Jurisprudence : CA Aix-en-Provence, 09-04-2015, n° 14/11978, Confirmation

CA Aix-en-Provence, 09-04-2015, n° 14/11978, Confirmation

A3200NGM

Référence

CA Aix-en-Provence, 09-04-2015, n° 14/11978, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/24090556-ca-aixenprovence-09042015-n-1411978-confirmation
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Abstract

Dès lors que la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel est exploité un fonds de commerce grevé d'inscriptions a été autorisée par le juge-commissaire sur requête du liquidateur du preneur, le défaut de notification au créancier inscrit sur le fonds de commerce ne saurait être imputé au bailleur qui n'a pas l'initiative de la procédure ; il appartient, dès lors, au créancier inscrit de se prévaloir de l'inopposabilité de la décision devant le magistrat consulaire compétent.



COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 11e Chambre B
ARRÊT AU FOND DU 09 AVRIL 2015
N° 2015/238
Rôle N° 14/11978 SARL M.I.
C/
SCI CAPA
Grosse délivrée
le
à
ME ... ...... ...
Décision déférée à la Cour
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 15 Mai 2014 enregistré au répertoire général.

APPELANTE SARL M.I.
demeurant SANARY SUR MER
représentée par Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
et ayant Me Philippe ..., avocat au barreau de TOULON, pour avocat plaidant
INTIMÉE
SCI CAPA Poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié
demeurant SIX FOURS LES PLAGES
représentée par la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Mars 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Anne CAMUGLI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats Mme Anaïs ROMINGER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2015,
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte du 3 avril 2010, La SARL M.I a cédé son fonds de commerce de boulangerie pâtisserie à six fours les plages 33 avenue de l'Europe à la société Maison Dalleau. La SARL M.I était co-preneur avec une société PERMEAU d'un immeuble situé à six fours les plages 33 avenue de l'Europe loué par la SCI CAPA aux termes d'un contrat de bail commercial " tous commerces " du 12 août 2005 ( loyer 32.928euros HT)
Cette cession de fond était assortie d'un crédit vendeur sur la totalité du prix soit 120 000 euros garanti d'une part par un privilège de vendeur inscrit le 22 avril 2010 et d'autre part par un privilège de nantissement également inscrit le même jour.
Le 6 juillet 2010, la SCI CAPA a consenti à la société Maison Dalleau un autre bail pour un loyer annuel de 27 600 euros hors taxes.
Le preneur a été placé sous redressement judiciaire le 15 mai 2012 puis en liquidation judiciaire le 15 juillet 2012.
La SARL M.I a déclaré sa créance le 31 mai 2012 et l'a ensuite actualisée.
Sur requête du liquidateur judiciaire après offre de la SCI CAPA, le juge commissaire de la procédure collective au tribunal de commerce a autorisé par ordonnance du 10 octobre 2012, la restitution des clés du local loué au bailleur avec abandon des loyers impayés et paiement d'une indemnité d'éviction au bénéfice de la procédure collective de 10 000 euros.
La SARL M.I a considéré que cette ordonnance lui était inopposable pour ne pas lui avoir été notifiée et que la SCI CAPA avait renegocié un nouveau bail avec la société Maison Dalleau en fraude de ses droits de créancier inscrit.
Par acte du 12 février 2013, elle a fait assigner la SCI CAPA devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 105.181,80 euros correspondant au montant de sa déclaration de créance et la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sollicitant en outre l'exécution provisoire.

Par jugement du 15 mai 2014, le tribunal de grande instance de Toulon a débouté La SARL M.I de ses demandes
Au visa de l'article L 143 '2al2 du code de commerce, il a considéré que La SARL M.I ne démontrait pas avoir donné à la SCI CAPA sa nouvelle adresse ni que celle-ci pouvait la connaître, que le créancier inscrit devait faire valoir sa demande d'inopposabilité devant le magistrat consulaire compétent.
Sur l'article L 145 ' 49 du code de commerce, le tribunal a considéré qu'il n'existait aucune procédure de déspécialisation engagée par le bailleur et que l'activité du fonds de commerce était restée la même jusqu'à la mise en liquidation.

La SARL M.I a relevé appel de la décision le 17 juin 2014.
Par conclusions déposées et signifiées le 9 février 2015, elle conclut à la réformation du jugement déféré, au constat de l'admission définitive de sa créance nantie par ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Toulon du 8 octobre 2013, au rejet de toutes les demandes de la SCI CAPA, à la parfaite recevabilité de ces demandes. Elle réitère sa demande principale et sollicite la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle redit que l'ordonnance autorisant la résiliation amiable du bail commercial et la restitution subséquente des clés du local à la SCI CAPA lui a été notifiée à une adresse à laquelle elle n'était plus domiciliée, qu'elle avait changé sa domiciliation auprès du greffe du tribunal de commerce bien antérieurement à la date de l'ordonnance litigieuse et même à la convocation adressée à la mauvaise adresse par le greffe le 14 septembre 2012, que le transfert de son siège social avait d'ailleurs été acté dans un procès-verbal d'assemblée générale du 15 juin 2012, que sa déclaration de créance mentionne très clairement sa nouvelle domiciliation à Sanary sur Mer, que la SCI CAPA ne pouvait ignorer ce changement d'adresse au vu de la signification d'une ordonnance de référé à sa requête du 18 avril 2012, qu'elle ne pouvait ignorer qu'ayant cédé le fonds exploité à six fours, la SARL M.I n'était plus à cette adresse et alors qu'elle connaissait sa nouvelle adresse. Elle fait valoir qu'aucun délai n'a des lors couru à son égard notamment pas de tierce opposition à supposer qu'un tel recours lui ait été ouvert, qu'à défaut de la notification que la bailleresse devait régulariser entre les mains du créancier nanti par application de l'article L 143 '2 du code de commerce, celle-ci a engagé sa responsabilité à l'égard du créancier auquel la résiliation est inopposable alors qu'elle n'a quant à elle commis aucune faute.
Elle fait d'autre part valoir une diminution de la valeur de son gage en raison du changement de destination du bail, que son gage portait à l'origine sur un fonds tous commerces alors que le bailleur a réduit l'objet du bail à la seule activité de boulangerie pâtisserie. Elle soutient que la clause de destination est l'un des éléments intrinsèques du bail commercial et qu'elle a été modifiée pour spécifier une activité exclusive de boulangerie pâtisserie au lieu d'une destination tous commerces, ce qui a affecté la valeur de son gage, que le bailleur n'a pas respecté les articles L 145 ' 47 à elle 145
' 55 du code de commerce.
Elle fait grief à la SCI CAPA en tant que bailleur de ne pas avoir rempli ses obligations légales dans le cadre de la notification de sa demande de résiliation amiable du bail commercial au mépris de l'article L 143 '2 du code de commerce puisqu'elle n'a été destinataire d'aucune notification et réclame réparation de son préjudice correspondant au règlement du montant de sa créance nantie.
Par conclusions au fonds déposées et signifiées le 8 juillet 2014, la SCI CAPA conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré et à la condamnation de La SARL M.I à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle conteste avoir à l'insu de La SARL M.I et en fraude de ses droits de créancier inscrit, renégocié un nouveau bail avec la société maison Dalleau limitant la destination des lieux et des lors qu'en réalité ce bail est venu multiplier par 2 la surface louée.
Elle rappelle que l'ordonnance du 11 septembre 2012 a été notifiée à La SARL M.I le 17 septembre 2012 par le greffe du tribunal de commerce de Toulon, notification dans laquelle elle n'a aucune responsabilité, que le créancier inscrit devait invoquer l'inopposabilité éventuelle devant le magistrat consulaire compétent, que La SARL M.I n'a mis en cause ni le liquidateur de la société maison Dalleau, ni le greffe, que s'agissant d'une résiliation amiable et en application de l'article L 143 '2al2 du code de commerce, la notification doit être faite aux créanciers inscrits au domicile élu soit en l'espèce le 33 avenue de l'Europe' Six fours les plages, aucune modification de ce domicile élu n'ayant été effectuée auprès du greffe du tribunal de commerce par la SARL M.I qui au demeurant a uniquement transféré son siège social en juillet 2012 mais a fait suivre son courrier depuis le 24 septembre 2012 à une nouvelle adresse, de sorte qu'elle a nécessairement reçu la notification de l'ordonnance. Elle conteste que l'obligation de dénoncer la déspécialisation du bail aux créanciers inscrits s'applique en l'espèce des lors qu'il n'y a jamais eu de procédure de déspécialisation du bail commercial à l'initiative du locataire, que la procédure de l'article L 145 ' 48 et suivants du code de commerce est offerte au locataire qui souhaite adjoindre à l'activité de nouvelles activités alors que le nouveau bail est un bail restrictif ou spécialisé non soumis à la procédure de déspécialisation totale et concernant de surcroît une activité déjà autorisée dans le bail initial, que la notification doit être réalisée en tout état de cause par le locataire et ne concerne pas le bailleur, qu'aucune sanction n'est de surcroît prévue en cas d'absence de notification aux créanciers inscrits.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 mars 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION.
Sur l'article L 143 '2 du code de commerce.
Aux termes de l'article L 143 '2 du code de commerce,
Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions. Le jugement ne peut intervenir qu'après un mois écoulé depuis la notification.
La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus.
En l'espèce, la résiliation du bail commercial liant la SCI CAPA à la SARL MAISON DALLEAU a été poursuivie par le mandataire liquidateur de cette dernière qui a sollicité du greffe du Tribunal de commerce la convocation des parties aux fins de voir autoriser la restitution du local contre abandon total des loyers et règlement d'une indemnité d'éviction de 10.000euros.
Alors que la SARL M.I avait modifié sa domiciliation le 24 juillet 2012, auprès du greffe du Tribunal de Commerce, ce dernier l'a convoquée le 11 septembre 2012 à son adresse du boulevard de l'Europe . L'ordonnance faisant droit le 10 octobre 2012 à la demande précitée a été notifiée par le greffe du Tribunal de commerce le 19 octobre à cette même adresse.
Le bailleur n'est pas procéduralement à l'origine de la résiliation, il n'a pris l'initiative, ni de la convocation, ni de la notification de la SARL M.I, lesquelles ont été entreprises par le greffe du Tribunal de commerce.
Etranger à l'erreur éventuelle de ce dernier et n'ayant pas la maîtrise de la procédure telle qu'elle a été conduite, sa responsabilité,n'apparaît dans ces conditions nullement établie.
Le premier juge a justement ajouté qu'il appartenait au créancier inscrit de se prévaloir de l'inopposabilité de la décision devant le magistrat consulaire compétent.
La décision déférée sera par conséquent confirmée à ce titre. Sur l'article L 145 '49 du code de commerce.
La SARL M.I invoque la diminution de la valeur de son gage à raison du changement de destination du bail, faisant grief au bailleur d'en avoir réduit l'objet à la seule activité de boulangerie pâtisserie au mépris de la clause de destination initiale.
La SCI CAPA objecte cependant à bon droit que les dispositions des l'article L 145 ' 47 et suivants du code de commerce permettent au locataire de modifier sous certaines conditions la destination contractuelle des locaux commerciaux mais que la procédure prévue par l'article L 145 '49 du code de commerce est étrangère au bailleur, qu'aucune disposition ne sanctionne de surcroît l'absence de notification aux créanciers inscrits.
Le premier juge a par ailleurs justement observé que l'activité du fonds de commerce est restée identique jusqu'à la liquidation du preneur.
La décision déférée sera par conséquent confirmée en ce qu'elle a écarté la demande indemnitaire de la SARL M.I à ce titre.
Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'apparaît pas équitable de faire application en l'espèce de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS.
La cour, statuant publiquement, contradictoirement.
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Rejette toute autre demande.
Condamne la SARL M.I aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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