Jurisprudence : CE 9/10 ch.-r., 20-05-2022, n° 444451, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 9/10 ch.-r., 20-05-2022, n° 444451, mentionné aux tables du recueil Lebon

A91397XR

Référence

CE 9/10 ch.-r., 20-05-2022, n° 444451, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/85131820-ce-910-chr-20052022-n-444451-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

19-01-01-05 1) Eu égard à son objet, et tel qu’il est éclairé par les commentaires formulés par le comité fiscal de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sur l’article 12 de la convention-modèle établie par cette organisation publiés le 11 avril 1977, et ainsi d’ailleurs qu’il résulte de ces mêmes commentaires publiés respectivement les 23 octobre 1997, 28 janvier 2003 et 15 juillet 2014 et en dernier lieu le 21 novembre 2017, 2) le 2 de l’article 12 de la convention fiscale franco-néo-zélandaise est applicable aux redevances de source française dont le bénéficiaire effectif réside en Nouvelle-Zélande, quand bien même elles auraient été versées à un intermédiaire établi dans un Etat tiers.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 444451

Séance du 20 avril 2022

Lecture du 20 mai 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

La société Planet a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014. Par un jugement n°s 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 18MA04302 du 15 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a fait droit à l'appel du ministre de l'action et des comptes publics contre ce jugement et remis à la charge de la société Planet les sommes en litige.

Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre et 15 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Planet demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. A de Sainte Lorette, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de la société Planet ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Planet, qui exerce une activité de distribution de programmes sportifs à destination de clubs de fitness, a été assujettie à des rappels de retenue à la source à raison de sommes qualifiées de redevances versées aux sociétés Les Mills Belgium SPRL et Les Mills Euromed Limited, établies respectivement en Belgique et à Malte, au titre des exercices clos de 2011 à 2014 en contrepartie de la sous-distribution de programmes collectifs de fitness élaborés par la société Les Mills International LTD, établie en Nouvelle-Zélande. La société Planet se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 juillet 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel du ministre de l'action et des comptes publics, annulé le jugement du 18 mai 2018 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il l'avait déchargée de ces rappels et rétabli ces impositions.

2. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.

3. Aux termes de l'article 12 de la convention du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu : " 1. Les redevances provenant d'un Etat et payées à un résident de l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Toutefois, ces redevances sont aussi imposables dans l'Etat d'où elles proviennent et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui reçoit les redevances en est le bénéficiaire effectif l'impôt ainsi établi ne peut excéder 10 p. cent du montant brut des redevances. / 3. Le terme " redevances " employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques et les œuvres enregistrées pour la radiodiffusion ou la télévision, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle, d'un plan, d'une formule ou d'un procédé secrets, ainsi que pour l'usage ou la concession de l'usage d'un équipement industriel, commercial ou scientifique et pour des informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique ". Eu égard à leur objet, et telles qu'elles sont éclairées par les commentaires formulés par le comité fiscal de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sur l'article 12 de la convention-modèle établie par cette organisation publiés le 11 avril 1977, et ainsi d'ailleurs qu'il résulte des mêmes commentaires publiés respectivement les 23 octobre 1997, 28 janvier 2003 et 15 juillet 2014 et en dernier lieu le 21 novembre 2017, les stipulations du 2 de l'article 12 de la convention fiscale franco-néo-zélandaise sont applicables aux redevances de source française dont le bénéficiaire effectif réside en Nouvelle-Zélande, quand bien même elles auraient été versées à un intermédiaire établi dans un Etat tiers.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour rechercher si les sommes en cause étaient constitutives de redevances, la cour a examiné la qualification des sommes versées par la société Planet à la société belge Les Mills Belgium SPRL en 2011 ainsi qu'à la société maltaise Les Mills Euromed Limited de 2012 à 2014, au regard des stipulations de la seule convention fiscale franco-néo-zélandaise du 30 novembre 1979. En se bornant, pour juger que cette convention était applicable au litige, à relever que l'administration fiscale soutenait que la société néo-zélandaise Les Mills International LTD devait, en application d'un contrat d'agence signé le 2 décembre 1998 entre cette société et la société Planet, être regardée comme la bénéficiaire effective des sommes en litige versées par la société française aux sociétés belge et maltaise, sans se prononcer elle-même sur sa qualité de bénéficiaire effectif desdites sommes pour les quatre années en litige, la cour a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la société Planet est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Planet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 15 juillet 2020 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera à la société Planet la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Planet et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 20 avril 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme Anne Egerszegi, M. Thomas Andrieu, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. François Weil, conseillers d'Etat et M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 20 mai 2022.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

Le rapporteur :

Signé : M. Matias de Sainte Lorette

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida GhulamS30N6NML

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