Jurisprudence : CA Aix-en-Provence, 14-05-2008, n° 07/03014, Infirmation

CA Aix-en-Provence, 14-05-2008, n° 07/03014, Infirmation

A8731HI9

Référence

CA Aix-en-Provence, 14-05-2008, n° 07/03014, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/4332752-ca-aixenprovence-14052008-n-0703014-infirmation
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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10° Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 14 MAI 2008
N° 2008/
Rôle N° 07/03014
Charles Z
C/
Jean-Marie Y
CLINQUE DU COUDON
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR
Grosse délivrée
le .
à .
réf
Décision déférée à la Cour
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 23 Novembre 2006 enregistré au répertoire général sous le n° 05/1434.

APPELANT
Monsieur Z Z
demeurant DINAN
représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour
ayant Me ... ..., avocat au barreau de RENNES
INTIMÉS
Monsieur Y Y
demeurant LA VALETTE DU VAR
représenté par la SCP MAYNARD - SIMONI, avoués à la Cour,
assisté de la SCP LOUSTAUNAU SABATER FORNO, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
CLINQUE DU COUDON, RCS DE TOULON N° 67 B 137 agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, LA VALETTE DU VAR
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Yves SOULAS, avocat au barreau de MARSEILLE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, TOULON
défaillante
*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 19 Mars 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mai 2008.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mai 2008,
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***
EXPOSÉDULITIGE
Victime d'un traumatisme du genou gauche le 24 août 1981, M. Z Z a subi diverses interventions chirurgicales entre le 2 mars 1982 et le 10 juillet 1986 ayant abouti à la mise en place d'une prothèse du genou ; à la suite de douleurs apparues en septembre 1996, il a consulté le Dr Y Y à la clinique du Coudon à LA-VALETTE-DU-VAR (Var) qui a réalisé, le 5 novembre 1996, une intervention pour changement de prothèse à la suite de laquelle il a été victime d'une infection.

Par jugement contradictoire du 23 novembre 2006, le Tribunal de Grande Instance de TOULON a - Mis hors de cause la S.A. CLINIQUE DU COUDON,
- Dit que la responsabilité de la clinique du Coudon ou du Dr Y Y n'est pas engagée du fait de l'infection pathogène dont a souffert M. Z Z et dont il demande réparation,
- Dit que le Dr Y Y a manqué, toutefois, à l'égard de M. Z Z à son devoir d'information,
- Débouté, toutefois, M. Z Z de ses demandes en réparation de son préjudice, faute d'un lien démontré entre le préjudice et la faute présumée du Dr Y Y,
- Condamné le Dr Y Y à payer à M. Z Z la somme de 2.000 sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile (aujourd'hui Code de procédure civile),
- Condamné le Dr Y Y aux dépens, dont les frais d'expertise.

M. Z Z a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 20 février 2007.
Vu l'assignation de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE (ci-après C.P.A.M.) du Var notifiée à personne habilitée le 4 septembre 2007 à la requête de M. Z Z.
Vu les conclusions de M. Y Y en date du 20 septembre 2007.
Vu les conclusions de la S.A. CLINIQUE DU COUDON en date du 8 octobre 2007.
Vu les conclusions récapitulatives de M. Z Z en date du 21 novembre 2007.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 20 février 2008.
MOTIFSDEL ' ARRÊT
I SUR L'ORIGINE NOSOCOMIALE DE L'INFECTION ET LES RESPONSABILITÉS

Attendu qu'une mesure d'expertise a été confiée par ordonnance de référé du 11 avril 2003 et ordonnance modificative du 9 juillet 2003 au Pr ... ... qui a déposé son rapport définitif le 7 septembre 2004.
Attendu qu'il en ressort que M. Z Z, né le 20 octobre 1932, a été victime en 1981 d'une chute ayant occasionné un traumatisme du genou gauche nécessitant, en juillet 1986, la pose d'une prothèse totale du genou gauche dont les résultats furent bons pendant huit à neuf ans.
Attendu toutefois que cette prothèse s'est progressivement détériorée au cours du temps, rendant l'articulation douloureuse et créant de plus une boiterie rendant la marche difficile et limitée, conduisant le Dr Y Y à procéder, le 5 novembre 1996, à l'enlèvement de la prothèse de 1986, à la pose d'une autre prothèse et au comblement des cavités osseuses, qu'il s'est agi d'une intervention particulièrement longue (seize heures) et complexe.
Attendu qu'est immédiatement survenue une infection par le staphylocoque epidermidis nécessitant une mise sous antibiothérapie suivie de nombreuses interventions.
Attendu que l'expert précise que le staphylocoque epidermidis fait partie de la flore normale de la peau et des muqueuses et n'est pas, à l'habitude, pathogène mais qu'il peut être rendu responsable d'infection lors d'interventions chirurgicales difficiles, qu'il estime que cette infection n'entre pas dans le cadre des infections nosocomiales et que M. Z Z a subi les effets péjoratifs de l'évolution d'une infection 'réveillée' par l'intervention mais non créée par cette dernière.
Mais attendu qu'une infection nosocomiale est une infection contractée dans un établissement de soins, qui n'existait pas à l'entrée et qui n'était pas en incubation, qu'il résulte du rapport d'expertise que M. Z Z n'avait aucune infection avant l'intervention et que le staphylocoque epidermidis est un germe présent à la surface de la peau mais également responsable, en milieu hospitalier, d'infections lors d'interventions chirurgicales difficiles, comme en l'espèce.
Attendu dès lors que l'infection par le staphylocoque epidermidis s'étant produite à l'occasion de l'intervention chirurgicale, il en ressort que M. Z Z a bien été victime d'une infection nosocomiale.
Attendu que l'acte médical à l'origine de cette infection nosocomiale ayant eu lieu le 5 novembre 1996, l'article L 1142-1 du Code de la santé publique, tel qu'issu de la loi du 4 mars 2002, est inapplicable aux faits de l'espèce, qu'en conséquence seules les dispositions de l'article 1147 du Code civil sont applicables.
Attendu qu'en application de cet article, un médecin et un établissement de santé privé sont tenus, en matière d'infection nosocomiale, d'une obligation de sécurité de résultat qui n'est pas limitée aux infections d'origine exogène et dont ils ne peuvent se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère.
Attendu que pour sa part M. Y Y n'allègue aucune cause étrangère susceptible de l'exonérer de sa responsabilité, son argumentation ne portant que sur l'absence du caractère nosocomial de l'infection.
Attendu que contrairement à ce que soutient la S.A. CLINIQUE DU COUDON, une infection nosocomiale à l'occasion d'une intervention chirurgicale particulièrement complexe et invasive n'est nullement imprévisible, que les différents moyens employés par la clinique pour stériliser le bloc opératoire ne sont pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité.
Attendu qu'il apparaît donc que ni le médecin ni l'établissement de santé privé ne rapportent la preuve d'une cause étrangère de nature à les exonérer de leur responsabilité, que le jugement déféré sera dès lors infirmé et que, statuant à nouveau, M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON seront déclarés responsables de l'infection nosocomiale présentée par M. Z Z suite à l'intervention chirurgicale du 5 novembre 1996 et seront solidairement tenus de l'indemniser du dommage en résultant.
Attendu que de ce fait la discussion relative à l'existence d'un éventuel défaut d'information, évoquée à titre subsidiaire par M. Z Z, devient sans objet.
II SUR L'ÉVALUATION ET LA LIQUIDATION DES PRÉJUDICES DE M. ZZZ
Attendu que l'expert a fixé la date de consolidation au 24 mai 2004, qu'il fixe le taux d'I.P.P. à 25-30 % correspondant à l'état actuel de M. Z Z qui a été en partie aggravé par les interventions pratiquées par le Dr Y Y dans une proportion d'environ 5 %, qu'il évalue le pretium doloris à 3,5/7 (interventions chirurgicales diverses, soins intermédiaires, souffrances physiques et psychologiques) et l'aggravation du préjudice esthétique à 1/7 (nouvelles cicatrices post-opératoires sur un genou fortement lésé avant la première intervention de 1996), que le préjudice d'agrément antérieur à la première intervention de 1996 est resté le même.
Attendu que la C.P.A.M. du Var, régulièrement assignée, n'a pas constitué Avoué mais a fait connaître à la Cour, par lettre du 24 septembre 2007 portée à la connaissance des autres parties, qu'elle n'avait aucun débours à faire valoir.
Le déficit fonctionnel séquellaire
Attendu que ce poste de préjudice sera évalué à la somme demandée de 6.000 compte tenu de l'âge de M. Z Z à la date de consolidation (71 ans) et de la part du taux d'I.P.P. correspondant à l'infection nosocomiale (5 %).
Le préjudice au titre des souffrances endurées
Attendu que ce poste de préjudice sera évalué à la somme demandée de 6.000 compte tenu de l'évaluation à 3,5/7 qui en a été faite par l'expert judiciaire.
Le préjudice esthétique
Attendu que ce poste de préjudice sera évalué à la somme demandée de 1.000 compte tenu de l'évaluation à 1/7 qui en a été faite par l'expert judiciaire.
Le préjudice 'd'impréparation'
Attendu que M. Z Z réclame en outre une somme de 5.000 au titre d'un poste de préjudice qu'il qualifie 'd'impréparation' dans la mesure où, faute d'information sur les risques possibles d'infection nosocomiale, il n'a pu anticiper psychologiquement la possibilité d'une telle infection.
Mais attendu que le préjudice ainsi allégué est de nature psychologique et a déjà été indemnisé dans le cadre du préjudice au titre des souffrances endurées puisque l'expert judiciaire a expressément motivé son évaluation à 3,5/7 en se référant notamment aux souffrances psychologiques subies par M. Z Z.
Attendu que M. Z Z sera donc débouté de ce chef de demande.
Attendu que le préjudice corporel global de M. Z Z sera dès lors évalué à la somme de 13.000 que M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON seront solidairement condamnés à lui payer.
Attendu que le présent arrêt sera déclaré commun et opposable à la C.P.A.M. du Var.
Attendu qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique des parties condamnées, d'allouer à M. Z Z la somme de 2.000 au titre des frais par lui exposés et non compris dans les dépens.
Attendu que M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON, parties perdantes, seront solidairement condamnés au paiement des dépens de la procédure de première instance, lesquels comprendront les frais d'expertise, et d'appel.

PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire.
Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau
Vu l'article 1147 du Code civil.
Déclare M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON responsables de l'infection nosocomiale présentée par M. Z Z suite à l'intervention chirurgicale du 5 novembre 1996.
Déclare sans objet la discussion relative à l'existence d'un éventuel défaut d'information, évoquée à titre subsidiaire par M. Z Z.
Condamne solidairement M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON à payer à M. Z Z la somme de TREIZE MILLE EUROS (13.000 ) en réparation de son préjudice corporel.
Déboute M. Z Z du surplus de ses demandes indemnitaires relatif à l'indemnisation d'un préjudice 'd'impréparation'.
Déclare le présent arrêt commun et opposable à la C.P.A.M. du Var.
Condamne solidairement M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON à payer à M. Z Z la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 ) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Condamne solidairement M. Y Y et la S.A. CLINIQUE DU COUDON aux dépens de la procédure de première instance, lesquels comprendront les frais d'expertise, et d'appel et autorise la S.C.P. BOTTAÏ, GEREUX, BOULAN, Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.
Rédacteur M. ...
Madame ... ... SAUVAGE
GREFFIÈRE PRÉSIDENTE

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