CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
Cette décision sera publiée au Recueil LEBON
N° 206976
Mme Marie-Louise GOURSOLAS et autres
M. Sauron, Rapporteur
M. Bachelier, Commissaire du Gouvernement
Séance du 13 octobre 2000
Lecture du 17 novembre 2000
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 avril et 20 août 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme MarieLouise GOURSOLAS, M. Pierre-André GOURSOLAS, Mme Abigail GOURSOLAS et Mme Nathalie BOGREN, pris en qualité d'héritiers de M. Alain Goursolas, demeurant respectivement Chemin de la Vallée Barré à Glos (14100), 1, rue d'Hermanville à Caen (14000), 72, rue Anatole France au Havre (76600) et 93, rue de la côte à Nancy (54000) ; Mme GOURSOLAS et autres demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 25 février 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé, à la demande de la SA Atos, le jugement du 14 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 2 septembre 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle annulant une décision de l'inspecteur du travail et l'autorisant à licencier pour motif économique M. Alain Goursolas, salarié protégé ;
2°) de condamner la société Atos à payer aux requérants la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme Marie-Louise GOURSOLAS et autres et de Me Luc-Thaler, avocat de la société Atos,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les héritiers de M. Goursolas, conseiller prud'hommal et directeur des services opérationnels de la SA Atos qui a pour activité la fabrication de composants mécaniques pour l'électronique, se pourvoient en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, sur requête de la société, a annulé le jugement du 14 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé la décision en date du 2 novembre 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle annulant une décision de l'inspecteur du travail et l'autorisant à licencier pour motif économique M. Alain Goursolas, salarié protégé ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 514-2 et L. 412-18 du code du travail le licenciement des salariés légalement investis des fonctions de conseiller prud'homal, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail, que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant que si, pour apprécier les possibilités de reclassement offertes au salarié, l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique par une société appartenant à un groupe, ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de la société demanderesse, elle n'est tenue de faire porter son examen que sur les entreprises du groupe dont les activités ou l'organisation offrent à l'intéressé la possibilité d'exercer des fonctions comparables ; que, par suite, eu égard aux fonctions de directeur des opérations de production de composants mécaniques pour l'électronique exercé par M. Alain Goursolas, la cour, en jugeant que le ministre n'était pas tenu de vérifier l'existence d'une possibilité de reclassement de M. Alain Goursolas parmi toutes les sociétés du groupe Paribas, quel que fût leur objet, n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ; qu'il suit de là que les consorts GOURSOLAS ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions des consorts GOURSOLAS tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la SA Atos qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer aux consorts GOURSOLAS la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux ton compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête des consorts GOURSOLAS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Marie-Louise GOURSOLAS, à M. Pierre-André GOURSOLAS, à Mme Abigaïl GOURSOLAS, à Mme Nathalie BOGREN, à la SA Atos et au ministre de l'emploi et de la solidarité.