Jurisprudence : CA Montpellier, 02-02-2023, n° 20/01252, Confirmation

CA Montpellier, 02-02-2023, n° 20/01252, Confirmation

A96369BI

Référence

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à


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER


4e chambre civile


ARRET DU 02 FEVRIER 2023


Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/01252 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OREX


Décision déférée à la Cour :

Jugement du 05 FEVRIER 2020

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 18/03243



APPELANTE :


S.A.S. Dauphine Isolation Projection

(RCS 421 346 891) agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié au siège social,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour le CABINET BALESTAS


INTIMEE :


S.C.I. de Layrargues

Prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Virginie ARCELLA-LUST de la SCP LES AVOCATS DU THELEME, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant



COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile🏛🏛, l'affaire a été débattue le 06 DECEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre et Madame Marianne FEBVRE, Conseillère, chargée du rapport.


Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

M. Thibault GRAFFIN, Conseiller, magistrat de permanence


Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT


ARRET :


- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛 ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.


*

* *



FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :


La SCI de Layrargues (la SCI ci-après) a confié à la société Dauphiné Isolation Projection (la société DIP ci-après) une mission portant sur la réalisation de travaux de mise en conformité d'un bâtiment situé à Baillargues par la projection de fibres minérales (flocage de la structure métallique) destinées à assurer la sécurité de cette structure.


Dans ce cadre, le 5 septembre 2016. la SCI a accepté un devis d'un montant de 16.800 € et réglé un acompte de 5.000 €, si bien que le 20 septembre suivant, la société DIP a établi une facture correspondant au devis mentionnant un solde de 11.800 €.


Par un courrier du 24 novembre 2016, la SCI a informé l'entreprise prestatataire que le flocage d'une poutre à l'étage du bâtiment était défectueux et elle a sollicité la reprise de ces travaux. Suite à de nouvelles chutes de fibres, elle a fait établir un constat d'huissier le 15 décembre 2016.


Cependant, par des courriers datés des 12 décembre 2016 et 3 janvier 2017, la société DIP a contesté être à l'origine des désordres constatés et elle a mis en demeure la SCI de s'acquitter de la somme restant due.


Saisi par la SCI le 6 mars 2017 et statuant par une ordonnance en date du 20 avril 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Montpellier a ordonné une expertise confiée à MonsAaeur [B].


C'est dans ce contexte - et sans attendre l'ordonnance de désignation d'expert - que, par un acte du 29 mars 2017, la société Dauphiné Isolation Projection a fait assigner la SCI en paiement du solde de sa facture.


Vu le jugement en date du 5 février 2020 expressément assorti de l'exécution provisoire, par lequel - après avoir débouté la société DIP de ses demandes -,  le tribunal judiciaire de Montpellier l'a condamnée à payer à la SCI la somme de 71.014 € en réparation du préjudice subi outre une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,


Vu la déclaration d'appel de la société DIP en date du 28 février 2020,


Vu l'ordonnance sur incident en date du 5 janvier 2022 par laquelle le conseiller de la mise en état a dit n'y avoir lieu à radiation de l'appel, après avoir constaté que la partie appelante avait procédé au règlement d'une somme de 76.514 € et que la partie intimée ne maintenait plus sa demande de radiation,



Vu les dernières conclusions de la société DIP appelante en date du16 mai 2022, par lesquelles il est demandé à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, en substance, de :

- débouter la SCI de ses demandes au titre des travaux de reprise et du préjudice pour perte de jouissance,

- condamner cette dernière au paiement de la somme de 11.800 € à réception de laquelle elle s'engage à reprendre les désordres, avec intérêts au taux de trois fois celui du taux légal à compter de l'échéance de la facture impayée, ainsi que la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛, outre les entiers dépens de première instance et d'appel,


Vu les dernières conclusions prises le 20 mai 2022 pour le compte de la SCI, aux fins de confirmation du jugement entrepris, de rejet des demandes de l'appelante et de condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 5.000 € supplémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens,



Vu l'ordonnance de clôture du 15 novembre 2022,


Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère au jugement ainsi qu'aux conclusions écrites susvisées.



MOTIFS


Pour débouter la société DIP de sa demande de paiement du solde de la facture et la condamner au paiement de dommages et intérêts à l'égard de la SCI, le tribunal a estimé, en lecture du rapport d'expertise du 7 mai 2018, que le flocage de la structure n'avait pas été réalisé d'une manière conforme aux règles de l'art et qu'en l'absence de réception des travaux et face à l'impossibilité d'appliquer les articles 1792 et 1792-6 du code civil🏛🏛, l'entreprise prestataire avait engagé sa responsabilité contractuelle de droit commun sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil🏛 encore applicable à l'époque de la réalisation des travaux.


Au soutien de son appel, la société DIP critique le rapport d'expertise, fait état de travaux réalisés par la SCI (démontage des faux plafonds notamment) qui auraient contribué à la réalisation du dommage voire en auraient été la cause et objecte - en substance - qu'elle avait proposé d'effectuer des travaux de reprise dans le délai de la garantie de parfait achèvement ce que la cliente avait refusé, si bien que cette dernière était à l'origine de son propre préjudice et ne pouvait invoquer sa propre turpitude pour demander à être indemnisée. S'agissant de l'exception d'inexécution, elle fait valoir qu'il n'est pas démontré que l'immeuble était impropre à l'usage auquel il était destiné, que l'expert ne désignait pas les normes applicables, et n'avait pas répondu à la mission confiée faute d'indiquer si les désordres provenaient d'une non-conformité aux documents contractuels, aux règles de l'art ou d'une exécution défectueuse. L'appelante fait également valoir qu'il n'est pas justifié que les pompiers avaient refusé de délivrer un certificat de conformité des locaux.


La cour observe cependant que la SCI fait à juste titre valoir que la société DIP reprend exactement la même argumentation que celle développée en première instance et à laquelle le tribunal a déjà répondu après avoir apprécié les constatations faites par l'expert judiciaire dans son rapport.


La SCI ne peut par ailleurs se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article 1792-6 du code civil🏛 dont il n'y avait pas lieu de faire application faute de preuve d'une réception - fût-ce tacite - des travaux réalisés. C'est donc à bon droit que le tribunal a écarté la garantie de parfait achèvement pour se fonder sur les dispositions de l'ancien article 1147 du code civil🏛 applicable à l'époque de la réalisation des travaux.


Or, dans le cadre des opérations d'expertise, l'expert a indiqué que '(son) analyse sur site et selon les documents (...) remis par les parties, (l'amenait) à dire que la société (DIP) n'avait pas fait de reconnaissance de support, ni de tests de résistance sur les fermettes métalliques touchées par le sinistre' et que 'la société (avait appliqué) le produit de flocage sans vérifier s'il y avait compatibilité entre le primaire et le support. Les désordres (étaient) bien apparents car le flocage n'a(vait) pas adhéré sur le support et a(vait) chu sur la quasi-totalité du sol' .


Son rapport précise également en page 10 que « la cause et l'origine de ces dommages sont dus à une mauvaise reconnaissance du support et de la mise en œuvre par la société (DIP), ce qui est un manquement aux règles de l'art, et une exécution défectueuse ».


Il s'en déduit que l'expert a bien rempli la mission qui lui était confiée, et la société DIP n'est pas fondée à critiquer les conclusions de son rapport, alors qu'il y est noté que son représentant avait déclaré n'avoir procédé qu'à une reconnaissance visuelle, sans réalisation du moindre test d'adhérence, et que celui-ci avait fourni des fiches techniques relatives au primaire d'accrochage démontrant que ce produit était inadapté puisque devant être mis en oeuvre sur un support métallique sain et propre, ce qui n'était pas le cas de la structure. Il résulte en effet des constatations effectuées par l'expert que la structure comportait déjà des peintures de sorte que sans test préalable, 'aucun élément ne pouvait garantir l'adhérence du flocage'.


Sur le point de savoir si ces désordres rendaient l'immeuble impropre à sa destination, il ressort encore du rapport d'expertise que - contrairement à ce qu'affirme l'appelant - la chute des fibres projetées ne concernait pas qu'une seule poutre, celle du fond, mais affectait bien la totalité de l'étage concerné. En effet, en page 10 de son rapport, l'expert indique que lors de sa première visite le 12 juillet 2017, il avait 'constaté que sur 2 fermettes constituant la charpente métallique de la toiture du bâtiment de la SCI (...) le flocage n'avait pas adhéré et s'était retrouvé au sol' et que 'sur deux autres fermettes des zones de non-adhérence sont également constatées'. Il renvoie expressément aux photos, lesquelles établissent que le désordre avait affecté la charpente en de multiples endroits et qu'il y avait du flocage 'sur la quasi totalité du sol' de l'étage concerné comme indiqué dans le rapport.


Les photographies prises le 15 décembre 2016 par l'huissier de justice mandaté par la SCI sont également explicites sur l'ampleur des chutes du flocage, en de multiples points de la charpente.


Quant aux allégations de l'appelant sur le fait que les désordres avaient pu être causés par d'autres corps de métiers intervenant dans le cadre de travaux d'aménagement de l'étage, notamment pour l'électricité, le placo, la plomberie ou la peinture, l'examen des photographies ainsi que les constatations faites par l'huissier de justice mettent en évidence que le hall en question - d'une superficie d'environ 500 m2 et auquel l'on accédait après avoir traversé des bureaux - n'avait pas fait l'objet du moindre travaux d'aménagement. Il est par ailleurs établi que la chute du flocage avait été immédiate puisque, dès le 24 novembre 2016, la SCI avait écrit ceci à la société DIP : 'Malgré nos appels, nous vous informons que nous attendons toujours votre intervention concernant le flocage sur une poutre à l'étage de notre bâtiment qui tombe après deux de vos interventions'. Le 15 décembre 2016, l'huissier notait des chutes du flocage non seulement sur la poutre située au niveau du mur de séparation avec un autre lot se trouvant côté nord (chute sur 10 mètres de long mais 'il semble évident que l'ensemble du flocage effectué sur cette poutre séparative (...) va s'effondrer dans son intégralité'), et que le 'même phénomène d'effondrement du flocage apparai(ssait) au niveau de la 3ème poutre en partant côté sud', de part et d'autre de cette poutre, ainsi qu'au niveau de la poutre 'sur la façade côté sud à l'extrémité côté sud-est'.

Il s'infère de ce qui précède que la société DIP qui était chargée de réaliser ce flocage anti-incendie a manqué à ses obligations contractuelles et qu'en l'état, la SCI pouvait se prévaloir de l'exception d'inexécution pour ne pas payer le solde de la facture et réclamer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.


Sur ce point, la société appelante réitère (comme déjà soutenu en première instance) que la SCI ne peut se prévaloir d'un préjudice de jouissance lié à l'impossibilité de louer les locaux, alors qu'elle avait refusé la reprise des travaux qui lui était proposée tandis qu'elle n'établit aucun préjudice certain ni un dangerosité ou non conformité, et que les promesses de location seraient des faux grossiers et alors enfin que l'absence de locataires était sans lien avec les désordres invoqués mais liée à la faiblesse du marché.


Outre le fait que la société DIP ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 1792-6 du code civil🏛 ce qui rend sans objet le moyen tiré du refus de la proposition de reprise des travaux, la cour observe que l'appelante ne justifie toujours pas d'une plainte ou d'une procédure pénale démontrant que les promesses de contrat de location versés aux débats par la SCI pouvaient être qualifiées de faux et n'explique pas davantage en quoi ce caractère serait grossier, alors qu'il est au contraire évident que les locaux litigieux étaient destinés à être commercialisés par la SCI qui avait pris la précaution de trouver des locataires intéressés par les locaux concernés pendant la phase de travaux. C'est donc à bon droit que le premier juge a pris en considération les loyers perdus (à concurrence de 162.800 €) et la demande de la SCI - qualifiée de modérée à cet égard - étant limitée à la somme, non actualisée, de 70.400 €. La prise en considération des loyers perdus du fait qu'il n'avait pu être donné une suite favorables aux promesses en question rend inopérant l'argument pris de la faible attractivité des locaux en raison de facteurs actuels, non contemporains de la faute contractuelle considérée.


S'agissant de la contestation de l'évaluation des travaux nécessaires à la reprise des locaux, la société DIP ne peut reprocher à l'expert d'avoir pris en considération le devis qu'il a lui-même sollicité auprès de la société MBI comme proposé aux parties, et ce pour remplir sa mission, ce devis précisant les travaux nécessaires à la reprise des désordres et en évaluant le coût à la somme de 12.414 € TTC.


Enfin, la société DIP qui a été chargée de procéder au flocage de la charpente des locaux appartenant à la SCI ne saurait se réfugier derrière l'absence de preuve de la non conformité de ces locaux aux normes en matière d'incendie alors que - précisément - le flocage qui lui était demandé d'effectué avait pour objet de préserver le bâtiment contre le risque incendie.


Par suite, le jugement qui l'a condamnée à payer à la SCI la somme de 71.014 € en réparation du préjudice subi outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛, mérite confirmation.


Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile🏛, la société DIP supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à la SCI une indemnité au titre des frais par elle exposés dans le cadre de la présente procédure en cause d'appel.



PAR CES MOTIFS


Statuant par arrêt contradictoire, et mis à la disposition des parties au greffe,


Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;


Y ajoutant,


Condamne la société DIP à payer à la SCI de Layrargues la somme de 3.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


Condamne la société DIP aux dépens d'appel.


LE GREFFIER LE PRESIDENT

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