité d'employeurs ne peut être retenue puisque celui-ci est président-directeur général de la S.A. [15], société mère du groupe [15], qui détient à 100% ses filiales suisses dans lesquelles il intervient en qualité de président et de directeur ; que les déclarations de la S.A. [15], dans sa lettre du 30 mars 2016, sur l'absence de rémunération du mandat social de l'intéressé en sa qualité de P.-D.G. sont contredites par les rapports des commissaires aux comptes, joints aux rapports annuels d'activité remis aux actionnaires, dans lesquels sont mentionnés les rémunérations des dirigeants (membres du Conseil d'administration et directeurs généraux délégués, à savoir en 2013 : 1 989 750 euros, et en 2014 : 2 287 500 euros) ; que les mandataires sociaux mentionnés sur l'extrait Kbis fourni par la société lors des opérations de contrôle sont : [F] [G] président-directeur général, [N] [D] directeur général délégué et administrateur, [K] [U] directeur général délégué et administrateur, et [S] [O] directeur général délégué et administrateur ; que par ailleurs, dans les rapports spéciaux des commissaires aux comptes ([18] et Présence & Conseils) concernant les conventions réglementées passées par la S.A. [15], il est précisé que dans le cadre d'un contrat de prestations de services régularisé en date du 1er janvier 2009, [F] [G] intervient en tant que prestataire externe de la société [16] S.A. ; qu'à ce titre, ses prestations sont rémunérées sous forme « d'honoraires » adressées à la [16] S.A. ; que ces honoraires sont entièrement refacturés à [17] et donc aux sociétés du groupe [14], devenu [15], signataire de l'annexe au contrat de prestations de services de cette dernière ; qu'il convient de préciser que la S.A. [15] (France) consent à sa filiale [17] (Suisse) des avances de trésorerie destinées à couvrir ses frais de structure ; que la [16] S.A. est associée à hauteur de 38% dans le capital de la S.A. [15] (France) ; que cette participation minoritaire dans le capital de la S.A. [15] ne lui confère pas les prérogatives d'une holding à proprement parler, les comptes du groupe [15] étant consolidés au niveau de la S.A. [15] ; que cette société détient 100% de la société [17] (Suisse) ; que la [16] S.A. a apporté à [17] (filiale de [15]) ses activités de service, comprenant notamment la facturation au taux horaire des rémunérations versées par [16] à [F] [G] pour ses activités de gouvernance et managériales sur l'ensemble des sociétés du groupe [15] ; qu'en d'autres termes, la rémunération de [F] [G] est logée chez [16] S.A., par le biais de conventions réglementées entre une société actionnaire minoritaire ([16] S.A.) qui elle-même a fait apport de son activité de services à une des filiales suisses de la S.A. [15] ; que les allégations contenues dans le la lettre du 13 avril 2016, selon lesquelles [F] [G] n'est pas salarié de la S.A. [15] ou de l'une de ses succursales ou filiales sont de pure forme et sont démenties par les modalités de rémunération décrites dans les rapports spéciaux des commissaires aux comptes ; que la réalité d'une activité substantielle en Suisse n'est justifiée ni par la S.A. [15], ni par la société suisse [16] (actionnaire à hauteur de 38,54% de la S.A. [15]), ni par la filiale suisse de la S.A. [15], qui seules pourraient être en mesure de démontrer, par la fourniture de documents probants (frais de déplacement, frais de restauration et de réception' en Suisse), la réalité et le caractère substantiel de l'activité en Suisse de l'intéressé ; qu'en outre, la présomption d'une activité substantielle, qui serait tirée de sa domiciliation en Suisse depuis le mois de juin 2009, est contredite par les autres activités de [F] [G] en France, entre le mois de juillet 2008 (date à partir de laquelle il cesse d'être déclaré au régime français de sécurité sociale pour devenir « prestataire de services », au titre d'une assistance technique et managériale, auprès de l'actionnaire [16]) et le mois de décembre 2013 ; qu'au de cette période, [F] [G] est resté inscrit à l'Urssaf, sous le n°11700000 1513572888, en qualité d'associé des S.N.C. [23] et la Mahaudière ; que par ailleurs, l'intéressé a également été inscrit à l'Urssaf sous le n°11700000 1534083279 jusqu'au 30 septembre 2012, en qualité d'employeur de personnel de maison à l'adresse suivante : [Adresse 2] ; qu'il convient de préciser que cette adresse est restée le pied à terre de l'intéressé, lors de ses très fréquents séjours à [Localité 24] (60 séjours en 2013 d'une durée de 134 jours, 58 séjours en 2014 d'une durée de 110 jours) ; qu'enfin et à titre subsidiaire, il n'est pas inintéressant de noter sur le rapport de l'organe de révision des comptes consolidés 2015 que les sociétés [16] et [14] Management, détenant respectivement 38,54% et 1,46% du capital de la S.A. [15], ne déclarent aucun salarié, alors que le statut social du mandataire de S.A., en Suisse et comparable au régime français de sécurité sociale ; que dès lors, c'est à tort que les rémunérations versées ont été qualifiées « d'honoraires ».


Il est renvoyé aux termes des articles L. 111-2-2, L. 311-2 et L. 311-3 du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable, ainsi qu'aux article 1er et 13 du règlement (CE) n°883/2004 modifié par le règlement (UE) n°465/2012 et à la décision n°1/2012 du comité mixte en date du 31 mars 2012 ci-dessus rappelés.


En l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, le président-directeur général d'une société anonyme est assimilé à un salarié au sens du droit de la sécurité sociale français. En outre, exerçant une activité rémunérée dans les deux États membres, aux termes des dispositions du premier article du règlement (CE) n° 883/2004, applicables à cette situation, [F] [G] exerce une activité assimilée à une activité salariée en France.


Or, il est constant comme l'a relevé le premier juge que [F] [G] exerce la fonction de président-directeur général de la S.A. [15], société de droit français, qu'il intervient simultanément en tant que prestataire externe de la [16] S.A., société de droit suisse, et qu'il est rémunéré sous forme d'honoraires.


L'intéressé intervient, en vertu d'un contrat de prestation de service, du 1er janvier 2009 en tant que prestataire externe auprès de la société [16] S.A. Il exerce donc une activité indépendante en tant que prestataire externe selon le droit Suisse.


Il ressort du rapport spécial du commissaire aux comptes relatif à l'exercice 2014 que les honoraires versés à [F] [G] « sont refacturés à la société [17] et donc aux sociétés du groupe [14] [désormais dénommé S.A. [15]] signataires de l'annexe au contrat de prestation de service de cette dernière ».


Ainsi [F] [G] exerçant une activité salariée en France et une activité non salariée en Suisse, les dispositions du point 3 de l'article 13 du règlement (CE) n°883/2004 sont applicables à sa situation et la législation de l'État dans lequel il exerce son activité salariée, la France, doit lui être appliquée, de sorte que sa rémunération doit être soumise à la législation française de sécurité sociale.


Au surplus, la société suisse [16] S.A. détient 38,54% de la S.A. [15] qui détient 100% de la société [17], à laquelle sont refacturés les « honoraires » de [F] [G], de sorte que la S.A. [15] apparaît être l'entité qui verse indirectement à l'intéressé lesdits « honoraires », étant rappelé que les comptes sont consolidés au sein de la société [15]. Ainsi, même si apparemment la société [15] ne rémunère pas [F] [G] au titre de son mandat social conformément à ses statuts, en réalité elle le rémunère par le biais des « honoraires » versés en exécution des contrats conclus avec les société suisses [16] et [17].


Il s'ensuit qu'au regard de la règlementation européenne applicable en la matière, la S.A. [15] doit être tenue au paiement des cotisations de sécurité sociale en France au titre des rémunérations de [F] [G] telles que calculées par le service du contrôle, leur quantum n'étant pas discuté par la société.


Le jugement sera confirmé de ce chef.


III - Sur le point de redressement n°11 relatif aux rémunérations non soumises à cotisations


S'agissant de [C] [R], la S.A. [15] expose qu'elle n'est pas son employeur et qu'elle ne l'a pas rémunéré, ce que le Conseil des prud'hommes de Paris a jugé le 7 avril 2014.


S'agissant de [J] [X], la S.A. [15] expose qu'il a été embauché par la société de droit Suisse [14] à compter du 1er septembre 2008. Son détachement en France a pris fin le 31 décembre 2013. Il n'a été engagé par la société, via sa succursale de [Localité 20], qu'à compter du 1er janvier 2014, suivant un contrat de travail de droit anglais en date du 16 décembre 2013. Exerçant ses fonctions à [Localité 20], comme le démontre l'article 5 du contrat de travail, ainsi que sa signature courriel à l'époque, ses rémunérations ont été soumises à cotisations au Royaume-Uni (pièce n°17) du 1er janvier 2014 au 31 juillet 2014, date à laquelle le contrat a été rompu. Elle en conclut que n'est pas justifiée la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales des rémunérations versées à [J] [X] avant le 1er janvier 2014, puisqu'elle n'a été l'employeur de l'intéressé qu'à compter de cette date, et entre le 1er janvier 2014 et le 31 juillet 2014, [J] [X] relevant durant cette période de la législation anglaise de sécurité sociale.


L'Urssaf réplique que, s'agissant de [C] [R], le tribunal a constaté que l'intéressé avait signé un contrat de travail avec la société [14] [Localité 22] en date du 1er décembre 2008 pour un travail situé à [Localité 24]. Ainsi, l'intéressé travaillant et résidant effectivement en France, il a donc considéré que ses rémunérations devaient être réintégrées dans l'assiette des cotisations sociales. Une partie substantielle d'une activité salariée exercée dans un État membre signifie qu'une partie quantitativement importante de l'ensemble des activités du travailleur salarié ou non salarié y est exercée, sans qu'il s'agisse nécessairement de la majeure partie de ses activités. Pour déterminer si une partie substantielle des activités est exercée dans un état membre, il est tenu compte des critères indicatifs suivants dans le cas d'une activité salariée : le temps de travail et ou la rémunération. Dans le cadre d'une évaluation globale, la réunion de moins de 25% des critères précités indiquera qu'une partie substantielle des activités n'est pas exercée dans l'État membre concerné. Le principe comporte, néanmoins, plusieurs exceptions dont le régime du détachement. Dans le cadre de la sécurité sociale, on entend par détachement le fait de maintenir au régime de protection sociale du pays habituel d'emploi un travailleur qui va, durant un temps déterminé, exercer son activité professionnelle sur le territoire d'un autre pays. Le détachement constituant une exception au principe de territorialité, les dispositions le régissant doivent être interprétées strictement. La législation de sécurité sociale applicable au salarié détaché est donc celle de l'État membre du lieu où celui-ci exerce habituellement son activité salariée, soit la loi de l'État dans lequel est établi son employeur, loi du pays d'origine ou du pays d'envoi. La décision A2 du 12 juin 2009 de la Commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, interprétant l'article 12 du règlement n°883-2004, précise que l'application de ce dernier requiert l'existence d'un lien organique entre l'employeur qui a embauché le travailleur et celui-ci. Il appartient donc à l'employeur de prouver que la législation française n'est pas applicable au salarié, en fournissant à l'organisme chargé du recouvrement des cotisations de sécurité sociale le formulaire A1 prouvant l'assujettissement du salarié à un autre régime de protection sociale. Ainsi, à supposer que [C] [R] ait été détaché de la filiale suisse auprès de la société mère en France, les conditions de détachement justifiant le maintien de l'intéressé au régime suisse de sécurité sociale ne sont pas remplis. En effet, pour un détachement d'un salarié dans un des États membres de l'Union Européenne/Espace Économique Européen (UE/EEE) ou en Suisse d'une durée supérieure à 24 mois, il convient d'obtenir l'accord conjoint de l'organisme français compétent en matière de détachement : le CLEISS (Centre des Liaisons Européennes et Internationales de Sécurité Sociale) et de l'organisme compétent en matière de détachement de l'autre État. Or, cette procédure n'a pas été respectée.


S'agissant de [J] [X], l'Urssaf indique que le tribunal a justement constaté, après examen des différents contrats de travail et avenants qu'il ne travaillait pas effectivement pour la société de droit suisse [14] mais qu'il exerçait en réalité son activité en France pour le compte de la S.A. [15].


En l'espèce, s'agissant de [C] [R], il est constant qu'il a été embauché par la société de droit suisse [14] le 16 juin 2008 en qualité de « co-manager du desk Obligations d'État », puis le 1er décembre 2008 par la société de droit suisse [14] [Localité 22] pour un travail situé à [Localité 24]. En 2012, l'adresse personnelle de l'intéressé est à [Localité 21].


Il n'est pas fait état d'une activité ailleurs qu'à [Localité 24], de sorte que l'activité substantielle de l'intéressé est en France où il réside de façon habituelle.


Il s'ensuit qu'en application de la réglementation européenne déjà rappelée au sujet de MM. [D] et [G], les rémunérations versées à [C] [R] par la société [14] ont été réintégrées à bon droit dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale.


Le jugement sera confirmé de ce chef.


S'agissant de [J] [X], le contrat de travail signé le 18 mai 2008 avec la société [14] et l'avenant en date du 1er décembre 2008 prévoyaient que l'emploi serait exercé à [Localité 24] au siège du groupe [15]. Le lieu de travail est encore confirmé par l'avenant en date du 30 octobre 2012 qui indique en outre que l'adresse de [J] [X] est située à [Localité 21]. Si le contrat de travail en date du 16 décembre 2013 prévoyait un poste à [Localité 20], il indique toutefois une résidence de l'intéressé à [Localité 21]. Un nouveau contrat le 31 juillet 2014 situe à nouveau le lieu de travail à [Localité 24]. En outre, les constatations de l'inspecteur du recouvrement démontrent que l'intéressé n'a jamais cessé totalement d'exercer son activité à [Localité 24].


Une situation de détachement suppose que la procédure propre à cette situation soit suivie. La société a produit une attestation A1 pour la période du 1er décembre 2008 au 30 novembre 2013, au titre d'un détachement en France, lequel a pourtant pris fin le 31 décembre 2013 selon la S.A. [15]. Pendant cette période, [J] [X] travaillait à [Localité 24] et résidait à [Localité 21]. Néanmoins après le 30 novembre 2013, la situation de détachement n'est plus établie par la société. [J] [X] exerçait l'essentiel de son activité en France et y résidait toujours sans être couvert par une attestation A1. En revanche aucune attestation A1 n'a été produite pour la période du 1er janvier 2014 au 31 juillet 2014, où il était censé travailler à [Localité 20], de sorte que la réintégration des rémunérations dans l'assiette sociale après le 1er janvier 2014 est justifiée.


Le jugement sera confirmé sur ce chef.


IV- Sur le point de redressement n°14 relatif aux cotisations en cas de rupture forcée du contrat de travail et aux limites d'exonération


a) S'agissant de [W] [L]-[B]


La société [15] expose que l'intéressé a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 29 mai 2017. Elle lui a notifié son licenciement pour insuffisance professionnelle, par lettre du 11 juillet 2012. Afin de mettre fin au litige les opposants, les parties ont conclu une transaction en date du 12 septembre 2012 prévoyant notamment le versement d'une indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant de 32 048,09 euros net et d'une indemnité transactionnelle de 167 952 euros brut, dont la somme de 117 952 euros versée en septembre 2012 et la somme de 50 000 euros en janvier 2013. En application de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale🏛, les indemnités de rupture sont exonérées de CSG-CRDS dans la limite du montant de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, sans que le montant exonéré ne puisse être supérieur au montant exonéré de cotisations. En l'espèce, le montant exonéré de cotisations de sécurité sociale et de 72 744 euros l'indemnité de licenciement est de 32 048,09 euros. En conséquence, le montant assujetti à CSG-CRDS est donc de 200 000 € - 32 048,09 € = 16 7951,91 €, montant effectivement soumis à CSG-CRDS, comme le démontrent les bulletins de paie de septembre 2012 et janvier 2013. Sur le bulletin de septembre 2012, les sommes de 77 256 euros et 40 695,91 euros sont soumises à la CSG-CRDS.


L'Urssaf répond qu'après examen de ces pièces, et compte tenu des arguments avancés par la requérante, les inspecteurs du recouvrement ont procédé à un nouvel examen du dossier. Ainsi, concernant [W] [L]-[B], ils ont indiqué que l'assiette des contributions CSG-CRDS devait être ramenée à 27 212 euros. Ainsi, après un nouveau calcul, le redressement opéré au titre de la CSG-CRDS pour 2013 doit être ramené à 2 177 euros. Toutefois, en l'absence de production du bulletin de janvier 2013 justifiant que les 50 000 euros restants avaient bien été soumis à cotisations, le tribunal a confirmé le redressement opéré. Cependant devant la cour, la société produit le bulletin en cause, de sorte qu'elle s'en remet à la sagesse de la cour.


En l'espèce, la société ayant produit en pièce n°26 le bulletin de paie de janvier 2013 qui seul avait justifié le redressement contesté au motif qu'en l'absence de sa production la société ne rapportait pas la preuve que la somme de 50 000 euros avait bien été soumise à cotisations.


La production de ce bulletin de paie de janvier 2013 permettant de vérifier que le reliquat de l'indemnité transactionnelle avait bien été soumis à cotisations, le chef de redressement n°14 concernant [W] [L]-[B] sera annulé.


b) S'agissant de [H] [P] (appel incident)


La société [15] expose que l'intéressé a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 26 février 2007. Elle lui a notifié son licenciement pour motif économique par lettre du 24 mars 2009. Il a alors perçu une indemnité conventionnelle de licenciement de 15 687,50 euros. Contestant la procédure et le motif du licenciement, l'intéressé a saisi le Conseil des prud'hommes de Paris le 29 avril 2009. Par jugement du 11 avril 2011, ce tribunal a débouté l'intéressé et la société de leurs demandes respectives. [H] [P] a relevé appel de cette décision. Afin de mettre fin au litige les opposant, les parties ont conclu une transaction en date du 20 février 2013 prévoyant notamment le versement d'une indemnité transactionnelle de 190 000 euros bruts. L'indemnité transactionnelle bénéficie des conditions d'exonération en vigueur au moment de la rupture du contrat de travail et non, comme le soutient l'Urssaf, à la date de la signature de la transaction. En outre la solution retenue par l'Urssaf est contraire à la circulaire DSS n°2011-145 du 14 avril 2011 qui lui est pourtant opposable et à la circulaire ACOSS n°2013-019 du 28 mars 2013 qui confirme que les indemnités transactionnelles doivent être considérées comme une majoration de l'indemnité de rupture versée préalablement à la transaction et être soumises au régime social et fiscal de l'indemnité en cause. Aucun plafonnement des exonérations n'est applicable pour les ruptures intervenues en 2009. En l'espèce, la rupture du contrat de travail a eu lieu en mars 2009. Ainsi, même si la transaction a été signée en 2013, c'est la rémunération de l'année 2008 qui a été prise en considération pour calculer le plafond d'exonération des indemnités de rupture. [H] [P] ayant perçu une rémunération annuelle brute de 180 000 euros en 2008, le plafond d'exonération à cette date est égal à 205 848 euros, de sorte que la somme de 205 687,50 euros correspondant au cumul de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de l'indemnité transactionnelle est inférieure à ce plafond et n'a pas été soumise à cotisations de sécurité sociale. C'est donc à tort que l'Urssaf a opéré la rectification de l'assiette des cotisations sociales à ce titre.


L'Urssaf réplique que seules peuvent être exclues de l'assiette sociale les indemnités présentant le caractère des dommages et intérêts. L'Urssaf observe que [H] [P] a été licencié le 24 mars 2009 pour motif économique et a perçu une indemnité conventionnelle de licenciement de 15 687,50 euros ; qu'il a contesté le motif du licenciement et a saisi le Conseil des prud'hommes de Paris ; que par jugement du 11 avril 2011, cette juridiction a débouté [H] [P] et la société de leurs demandes ; qu'afin de mettre fin au litige les opposant, les parties ont signé une transaction le 20 février 2013 prévoyant notamment le versement d'une indemnité transactionnelle 190 000 euros brut ; que la société prétend que l'indemnité transactionnelle doit bénéficier des conditions d'exonération en vigueur au moment de la rupture du contrat de travail, soit 6 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, en mars 2009 et non à la date de la transaction le 20 février 2013, soit 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale ; que la société a estimé en conséquence que la somme de 205 687,50 euros correspondant au cumul de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de l'indemnité transactionnelle étant inférieure à ce plafond, elle n'avait pas à être soumise à cotisations sociales. L'Urssaf au contraire soutient que le fait générateur de l'obligation sociale est le versement de l'indemnité de sorte que, ayant été versée le 20 février 2013, il convient d'appliquer à l'indemnité en cause le texte en vigueur à cette date et que depuis le 21 décembre 2011 la loi limitait à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale la part des indemnités exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale. Ainsi l'indemnité transactionnelle accordée à [H] [P] étant supérieure à la limite d'exonération de 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, à savoir 72 744 euros, la réintégration opérée dans l'assiette des cotisations sociales pour ce salarié doit être intégralement maintenue.


En l'espèce, il est constant que [H] [P] a été licencié le 24 mars 2009 et a perçu une indemnité de licenciement de 15 687,50 euros. À la suite d'un litige ouvert par ce licenciement, une transaction prévoyant une indemnité de 190 000 euros brut a été conclue le 20 février 2013 entre [H] [P] et la société [15]. L'indemnité transactionnelle doit être considérée comme un complément d'indemnisation versée en majoration de l'indemnité de licenciement initiale versée préalablement à la transaction, de sorte que la transaction conclue le 20 février 2013 est soumise aux règles en vigueur le 24 mars 2009 (Circulaire DSS n°2011/145 du 14 avril 2011 ; circulaire ACOSS n°2013-019 du 28 mars 2013).


L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa version applicable ne prévoyait pas une limite à égale à 2 fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale mentionnée à l'article L. 241-3, mais une limite applicable de 6 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit la somme de 205 848 euros.


Il s'ensuit que l'indemnité totale versée à [H] [P] au titre du licenciement du 24 mars 2009 est d'un montant de 205 687,50 euros, c'est-à-dire une indemnité transactionnelle inférieure au plafond d'exonération. C'est donc à tort que l'Urssaf a procédé à la réintégration de cette indemnité dans l'assiette sociale.


Le jugement qui a annulé le chef de redressement n°14 s'agissant de [H] [P] sera donc confirmé.


V- Sur les demandes accessoires


Succombant essentiellement en ses demandes, la société sera condamnée aux dépens. Les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile des parties seront rejetées.



PAR CES MOTIFS


LA COUR,


DÉCLARE recevable l'appel interjeté par la S.A. [15] ;


CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a annulé partiellement le chef de redressement n°14 de la lettre d'observations du 5 juillet 2016 relatif aux indemnités de rupture versées à [W] [M] et à [H] [P] ;


Et statuant sur ce seul chef,


ANNULE le chef de redressement n°14 de la lettre d'observations du 5 juillet 2016 relatif aux indemnités de rupture versées à [W] [L]-[B] et à [H] [P] ;


REJETTE les demandes formées par la S.A. [15] et l'Urssaf d'Île-de-France sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;


CONDAMNE la S.A. [15] aux dépens.


La greffière La présidente

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