Circ. SG, NOR: IOCD1009702C, du 31-03-2010, Conséquences de l'entrée en vigueur, au 1er mars 2010, de la question prioritaire de constitutionnalité

Circ. SG, NOR: IOCD1009702C, du 31-03-2010, Conséquences de l'entrée en vigueur, au 1er mars 2010, de la question prioritaire de constitutionnalité

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L0072INY


NOR: IOCD1009702C
Liberté, Égalité' Fraternité
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Ministère de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales
Paris, le 3 1 MAR. 201 0
Le Ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales
à
Mesdames et Messieurs les préfets
Monsieur le préfet de police
Messieurs les hauts-commissaires
OBJET: Conséquences de l'entrée en vigueur, au 1er mars 2010, de la question prioritaire de constitutionnalité.
rJ,: 1.
La procédure dénommée « question prioritaire de constitutionnalité »,
applicable aux instances en cours au 1er mars 2010, introduit une réforme importante
susceptible d'avoir des conséquences sur la stabilité juridique de nos textes
normatifs, y compris les plus anciens et les plus communément appliqués.
Cette procédure offre au justiciable la possibilité de saisir le Conseil
constitutionnel de la conformité de dispositions législatives promulguées aux droits
et libertés constitutionnellement garantis. Ce droit est ouvert à l'occasion des procès
intentés devant toutes les juridictions, administratives ou judiciaires.
Il est probable que cette question soit soulevée de manière fréquente dans
les premiers mois qui vont suivre son entrée en vigueur. Cette nouvelle procédure
a, en effet, fait l'objet d'une information importante auprès de tous les avocats
inscrits à un barreau français. Par ailleurs, le champ d'application potentiel de la
question prioritaire de constitutionnalité est particulièrement large.
Il m'a semblé utile de vous présenter les principales caractéristiques de cette
nouvelle procédure (fiche jointe), au bénéfice des observations suivantes.
adresse postale: place Beauvau 75800 Paris cedex 08 - standard 01.49.27.49.27 - 01.40.07.60.60
adresse internet: www.interieur.gouv.fr
Son champ d'application inclut toutes les lois antérieures à 1958 lesquelles,
par définition, n'ont pas été déférées au Conseil constitutionnel et les lois
postérieures à 1958 non déférées à la censure du Conseil.
S'agissant des lois déférées au Conseil constitutionnel, seules les dispositions
qui ont été examinées et déclarées expressément conformes à la Constitution sortent
du champ d'application de la question prioritaire de constitutionnalité.
En outre, toute circulaire impérative d'application d'une loi ouvre une voie
de contestation de cette loi devant le Conseil constitutionnel, en permettant de
soulever une question prioritaire de constitutionnalité.
En cas de déclaration d'inconstitutionnalité, la loi ou la disposition législative
en cause sera abrogée (art. 62 de la Constitution).
Il est également envisageable que le Conseil constitutionnel juge que la
disposition législative contestée n'est pas, en tant que telle, inconstitutionnelle, mais
qu'elle le devient dans certaines conditions d'application. Le Conseil pourrait, dans
cette hypothèse, non pas abroger la disposition législative, mais recourir à la
technique des réserves d'interprétation.
Cette nouvelle procédure aura également des conséquences sur la défense
que l'Etat est amené à produire devant les juridictions administratives.
Lorsqu'une question prioritaire de constitutionnalité, soulevée devant un
tribunal administratif ou une cour administrative d'appel, vous sera notifiée par la
juridiction, il vous appartiendra de présenter vos observations à la juridiction
concernée dans « un bref délai» (nouvel article R 771-5 du Code de justice
administrative).
La DLP AJ se tient à votre disposition pour vous apporter son concours au
besoin. En tout état de cause, vous l'informerez donc de toutes les questions
prioritaires de constitutionnalité dont vous serez destinataire. Une boite
fonctionnelle, qpc@interieur.gouv.fr, a été créée à cette fin.
En outre, je vous rappelle que le contentieux afférent aux élections politiques
est de la compétence de la DMAT. Vous adresserez donc à cette direction (bureau des
élections et des études politiques) pour attribution les questions prioritaires de
constitutionnalité relevant de ce domaine.
Par ailleurs, vous veillerez également à informer la DGCL des questions
relatives aux collectivités territoriales, et la DMAT des autres questions relevant de
sa compétence.
Outre la transmission à la juridiction, je vous demande donc de m'adresser,
pour information, un exemplaire de vos observations. En effet, il appartiendra à
l'administration centrale, par l'intermédiaire du secrétariat général du
Gouvernement, de produire dans des délais très courts des éléments de défense
devant le Conseil d'Etat sur la question prioritaire de constitutionnalité transmise par
les juges du fond.
En outre, s'il était porté à votre connaissance des questions prioritaires de
constitutionnalité dans lesquelles l'Etat ne serait partie mais qui présenteraient un
intérêt pour le ministère de l'intérieur, vous voudrez bien m'en informer sous le
même timbre.
Enfin, j'appelle votre attention sur les conséquences de la réforme sur les
procédures d'urgence. Elle prévoit qu'en principe le juge saisi de la question
prioritaire de constitutionnalité doit surseoir à statuer. Toutefois, la procédure
prévoit que le juge peut régler la partie du litige qui n'est pas commandée par la
question en elle même, lorsque le sursis à statuer risquerait d'entraîner des
conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits d'une
partie. Si tel est le cas dans un litige auquel vous êtes partie, vous indiquerez au juge
l'intérêt qui s'attache à ce que le principal soit tranché.
Au vu des premières décisions faisant application de la question prioritaire
de constitutionnalité et des informations que vous m'aurez transmises d'ici l'été, un
bilan de la procédure sera réalisé par l'administration centrale.
r délégation.
du caJillet
Michel BART
Annexe
Le mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité
L'article 61-1 de la Constitution, résultant de la loi constitutionnelle du
23 juillet 2008, dispose:
"Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est
soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la
Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur
renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai
déterminé.
Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article".
Cette loi organique, n° 2009-1523 du 10 décembre 2009, a été complétée
par un décret n° 2010-148 du 16 février 2010 .
• Cette question peut être soulevée à tout moment et devant toutes les
juridictions relevant du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation.
Le moyen tiré de l'inconstitutionnalité d'une disposition législative
peut être soulevé devant n'importe quelle juridiction administrative (TA, CAA,
juridictions administratives spécialisées comme la CNDA, les Commissions
départementales d'aide sociale, les sections disciplinaires des ordres
professionnels ou des établissements universitaires, ... ) ou judiciaire (civile,
sociale, pénale - des aménagements sont prévus pour ces dernières, notamment
le fait que le moyen ne peut être soulevé devant la cour d'assises -), dès lors
qu'elle relève du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en appel.
Il peut également être soulevé pour la première fois devant la Cour de
cassation ou devant le Conseil d'Etat que ce soit en sa qualité de juge de
premier et dernier ressort, d'appel ou de cassation.
• Cette question n'est recevable et transmissible au Conseil
constitutionnel qu'à certaines conditions
Outre le fait que le moyen tire de l'inconstitutionnalité d'une
disposition législative devra être présenté « dans un écrit distinct et motivé », la
loi organique a prévu trois conditions de recevabilité:
1°) La disposition légale contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou
constitue le fondement des poursuites;
2°) Elle doit ne pas avoir été déjà déclarée conforme à la Constitution dans les
motifs i;Lle dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des
circonstances.
Cette condition est importante. Si de nombreuses lois votées par le
Parlement ont été déférées au Conseil constitutionnel, celui-ci n'examine pas
nécessairement r ensemble des motifs d'inconstitutionnalité ou des dispositions
d'une loi.
Pour chaque loi déférée, seules les dispositions législatives
expressément déclarées conformes à la Constitution seront, dès lors, exclues du
champ d'application de la question prioritaire de constitutionnalité.
3°) La question ne doit pas être dépourvue de caractère sérieux.
Si la question satisfait à ces trois conditions, elle est adressée, par la
juridiction devant laquelle elle est soulevée, au Conseil d'Etat ou à la Cour de
cassation, dans les huit jours de son prononcé. La juridiction à r origine de la
transmission sursoit à statuer jusqu'à réception de la décision du Conseil d'Etat
ou de la Cour de cassation ou, s'il a été saisi par ces derniers, du Conseil
constitutionnel.
Le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation disposera d'un délai de trois
mois, à compter de la réception de la transmission de la question, pour saisir ou
non le Conseil constitutionnel.
Le renvoi n'est en effet prononcé que si, pour le Conseil d'Etat ou la
Cour de cassation, les conditions mentionnées ci-dessus sont remplies et que la
disposition contestée soulève une "question nouvelle" ou "présente une
difficulté sérieuse".
• L'examen des questions de constitutionnalité par le Conseil
constitutionnel
Dès réception, le Conseil constitutionnel avise immédiatement le
Président de la République, le Premier ministre et les présidents de rAssemblée
nationale et du Sénat qui sont invités à produire leurs observations sur la
question de constitutionnalité en cause.
Le Conseil constitutionnel rend sa décision dans un délai de trois mois.
Cette décision est notifiée aux parties et communiquée au Conseil d'Etat
ou à la Cour de cassation ainsi qu'à la juridiction devant laquelle la question de
constitutionnalité a été soulevée. Elle est également notifiée au Président de la
République, au Premier ministre et aux présidents des assemblées.
La décision du Conseil constitutionnel est publiée au Journal officiel.

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