Jurisprudence : Cass. civ. 1, 26-06-2013, n° 11-25.946, FS-P+B+I, Cassation

Cass. civ. 1, 26-06-2013, n° 11-25.946, FS-P+B+I, Cassation

A6859KHI

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Cass. civ. 1, 26-06-2013, n° 11-25.946, FS-P+B+I, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8880950-cass-civ-1-26062013-n-1125946-fsp-b-i-cassation
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Abstract

Aux termes de l'article 389-3, alinéa 3, du Code civil "ne sont pas soumis à l'administration légale, les biens qui auraient été donnés ou légués au mineur sous la condition qu'ils seraient administrés par un tiers. . Ce tiers administrateur aura les pouvoirs qui lui auront été conférés par la donation ou le testament ; à défaut, ceux d'un administrateur légal sous contrôle judiciaire".. En cas de legs à un mineur de biens sous la condition qu'ils soient administrés par un tiers, il ne peut être fait échec aux dispositions testamentaires au nom de l'intérêt de l'enfant ; c'est ce qu'il ressort d'un arrêt rendu le 26 juin 2013 par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 26 juin 2013, n° 11-25.946, FS-P+B+I).



CIV. 1 CM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 juin 2013
Cassation
M. CHARRUAULT, président
Arrêt no 663 FS-P+B+I
Pourvoi no E 11-25.946
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ M. Jean-Paul Z, domicilié Evry,
2o/ Mme Joëlle Z, domiciliée Evry,
contre l'arrêt rendu le 1er septembre 2011 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 1re section), dans le litige les opposant
1o/ à M. Jérôme Y, domicilié Levallois-Perret,
2o/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié Versailles cedex,
défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 mai 2013, où étaient présents M. Charruault, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bignon, conseiller doyen, MM. Suquet, Savatier, Matet, Reynis, conseillers, Mmes Degorce, Capitaine, Bodard-Hermant, Maitrepierre, Guyon-Renard, M. Mansion, Mmes Le Cotty, Gargoullaud, conseillers référendaires, Mme Petit, premier avocat général, Mme Nguyen, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat des époux Z, ... ... SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. Y, l'avis de Mme Petit, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche Vu l'alinéa 3 de l'article 389-3 du code civil ;
Attendu que les biens qui auraient été donnés ou légués au mineur sous la condition qu'ils seraient administrés par un tiers ne sont pas soumis à l'administration légale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y et Elodie Hérault se sont mariés en 2007 ; que Théo est né en 2009 de cette union ; qu'Elodie Hérault est décédée le 31 juillet 2010 après avoir institué, par testament du 31 décembre 2009, son fils légataire universel de ses biens ; que par un codicille du 4 juin 2010, Elodie Hérault avait désigné son père, M. Jean-Paul Z, et à défaut sa soeur, Mme Stéphanie Z, administrateur des biens ainsi légués à son fils mineur ; que les époux Z, grand-parents maternels de Théo, ont contesté à M. Y sa qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire ;

Attendu que, pour réputer non écrites les dispositions testamentaires prises par Elodie Hérault le 4 juin 2010 instituant un administrateur des biens de Théo Y, l'arrêt retient que cette désignation est contraire à l'intérêt de l'enfant ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi, l'a violée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs subsidiaires
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour les époux Z
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir réputé non écrites les dispositions testamentaires prises par feue Elodie Z le 4 juin 2010, instituant son père, Monsieur Jean-Paul Z, et à défaut, sa soeur, Madame Stéphanie Z, administrateur spécial des biens légués à son fils Théo Y ;
AUX MOTIFS QUE la disposition testamentaire par laquelle la gestion de biens appartenant à un mineur est dévolue à un administrateur spécial conformément aux dispositions de l'article 389-3 du Code civil peut être réputée non écrite par le juge lorsqu'elle porte atteinte à l'intérêt de l'enfant ; qu'il doit être relevé en premier lieu que selon courrier du 17 janvier 2011, le notaire ayant reçu le testament d'Elodie Z n'a pas gardé trace du moyen et de la forme de réception du codicille instituant un administrateur spécial ; qu'en second lieu, un conflit massif oppose Jérôme Y à ses beaux-parents qui lui reproche d'être à l'origine de la coupure existante avec leur petit-fils ; qu'ils font état d'un conflit d'intérêts entre le père et son fils en raison de la disparité de la situation de fortune de l'un et de l'autre puisque, selon eux, Théo est appelé à bénéficier d'un patrimoine de plus de 500.000 euros, alors que son père, Jérôme Y, ne dispose d'aucun patrimoine personnel, mais est redevable du remboursement de l'emprunt qu'il a contracté pour acquérir en indivision avec son épouse à concurrence de 20% pour lui et 80% pour elle, le logement familial dans lequel il se trouve avec Théo ; que Jérôme Y fait état du rejet dont lui-même et sa famille ont été l'objet de la part de la famille Z ; qu'il conteste l'existence d'un quelconque conflit d'intérêts avec son fils ; qu'il fait enfin valoir qu'aucune insuffisance de nature à le priver de ses droits d'administrateur légal ne peut lui être reprochée, ajoutant que le contrôle exercé par le juge des tutelles sur sa gestion est de nature à calmer les craintes de dilapidation qui animent les époux Z ; que la lecture des mails échangés à l'occasion du décès d'Elodie démontre que Jérôme Y n'a pas trouvé auprès de ses beaux-parents la compassion qu'il pouvait en attendre alors qu'il se trouvait seul avec un très jeune enfant privé de sa mère, même si ceux-ci ont été durement éprouvés par la perte tragique de leur fille ; qu'ainsi, il apparaît que les époux Z se sont accaparés l'organisation de la cérémonie des obsèques de leur fille en date du 6 août 2010 pour en exclure tous les " étrangers " ; qu'ils ont fait établir des faire-parts ne mentionnant que leur nom et celui de leur seconde fille et sur lesquels ni Théo ni Jérôme Y ne figurent ; que dès le 4 août 2010, ils ont réclamé la restitution des affaires de leur fille à leur gendre en mentionnant expressément " sans oublier les bijoux " ; que dès le 19 octobre 2010, ils ont saisi un avocat afin de faire établir à leur profit un droit de visite et d'hébergement sur Théo avant de faire délivrer le 9 novembre 2010 à Jérôme Y une assignation en référé ; que l'animosité opposant les deux parties est donc forte et qu'il existe une forte probabilité que l'exercice par Jean-Paul Z des pouvoirs d'un administrateur spécial ne soit guidé que par des considérations étrangères à l'intérêt de l'enfant et provoque des situations de blocage incessantes contraires à cet intérêt ; que bien qu'il existe une disparité objective entre les patrimoines de l'enfant et de son père, cet élément ne permet pas de présumer par lui-même une opposition d'intérêts en dehors de tout élément de nature à laisser suspecter de la part du père une volonté de faire du patrimoine de l'enfant un usage contraire à son intérêt ; qu'aucune carence dans l'entretien ou l'éducation de son fils n'est alléguée à son encontre ; que dès lors, l'intérêt de Théo, qui vit au quotidien près de son père qui se charge de son entretien et de son éducation, commande de réputer non écrites les dispositions testamentaires instituant Jean-Paul Z administrateur spécial de ses biens et de restaurer Jérôme Y dans la plénitude de ses droits, qu'il exerce son contrôle judiciaire ;
1o) ALORS QUE ne sont pas soumis à l'administration légale, les biens qui auraient été donnés ou légués au mineur sous la condition qu'ils seraient administrés par un tiers ; que le juge n'a pas le pouvoir de réputer non écrites les dispositions testamentaires par lesquelles la gestion d'un bien légué à un mineur est dévolue à un administrateur spécial ; qu'en déclarant néanmoins non écrites les dispositions testamentaires de feue Elodie Z instituant Monsieur Z et, à défaut, Madame Stéphanie Z, administrateur des biens légués à son fils Théo Y, la Cour d'appel a violé l'article 389-3, alinéa 3, du Code civil ;
2o) ALORS QUE, subsidiairement, si le juge peut réputer non écrites des dispositions testamentaires par lesquelles la gestion d'un bien légué à un mineur est dévolue à un administrateur spécial, c'est à la seule condition que ces dispositions portent atteinte à l'intérêt de l'enfant ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que les dispositions testamentaires prises par feue Elodie Z le 4 juin 2010, instituant son père et, à défaut, sa soeur, administrateur des biens légués à son fils Théo, devaient être réputées non écrites, qu'il existait une forte animosité entre, d'une part, Monsieur et Madame Z et, d'autre part, Monsieur Y, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir qu'il était contraire à l'intérêt de Théo Y que Monsieur Z administre les biens que sa mère lui avait légués, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 389-3, alinéa 3, du Code civil ;
3o) ALORS QUE, à titre également subsidiaire, tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'un motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour décider que les dispositions testamentaires prises par feue Elodie Z le 4 juin 2010, instituant son père et, à défaut, sa soeur, administrateur des biens légués à son fils Théo, devaient être réputées non écrites, que l'animosité entre, d'une part, Monsieur et Madame Z et, d'autre part, Monsieur Y, étant forte, il existait " une forte probabilité " que l'exercice par Monsieur Jean-Paul Z des pouvoirs d'un administrateur spécial ne soit guidé que par des considérations étrangères à l'intérêt de l'enfant et provoque des situations de blocage incessantes contraires à cet intérêt, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif hypothétique, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4o) ALORS QUE, à titre encore subsidiaire, qu'en se bornant à affirmer, pour décider que les dispositions testamentaires prises par feue Elodie Z le 4 juin 2010, instituant son père et, à défaut, sa soeur, administrateur des biens légués à son fils Théo, devaient être réputées non écrites, d'une part, que la circonstance qu'il existait une disparité objective entre les patrimoines de l'enfant et de son père ne permettait pas de présumer par elle-même une opposition d'intérêts entre eux, en dehors de tout élément de nature à laisser suspecter de la part du père une volonté de faire du patrimoine de l'enfant un usage contraire à son intérêt et, d'autre part, qu'aucune carence dans l'entretien ou l'éducation de l'enfant n'était alléguée à l'encontre de Monsieur Y, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir qu'il était contraire à l'intérêt de Théo Y que la gestion des biens qui lui avaient été légués par sa mère soit dévolue à Monsieur Z, à titre d'administrateur spécial, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 389-3, alinéa 3, du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame Z de leur demande tendant à voir nommer Monsieur Z administrateur ad hoc des biens du mineur Théo Y et d'avoir en conséquence décidé que la gestion de ces biens sera assurée par Monsieur Jérôme Y, en sa qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE [...] un conflit massif oppose Jérôme Y à ses beaux-parents qui lui reproche d'être à l'origine de la coupure existante avec leur petit-fils ; qu'ils font état d'un conflit d'intérêts entre le père et son fils en raison de la disparité de la situation de fortune de l'un et de l'autre puisque, selon eux, Théo est appelé à bénéficier d'un patrimoine de plus de 500.000 euros, alors que son père, Jérôme Y, ne dispose d'aucun patrimoine personnel, mais est redevable du remboursement de l'emprunt qu'il a contracté pour acquérir en indivision avec son épouse à concurrence de 20% pour lui et 80% pour elle, le logement familial dans lequel il se trouve avec Théo ; que Jérôme Y fait état du rejet dont lui-même et sa famille ont été l'objet de la part de la famille Z ; qu'il conteste l'existence d'un quelconque conflit d'intérêts avec son fils ; qu'il fait enfin valoir qu'aucune insuffisance de nature à le priver de ses droits d'administrateur légal ne peut lui être reprochée, ajoutant que le contrôle exercé par le juge des tutelles sur sa gestion est de nature à calmer les craintes de dilapidation qui animent les époux Z ; [...] que bien qu'il existe une disparité objective entre les patrimoines de l'enfant et de son père, cet élément ne permet pas de présumer par lui-même une opposition d'intérêts en dehors de tout élément de nature à laisser suspecter de la part du père une volonté de faire du patrimoine de l'enfant un usage contraire à son intérêt ; qu'aucune carence dans l'entretien ou l'éducation de son fils n'est alléguée à son encontre ; que dès lors, l'intérêt de Théo, qui vit au quotidien près de son père qui se charge de son entretien et de son éducation, commande [...] de restaurer Jérôme Y dans la plénitude de ses droits, qu'il exerce son contrôle judiciaire ;
ALORS QUE lorsque les intérêts de l'administrateur légal des biens d'un mineur sont en opposition avec ceux du mineur, il doit faire nommer un administrateur ad hoc par le juge des tutelles ; qu'à défaut de diligence de l'administrateur légal, le juge peut procéder à cette nomination à la demande du ministère public, du mineur lui-même ou d'office ; que le conflit d'intérêts entre le mineur et l'administrateur légal de ses biens doit être apprécié de manière objective, indépendamment de la volonté de l'administrateur légal de confondre ses propres intérêts avec ceux de l'enfant ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que l'existence d'une disparité entre les patrimoines de Monsieur Y et de son fils ne permettait pas de présumer par elle-même une opposition d'intérêts entre eux, qu'aucun élément ne laissait suspecter de la part du père une volonté de faire du patrimoine de l'enfant un usage contraire à son intérêt, sans rechercher si la disparité de la situation de fortune de Monsieur Y et de son fils caractérisait, de manière objective, une opposition d'intérêts entre eux, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 389-3, alinéa 2, du Code civil.

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