Jurisprudence : Cass. civ. 3, 02-02-2022, n° 21-11.051, F-D, Rejet

Cass. civ. 3, 02-02-2022, n° 21-11.051, F-D, Rejet

A50877LY

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:C300094

Identifiant Legifrance : JURITEXT000045133431

Référence

Cass. civ. 3, 02-02-2022, n° 21-11.051, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/78119913-cass-civ-3-02022022-n-2111051-fd-rejet
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Abstract

► L'article 145 du Code de procédure civile exige que soit rapportée la preuve d'un intérêt légitime ; ► L'appréciation de cet intérêt légitime relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.


CIV. 3

VB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 février 2022


Rejet


Mme TEILLER, président


Arrêt n° 94 F-D

Pourvoi n° W 21-11.051


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022


M. [R] [Aa], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 21-11.051 contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2020 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Ab] [W],

2°/ à Mme [S] [B],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [Aa], de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de M. [W] et de Mme [B], après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 novembre 2020), invoquant des désordres affectant la maison d'habitation qu'ils avaient acquise de Mme [M], laquelle en était attributaire à la suite du partage des intérêts patrimoniaux ayant existé entre elle et son époux, M. [Aa], M. [W] et Mme [B] ont obtenu, en référé, l'organisation d'une mesure d'expertise au contradictoire de leur venderesse et de divers intervenants à l'acte de construire.

2. Soutenant que les désordres trouvaient leur origine dans les travaux réalisés avant la vente par M. [Aa], M. [W] et Mme [B] ont assigné celui-ci, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile🏛, afin que les opérations d'expertise lui soient rendues communes et opposables.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [Aa] fait grief à l'arrêt de lui rendre les opérations d'expertises communes et opposables et de dire que celles-ci se poursuivront en sa présence, alors :

« 1°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; qu'est assimilé au constructeur de l'ouvrage, toute personne qui vend après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ; que ne peut donc être assimilée au constructeur la personne qui a réalisé des travaux sans être lié par un contrat au maître de l'ouvrage et qui n'est pas le vendeur ; que toute action dirigée contre une telle personne sur le fondement de la garantie décennale est donc manifestement vouée à l'échec ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir constaté que c'est Mme [M] et non M. [Aa] qui a vendu l'immeuble, a cependant considéré que « M. [Aa] peut être considéré comme constructeur de l'ouvrage et sa responsabilité peut être recherchée sur le fondement de l'article 1792-1 du code civil🏛, nonobstant (..) le fait qu'il n'est pas le vendeur de la maison » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1792-1 du code civil🏛 ;

2°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; que la garantie décennale ne peut être invoquée qu'à la condition que les travaux aient été réceptionnés ; qu'en retenant à l'inverse que « M. [Aa] peut être considéré comme constructeur de l'ouvrage et sa responsabilité peut être recherchée sur le fondement de l'article 1792-1 du code civil🏛, nonobstant l'absence de procès-verbal de réception des travaux », la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1792-1 du code civil🏛 ;

3°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; que l'acquéreur ne peut agir en responsabilité contractuelle en raison de désordres affectant les travaux qu'à l'encontre de son propre vendeur voire contre le locataire d'ouvrage, lié par un contrat au vendeur, lorsque le contrat d'entreprise a emporté transfert de la propriété d'une chose ; qu'en l'espèce, il est constant que M. [W] et Mme [B] ont acquis la maison de Mme [M] et que si des travaux ont pu être réalisés par M. [Aa], ce dernier n'a jamais été lié par un contrat de location d'ouvrage avec Mme [M] ; que la cour d'appel a pourtant considéré que c'est « en vain qu'il soutient qu'aucun motif légitime ne fonde sa demande parce que sa responsabilité contractuelle comme vendeur ne peut être recherchée » ; qu'à supposer qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel ait entendu indiquer qu'une action des acquéreurs contre M. [Aa] fondée sur la responsabilité contractuelle ne serait pas manifestement vouée à l'échec, elle a ainsi violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1147 du code civil🏛, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016🏛, applicable en l'espèce. »


Réponse de la Cour

4. Ayant constaté que les travaux de pose d'un plancher en bois et d'aménagement du rez-de-chaussée, que M. [Aa] avait réalisés en qualité « d'auto-constructeur », étaient à l'origine des désordres dénoncés par les acquéreurs, la cour d'appel a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par le moyen, souverainement retenu que ceux-ci justifiaient d'un motif légitime, au sens de l'article 145 du code de procédure civile🏛, tendant à ce que l'expertise ordonnée lui fût rendue commune et opposable.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [Aa] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par M. [Aa] et le condamne à payer à M. [W] et Mme [B] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour MAa [N]

M. [Aa] fait grief à la décision attaquée d'avoir déclaré les opérations d'expertise confiées à M. [F] [P] par ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Brest du 14 mai 2018 communes et opposables à M. [R] [Aa], et d'avoir dit que les opérations d'expertise confiées à M. [P] devraient se poursuivre en sa présence ;

alors 1°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; qu'est assimilé au constructeur de l'ouvrage, toute personne qui vend après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ; que ne peut donc être assimilée au constructeur la personne qui a réalisé des travaux sans être lié par un contrat au maître de l'ouvrage et qui n'est pas le vendeur ; que toute action dirigée contre une telle personne sur le fondement de la garantie décennale est donc manifestement vouée à l'échec ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir constaté que c'est Mme [M] et non M. [Aa] qui a vendu l'immeuble (arrêt, p. 2, deux premiers alinéas), a cependant considéré que « M. [Aa] peut être considéré comme constructeur de l'ouvrage et sa responsabilité peut être recherchée sur le fondement de l'article 1792-1 du code civil🏛, nonobstant (..) le fait qu'il n'est pas le vendeur de la maison » (arrêt, p. 3, dernier alinéa) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1792-1 du code civil🏛 ;

alors et en tout état de cause 2°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; que la garantie décennale ne peut être invoquée qu'à la condition que les travaux aient été réceptionnés ; qu'en retenant à l'inverse que « M. [Aa] peut être considéré comme constructeur de l'ouvrage et sa responsabilité peut être recherchée sur le fondement de l'article 1792-1 du code civil🏛, nonobstant l'absence de procès-verbal de réception des travaux » (arrêt, p. 3, dernier alinéa), la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1792-1 du code civil🏛 ;

alors et en tout état de cause 3°/ que le prononcé d'une mesure d'instruction in futurum suppose que l'action au fond susceptible d'être introduite ne soit pas manifestement vouée à l'échec ; que l'acquéreur ne peut agir en responsabilité contractuelle en raison de désordres affectant les travaux qu'à l'encontre de son propre vendeur voire contre le locataire d'ouvrage, lié par un contrat au vendeur, lorsque le contrat d'entreprise a emporté transfert de la propriété d'une chose ; qu'en l'espèce, il est constant que M. [W] et Mme [B] ont acquis la maison de Mme [M] et que si des travaux ont pu être réalisés par M. [Aa], ce dernier n'a jamais été lié par un contrat de location d'ouvrage avec Mme [M] ; que la cour d'appel a pourtant considéré que c'est « en vain qu'il soutient qu'aucun motif légitime ne fonde sa demande parce que sa responsabilité contractuelle comme vendeur ne peut être recherchée » (arrêt, p. 4, alinéa 1er ) ; qu'à supposer qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel ait entendu indiquer qu'une action des acquéreurs contre M. [Aa] fondée sur la responsabilité contractuelle ne serait pas manifestement vouée à l'échec, elle a ainsi violé l'article 145 du code de procédure civile🏛, ensemble l'article 1147 du code civil🏛, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016🏛, applicable en l'espèce.

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