Jurisprudence : Cass. civ. 2, 10-11-2022, n° 21-14.664, F-B, Rejet

Cass. civ. 2, 10-11-2022, n° 21-14.664, F-B, Rejet

A29148SQ

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Cass. civ. 2, 10-11-2022, n° 21-14.664, F-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/89662296-cass-civ-2-10112022-n-2114664-fb-rejet
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Abstract

Selon l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, les rentes versées dans le cadre des régimes de retraite à prestations définies sont soumises à une contribution à la charge du bénéficiaire dont le taux est fixé, par les quatrième et huitième alinéas, à 14 % pour la part de ces rentes supérieure à 1 000 euros et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois et, par les cinquième et neuvième alinéas, à 21 % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 euros par mois. Dans sa décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les cinquième et neuvième alinéas de l'article L. 137-11-1 et, aux quatrième et huitième alinéas, les mots : " et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois." A défaut de report dans le temps de ses effets, la déclaration d'inconstitutionnalité a pris effet à compter de la publication de la décision (décision n° 2013-672 DC du 13 juin 2013 ; décision n° 2013-349 QPC du 18 octobre 2013 ; décision n° 2012-656 DC du 24 octobre 2012). Il en résulte que les dispositions censurées ne s'appliquent pas aux rentes perçues en 2012 et soumises au nouveau barème d'imposition prévu par l'article 3 de la loi de finances pour 2013


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 novembre 2022


Rejet


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 1120 F-B

Pourvoi n° Y 21-14.664


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2022



L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Nord-Pas-de-Calais, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-14.664 contre l'arrêt rendu le 4 février 2021 par la cour d'appel d'Amiens (2e protection sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Aa] [S], domicilié [… …],

2°/ à la société [4], société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Ab et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [S] et la société [4], et l'avis de M. Ac, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 4 février 2021), la société [4] (la société) et M. [S], son ancien président, ont sollicité, sur le fondement de la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-662 DC⚖️ du 29 décembre 2012, la restitution partielle par l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais (l'URSSAF) de la contribution visée à l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛, versée en 2012.

2. Leurs demandes ayant été rejetées, ils ont saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'URSSAF fait grief à l'arrêt de faire droit au recours de la société, alors « que les décisions du Conseil constitutionnel s'imposent à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ; que lorsque la conformité à la Constitution d'une loi déjà promulguée est appréciée à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine, la déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par le Conseil constitutionnel peut prendre effet à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que le Conseil constitutionnel peut également déterminer les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition litigieuse a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; qu'à défaut de précision dans la décision du Conseil constitutionnel, la déclaration d'inconstitutionnalité est ainsi réputée prendre effet à compter de la publication de la décision, sans remise en cause des effets que la disposition litigieuse a produits ; qu'en l'espèce, par une décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, à l'occasion de l'examen de dispositions de la loi de finances pour 2013, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions, issues d'une précédente loi déjà promulguée, des cinquième et neuvième alinéas de l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 et les mots : « et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois » figurant aux quatrième et huitième alinéas de ce même article ; que dans cette décision, le Conseil constitutionnel n'a précisé ni date d'effet de cette déclaration d'inconstitutionnalité, ni remise en cause des effets produits par les dispositions concernées ; que cette déclaration d'inconstitutionnalité devait donc produire effet à compter de la date de publication de la décision, soit le 30 décembre 2012, de sorte que les contributions antérieurement versées au titre de l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 ne devaient pas être remises en cause ; qu'en retenant néanmoins que la décision n° 2012-662 DC du Conseil constitutionnel⚖️ devait être appliquée aux contributions versées au titre de l'année 2012 et que par conséquent l'URSSAF devait rembourser à la société la quote-part de la contribution prévue par l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 au taux de 21 %, qu'elle avait précomptée pour le compte de certains bénéficiaires de retraites à prestations définies au titre de l'année 2012, la cour d'appel a violé l'article 62 de la Constitution, ensemble l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛. »


Réponse de la Cour

4. Selon l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011🏛, les rentes versées dans le cadre des régimes de retraite à prestations définies sont soumises à une contribution à la charge du bénéficiaire dont le taux est fixé, par les quatrième et huitième alinéas, à 14 % pour la part de ces rentes supérieure à 1 000 euros et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois et, par les cinquième et neuvième alinéas, à 21 % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 euros par mois.

5. Dans sa décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel⚖️ a déclaré contraires à la Constitution les cinquième et neuvième alinéas de l'article L. 137-11-1 et, aux quatrième et huitième alinéas, les mots : « et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois. »

6. Rappelant que la conformité à la Constitution d'une loi déjà promulguée peut être appréciée à l'occasion de l'examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine, le Conseil constitutionnel a dit que l'article 3 de la loi de finances pour 2013 qui lui était déférée, instaurant une nouvelle tranche marginale d'imposition sur les revenus de 45 %, affectait le domaine d'application des dispositions de l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛.

7. Il a considéré, en effet, que le taux marginal maximal d'imposition pesant sur les rentes versées dans le cadre des régimes de retraite à prestations définies était porté, par suite de la modification prévue par l'article 3 et après prise en compte de la déductibilité d'une fraction de la contribution sociale généralisée ainsi que d'une fraction de la contribution prévue par l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 de l'assiette de l'impôt sur le revenu, à 75,04 % pour les rentes perçues en 2012 et à 75,34 % pour les rentes perçues à compter de 2013, que ce nouveau niveau d'imposition faisait peser sur les contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives et qu'il était contraire au principe d'égalité devant les charges publiques.

8. Il en a déduit que pour remédier à l'inconstitutionnalité tenant à la charge excessive au regard des facultés contributives de certains contribuables percevant des rentes versées dans le cadre des régimes de retraite à prestations définies, les dispositions susvisées devaient être déclarées contraires à la Constitution.

9. À défaut de report dans le temps de ses effets, la déclaration d'inconstitutionnalité a pris effet à compter de la publication de la décision (Cons. Const., 13 juin 2013, décision n° 2013-672 DC ; Cons. Const., 18 octobre 2013, décision n° 2013-349 QPC ; Cons. Const., 24 octobre 2012, décision n° 2012-656 DC).

10. Il en résulte que les dispositions censurées ne s'appliquent pas aux rentes perçues en 2012 et soumises au nouveau barème d'imposition prévu par l'article 3 de la loi de finances pour 2013.

11. Dès lors, c'est sans encourir le grief du moyen, que la cour d'appel a dit que la quote-part de la contribution précomptée, en application de ces dispositions, par la société sur les rentes versées en 2012, devait lui être restituée.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais et la condamne à payer à la société [4] et M. [S] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau, Ab et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais

L'URSSAF Nord Pas-de-Calais fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à restituer à la société [4] la quote-part de la contribution prévue par l'article L.137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 au taux de 21%, qu'elle a précomptée pour le compte de certains bénéficiaires de retraites à prestations définies au titre de l'année 2012, à savoir MM. [P], [S], [Z] et [W] et Mme [M], pour un montant de 182 594,51 €, assorti des intérêts moratoires au taux légal à compter du 17 janvier 2014.

Alors que les décisions du Conseil Constitutionnel s'imposent à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ; que lorsque la conformité à la Constitution d'une loi déjà promulguée est appréciée à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine, la déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par le Conseil constitutionnel peut prendre effet à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que le Conseil constitutionnel peut également déterminer les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition litigieuse a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; qu'à défaut de précision dans la décision du Conseil constitutionnel, la déclaration d'inconstitutionnalité est ainsi réputée prendre effet à compter de la publication de la décision, sans remise en cause des effets que la disposition litigieuse a produits ; qu'en l'espèce, par une décision n°2012-662 DC du 29 décembre 2012, à l'occasion de l'examen de dispositions de la loi de finances pour 2013, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions, issues d'une précédente loi déjà promulguée, des cinquième et neuvième alinéas de l'article L.137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 et les mots : « et inférieure ou égale à 24 000 euros par mois » figurant aux quatrième et huitième alinéas de ce même article ; que dans cette décision, le Conseil constitutionnel n'a précisé ni date d'effet de cette déclaration d'inconstitutionnalité, ni remise en cause des effets produits par les dispositions concernées ; que cette déclaration d'inconstitutionnalité devait donc produire effet à compter de la date de publication de la décision, soit le 30 décembre 2012, de sorte que les contributions antérieurement versées au titre de l'article L.137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 ne devaient pas être remises en cause ; qu'en retenant néanmoins que la décision n°2012-662 DC du Conseil constitutionnel⚖️ devait être appliquée aux contributions versées au titre de l'année 2012 et que par conséquent l'URSSAF Nord Pas-de-Calais devait rembourser à la société [4] la quote-part de la contribution prévue par l'article L.137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛 au taux de 21%, qu'elle avait précomptée pour le compte de certains bénéficiaires de retraites à prestations définies au titre de l'année 2012, la cour d'appel a violé l'article 62 de la Constitution, ensemble l'article L.137-11-1 du code de la sécurité sociale🏛.

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