Instr. du 07-11-2000, BOI 4 C-4-00

Instr. du 07-11-2000, BOI 4 C-4-00

Lecture: 8 min

X0353AAC

BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS

DIRECTION GÉNÉRALE DES IMPÔTS

4 C-4-00

N° 205 du 14 NOVEMBRE 2000

4 F.E. / 23

INSTRUCTION DU 07 NOVEMBRE 2000

INSTRUCTION PORTANT COMMENTAIRES DE L'ARTICLE 39-2 BIS DU CGI

NOR : ECO L 00 00164 J

[CF 3]

RESUME

La législation française permet aux exportateurs de déduire de leurs résultats imposables les commissions et autres frais commerciaux, sous réserve qu'ils remplissent les. conditions générales énoncées par l'article 39-1 du CGI et les critères définis par la jurisprudence. II en est ainsi, en particulier, lorsqu'ils sont versés dans l'intérêt de l'entreprise. et régulièrement déclarés. La réalité du versement doit être démontrée et la charge ne doit pas être excessive

L'article 39-2 bis du code général des impôts, introduit par l'article 32 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1997 et modifié par la loi n° 2000-595 du 30 juin 2000 modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption, supprime la possibilité pour les entreprises de déduire de leurs résultats imposables toutes les sommes versées ou tous les avantages octroyés directement ou indirectement à un agent public en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu dans le cadre de transactions commerciales internationales.

Ces dispositions s'appliquent aux sommes versées ou aux avantages octroyés à compter du 29 septembre 2000, date de l'entrée en vigueur sur le territoire de la République de la Convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales signée le 17 décembre 1997 (décret n° 2000-948 du 28 septembre 2000 portant publication de la Convention - J.O. n°226 du 29 septembre 2000).

Parallèlement, sera désormais sanctionné pénalement le fait pour une personne physique ou morale de proposer sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour obtenir d'un agent public étranger au sens de la Convention OCDE qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage inclus dans le commerce international.

SOMMAIRE ANALYTIQUE


CHAPITRE PREMIER : SOMMES OU AVANTAGES ENTRANT DANS LE CHAMP D'APPLICATION DE L'ARTICLE 39-2 BIS
CHAPITRE DEUXIEME : CHAMP D'APPLICATION DE L'INTERDICTION
SECTION 1 : NOTION D'AGENT PUBLIC AU SENS DE LA CONVENTION OCDE
SECTION 2 : INTERVENTION DE L'AGENT PUBLIC
SECTION 3 : FAITS INCRIMINES PENALEMENT
CHAPITRE TROISIEME : CONSEQUENCES DE L'INTERDICTION
SECTION 1 : ETABLISSEMENT DES FAITS DE CORRUPTION
SECTION 2 : INDEPENDANCE DES PROCEDURES PENALES ET FISCALES
CHAPITRE QUATRIEME : SANCTIONS

CHAPITRE PREMIER
SOMMES OU AVANTAGES ENTRANT DANS LE CHAMP D'APPLICATION DE
L'ARTICLE 39-2 BIS

L'article 39-2 bis du CGI s'applique à tous les versements ou octroi d'avantages, directement ou par des intermédiaires, au profit d'un agent public étranger intervenus à compter de l'entrée en vigueur sur le territoire de la République de la Convention OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, qu'ils se rapportent à des contrats (au sens de marché à l'exportation) conclus antérieurement ou postérieurement à l'entrée en vigueur de la Convention.

Dès lors, les sommes versées à ce titre à compter du 29 septembre 2000 ne sont plus admises en déduction des bénéfices imposables.

CHAPITRE DEUXIEME
CHAMP D'APPLICATION DE L'INTERDICTION

L'interdiction énoncée à l'article 39-2 bis du CGI s'applique à tous les faits de corruption à l'encontre d'un agent public au sens du 4 de l'article 1er de la convention OCDE ou d'un tiers pour que cet agent agisse ou s'abstienne d'agir dans l'exécution de fonctions officielles.

SECTION 1 :
NOTION D'AGENT PUBLIC AU SENS DE LA CONVENTION OCDE

La définition de l'agent public au sens de la convention OCDE repose essentiellement sur un critère fonctionnel. Est considéré comme agent public étranger « toute personne qui détient un mandat législatif, administratif ou judiciaire dans un pays étranger, qu'elle ait été nommée ou élue, toute personne exerçant une fonction publique pour un pays étranger, y compris pour une entreprise ou un organisme public et tout fonctionnaire ou agent d'une organisation internationale publique » (§ 4 de l'article 1 de la convention)

Sont donc notamment concernés par cet article les versements au profit :

- de parlementaires ;

- de magistrats ;

- de dirigeants d'entreprises publiques ou parapubliques ;

- de partis politiques, mais uniquement de manière indirecte, en tant qu'ils peuvent intervenir auprès d'un agent public et user de leur influence pour amener celui-ci à attribuer un marché ou un autre avantage indu à une entreprise.


Les commentaires relatifs à la Convention adoptés par la Conférence de négociation le 20 novembre 1997 apportent les précisions suivantes :

- L'expression « fonction publique » comprend toute activité d'intérêt public déléguée par un pays étranger, comme l'exécution de tâches déléguées par le gouvernement en liaison avec la passation de marchés publics.

- L'expression « organisme public » désigne toute entité instituée par des dispositions de droit public pour l'exercice d'activités spécifiques d'intérêt public.

- L'expression « entreprise publique » désigne toute entreprise, quelle que soit sa forme juridique, sur laquelle un ou plusieurs Etats peuvent, directement ou indirectement, exercer une influence dominante. Un ou plusieurs Etats sont réputés exercer une influence dominante, par exemple, lorsqu'ils détiennent une majorité du capital souscrit d'une entreprise, lorsqu'ils disposent de la majorité des voix attachées aux parts émises par l'entreprise ou lorsqu'ils peuvent désigner plus de la moitié des membres de l'organe d'administration, de direction ou de surveillance de l'entreprise.


- Un responsable d'une entreprise publique est réputé exercer une fonction publique à moins que l'entreprise exerce son activité sur une base commerciale normale dans le marché concerné, c'est à dire sur une base fondamentalement équivalente à celle d'une entreprise privée, sans aides préférentielles ou autres privilèges.

- Dans des circonstances particulières, une autorité publique peut être exercée dans les faits par des personnes (par exemple, des responsables d'un parti politique dans les Etats à parti unique) qui ne sont pas formellement des agents publics.

- L'expression « organisation internationale publique » désigne toute organisation internationale constituée par des Etats, des gouvernements ou d'autres organisations internationales publiques, quelles que soient la forme de l'organisation et ses compétences, y compris, par exemple, une organisation d'intégration économique régionale comme les communautés européennes.

SECTION 2 :
INTERVENTION DE L'AGENT PUBLIC

L'article 39-2 bis du CGI dispose que l'agent public doit avoir agi ou s'être abstenu d'agir dans l'exécution de fonctions officielles, en vue d'obtenir ou de conserver un marché ou de procurer un avantage indu dans les transactions commerciales internationales.

La Convention OCDE précise qu'« agir ou s'abstenir d'agir dans l'exécution de fonctions officielles » désigne toute utilisation qui est faite de la position officielle de l'agent public, que cette utilisation relève ou non des compétences conférées à cet agent. Pour s'appliquer aux faits incriminés, l'acte (ou l'inaction) de l'agent ne doit donc pas être détachable de sa fonction ou de sa position officielle.

SECTION 3 :
FAITS INCRIMINES PENALEMENT

La convention OCDE vise le fait intentionnel, pour toute personne, d'offrir, de promettre ou d'octroyer un avantage indu, pécuniaire ou autre, directement ou par des intermédiaires, à un agent public, à son profit ou au profit d'un tiers, pour que cet agent agisse ou s'abstienne d'agir dans l'exécution de fonctions officielles, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu dans le cadre de transactions commerciales internationales.

A - Mode de versement

L'octroi d'un avantage indu peut non seulement prendre la forme d'un avantage pécuniaire, mais aussi toute autre forme telle que, par exemple, la prise en charge des frais de scolarité, de soins ou d'hébergement d'un membre de la famille de l'agent public dans un établissement d'un autre pays.

B - Objectif poursuivi

Sont visés par le présent dispositif les versements destinés à « obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu ». Selon les commentaires officiels relatifs à la convention, le fait de corrompre pour obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu constitue une infraction, même si l'entreprise a par ailleurs fait l'offre la mieux disante ou si elle a pu se voir attribuer légitimement le marché pour une quelconque autre raison.

De même, selon les mêmes commentaires, un « autre avantage indu » s'entend d'un avantage qu'une entreprise n'aurait pas clairement dû recevoir, par exemple l'autorisation d'exercer une activité pour une usine ne remplissant pas les conditions réglementaires.

Le caractère non déductible d'un versement est indépendant de la valeur de l'avantage ou de son résultat, des usages locaux en la matière, de la tolérance des autorités locales ou de la nécessité du paiement pour obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage. En d'autres termes, la complaisance de certains régimes à l'égard de la corruption n'est pas de nature à permettre la déductibilité des frais qui lui sont liés.

En revanche, ne sont pas concernés par les nouvelles dispositions les versements destinés à obtenir un avantage dès lors qu'ils sont autorisés ou exigés par la loi (et qu'ils demeurent dans les limites exigées par celle-ci) ou la réglementation écrite du pays du fonctionnaire étranger, y compris la jurisprudence.

CHAPITRE TROISIEME
CONSEQUENCES DE L'INTERDICTION

Sans préjuger des sanctions pénales dont est passible la société et ses dirigeants, l'application de l'article 39-2 bis du CGI conduit à rejeter des charges de l'entreprise les commissions versées, dès lors qu'il est démontré que ces sommes ou ces avantages ont bénéficié directement ou indirectement à un agent public ou assimilé. Le fait que l'entreprise ait pu y trouver un avantage proportionnel au montant versé reste sans incidence sur la non-déductibilité fiscale des commissions.

SECTION 1 :
ÉTABLISSEMENT DES FAITS DE CORRUPTION

La mise en oeuvre de l'article 39-2 bis du CGI est subordonnée à la condition que soit démontrée l'existence du versement des sommes en litige ou l'octroi d'un avantage indu au profit d'un agent public.

Trois éléments devront être réunis :

- la conclusion d'un marché à l'exportation,. en particulier s'agissant d'un marché conditionné par l'accord l'accord préalable d'une autorité politique ou relevant directement de l'autorité publique.
- l'intervention d'un ou de plusieurs décideurs agents publics dans le choix du bénéficiaire du marché ou dans l'attribution de celui-ci ;
- l'existence d'éléments mettant en évidence le fait que les agents publics susvisés aient directement ou indirectement bénéficié desdits avantages.

SECTION 2 :
INDÉPENDANCE DES PROCEDURES PENALES ET FISCALES

La procédure fiscale est indépendante de la procédure pénale. En effet, la remise en cause de la déductibilité des frais de corruption prévue à l'article 39-2.bis du CGI n'est pas liée à l'existence d'un délit pénal mais à des faits visés par la convention susceptibles, par ailleurs, de constituer un délit.

En la matière, la procédure pénale pourra préexister à la procédure fiscale, dès lors que les poursuites pour faits de corruption relèvent du droit commun et ne dépendent pas de la mise en œuvre de la procédure spéciale des poursuites pénales pour fraude fiscale.

CHAPITRE QUATRIEME :
SANCTIONS

L'article 39-2 bis du CGI ne prévoit pas de dispositif spécifique de sanctions fiscales.

Outre les sanctions pénales qui s'attachent aux faits de corruption, il sera fait application, en matière fiscale, des sanctions de mauvaise foi ou de manœuvres frauduleuses, en fonction des circonstances propres à chaque affaire et de l'importance des obstacles mis à la connaissance par l'administration des faits litigieux.

Le Directeur Général des Impôts,

F. VILLEROY DE GALHAU

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Textes juridiques liés au document

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.