Jurisprudence : CA Bordeaux, 19-07-2013, n° 13/03836, Confirmation



COUR D'APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 19 JUILLET 2013
(Rédacteur Monsieur Robert ..., Président)
N° de rôle 13/03836
SCS MARINA DE TALARIS
c/
SELARL CHRISTOPHE MANDON
Nature de la décision DÉFÉRÉ
Grosse délivrée le
aux avocats
Décision déférée à la Cour ordonnance rendue le 10 juin 2013 (R.G. 12/05420) par le Conseiller de la mise en état de la deuxième chambre de la Cour d'Appel de BORDEAUX suivant requête en date du 21 juin 2013

DEMANDERESSE
SCS MARINA DE TALARIS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social TOULOUSE
représentée par Me Julien FOUCHET, membre de la SCP CORNILLE, avocat au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE
SELARL CHRISTOPHE MANDON, mandataire liquidateur, pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL SERBATI BROCHARD DESVAUX prise en la personne de son représentant légal, domiciliée en cette qualité au siège
BORDEAUX CEDEX
représentée par Me Pierre FONROUGE membre de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 juillet 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Franck LAFOSSAS, Président de chambre et Robert MIORI, Président de chambre, chargés du rapport,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Chantal ..., Première Présidente,
Franck LAFOSSAS, Président de chambre
Robert MIORI, Président de chambre
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats Martine MASSÉ
ARRÊT
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
PROCÉDURE

Par jugement en date du 10 septembre 2012, le tribunal de commerce de Bordeaux a notamment condamné la société Marina de Talaris à verser à la société Serbati Brochard Desvaux ( la société Serbati) prise en la personne de son mandataire liquidateur, la SELARL Christophe Mandon la somme principale de 39 241,68 euros représentant le montant de travaux non payés.
Ce jugement a été signifié le 28 septembre 2012, à la demande de de la SELARL Christophe Mandon en sa qualité de liquidateur de la SARL Serbati.

Le 4 octobre 2012 la société Marina de Talaris a relevé appel de cette décision en intimant uniquement la SARL Serbati sans faire mention de son liquidateur.
Par acte d' huissier en date du 13 décembre 2012 la société Marina de Talaris a signifié sa déclaration d'appel à la société Serbati . Elle en a fait de même à l'égard de la SELARL Christophe Mandon le 7 décembre 2012.
Le 7 février 2013 la société Christophe Mandon agissant en qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL Serbati a saisi le conseiller de la mise en état d'une demande ayant pour objet de voir constater l'irrecevabilité de l'appel au motif que la déclaration d'appel est nulle comme étant dirigée contre une personne dessaisie de ses droits.

Par ordonnance en date du 10 juin 2013 le conseiller de la mise en état a constaté la nullité de la déclaration d'appel du 4 octobre 2012 enregistrée sous le numéro 12/5420 par laquelle la société Marina de Talaris a intimé la SARL Serbati et l'a condamnée à payer à la SELARL Christophe Mandon en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Serbati la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en retenant
-qu'à partir de sa liquidation judiciaire intervenue le 25 mars 2009 la société Serbati n'avait plus la capacité pour agir en justice seul son liquidateur désigné pouvant la représenter que l'absence d'acte d'appel contre le mandataire liquidateur constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte qu'avant l'expiration du délai de recours, que l'assignation délivrée le 7 décembre 2012 à la SELARL Christophe Mandon ne pouvait opérer une régularisation puisque effectuée plus d'un mois après la signification du jugement déféré et qu'une deuxième déclaration d'appel intervenue le 23 janvier 2013 est également tardive ;
- que la société Marina de Talaris ne peut invoquer l'irrégularité de la signification du jugement intervenue le 28 septembre 2012 au motif que sa forme sociale n'a pas été indiquée alors qu'elle ne prouve pas que cette irrégularité causerait un grief et qu'elle ne peut non plus invoquer l'existence d'une indivisibilité à l'égard de plusieurs parties alors qu'une seule partie intimée est en cause.
Le 21 juin 2013 la société Marina de Talaris a déposé au greffe une " requête portant déféré " par laquelle elle sollicite que la cour infirme l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 juin 2013, qu'elle déclare son appel recevable qu'elle déboute la SELARL Christophe Mandon ès qualités de liquidateur de la SARL Serbati de ses demandes tendant à voir prononcer la nullité de l'acte d'appel et qu'il la condamne à lui verser une indemnité de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 1er juillet 2013 la SELARL Christophe Mandon agissant en qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL Serbati a notifié des conclusions par lesquelles elle demande que la déclaration d'appel du 4 octobre 2012 et en conséquence l'appel soient déclarés irrecevables, de constater que l'assignation de la SELARL Christophe Mandon ainsi que les deux appels intervenus postérieurement au délai d'appel ne peuvent couvrir cette de nullité et que la société Marina de Talaris soit condamnée à lui verser une indemnité de 3000 euros en application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile .

MOTIFS DE LA DÉCISION
1 Sur les parties à la procédure
L'action en paiement a été engagée par la société Serbati prise en la personne de son mandataire liquidateur, la SELARL Christophe Mandon contre la société Marina de Talaris.
La SELARL Christophe Mandon ne peut donc soutenir qu'elle était seule partie en première instance à la procédure et que l'appel dirigé contre la société Serbati est irrecevable pour ce motif.
2 Sur la nature du vice affectant la déclaration d'appel
La société Marina de Talaris soutient que le défaut de mention de l'identité du liquidateur judiciaire ne constitue pas un vice de fond mais un vice de forme qui ne peut entraîner la nullité qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief et que l'ordonnance du 10 juin 2013 crée une rupture d'égalité entre l'appelant ne mentionnant pas son propre liquidateur judiciaire et l'appelant oubliant la même mention pour la société intimée dans le même acte juridique .
La société Christophe Mandon agissant ès qualités maintient pour sa part que l'appel dirigé contre la société Serbati est irrecevable en raison de ce que l'erreur commise dans l'acte d'appel porte sur le choix d'une partie et qu'en intimant la SARL Serbati qui était dépourvue de la capacité juridique, la société Marina de Talaris a entaché son appel d'un vice de fond.
Il ressort des dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens et que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.
Il en résulte que la personne placée en liquidation judiciaire ne peut agir en justice sauf pour exercer les droits et actions qui lui sont personnels.
Tel n'est pas le cas en l'espèce puisque la SARL Serbati qui a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 25 mars 2009 a engagé contre la société Marinas de Talaris une action en paiement d'une somme correspondant au montant de travaux.
L'article 117 du code de procédure civile prévoit que le défaut de capacité d'ester en justice constitue une irrégularité de fond affectant la validité d'un acte . La société Serbati est donc en raison de son placement en liquidation de biens frappée d'une interdiction d'agir elle-même en justice. Parallèlement les actions dirigées contre elle doivent être formalisées contre son liquidateur seul à même de la représenter.
L'absence d'appel contre le liquidateur de la société Serbati ne constitue en conséquence pas un vice de forme mais un vice de fond. Ce n'est pas en effet une erreur matérielle concernant l'identité du liquidateur ou l'absence d'identification de celui-ci qui a été commise puisque l'acte d'appel n'a pas été formé contre lui mais contre une personne qui n'avait pas le pouvoir d'agir elle-même en cause d'appel.
Il n'y a pas par ailleurs de rupture d'égalité entre l'appelant ne mentionnant pas son propre liquidateur et l'appelant oubliant la même mention pour la société intimée, l'irrégularité commise entraînant dans les deux cas l'irrecevabilité de la déclaration d'appel en raison dans le premier cas du défaut de pouvoir de l'appelante de relever appel et dans le second cas du défaut de pouvoir de l'intimé de se défendre à l'égard de l'appel relevé à son encontre.
Il s'agit donc d'un vice de fond susceptible d'entrainer la nullité de la déclaration d'appel sans que celui qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'un grief.
3 Sur l'exercice d'un droit propre
La société Marina de Talaris maintient à ce titre que la prétendue créance de la société Serbati n'est pas suffisamment établie pour être exigible, et que l'article L. 641-9 du code de commerce ne la prive pas de l'exercice d'un droit propre ou d'une capacité d'ester en justice en qualité d'intimée dans la présente affaire .
La SELARL Christophe Mandon agissant ès qualités fait valoir que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés par le liquidateur et que le recouvrement d'une créance n'est pas un droit propre du débiteur.
L'article L. 641-9 du code de commerce prévoit que le liquidateur exerce les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine. Même si l'existence de la créance est contestée, il n'en reste pas moins que la demande en paiement du montant des travaux réalisés constitue une action de nature patrimoniale qui n'a aucun caractère personnel. Cette action entre dés lors dans les pouvoirs du liquidateur seul à même de l'exercer et par conséquent seul à même de représenter la personne placée en liquidation judiciaire en cas d'appel relevé par la partie adverse.
Il ne s'agit donc pas d'un droit propre de la société Serbati qui doit dés lors être représentée par son liquidateur contre lequel l'appel de la société Martina de Talaris aurait dû être dirigé en sa qualité de représentant de cette société.
4 Sur la cause de l'irrégularité
La société Marina de Talaris souligne qu'il convient de rechercher si l'irrégularité ne trouve pas son origine dans une confusion née de la procédure suivie en première instance de sorte qu'elle est susceptible d'être rectifiée même après l'expiration des délais d'appel et que tel est le cas en l'espèce puisque le nom du liquidateur a été omis dans l'acte de signification de l'assignation qui lui a été délivré, que le nom du mandataire liquidateur a été " camouflé " et que le tribunal de commerce ne mentionne pas le nom du mandataire liquidateur.
La SELARL Christophe Mandon agissant ès qualités relève qu'il n'existait aucune confusion possible en première instance sur le fait que la société Serbati était en liquidation judiciaire et qu'elle était représentée par son liquidateur.
L'assignation à comparaitre devant le tribunal de commerce en date du 7 avril 2011, délivrée par la société Serbati à la société Marina de Talaris, mentionne expressément que les poursuites sont diligentées par son mandataire liquidateur, la SELARL Christophe Mandon dont les coordonnées sont précisées.
Le jugement attaqué mentionne expressément dans son " chapeau " que la société Serbati agit " poursuites et diligences " de son liquidateur la SELARL Christophe Mandon. Le dispositif du jugement précise en outre sans ambiguïté que la société Serbati est prise en la personne de son mandataire liquidateur la SELARL Christophe Mandon.
L'acte de signification du jugement en date du 28 septembre 2012 notifié à la demande de la société Serbati indique enfin lui aussi que cette société est représentée par son liquidateur la SELARL Christophe Mandon.
C'est dés lors de manière inopérante que la société Marina Talaris soutient que l'irrégularité qu'elle a commise trouve son origine dans une confusion due à la procédure de première instance, que le nom du liquidateur a été camouflé, ou que le tribunal de commerce ne mentionne pas son nom.
5 Sur le nombre d'intimés et la régularisation de la procédure
La société Mariana de Talaris fait valoir que société Serbati a conservé une existence juridique durant la procédure, qu'il y a donc deux parties intimées, la SARL Serbati et SELARL Christophe Mandon, que la mention d'un seul intimé dans la procédure dans la première déclaration d'appel enregistrée dans le délai, lui conserve le droit d'interjeter appel contre une autre partie en présence d'un lien de solidarité et d'indivisibilité entre celui-ci et l' intimé, et que la déclaration qu'elle a régularisée contre la société Christophe Mandon le 27 février 2013 a régularisé celle du 4 octobre 2012.
La SELARL Christophe Mandon agissant ès qualités maintient que la déclaration d'appel du 23 janvier 2013 ne peut couvrir la nullité de la première déclaration d'appel, que la SELARL Christophe Mandon n'était pas partie en première instance personnellement à la procédure, et que le moyen invoqué concernant divisibilité celle-ci est inopérant.
Le représentant légal d'une société n'est pas, en effet, à titre personnel partie à la procédure. La SELARL Christophe Mandon qui agit en qualité de liquidateur de la société Serbati n'est donc pas à titre personnel partie à la procédure même si la déclaration d'appel aurait dû être formulée à son encontre en sa qualité de liquidateur de la société Serbati. C'est donc également à tort que la société Marina de Talaris soutient qu'il y a deux intimés et qu'après avoir relevé appel contre le premier elle pourrait relever appel contre le second.
Il convient dans ces conditions de confirmer l'ordonnance entreprise.
Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.

PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance entreprise.
Condamne la société Marina de Talaris aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par la première présidente Chantal ... et par Martine ..., greffière à qui elle a remise la minute signée de la décision.
La greffière La première présidente

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