Jurisprudence : Cass. civ. 3, 16-03-2023, n° 22-11.429, FS-B, Cassation

Cass. civ. 3, 16-03-2023, n° 22-11.429, FS-B, Cassation

A80149HB

Référence

Cass. civ. 3, 16-03-2023, n° 22-11.429, FS-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/94205448-cass-civ-3-16032023-n-2211429-fsb-cassation
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Abstract


CIV. 3

SG


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 mars 2023


Cassation partielle


Mme TEILLER, président


Arrêt n° 187 FS-B

Pourvoi n° C 22-11.429


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023


La société Autoroute Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes (ESCOTA), société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-11.429 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre des expropriations), dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires de la copropriété AX [Cadastre 3] [Adresse 4], dont le siège est [Adresse 1], représenté par son syndic la société Proletazur, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ au commissaire du gouvernement de Toulon, domicilié [… …],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Autoroute Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes, et l'avis de Mme Aa, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Delbano, Mme Farrenq-Nési, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mme Djikpa, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 décembre 2021), une portion des parties communes de la copropriété [Adresse 4] a fait l'objet d'une procédure d'expropriation en urgence au profit de la société Autoroute Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes (la société expropriante).

2. Le juge de l'expropriation a fixé l'indemnité de dépossession revenant au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 4].


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société expropriante fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité pour dépréciation du surplus à une certaine somme, alors « que les indemnités
d'expropriation allouées doivent couvrir le seul préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que la détermination du montant de l'indemnité pour dépréciation du surplus ne doit pas excéder le préjudice réellement subi, constitué par la moins-value consécutive à l'expropriation partielle, subie par le surplus non exproprié ; qu'en indemnisant globalement la dépréciation de l'immeuble, comprenant les parties communes et les parties privatives là où elle devait la limiter aux seules parties communes dès


lors que l'expropriation portait uniquement sur des parties communes à l'ensemble des copropriétaires et n'était poursuivie qu'à l'encontre du syndicat des copropriétaires, seule partie à l'instance, la cour d'appel, qui a retenu une indemnisation supérieure à la valeur dépréciée du surplus non exproprié des parties communes, seules ici en litige, a violé les dispositions des articles L. 321-1 et L 321-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique🏛🏛. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 321-1 et L. 321-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique🏛🏛 :

5. Aux termes du premier de ces textes, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.
6. Selon le second, le juge prononce des indemnités distinctes en faveur des parties qui les demandent à des titres différents.

7. Pour allouer au syndicat des copropriétaires [Adresse 4] une indemnité de dépréciation du surplus, l'arrêt retient que la dévalorisation du surplus de la copropriété résulte de la disparition de près d'un tiers des emplacements de parking matérialisés, ce qui, en zone urbaine, est de nature à dissuader fortement les candidats acquéreurs et à diminuer la valeur marchande au mètre carré de la copropriété de sorte que cette dépréciation, évaluée à 20 %, doit s'appliquer au prix moyen de vente au mètre carré d'après des exemples de ventes de lots privatifs au sein de la copropriété.

8. En statuant ainsi, alors que le syndicat des copropriétaires ne peut représenter chaque copropriétaire pour la défense de ses droits sur son lot et ne peut donc se voir allouer une indemnité de dépréciation du surplus de l'ensemble de la copropriété, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe l'indemnité pour dépréciation du surplus à la somme de 326 152 euros et condamne la société Escota à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 4] la somme de 365 727,46 euros, en ce qu'elle comprend celle de 326 152 euros, l'arrêt rendu le 2 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;


Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la copropriété AX [Cadastre 3] [Adresse 4] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille vingt-trois.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Autoroute Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé l'indemnité pour dépréciation du surplus revenant au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 4] à la somme de 326 152 euros et D'AVOIR condamné la société Escota à lui payer la somme totale de 365 727,46 euros au titre de l'indemnité de dépossession ;

1°) ALORS QUE les indemnités d'expropriation allouées doivent couvrir le seul préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que la détermination du montant de l'indemnité pour dépréciation du surplus ne doit pas excéder le préjudice réellement subi, constitué par la moins-value consécutive à l'expropriation partielle, subie par le surplus non exproprié ; qu'en indemnisant globalement la dépréciation de l'immeuble, comprenant les parties communes et les parties privatives là où elle devait la limiter aux seules parties communes dès lors que l'expropriation portait uniquement sur des parties communes à l'ensemble des copropriétaires et n'était poursuivie qu'à l'encontre du syndicat des copropriétaires, seule partie à l'instance, la cour d'appel, qui a retenu une indemnisation supérieure à la valeur dépréciée du surplus non exproprié des parties communes, seules ici en litige, a violé les dispositions des articles L. 321-1 et L 321-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique🏛🏛 ;

2°) ALORS QUE, en cas de litige, les indemnités d'expropriation allouées doivent couvrir le seul préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation à l'exproprié, partie au litige ; que la détermination du montant de l'indemnité pour dépréciation du surplus ne doit pas excéder le préjudice réellement subi, constitué par la moins-value consécutive à l'expropriation partielle, subie par le surplus non exproprié ; que la société Escota faisait valoir qu'ici, l'éventuelle indemnisation de « dépréciation du surplus » ne pouvait être calculée que sur les parties communes et non sur l'ensemble de la copropriété, les parties privatives n'étant pas concernées dès lors que les propriétaires des lots n'étaient pas intervenus, individuellement, à la procédure ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l'indemnisation retenue par le premier juge n'était pas supérieure à la valeur dépréciée du surplus non exproprié des parties communes et ainsi au préjudice subi, dès lors qu'il avait indemnisé globalement la dépréciation de l'immeuble, comprenant les parties communes et les parties privatives cependant que le syndicat de copropriétaires, seule partie au litige, ne pouvait obtenir que l'indemnisation d'une éventuelle dépréciation calculée uniquement sur les parties communes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 321-1 et L 321-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique🏛🏛 ;

3°) ALORS QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation ; que s'il appartient au juge de l'expropriation de déterminer le montant de l'indemnité principale de dépossession et des différentes indemnités accessoires dont l'objet est de couvrir l'intégralité du préjudice directement lié à l'expropriation, il ne lui appartient pas en revanche de prendre en considération le préjudice afférent à l'implantation de l'ouvrage public pour la réalisation duquel a été engagée la procédure d'expropriation, ce dommage relevant de la juridiction administrative ; que la société Escota faisait valoir que les nuisances sonores et visuelles pris en compte par l'expert pour le calcul de l'indemnité « pour dépréciation du surplus » résultaient de l'implantation de l'ouvrage public et relevaient de la compétence du juge administratif (mémoire en réplique n°1p.29) ; qu'en se bornant, pour fixer l'indemnité de dépréciation du surplus à la somme de 326.152 euros, à confirmer le jugement en ce qu'il avait fixé cette indemnité sur la base d'une dépréciation de 20 % et à appliquer ce quantum par rapport au prix moyen de vente au m2 qui avait été constaté par le commissaire du gouvernement d'après des exemples précis au sein de la copropriété, à savoir 1.383 euros le m2 en année moyenne 2017 et non 1.584 euros, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les nuisances sonores et visuelles évoquées par l'expert comme dévaluant globalement le bien n'étaient pas directement liées à l'ouvrage public et ne relevaient pas ainsi du juge administratif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique🏛 et la loi des 16 et 24 août 1790.

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