Jurisprudence : TA Cergy-Pontoise, du 05-10-2011, n° 1107750

TA Cergy-Pontoise, du 05-10-2011, n° 1107750

A0164HZ4

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TA Cergy-Pontoise, du 05-10-2011, n° 1107750. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5618275-ta-cergypontoise-du-05102011-n-1107750
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Abstract

Il résulte de l'article 4 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, et de l'article 13 de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005, portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, que la collectivité publique employeur ne peut refuser de renouveler le contrat d'un agent non titulaire en fonction depuis six ans et qui a vocation a bénéficier d'un contrat à durée indéterminée, outre des motifs disciplinaires ou d'insuffisance professionnelle, que pour des motifs tirés de l'intérêt du service.


TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE CERGY-PONTOISE
N°1107750
___________
Mme Nathalie MOUILLET
___________
M Meslay
Juge des référés
___________
Ordonnance du 5 octobre 2011
__________
PCJA : 54-035-02-03-01
36-12
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le juge des référés
Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2011 sous le numéro 1107750, présentée pour
Mme Nathalie MOUILLET, demeurant Villa Victor Hugo 25 rue Pasteur à Boulogne Billancourt
(92100) par Me Krust ; Mme MOUILLET demande au juge des référés dans l'attente du jugement au
fond à intervenir :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice
administrative, la suspension de la décision en date du 6 septembre 2011 par laquelle le directeur
général de l' Etablissement public d'insertion de la défense (EPIDe) a refusé le renouvellement du
contrat à durée déterminée la liant à cet établissement à compter du 16 octobre 2011, jusqu'à ce qu'il
soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;
2°) d'enjoindre à l'EPIDe de renouveler son contrat pour une durée indéterminée selon les
conditions du dernier contrat dans un délai de 8 jours à compter de la notification du jugement ;
3°) de condamner l'EPIDe à lui verser la somme de 3000 euros en application des
dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative ;
La requérante soutient :
- qu'elle a été recrutée en 2005 en qualité de directrice de communication par l'EPIDe ; que
son contrat a été renouvelé pour trois ans ; que le directeur général lui a proposé, le 11 mai 2011, de
renouveler son contrat à compter du 17 octobre 2011 ; que par lettre en date du 26 mai 2011 et en
application des dispositions de l'article 15 de la loi du 26 juillet 2005, le directeur général de
l'établissement lui a proposé de passer un contrat à durée indéterminée à compter du 17 octobre 2011
en l'informant que sa rémunération globale annuelle sera fixée à compter du 17 octobre 2011 à
88 250 euros soit 7 350 euros bruts mensuels ; que la requérante a accepté la proposition de
renouvellement par une lettre du 5 juin 2011 en précisant que la diminution de sa rémunération ne
pouvait relever que d'une erreur de plume et en rappelant ses conditions de rémunération ; que par
lettre du 10 juin 2011, le directeur général a confirmé les termes de sa lettre initiale ajoutant que la
baisse de rémunération était justifiée par la réorganisation globale des rémunérations qui a abouti au
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nouveau référentiel validée par le conseil d'administration du 29 mars 2011, des rémunérations
pratiquées au sein de l'établissement ainsi que des rémunérations octroyées à des agents de l'Etat
effectuant des fonctions similaires ; qu'elle a contesté cette décision auprès du président de l'EPIDe ;
que son recours gracieux est resté sans réponse ; qu'en l'absence de réponse de sa part à sa dernière
proposition, le directeur général de l'EPIDE a considéré le 29 juin 2011 qu'elle avait renoncé à la
proposition de renouvellement de son contrat et lui a signifié la fin de ses fonctions au soir du 16
octobre 2011 ; que par une ordonnance en date du 29 août 2011, le juge des référés du tribunal de
céans a suspendu l'exécution des décisions des 10 et 29 juin 2011 et a enjoint au directeur de
l'EPIDe de procéder à un nouvel examen de la situation de Mme MOUILLET dans un délai de 8
jours à compter de la notification de l'ordonnance ; que par la décision susvisée du 6 septembre
2011, le directeur général de l' EPIDe a refusé de renouveler son contrat ;
Sur l'urgence :
- que la décision de ne pas renouveler son contrat la prive de son emploi et de sa
rémunération dés le 16 octobre prochain et affecte donc gravement ses intérêts personnels ; qu'ainsi
la condition d'urgence est remplie ;
Sur le doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :
- qu'en application de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984, issu de la loi du 26 juillet
2005, elle a droit au renouvellement de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée dès lors
qu'elle est en fonction depuis six ans de manière continue sur un emploi permanent ; que le refus de
renouvellement contesté n'est motivé ni par l'intérêt du service ni par sa manière de servir ;
- que la décision litigieuse viole le droit des agents non titulaires au renouvellement de leur
contrat de travail en contrat à durée indéterminée ; que cette obligation de renouvellement incombant
à l'administration est consacrée par un accord conclu entre l'Etat et les organisations syndicales le 31
mars 2011 ; que le juge des référés peut enjoindre à l'administration de reconduire le contrat d'un
agent dans l'attente d'un jugement au fond ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2011, présenté pour l'Etablissement
public d'insertion de la défense (EPIDe) par Me Haas, avocat ; l'EPIDe conclut au rejet de la requête
et à la condamnation de Mme MOUILLET à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article
L761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- qu'un agent public n'a aucun droit au renouvellement de son contrat, l'administration
pouvant refuser de renouveler le contrat pour des motifs d'intérêt général ; que le refus de renouveler
le contrat est justifié en l'espèce par le fait que la rémunération de la requérante est excessive ;
qu'elle est manifestement supérieure à celle que pourraient percevoir des agents de l'Etat de
qualification équivalente exerçant des fonctions analogues ; qu'en conséquence, la requérante n'est
pas fondée à soutenir que l'EPIDe était tenu de lui proposer un contrat maintenant son niveau de
rémunération antérieur ;
- que le juge des référés ne peut, sans excéder ses pouvoirs, lui enjoindre de renouveler le
contrat la liant à Mme MOUILLET ou imposer le maintien provisoire des relations contractuelles audelà
du terme du contrat en cours ;
Vu le mémoire, enregistré au greffe du tribunal le 3 octobre 2011, présenté pour Mme
MOUILLET tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre,
que sa rémunération n'est pas manifestement disproportionnée par rapport à celle de fonctionnaires
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de qualification équivalente exerçant des fonctions analogues ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier
Vu la directive n° 1999/70 CE du Conseil en date du 28 juin 1999 sur le travail à durée
déterminée ;
Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique de l'Etat ;
Vu la loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit
communautaire à la fonction publique ;
Vu le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux
agents non titulaires de l'Etat ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la requête numéro 1108061 enregistrée le 19 septembre 2011 par laquelle Mme
MOUILLET demande l'annulation de la décision du 6 septembre 2011 ;
Vu la décision par laquelle le président du tribunal a désigné M MESLAY, vice-président,
pour statuer sur les demandes de référé ;
Après avoir convoqué à une audience publique :
- Mme MOUILLET ;
- l'EPIDe ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 3 octobre 2011 à 15 heures au cours de
laquelle ont été entendus :
- le rapport de M Meslay, juge des référés ;
- les observations de Me Krust pour Mme MOUILLET ;
- les observations de Me Robillot, substituant Me Haas, représentant l'EPIDe ;
Après avoir prononcé, à l'issue de l'audience, la clôture de l'instruction ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 521-1 du code de justice
administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand
une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en
réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de
l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait
état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la
décision (...) » ;
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En ce qui concerne la condition d'urgence :
Considérant que la décision attaquée qui a pour objet de mettre fin aux relations
contractuelles en cours entre Mme MOUILLET et l'EPIDe et qui la privera ainsi de ses revenus, doit
être regardée, eu égard à sa nature et à ses effets, comme portant une atteinte suffisamment grave et
immédiate à sa situation ; que, dans ces conditions, la condition d'urgence énoncée à l'article L. 521-
1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie ;
En ce qui concerne les moyens propres à créer un doute sérieux sur la légalité de la
décision:
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : « Par
dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels
peuvent être recrutés dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires
susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie
A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des
fonctions ou les besoins des services le justifient. Les agents ainsi recrutés sont engagés par des
contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables,
par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. Si, à l'issue de
la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne
peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée... » ; qu'aux termes de
l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 prise pour la transposition de la directive précitée : « I. -
Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la
présente loi ou bénéficie, à cette date, d'un congé, en application des dispositions du décret
mentionné à l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique de l'Etat, le renouvellement de son contrat est soumis aux
conditions prévues aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article 4 de la même loi.
Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins,
de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et
pour une durée indéterminée. (…) » ; qu'il résulte de ces dispositions que la collectivité publique
employeur ne peut refuser de renouveler le contrat d'un agent non titulaire en fonction depuis six ans
et qui a vocation à bénéficier d'un contrat à durée indéterminée, outre des motifs disciplinaires ou
d'insuffisance professionnelle, que pour des motifs tirés de l'intérêt du service ;
Considérant que les missions confiées à Mme MOUILLET relèvent de l'article 4 de la loi
du 11 janvier 1984 ; que l'intéressée a, par suite, vocation à bénéficier d'un contrat à durée
indéterminée après six années continues de fonctions ;
Considérant que par la décision contestée du 6 septembre 2011, le directeur général de
l'EPIDe a refusé de renouveler le contrat de Mme MOUILLET sans indiquer les motifs sur lesquels
il se fondait pour s'opposer à ce renouvellement ; que si l'EPIDe fait valoir devant le juge des référés
que sa décision est motivée par le caractère excessif de la rémunération de Mme MOUILLET, il
n'établit pas, en l'état de l'instruction, que la rémunération de la requérante excéderait celle à
laquelle peuvent prétendre des fonctionnaires de l'Etat de qualification équivalente exerçant des
fonctions équivalentes ; qu'ainsi le moyen invoqué par Mme MOUILLET, tiré de ce qu'en refusant
de reconduire son contrat pour une durée indéterminée, l'EPIDe a méconnu les dispositions de
l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 est, en l'état de
l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décisions attaquée ; qu'il y a
lieu, dès lors, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision attaquée jusqu'à ce qu'il soit
statué au fond sur la demande ;
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Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que si, dans le cas où les conditions posées par l'article L. 521-1 du code de
justice administrative sont remplies, le juge des référés peut suspendre l'exécution d'une décision
administrative, même de rejet, et assortir cette suspension d'une injonction, s'il est saisi de
conclusions en ce sens, les mesures qu'il prescrit ainsi doivent, comme l'imposent les dispositions
précitées de l'article L. 511-1 du même code, présenter un caractère provisoire ; que la présente
décision implique, eu égard à ses motifs, d'enjoindre au directeur général de l'EPIDe de reconduire
le contrat dont bénéficie Mme MOUILLET dans l'attente d'une solution au fond du litige ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à
payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les
dépens ; que le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ;
il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à
cette condamnation ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de
l'EPIDe une somme de 1500 euros au titre des frais exposés par Mme MOUILLET à l'occasion du
présent litige ; que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par l'EPIDe soit mise
à ce titre à la charge de la requérante qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
O R D O N N E :
Article 1er : L'exécution de la décision en date du 6 septembre 2011 du directeur général de
l'EPIDe est suspendue.
Article 2 : Il est enjoint au directeur général de l'EPIDe de reconduire, à compter du 16
octobre 2011, le contrat dont bénéficie Mme MOUILLET dans l'attente d'une solution au fond du
litige.
Article 3 : L'EPIDe versera à Mme MOUILLET la somme de 1500 euros en application des
dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté et les conclusions présentées
par l'EPIDe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme MOUILLET et à l'EPIDe.
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Fait à Cergy-Pontoise, le 5 octobre 2011.
Le juge des référés,
Signé
P. MESLAY
Le greffier,
Signé
P. DUMEIX
La République mande et ordonne au préfet des Hauts de Seine en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce
requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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