Jurisprudence : CA Versailles, 16-04-2015, n° 14/04253, Infirmation

CA Versailles, 16-04-2015, n° 14/04253, Infirmation

A7103NG8

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CA Versailles, 16-04-2015, n° 14/04253, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/24144299-ca-versailles-16042015-n-1404253-infirmation
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Abstract

L'adoption de l'enfant du conjoint est possible au sein des couples de même sexe.



COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac 26G 1re chambre 1re section
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 AVRIL 2015
R.G. N° 14/04253
AFFAIRE
Laure Solange Thérèse Z épouse Z
...
C/
MINISTÈRE PUBLIC
Décision déférée à la cour Jugement rendu le 29 Avril 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
Chambre du Conseil
N° RG 13/8030
Expéditions exécutoires
Expéditions délivrées le à
Me Katell ... de la SELARL LM AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES,
Notification aux parties
MP
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE AVRIL DEUX MILLE QUINZE,
1

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre
Madame Laure Solange Thérèse Z épouse Z
née le ..... à ETAMPES (91150)

POISSY
Représentant Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 629 - assistée de Maitre ..., substituant Maitre Bénédicte DEVAUX, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire PC 148
Madame Marilyn, Emily Z
née le ..... à LEICESTER (Grande Bretagne)

POISSY
Représentant Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 629 - assistée de Maitre ..., substituant Me Bénédicte DEVAUX, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire PC 148
APPELANTES
*********************
EN PRÉSENCE DU MINISTÈRE PUBLIC représenté par Monsieur ... ... général près la cour d'appel de Versailles, représenté lui même par Monsieur ..., avocat général.

Composition de la cour
L'affaire a été débattue le 09 mars 2015, Madame Odile BLUM, président ayant été entendu en son rapport, en chambre du conseil, devant la cour composée de
Madame Odile BLUM, Président,
Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,
Monsieur Georges DOMERGUE, Conseiller,
Greffier, lors des débats Madame Sylvie RENOULT,

Vu le jugement rendu le 29 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Versailles qui a débouté Mme Y de sa demande d'adoption plénière de l'enfant de sa conjointe ;

Vu la déclaration d'appel de cette décision déposée le 15 mai 2014 par Mme Y au greffe du tribunal de grande instance de Versailles ;
2

Vu l'arrêt rendu le 11 décembre 2014, sur les seules fins de non-recevoir, par cette cour qui a déclaré l'association Juristes pour l'enfance-Jpe irrecevable en son intervention, débouté Mme Y et Mme Z de leur demande de dommages et intérêts et dit sans objet la demande de refus de communication de pièces, débouté l'association Juristes pour l'enfance-Jpe de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné celle-ci à payer à ce titre à Mme Y la somme de 2.000 euros et laissé à la charge de l'association les dépens afférents à son intervention ;
Vu les dernières conclusions du 19 février 2015 de Mme Y et de Mme Z, intervenante volontaire, qui demandent à la cour d'infirmer le jugement et de
- prononcer l'adoption plénière de l'enfant Axelle, Marie Z,
- ordonner la transcription du jugement d'adoption conformément à l'article 354 du code civil sur les registres d'état civil du lieu de naissance de l'adoptée ;
Vu les conclusions signifiées le 2 mars 2015 par le ministère public qui est d 'avis qu'il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a refusé l'adoption motif pris d'une fraude à la loi du fait de l'illégalité de la conception de l'enfant et s'en remet à l'appréciation de la cour sur les éléments qui pourraient être fournis de nature à convaincre que cette adoption est 'conforme à l'intérêt de l'enfant', comme le rappelle la Cour de cassation dans ses deux avis du 22 septembre 2014 ;

SUR QUOI, LA COUR,
Considérant que Mme Laure Y et Mme Marilyn Z se sont mariées le 10 juin 2013 à Poissy ;
Que le 16 juin 2013, Mme Z a donné naissance à Poissy à l'enfant Axelle Z dont la filiation paternelle n'est pas établie, l'enfant ayant été conçue par insémination artificielle avec donneur dans le cadre d'un protocole de procréation médicalement assistée suivi par Mme Z en Belgique ;
Considérant que le 11 octobre 2013, Mme Y a déposé une requête aux fins d'adoption plénière de l'enfant de sa conjointe ;
Que cette requête a été rejetée par le jugement déféré au motif, en substance, que le procédé qui consiste à bénéficier à l'étranger d'une assistance médicale à la procréation interdite en France puis à demander l'adoption de l'enfant conçu conformément à la loi étrangère mais en violation de la loi française, constitue une fraude à la loi française et interdit donc l'adoption de l'enfant illégalement conçu ;
Considérant que l'article 143 du code civil issu de la loi n°2013-404 du 17 mai 2013 autorise le mariage entre personnes du même sexe ; que l'article 6-1 du code civil issu de la même loi dispose que le mariage et la filiation adoptive emportent les mêmes effets, droits et obligations reconnus par 3

les lois à l'exclusion de ceux prévus au titre VII du livre 1er du présent code, que les époux ou les parents soient de sexes différents ou de même sexe ;
Que l'adoption de l'enfant du conjoint est donc possible au sein des couples du même sexe ;
Considérant qu'en l'espèce, Mme Y demande à adopter l'enfant dont sa conjointe a accouché dans le but de voir consacrer le lien affectif l'unissant à celui-ci ; qu'il n'existe aucun détournement de l'institution de l'adoption considérée en elle-même ;
Considérant que s'agissant de la fraude à la loi, le ministère public fait exactement observer que s'il n'est pas douteux qu'en allant à l'étranger pour bénéficier d'une procréation médicalement assistée, il y a bien eu de la part de la mère de l'enfant volonté d'échapper à la loi française et de l'enfreindre, il n'en demeure pas moins que la seule question posée est celle de l'adoption dans un tel contexte et que postérieurement au jugement querellé, la Cour de cassation a rendu le 22 septembre 2014 deux avis aux termes desquels le recours à l'assistance médicale à la procréation, sous la forme d'une insémination artificielle avec donneur anonyme à l'étranger ne fait pas obstacle au prononcé de l'adoption, par l'épouse de la mère, de l'enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l'adoption sont réunies et qu'elle est conforme à l'intérêt de l'enfant ;
Que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a rejeté la requête motif pris d'une fraude tenant à l'illégalité de la conception même de l'enfant dont Mme Z a accouché ;
Considérant qu'il convient de s'assurer de la réunion des conditions légales et de la conformité de l'adoption sollicitée avec l'intérêt de l'enfant ;
Considérant que l'article 345-1 1° du code civil permet l'adoption de l'enfant du conjoint lorsque l'enfant n'a de filiation légalement établie qu'à l'égard de ce conjoint, ce qui est le cas en l'espèce ;
Que les conditions d'âge de l'article 344 du code civil sont remplies ;
Que Mme Z a donné son consentement à l'adoption plénière de son enfant par sa conjointe par acte notarié du 22 juillet 2013 et ne s'est pas rétractée ;
Que les conditions légales sont réunies ;
Considérant que Mme Y a divorcé le 10 juin 2003 de M. ... dont elle a eu deux filles jumelles, âgées actuellement de 18 ans ; que Mme Y forme avec Mme Z un couple stable depuis de nombreuses années ; que ses filles vivent au sein de ce foyer et attestent de leur consentement de l'adoption plénière, par leur mère, de celle qu'elles considèrent comme leur petite soeur ;
Que Mme Y a suivi l'évolution de la grossesse de Mme Z qui n'a pas d'autre descendance ; qu'elle a accueilli l'enfant de celle-ci comme le sien dès sa naissance et subvient à ses besoins ; qu'il 4

n'apparaît pas que l'adoption sollicitée soit de nature à compromettre la vie familiale ;
Qu'au vu des pièces produites et dans une mise en balance des intérêts en présence, aucun élément ne vient mettre en doute le fait avancé tant par Mme Y que par Mme Z que l'adoption plénière sollicitée est conforme à l'intérêt de l'enfant ;
Qu'il sera fait droit à la requête ;

PAR CES MOTIFS
Statuant en matière gracieuse, publiquement, après débats en chambre du conseil,
Infirme le jugement ;
Vu la requête déposée le 11 octobre 2013,
Prononce l'adoption plénière de Axelle, Marie Z, de sexe féminin, née le ..... à Poissy (Yvelines) de Marilyn, Emily Z, née le ..... à Leicester (Grande Bretagne) (acte de naissance n°2639 ) ;
par
Laure, Solange, Thérèse Y, née le ..... à Etampes (Essonne), directrice, demeurant à Poissy (Yvelines), conjointe de la mère de l'adoptée ;
Dit qu'en vertu de l'article 356 alinéa 2 du code civil, l'adoptée conservera sa filiation d'origine à l'égard de Marilyn, Emily Z, née le ..... à Leicester (Grande Bretagne), contrôleur, demeurant à Poissy (Yvelines) ainsi qu'à l'égard de la famille de celle-ci ;
Rappelle qu'en application de l'article 354 du code civil, il appartient au ministère public de faire transcrire la présente décision passée en force de chose jugée sur les registres de l'état civil de Poissy, lieu de naissance de l'adoptée ;
Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge du Trésor public.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odile ..., Président et par Madame ..., greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,
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