Jurisprudence : Cass. soc., 11-02-2015, n° 13-23.573, FS-P+B, Cassation partielle

Cass. soc., 11-02-2015, n° 13-23.573, FS-P+B, Cassation partielle

A4456NBN

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Cass. soc., 11-02-2015, n° 13-23.573, FS-P+B, Cassation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/23146194-cass-soc-11022015-n-1323573-fsp-b-cassation-partielle
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Abstract

L'adhésion d'une mutuelle de santé à une fédération nationale n'entraîne pas en soi la constitution d'un groupe au sens des dispositions de l'article L. 1233-4 du Code du travail.



SOC. CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 11 février 2015
Cassation partielle
M. FROUIN, président
Arrêt no 257 FS-P+B
Pourvoi no S 13-23.573
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la Mutualité française Champagne Ardenne SSAM, venant aux droits de la Mutualité française de la Marne, dont le siège est Reims,
contre l'arrêt rendu le 26 juin 2013 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme Y Y, domiciliée Courcelles-Sapicourt,
défenderesse à la cassation ;
Mme Y Y a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 janvier 2015, où étaient présents M. Frouin, président, Mme Depelley, conseiller référendaire rapporteur, M. Béraud, Mmes Geerssen, Lambremon, Deurbergue, MM. Chauvet, Huglo, Maron, Déglise, Mme Reygner, conseillers, Mmes Mariette, Sommé, Sabotier, Corbel, Salomon, Duvallet, Barbé, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Depelley, conseiller référendaire, les observations de Me Blondel, avocat de la Mutualité française Champagne Ardenne, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de Mme Y, l'avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y, engagée le 3 février 2004 en qualité d'assistante dentaire par la Mutualité française Marne aux droits de laquelle se trouve la Mutualité française Champagne Ardenne SSAM, et occupant en dernier lieu les fonctions de standardiste-employée de bureau, a été licenciée pour motif économique le 23 novembre 2010 ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu que pour dire que l'employeur n'a pas accompli loyalement son obligation de reclassement et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la Fédération nationale de la Mutualité française, dont la Mutualité française de la Marne est adhérente, a vocation à collationner et diffuser les offres d'emplois disponibles au sein des mutualités affiliées, toutes régions confondues et que les permutations d'une mutualité à une autre sont possibles et que parmi les quelques courriers adressés par l'employeur dans le cadre des recherches externes, aucun ne l'a été à destination de l'une des mutualités de la région (pour le moins) sachant que la fédération rassemble six cents mutuelles de santé et deux mille cinq cents services de soins et d'accompagnement mutualiste ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'adhésion d'une mutuelle de santé à une fédération nationale n'entraîne pas en soi la constitution d'un groupe au sens des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail, la cour d'appel qui n'a pas précisé en quoi les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des différentes mutualités adhérentes de la Fédération nationale de la Mutualité française leur permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel de la salariée

Attendu que la cassation à intervenir sur le pourvoi principal entraîne, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt qui déboute la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l'ordre des licenciements ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Mutualité française Marne à payer à Mme Y une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser aux organismes intéressés tout ou partie des indemnités de chômage versées à Mme Y, et débouté Mme Y de sa demande d'indemnité pour violation de l'ordre des licenciements, l'arrêt rendu le 26 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Mutualité française Champagne Ardenne SSAM à payer à Mme Y la somme de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la Mutualité française Champagne Ardenne SSAM, demanderesse au pourvoi principal.
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la Mutualité française de la Marne n'a pas respecté son obligation de reclassement, d'avoir dit le licenciement de Madame Y Y sans cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la Mutualité française de la Marne à lui verser la somme de 8 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et à rembourser aux organismes intéressés tout ou partie des indemnités de chômage versées à Madame Y ;
AUX MOTIFS QUE Madame Y soutient encore que les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe, la Mutualité Française Marne adhérant à la Fédération Nationale de la Mutualité Française et que s'agissant d'un organisme à but non lucratif, les difficultés économiques mises en avant par l'employeur sont contestables ; que la Mutualité Française de la Marne est une personne morale de droit privé à but non lucratif relevant du Livre III du code de la Mutualité ; que les mutualités sont des entités juridiques indépendantes et que chaque union territoriale bénéficie d'une autonomie fonctionnelle et organisationnelle ; que la fédération définie par l'article L.111-5 du code la mutualité est un organe coordinateur et non décisionnaire et que la mutualité de la Marne, sans filiale ni lien capitalistique avec la fédération, la notion de groupe n'a pas vocation à s'appliquer en ce qui concerne l'appréciation des difficultés économiques ; que Madame Y pour contester les difficultés économiques se limite à contester l'existence même des difficultés de cet ordre au regard de la nature de la mutualité qui est un organisme à but non lucratif, qui n'a pas vocation à réaliser des bénéfices, sans émettre la moindre critique sur la situation décrite et les chiffres sur lesquels s'appuie la Mutualité Française de la Marne pour établir la réalité des difficultés rencontrées ; que pour sa part la Mutualité Française Marne produit les pièces justificatives d'un déficit de plus de 247 000 euros en 2009, d'une situation comptable négative au 30 juin 2010 de 294 609 euros ; que les éléments comptables font ressortir un déficit structurel, la nécessité de réorganisation entraînant la suppression de postes dont celui de Mme Y ; qu'en ce qui concerne le reclassement interne la Mutualité française de la Marne justifie avoir procéder à une recherche effective et loyale ; que le poste existant sur le tiers-payant était un emploi à temps plein, Mme Y ne pouvant occuper qu'un emploi à temps partiel suite à l'avis de la médecine du travail et exigeait des compétences en matière de comptabilité que Mme LUcak n'avait pas et aurait nécessité une formation lourde sans rapport avec les efforts de formation nécessaires à l'adaptabilité au poste, à laquelle l'employeur est tenu ;
ET AUX MOTIFS ENCORE QU'en ce qui concerne le reclassement externe le juge doit rechercher si les activités et l'organisation des centres qui relèvent d'une fédération permettait ou non de réaliser une permutation ; qu'il est établi que la Fédération a vocation à collationner et diffuser les offres d'emplois disponibles au sein des mutualités affiliées, toutes régions confondues ; que les permutations d'une mutualité à une autre sont possibles et que parmi les quelques courriers adressés par l'employeur dans le cadre des recherches externes, aucun ne l'a été à destination de l'une des mutualités de la région (pour le moins) sachant que la fédération rassemble 600 mutuelles de santé et 2 500 services de soins et d'accompagnement mutualistes ; que de plus le courrier circulaire produit ne fournit aucun élément individuel et descriptif de la situation de Mme Y, ne visant que la recherche d'un poste de standardiste, omettant ainsi qu'elle exerçait un emploi de standardiste mais également d'employée de bureau ; qu'il en résulte que l'employeur n'ayant pas accompli loyalement son obligation de reclassement, le licenciement de Mme Y est sans cause réelle et sérieuse, que le jugement sera infirmé ; que Mme Y était âgée de 58 ans et comptabilisait 7 ans d'ancienneté au moment de son licenciement ; qu'au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose son préjudice sera entièrement réparé par l'allocation d'une somme de 8 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en application des dispositions de l'article L.1235-4 du Code du travail le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, de jour de son licenciement au jour de la décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ; que ces dispositions ont vocation à s'appliquer en l'espèce, sauf à retenir que la convention de reclassement personnalisé est devenue sans cause du fait de la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle ni sérieuse, la contribution versée par l'employeur à son financement et versée à Pôle Emploi devenant elle aussi sans cause, il y aura lieu à compensation entre cette contribution versée à tort et le remboursement des allocations chômage ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité ; que la collecte et la diffusion par un organisme des offres d'emplois disponibles au sein de ses adhérents n'impliquent pas à elles seules la possibilité d'effectuer entre eux la permutation de tout ou partie du personnel et ne caractérisent pas l'existence d'un groupe au sein duquel le reclassement doit s'effectuer ; qu'en retenant au contraire que la collecte et la diffusion par la Fédération Nationale de la Mutualité française des annonces d'emplois disponibles dans les différentes Mutualités adhérentes établissait l'existence d'un groupe de reclassement au sein duquel la Mutualité Française de la Marne aurait dû rechercher des postes disponibles pour Madame Y, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article L.1233-4 du Code du travail ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité ; qu'en l'espèce, après avoir pourtant constaté l'autonomie fonctionnelle et organisationnelle de chaque mutualité, la Cour d'appel retient que les permutations d'une mutualité à une autre sont possibles ; qu'en statuant ainsi, par une simple affirmation, sans préciser en quoi les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des différentes mutualités adhérentes de la Fédération Française de la Mutualité Française leur permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la Cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article L.1233-4 du Code du travail.
Moyen produit par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour Mme Y, demanderesse au pourvoi incident éventuel.
Si par impossible la Cour de cassation devait exercer sa censure sur l'une ou l'autre des branches du moyen unique contenu dans le pourvoi principal, Mme Y entend soutenir un pourvoi incident et faire grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de de dommages et intérêts pour violation de l'ordre des licenciements ;
Aux motifs que " le licenciement étant déclaré sans cause réelle ni sérieuse, l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements, même à la supposer établie, n'est pas susceptible d'entrainer un cumul d'indemnité " ;
Alors que la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que dans l'hypothèse où l'arrêt d'appel serait censuré sur le moyen unique soutenu par la Mutualité française de la Marne concernant la cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme Y, la cassation entrainera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de l'arrêt relatif au rejet de la demande au titre de la méconnaissance de l'ordre des licenciements, motivé par la seule impossibilité de cumul entre l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et les dommages et intérêts pour méconnaissance de l'ordre des licenciements.

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