Jurisprudence : CA Paris, 4, 6, 18-09-2015, n° 13/13322

CA Paris, 4, 6, 18-09-2015, n° 13/13322

A2423NPG

Référence

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Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 4 - Chambre 6 ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2015 (n°, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 13/13322
Décision déférée à la Cour Jugement du 18 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/17250

APPELANTE
SA AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux
Dont le siège social est

NANTERRE CEDEX
Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque K0111
Assistée par Me Serge BRIAND, avocat au barreau de PARIS, toque D0208
INTIMÉS
Monsieur Gérard, Fernand, Marcel, Antoine Y

PARIS
ET
Monsieur Marie-Odile X

PARIS
Représentés par Me Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque B1055
Assistés par Me Corinne DIAZ, avocat au barreau de PARIS, toque E1360
SARL KAD DECOR prise en la personne de ses représentants légaux
Dont le siège social est
RCS 502 966 559

PARIS
Représentée par Me Jean-Jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque D0675
Assistée par Me Isabelle THOLON-MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque G491

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Valérie GERARD, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Madame Marie Christine BERTRAND, Présidente
Madame Valérie GERARD, Conseillère
Madame Madeleine HUBERTY, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats Madame Sabrina RAHMOUNI
ARRÊT
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie Christine BERTRAND, Présidente et par Madame Sabrina RAHMOUNI, Greffier auquel a été remis la minute par la magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Gérard Y et Marie-Odile X sont propriétaires de deux appartements contigus dans un immeuble situé à Paris 15ème.
Ils ont souhaité réunir les deux appartements et faire des travaux d'amélioration qu'ils ont confiés à la SARL KAD DECOR selon un premier devis d'un montant de 34'916,28 euros TTC. Ils ont également accepté un devis d'un montant de 8'700,06 euros TTC pour l'aménagement de la cuisine et un devis d'un montant de 629,83 euros TTC pour divers travaux relatifs au séjour, à la salle de bains et au couloir.
En décembre 2010, les consorts ... ont fait constater l'existence de malfaçons et non-façons et la SARL KAD DECOR a sollicité le règlement du solde du chantier.
Par ordonnance d'injonction de payer du 5 mai 2011, les consorts ... ont été condamnés à régler la somme de 15'475,47 euros en principal à la SARL KAD DECOR
Par ordonnance du 27 mai 2011, les consorts ... ont obtenu la désignation de Pierre ... en qualité d'expert, remplacé par Nadia ....
Les consorts ... ont formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer et le tribunal d'instance de Paris 15ème s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris.
Le rapport d'expertise a été déposé le 30 avril 2012.

Par jugement du 18 juin 2013, le tribunal de grande instance de Paris, examinant les deux demandes, a statué en ces termes
- constate la caducité de la requête en injonction de payer formée par la SARL KAD DECOR à l'encontre de Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X';
- déclare non avenue l'ordonnance portant injonction de payer du 5 mai 2011';
- rejette la demande tendant à voir prononcer la réception judiciaire du chantier au 30 novembre 2010,
- condamne la SARL KAD DECOR à payer à Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X les sommes suivantes
· 13'295,53 euros HT au titre des travaux réparatoires,
· 1'910,08 euros HT au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre,
· 2'191,31 euros TTC au titre de la facture de plomberie de Monsieur ...,
· 17'100 euros au titre du préjudice de jouissance,
Ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
- dit que l'indexation des sommes nécessaires à l'exécution des travaux (13'295,53 euros HT et 1'910,08 euros HT) se fera sur l'évolution à ce jour de l'indice BT01, l'indice de référence étant celui de la date du dépôt du rapport (valeur avril 2012) et que les sommes restant dues à ce titre porteront intérêts au taux légal à compter de ce jour;
- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil,
- condamne la SA AXA France IARD à relever et garantir son assurée la SARL KAD DECOR in solidum, à concurrence des sommes de 13'295,56 euros HT correspondant aux frais réparatoires et de 1'910,08 euros HT au titre des honoraires du maître d'oeuvre, étant précisé que la franchise est opposable aux tiers,
condamne in solidum la SA AXA France et la SARL KAD DECOR à payer à Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X la somme de 3'500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
rejette le surplus des demandes,
condamne in solidum la SA AXA France IARD et la SARL KAD DECOR aux dépens comprenant le coût de l'expertise judiciaire et les dépens de l'instance en référé,
ordonne l'exécution provisoire.

La SA AXA France IARD a interjeté appel de cette décision le 2 juillet 2013.
Vu les dernières conclusions de la SA AXA France IARD du 13 mai 2015,
Vu les dernières conclusions de Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X du 4 mai 2015,
Vu les dernières conclusions de la SARL KAD DECOR du 20 mai 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION
- La rupture des relations contractuelles et la réception des travaux
La SARL KAD DECOR soutient que la rupture est entièrement imputable aux consorts ... qui lui ont interdit l'accès au chantier de manière abusive, l'empêchant de finir le chantier.
Les consorts ... font valoir qu'ils ont perdu toute confiance en la SARL KAD DECOR qui a dépassé les délais convenus et est à l'origine de nombreuses non-façons et malfaçons qu'elle n'a jamais proposé de reprendre.
Il résulte des déclarations des parties devant l'expert, aucune pièce écrite n'ayant été échangée entre les parties avant la mise en demeure du 17 décembre 2010 à l'initiative du conseil des consorts ..., qu'après quatre mois de chantier, celui-ci n'était toujours pas achevé et qu'il existait nombreuses malfaçons et non-façons décrites dans le procès-verbal de constat du 6 décembre 2010, sans que la SARL KAD DECOR n'ait jamais proposé ni de les reprendre, ni d'organiser un rendez-vous de réception, cette dernière se contentant de solliciter le seul règlement de sa facture. La SARL KAD DECOR n'a jamais non plus sollicité que les clés lui soient restituées pour reprendre ses travaux.
Comme le relève l'expert à juste titre, si les désordres pris individuellement sont mineurs, leur accumulation est déplorable et a conduit les consorts ... à vivre dans des conditions inacceptables. Dès lors en l'absence de toute volonté de la SARL KAD DECOR de reprendre les désordres constatés, c'est à juste titre que les consorts ... ont pris l'initiative de la rupture des relations contractuelles entre les parties, intervenue lors de la mise en demeure du 17 décembre 2010.
La qualification d'ouvrage des travaux réalisés par la SARL KAD DECOR n'est pas discutée par les parties et s'impose compte tenu de l'ampleur des travaux et de la démolition de cloisons.
Le prononcé de la réception judiciaire des travaux suppose d'une part que les travaux soient en état d'être reçus, mais aussi un refus abusif du maître de l'ouvrage de prononcer une réception expresse sollicitée par le constructeur. Or en l'espèce aucune des parties, n'a manifesté la volonté de prononcer une quelconque réception, la mise en demeure du 17 décembre étant parfaitement explicite sur la volonté des consorts ... de ne pas accepter les travaux de ne pas les régler et d'obtenir le règlement de travaux de réparation.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont énoncé que la responsabilité de la SARL KAD DECOR était engagée sur le seul plan contractuel.
- Les désordres

La cour se réfère expressément à la description des désordres figurant dans la décision déférée, la matérialité de ces désordres n'étant pas discutée.
Les malfaçons et non-façons sont exclusivement imputables à la SARL KAD DECOR qui devait des travaux exempts de tout défaut et tout mettre en oeuvre pour assurer la réception et les reprises des désordres constatés, ce qu'elle n'a pas fait. Contrairement à ce qu'elle soutient, ces malfaçons et non-façons ne sont pas dues à l'interdiction du chantier par les consorts ... mais au seul non-respect de ses obligations contractuelles. Compte tenu des travaux devant être réalisés, la durée de quatre mois évaluée par l'expert était raisonnable et aurait dû suffire à la SARL KAD DECOR pour terminer ses travaux. Or au jour de la rupture des relations contractuelles, le chantier était loin d'être terminé et les reprises nécessaires excédaient largement les 2 à 3 jours invoqués par la SARL KAD DECOR
Il résulte du rapport de l'expert que la facture Enjolet est exclusivement consacrée aux travaux d'urgence notamment de réparation d'une fuite de la baignoire installée par la SARL KAD DECOR Cette dernière qui devait des travaux exempts de tout défaut doit assumer les conséquences des désordres affectant ses travaux et c'est donc à bon droit que les premiers juges ont mis cette facture à la charge de la SARL KAD DECOR
L'expert a exactement exclu des travaux de reprise ceux qui n'étaient pas compris dans les devis initiaux et les a exactement évalués au regard de la nature de ces travaux de reprise.
Les frais et honoraires de maîtrise d'oeuvre sont nécessaires en raison du nombre et de la nature des désordres qui nécessitent une coordination de chantier qui incombait à la SARL KAD DECOR et c'est donc justement que les premiers juges les ont mis à la charge de la SARL KAD DECOR
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a fixé à la somme de 23'876 euros le montant des travaux réparatoires, à cette somme devant s'ajouter le remboursement de la facture ENJOLET, soit 2'191,31 euros TTC et les honoraires de maîtrise d'oeuvre pour un montant de 1'910,08 euros HT.
En revanche c'est à tort que les premiers juges ont réduit la créance de la SARL KAD DECOR à la somme de 10'580,47 euros alors que le solde restant dû s'élève à la somme de 15'475,47 euros. Il n'y a pas lieu de déduire à nouveau des travaux non réalisés qui sont inclus dans le montant des travaux de reprise. Le jugement sera infirmé de ce chef et, après compensation entre les créances respectives des parties, la somme due par la SARL KAD DECOR au titre des travaux de reprise s'élève à 23'876,00 ' 15'475,47 = 8'400,53 euros TTC.
- Le préjudice de jouissance
Les consorts ... ont formé un appel incident de ce chef et réclament la somme de 25'542 euros en considérant que le préjudice a duré jusqu'à fin octobre 2012.
Il est exact que le préjudice a perduré dans le séjour/salon qui demeurait encombré et les premiers juges ont exactement évalué ce préjudice à la somme de 4'500 euros, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé le préjudice de jouissance total à la somme de 17'100 euros.
- La garantie de la SA AXA France IARD
La SARL KAD DECOR a souscrit auprès de la SA AXA France IARD un contrat d'assurance BTPLUS comportant des garanties assurances dommages en cours de chantier (effondrement catastrophes naturelles'), responsabilité pour dommages de nature décennale et responsabilité civile, après réception, connexe à celle pour dommages de nature décennale, qui ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce, aucun dommage de caractère décennal n'ayant été caractérisé et aucune réception n'ayant été prononcée.
Il a également été souscrit une assurance de responsabilité civile du chef d'entreprise avant ou après réception des travaux qui garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité de la SARL KAD DECOR à raison de préjudices causés aux tiers notamment par le fait de ses travaux de construction.
Les consorts ... invoquent la clause 2.17.3.5 relative à cette garantie (non contestée par la SA AXA France IARD selon laquelle "'par dérogation à l'exclusion figurant à l'article 2.18.15, la garantie est étendue aux conséquences pécuniaires de la responsabilité encourue par l'assuré en raison des dommages matériels affectant les travaux de construction réalisés par l'assuré ou ses sous-traitants, survenant après réception de ses travaux, alors même que ces travaux ne peuvent être considérés comme des ouvrages ou des éléments d'équipement d'ouvrage au sens des article 1792, 1792-2 et 1792-3 du code civil'".
Cette garantie ne trouve pas plus à s'appliquer en l'absence de toute réception des travaux.
La garantie responsabilité civile du chef d'entreprise avant réception des travaux est au surplus exclue, aux termes de l'article 2.18 des conditions générales, pour les dommages affectant les travaux de l'assuré et pour le coût des prestations que l'assuré s'est engagé à fournir, comme il est usuel en matière d'assurance de responsabilité civile garantissant la responsabilité contractuelle du constructeur de sorte que la garantie de la SA AXA France IARD n'est pas acquise et que le jugement déféré doit en conséquence être réformé de ce chef.
Il n'est pas équitable en l'espèce de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SA AXA France IARD ni au profit des consorts ... et de la SARL KAD DECOR qui ont succombé chacune dans une partie de leurs demandes en appel. Les dépens seront supportés par la SARL KAD DECOR partie perdante.

PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 18 juin 2013 en ce qu'il a
- condamné la SARL KAD DECOR à payer à Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X la somme de13 295,53 euros HT au titre des travaux réparatoires,
- condamné la SA AXA France IARD à relever et garantir son assuré et à régler diverses sommes au profit des consorts ...,
Statuant à nouveau,
Condamne la SARL KAD DECOR à payer à Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X la somme de 8 400,53 euros TTC au titre des travaux réparatoires,
Dit que cette somme sera indexée dans les conditions de la décision déférée, confirmé sur ce point,
Déboute Monsieur Gérard Y et Madame Marie-Odile X de toutes leurs demandes dirigées contre la SA AXA France IARD
Confirme pour le surplus la décision déférée,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL KAD DECOR aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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