Jurisprudence : CE 9/8 SSR, 05-07-1996, n° 150398

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 150398

SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL

Lecture du 05 Juillet 1996

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 9ème et 8ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 9ème sous-section, de la Section du Contentieux,

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juillet 1993 et 21 octobre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL, dont le siège social est chez M. Borganetti, Chemin du Laussy à Gières (38610); la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 13 mai 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 21 juin 1991 du tribunal administratif de Grenoble, rejetant sa demande de condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 18 000 000 F, augmentée des intérêts légaux, en réparation du préjudice commercial et financier qu'elle a subi, du fait d'une imposition à la taxe sur la valeur ajoutée et du retard mis par l'administration à la dégrever des pénalités pour mauvaise foi dont cette imposition avait été assortie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 modifiée par la loi n° 95-125 du8 février 1995 ;

Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Boulard, Conseiller d'Etat, - les observations de Me Choucroy, avocat de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL, - les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL, qui avait acquis, en 1976, la propriété d'un groupe d'immeubles en cours de construction à Saint-Egrève (Isère) en vue de sa division par fractions destinées à être attribuées à ses associés, a demandé et obtenu, en 1979, le remboursement de la TVA ayant grevé le prix de cette transaction ; qu'ayant relevé, lors d'une vérification de la comptabilité de la société, que celle-ci s'était indûment prévalue d'une activité de "vente d'appartements" pour bénéficier d'un tel remboursement, l'administration l'a, par avis de mise en recouvrement du 10 juin 1981, astreinte à restituer la somme de 3 442 176 F qui lui avait été remboursée et a majoré ce rappel de taxe d'une amende fiscale de 100 % ; que, par deux décisions des 11 avril et 28 juin 1984, prises en réponse à la réclamation formée, le 28 décembre 1982, par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL, l'administration a maintenu à la charge de cette dernière les droits en principal qui lui avait été assignés, mais a substitué à l'amende fiscale de 100 % l'indemnité de retard prévue par les dispositions, alors applicables, de l'article 1727 du code général des impôts et prononcé un dégrèvement de 3 304 489 F ; qu'estimant que l'administration fiscale l'avait obligée à tort à restituer la somme de 3 442 176 F, et mis un retard excessif à la dégrever de l'amende fiscale de 100 %, la SOCIETECIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL, selon laquelle ces agissements ont été la cause des difficultés financières en raison desquelles l'un de ses créanciers a fait vendre, le 20 mars 1984, par voie d'adjudication judiciaire, le groupe d'immeubles qu'elle avait acquis en 1976, a demandé au ministre de l'économie et des finances de lui allouer une indemnité d'environ 18 000 000 F correspondant au préjudice ayant résulté pour elle de la cession à perte de ce bien ; que n'ayant pas obtenu satisfaction, la société a porté le litige devant le tribunal administratif de Grenoble, puis devant la cour administrative d'appel de Lyon, qui ont successivement rejeté ses prétentions ; Considérant, en premier lieu, que, pour juger que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL n'était pas recevable à mettre en cause la responsabilité de l'Etat du chef de préjudice qu'elle impute au rappel de droits en principal mis à sa charge le 10 juin 1981, la cour administrative d'appel de Lyon a retenu que la société n'avait pas, à la suite du rejet, sur ce point, de sa réclamation du 28 décembre 1982, saisi le tribunal administratif dans les conditions prévues par l'article R.199-1 du livre des procédures fiscales ; qu'en statuant ainsi, alors que l'action engagée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL tend, non à l'octroi d'une indemnité équivalant à la décharge, non obtenue, des droits en principal qu'elle a dû acquitter, mais à la réparation du préjudice distinct, de caractère commercial et financier, dont la consistance et l'origine alléguées ont été invoquées plus haut, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que la société est, par suite, fondée à demander l'annulation, sur ce point, de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de règler, sur le même point, l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, ni à la date à laquelle elle a obtenu le remboursement de taxe qu'elle avait sollicité, ni à celle de la mise en recouvrement des droits en principal dont elle a été constituée débitrice, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL ne s'était livrée à des opérations la rendant passible de TVA et n'était donc en droit d'obtenir un quelconque remboursement de taxe ; qu'en l'astreignant à restituer la somme de 3 442 176 F qu'elle lui avait, par erreur, remboursée, l'administration fiscale n'a, dès lors, aucunement commis la faute lourde invoquée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL à l'appui de sa demande ; Considérant, en second lieu, qu'en jugeant que, ni l'erreur de droit ayant consisté, de la part de l'administration, à majorer initialement le rappel des droits en principal réclamés à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL de l'amende fiscale prévue par les dispositions, alors en vigueur, des articles 1729 et 1731 du code général des impôts, qui n'avait d'ailleurs pas été recouvrée à la date du 28 juin 1984 à laquelle elle a fait l'objet d'un dégrèvement, ni le délai mis par le service à faire droit, sur ce point, à la réclamation de la société du 28 décembre 1982, n'étaient révélateurs de l'existence d'agissements constitutifs d'une faute lourde, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas donné aux faits soumis à son examen une inexacte qualification juridique ;

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt n° 91LY00932 de la cour administrative d'appel de Lyon du 13 mai 1993 est annulé en tant qu'il rejette, comme irrecevables, les conclusions de la requête de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL présentées par celle-ci du chef du préjudice trouvant, d'après elle, son origine dans l'obligation qui lui a été faite, par avis de mise en recouvrement du 10 juin 1981, d'acquitter des droits en principal de TVA de même montant que la somme de 3 442 176 F qui lui avait été remboursée.

Article 2 : Les conclusions mentionnées à l'article 1er ci-dessus de la requête présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL devant la cour administrative d'appel de Lyon sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi en cassation de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE SAINT-MICHEL et au ministre de l'économie et des finances.

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