Jurisprudence : Cass. civ. 2, 30-06-2022, n° 21-15.003, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 30-06-2022, n° 21-15.003, F-B, Cassation

A857378Z

Référence

Cass. civ. 2, 30-06-2022, n° 21-15.003, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/86082149-cass-civ-2-30062022-n-2115003-fb-cassation
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Abstract

Selon l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Selon l'article 933 du même code, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, la déclaration désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Si, pour les procédures avec représentation obligatoire, il a été déduit de l'article 562, alinéa 1er, que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas et que de telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit, un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant en matière de procédure sans représentation obligatoire constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier. Il en résulte qu'en matière de procédure d'appel sans représentation obligatoire, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement. Encourt dès lors la cassation l'arrêt qui, dans un litige relevant du contentieux de la sécurité sociale, dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes d'une caisse, dont la déclaration d'appel ne mentionnait aucun chef de jugement critiqué


CIV. 2

CM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 juin 2022


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 713 F-B

Pourvoi n° S 21-15.003


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JUIN 2022


La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Indre-et-Loire, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 21-15.003 contre l'arrêt rendu le 12 février 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant à la société Asturienne, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2021), M. [K], salarié de la société Asturienne (l'employeur), a été victime le 25 octobre 2016, d'un accident pris en charge, au titre de la législation professionnelle, par la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire (la caisse).

2. L'employeur a saisi un tribunal de grande instance d'une contestation du taux d'incapacité permanente partielle attribué par la caisse à M. [K].


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu de statuer sur ses demandes en l'absence d'effet dévolutif de l'appel, alors « que la règle suivant laquelle lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, ne s'applique pas à la procédure sans représentation obligatoire ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 562 et 933 du code de procédure civile🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 562 et 933 du code de procédure civile🏛 :

4. Selon le premier de ces textes, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Selon le second, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, la déclaration désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour.

5. Si, pour les procédures avec représentation obligatoire, il a été déduit de l'article 562, alinéa 1er que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas (2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528⚖️, publié) et que de telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit (2e Civ., 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.954⚖️, publié), un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant en matière de procédure sans représentation obligatoire constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier (2e Civ., 9 septembre 2021, pourvoi n° 20-13.673).

6. Il en résulte qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués, doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement.

7. Pour dire n'y avoir lieu de statuer sur les demandes de la caisse, l'arrêt retient que celle-ci indiquait dans sa déclaration interjeter appel du jugement rendu le 2 avril 2019, dans le litige l'opposant à l'employeur, sans mentionner aucun chef de jugement critiqué, qu'en ne mentionnant pas le chef du jugement critiqué, l'appel n'opérait pas d'effet dévolutif et qu'elle n'était donc investie de la connaissance d'aucun litige.

8. En statuant ainsi, alors que le litige relevait du contentieux de la sécurité sociale pour lequel la procédure d'appel est sans représentation obligatoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Asturienne aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, condamne la société Asturienne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire

L'arrêt attaqué, critiqué par la Caisse, encourt la censure ;

EN CE QU' il a dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes de la Caisse en l'absence d'effet dévolutif de l'appel ;

ALORS QUE, premièrement, la règle suivant laquelle lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, ne s'applique pas à la procédure sans représentation obligatoire ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 562 et 933 du code de procédure civile🏛 ;

ALORS QUE, deuxièmement, et plus subsidiairement, si, en application de l'article 562 du code de procédure civile🏛, tels qu'issu du décret n°2017-891 du 6 mai 2017🏛, lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, la règle résultant d'une interprétation nouvelle, ne peut être appliquée, à raison du droit au procès équitable, que, s'agissant de la procédure sans représenta-tion obligatoire, aux déclarations d'appel postérieures à la date de l'arrêt de la Cour de cassation l'ayant consacrée, soit le 30 janvier 2020 ; qu'en disant n'y avoir lieu de statuer sur les demandes de la Caisse en l'absence d'effet dévolutif de l'appel, faute pour la déclaration d'appel de mentionner les chefs de jugement critiqués, quand la déclaration d'appel, relevant de la procédure sans représentation obligatoire, avait été formée en juin 2019, les juges du fond ont violé les articles 562 et 933 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales🏛.

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