Jurisprudence : CE 9/10 ch.-r., 24-02-2022, n° 453615, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 9/10 ch.-r., 24-02-2022, n° 453615, mentionné aux tables du recueil Lebon

A03297PU

Référence

CE 9/10 ch.-r., 24-02-2022, n° 453615, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/80708628-ce-910-chr-24022022-n-453615-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

095-02-07-03 1) Il résulte des articles L. 723-6, L. 733-5 et R. 723-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) que l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ne peut être regardé comme s’étant dispensé d’un entretien personnel, au sens du deuxième alinéa de l’article L. 733-5, aux seuls motifs que celui-ci n’a pas donné lieu à un enregistrement sonore ou que, si l’enregistrement n’a pas été possible, le demandeur n’a pas eu la possibilité de formuler des observations sur la transcription au terme de l’entretien. ...2) Dans l’hypothèse où l’enregistrement sonore n’a pu être réalisé et où le demandeur n’a pas eu la possibilité de formuler des observations sur la transcription à l’issue de l’entretien, il appartient à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), si le demandeur soutient de façon circonstanciée, dans le délai de recours, qu’une allégation précise qui lui est prêtée dans la transcription de l’entretien procède d’une erreur de traduction ou d’un contresens et que cette erreur serait de nature à exercer une influence déterminante sur l'appréciation du besoin de protection, de tenir compte de cette contestation dans son appréciation du bien-fondé de la demande et, s’il y a lieu, d’écarter la transcription dans cette mesure.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 453615

Séance du 28 janvier 2022

Lecture du 24 février 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

M. B D a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 11 mars 2019 par laquelle le directeur général de l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile, et de lui reconnaitre la qualité de réfugié ou de renvoyer l'examen de sa demande à l'OFPRA.

Par une décision n° 19018805 du 13 avril 2021, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et lui a renvoyé l'examen de la demande de M. D.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 14 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. L'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA) se pourvoit en cassation contre la décision par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé sa décision refusant l'asile à M. D et lui a renvoyé l'affaire.

2. L'article L. 723-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛 prévoit, dans sa version applicable en l'espèce, que, hormis les cas où il s'apprête à prendre une décision reconnaissant la qualité de réfugié à partir des éléments en sa possession et où l'état de santé du demandeur y fait obstacle, l'office convoque, par tout moyen garantissant la confidentialité et la réception personnelle par le demandeur, le demandeur à un entretien personnel. Aux termes de l'article L. 733-5 du même code, dans sa version applicable en l'espèce : " Saisie d'un recours contre une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Cour nationale du droit d'asile statue, en qualité de juge de plein contentieux, sur le droit du requérant à une protection au titre de l'asile au vu des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle se prononce. / La cour ne peut annuler une décision du directeur général de l'office et lui renvoyer l'examen de la demande d'asile que lorsqu'elle juge que l'office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur et qu'elle n'est pas en mesure de prendre immédiatement une décision positive sur la demande de protection au vu des éléments établis devant elle. / Sans préjudice du deuxième alinéa, le requérant ne peut utilement se prévaloir de l'enregistrement sonore de son entretien personnel qu'à l'appui d'une contestation présentée dans le délai de recours et portant sur une erreur de traduction ou un contresens, identifié de façon précise dans la transcription de l'entretien et de nature à exercer une influence déterminante sur l'appréciation du besoin de protection ". Aux termes de l'article R. 723-8 du même code🏛 : " L'entretien personnel fait également l'objet d'un enregistrement sonore. / L'intéressé est informé dès le début de l'entretien du déroulement de l'opération d'enregistrement sonore, notamment des modalités permettant d'assurer le respect des règles de confidentialité. / A l'issue de l'entretien, le demandeur est informé de son droit d'accès à l'enregistrement sonore dans les conditions prévues à l'article L. 723-7 / Dans le cas où il existe une impossibilité technique de procéder à l'enregistrement sonore, la transcription fait l'objet d'un recueil de commentaires. Si le demandeur refuse de confirmer que le contenu de la transcription reflète correctement l'entretien, les motifs de son refus sont consignés dans son dossier. Un tel refus n'empêche pas l'office de statuer sur la demande d'asile ".

3. Il résulte des dispositions précitées que l'OFPRA ne peut être regardé comme s'étant dispensé de l'entretien, au sens du deuxième alinéa de l'article L. 733-5, aux seuls motifs que celui-ci n'a pas donné lieu à un enregistrement sonore ou que, si l'enregistrement n'a pas été possible, le demandeur n'a pas eu la possibilité de formuler des observations sur la transcription au terme de l'entretien. Dans l'hypothèse où l'enregistrement sonore n'a pu être réalisé et où le demandeur n'a pas eu la possibilité de formuler des observations sur la transcription à l'issue de l'entretien, il appartient à la Cour nationale du droit d'asile, si le demandeur soutient de façon circonstanciée, dans le délai de recours, qu'une allégation précise qui lui est prêtée dans la transcription de l'entretien procède d'une erreur de traduction ou d'un contresens et que cette erreur serait de nature à exercer une influence déterminante sur l'appréciation du besoin de protection, de tenir compte de cette contestation dans son appréciation du bien-fondé de la demande et, s'il y a lieu, d'écarter la transcription dans cette mesure.

4. Il résulte de ce qui précède que la cour, qui était saisie par M. D d'une contestation de la transcription de son entretien personnel, a commis une erreur de droit en annulant la décision par laquelle le directeur général de l'OFPRA avait rejeté la demande d'asile de M. D et en lui renvoyant l'affaire, aux seuls motifs que l'entretien de M. D n'avait fait l'objet, ni d'un entretien sonore, ni d'un recueil de commentaires, et que l'OFPRA n'avait pas présenté d'explications suffisantes à ce sujet.

5. Il résulte de ce qui précède que l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 13 avril 2021 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B D.

Délibéré dans la séance du 28 janvier 2022 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. H G, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme J E, Mme A L, M. K F, M. C M, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat-rapporteur.

Lu en séance publique le 24 février 2022.

Le président :

Signé : M. Christophe Chantepy

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Delsol

La secrétaire :

Signé : Mme I N

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