Jurisprudence : CE 8/7 SSR, 04-11-1983, n° 34516

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 34516

Société anonyme xxxxx

Lecture du 04 Novembre 1983

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 8ème Sous-Section


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 mai 1981, présentée pour la société xxxxx, société anonyme, dont le siège social est xxxxx et tendant à ce que le Conseil d'Etat:

1°) annule le jugement du 12 mars 1981, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, au titre des années 1973 et 1974, dans les rôles de la ville de Paris, ensemble la contribution exceptionnelle pour 1974, ainsi que la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie, au titre des années 1973 et 1974, par avis de mise en recouvrement du 4 février 1976;

2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée;


Vu le code général des impôts;


Vu le code des tribunaux administratifs;


Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;


Vu la loi du 30 décembre 1977.

Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats des années 1973 et 1974 de la société xxxxx dont le siège est en France, le montant des intérêts versés par celle-ci à la société suisse "xxxxx", dont elle est la filiale, en rémunération des avances que celle-ci lui a consenties, sur une durée de huit semestres, pour le paiement de matériel informatique qu'elle lui vendait et que la société requérante commercialisait en France sous forme de location à des clients, à l'exclusion, toutefois, du montant des intérêts afférents au premier semestre d'avances, que le service a regardés comme des facilités commerciales normales; que l'administration soutient que les intérêts ainsi réintégrés n'étaient pas déductibles des résultats de la société xxxxx, d'une part, dans la mesure où le montant des avances excédait le montant du capital social, contrairement aux dispositions de l'article 212 du code général des impôts, et, d'autre part, à titre subsidiaire, dans la mesure où la société requérante aurait, en rémunérant les avances dont il s'agit, transféré indirectement, au sens de l'article 57 du code général des impôts, des bénéfices à la société suisse" xxxxx"; que le contribuable demande la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie, à la suite de ce redressement, au titre des années 1973 et 1974, du complément de majoration exceptionnelle qui lui a été assigné au titre de l'année 1974, ainsi que de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1973 et 1974;


Sur l'application de l'article 212 du code général des impôts:

Considérant qu'aux termes de l'article 212 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition: "Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues à l'article 39-1-3°. Toutefois: 1° La déduction n'est admise, en ce qui concerne les associés ou actionnaires possédant, en droit ou en fait, la direction de l'entreprise, que dans la mesure où ces sommes n'excèdent pas, pour l'ensemble desdits associés ou actionnaires, le montant du capital social"; qu'il résulte de ces dispositions que, pour qu'un associé, personne morale, soit regardé comme le dirigeant d'une société filiale, au sens des dispositions précitées de l'article 212 du code, il faut qu'il soit représenté, au sein de cette société, par une personne physique qui -tout en étant soit le dirigeant de droit de la filiale, soit son dirigeant de fait dans la mesure où il participe étroitement à la direction même de la société et où il exerce le contrôle effectif et constant des activités de l'entreprise- apparaisse comme le simple mandataire de l'associé personne morale;

Considérant, d'une part, que, pour soutenir que la société française doit être regardée comme placée sous la direction de fait de la société suisse, l'administration se fonde sur la dépendance financière de la première vis-à-vis de la seconde, laquelle dépendance mettrait la société suisse "à même" d'assurer la direction de la société française; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, cette situation n'est cependant pas, en elle-même, de nature à justifier l'application des dispositions précitées de l'article 212 du code;

Considérant, d'autre part, que, si l'administration invoque, à l'appui de sa position, la circonstance que l'un des quatre membres du conseil d'administration de la société requérante était le précédent directeur général de la société suisse "xxxxx", elle n'apporte aucun élément precis établissant que cet administrateur, dont il n'est pas contesté qu'il avait été désigné à titre personnel antérieurement à la création de la société suisse, eût exercé, au cours des années d'imposition en litige, au sein de la société française, d'autres activités que celles résultant des pouvoirs généraux de décision et de contrôle reconnus par la loi aux membres du conseil d'administration d'une société anonyme, lesquels pouvoirs ne peuvent être regardés comme un pouvoir de décision au sens des dispositions précitées de l'article 212 du code;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à soutenir que le plafond de déductibilité des intérêts prévu à l'article 212 du code ne lui était pas applicable;


Sur l'application de l'article 57 du code général des impôts:

Considérant qu'aux termes de l'article 57 du code général des impôts, applicable aux bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés en application de l'article 209 du même code: "Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dù par les entreprises qui sont sous la dépendance... d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières par voie de majoration ou de diminution du prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités";

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les avances dont s'agit aient été recherchées par la société requérante dans un intérêt autre que celui de l'entreprise, dès lors que le mode de commercialisation choisi, fondé sur la location à des clients du matériel acquis de la société suisse, et le plus couramment utilise dans le secteur informatique, ne permettait pas à la sociéte française, en l'état de ses fonds propres, de financer ses achats sans recourir au crédit; qu'il ne résulte pas davantage de l'intruction que les intérêts versés par la société requérante à la société suisse, pour rémunérer les avances que celle-ci lui consentait, aient revêtu un caractère exagéré, dès lors qu'il n'est pas contesté que les taux fixés étaient inférieurs à ceux qu'auraient exigé les banques ou les établissements financiers pour l'attribution de crédits de même durée: que, par suite, l'administration n'est pas fondée à soutenir que, sous couvert d'un système d'avances rémunérées consenties par la société suisse et dispensant ainsi la société française d'une augmentation de capital, cette dernière aurait opéré de manière indirecte un transfert de bénéfices à la société suisse;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société xxxxx est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées.

DECIDE

Article 1er: Le jugement, en date du 12 mars 1981, du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2: Il est accordé à la société anonyme décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1973 et 1974, de la cotisation supplémentaire de contribution exceptionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1974, ainsi que de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1973 et 1974, par avis de mise en recouvrement du 4 février 1976.

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

Lancer la recherche par visa

Domaine juridique - CONTRIBUTIONS ET TAXES

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.