Jurisprudence : CA Caen, 1ère ch., 10-06-2004, n° 01/03700

CA Caen, 1ère ch., 10-06-2004, n° 01/03700

A5440DDT

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CA Caen, 1ère ch., 10-06-2004, n° 01/03700. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/2202097-ca-caen-1ere-ch-10062004-n-0103700
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Abstract

La loi du 1er août 2003 relative à l'initiative économique, dite loi "Dutreil" (loi n° 2003-721, 1er août 2003, pour l'initiative économique), a, on sait, étendu la sanction de la disproportion manifeste à tout cautionnement souscrit par une personne physique à l'égard d'un créancier professionnel, et ce, en s'inspirant du mécanisme de l'article L. 313-10 du Code de la consommation, assurant ainsi de l'existence d'une exigence générale de proportionnalité.



COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE - SECTION CIVILE ET COMMERCIALE ARRÊT DU 10 JUIN 2004

APPELANTS
Madame Marie-France Z épouse Z 11.
BRETTEVILLE SUR ODON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141182212001008238 du 05/02/2002 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
Monsieur Pascal Y
CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141182212001008237 du 12/03/2002 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
représentés par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués à
assistés de Me LEJARD substituant Me Claude-Noël W. avocat au barreau de CAEN
INTIMÉE
S.A. BANQUE NATIONALE DE PARIS - PARIBAS, venant aux droits de la B.N.P

PARIS
prise en la personne de son représentant légal
représentée par Me Jean .U1ERE. avoué
assistée de Me Jean-Pierre PILLON, avocat au barreau de CAEN

Monsieur T T, Président, rédacteur.
Madame S, Conseiller,
Monsieur R, Conseiller,

DÉBATS A l'audience publique du 06 Mai 2004
GREFFIER Mme VÉRA, Greffier de la 1ère Chambre 2ème section. lors des débats. et lors du prononcé,
ARRÊT prononcé par Monsieur LE FEVRE, Président, à l'audience publique du 10 Juin 2004
La Cour,

Vu l'an* de cette Cour du 20 novembre 2003 qui a rouvert les débats sur l'application à l'espèce de l'article L 341-4 du code de la consommation, et la procédure antérieure ;

Vu les conclusions du 4 mai 2004 de Mme Marie-France Z et de M. Pascal Y qui demandent à la Cour de dire que la BNP ne peut' se prévaloir des contrats de cautionnement par application de l'article L 341-4 du code de la consommation, la débouter de toutes ses demandes ; subsidiairement prononcer la déchéance du droit aux intérêts par application de l'article L 313-22 du code monétaire et financier et la débouter de toutes ses demandes, à défaut de chiffrer sa demande expurgée des intérêts, condamner la BNP PARIBAS à leur payer des dommages et intérêts équivalents aux sommes réclamées par elle, leur accorder les plus larges délais pour apurer les sommes qu'ils resteraient encore devoir et réclament 1.500 E sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions du 3 mai 2004 de la BNP PARIBAS qui demande à la Cour de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes ; constater qu'elle-même justifie à toutes fins de sa créance pour chacun des prêts avec calcul au seul taux légal (expurgés de tous intérêts conventionnels) et réclame 3.000 E au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Attendu que l'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mai 2004 puis révoquée et rendue à nouveau le 6 mai 2004 ; que la BNP PARIBAS a notamment conclu les 3 mai et 6 mai 2004 ; que les conclusions du 4 mai 2004 des consorts ... sont une réponse aux conclusions du 3 mai 2004 de la BNP et ne comportent ni demande nouvelle ni moyen nouveau par rapport à leurs conclusions antérieures du 27 avril 2004 ; qu'il y a lieu d'écarter des débats les conclusions du 6 mai 2004 de la BNP PARIBAS ;
Attendu qu'ainsi que l'a remarqué cette Cour dans l'arrêt susvisé, l'article L 341-4 du code de la consommation est d'application immédiate en ce sens que le législateur n'en a pas différé l'application, à l'inverse de ce qu'il a fait pour d'autres articles de cc code résultant de la loi du I er août 2003 ; mais que la BNP invoque l'article 2 du code civil ; que le législateur n'a pas disposé expressément que l'article L 341-4 s'appliquerait aux cautionnements souscrits avant son entrée en vigueur ; que l'emploi du passé, "était" dans le texte est inusité, les lois étant normalement rédigées au présent ; mais que ceci peut s'expliquer, sans que l'on en déduise nécessairement l'application rétroactive de la loi, par le fait que la situation de la caution est examinée, au moment où elle est appelée, à la fois par référence à ce qu'elle "était" lors de l'engagement et ce qu'elle -est'. lors de l'appel ; que la secrétaire d'Etat aux PME avait déclaré au cours des débats parlementaires que le texte était 'peut être aujourd'hui politiquement rétroactif, à défaut de l'être juridiquement'; que les appelants font valoir que le rapporteur à la commission paritaire a déclaré que le texte s'appliquerait "immédiatement, à toute caution existante ou à venir" ; mais qu'en l'absence de tout élément probant porté à la connaissance de la Cour ceci ne suffit pas à établir l'intention non équivoque du législateur d'appliquer le nouveau texte aux engagements de caution souscrits antérieurement à son entrée en vigueur ;
Attendu que pour certains des emprunts, Mme Z et M. Y ne se sont portés cautions qu'à hauteur de 50 % ; que la BNP fait valoir que le Tribunal de commerce de CAEN a été saisi d'une demande de paiement en principal des sommes de 330.875,98 F. 52.191,65 F, 241.882,66 F et 122.200,66 F soit 747.150,95 F que les cautions avaient indiqué à la banque pour Mme Marine Z 404.000 F de revenus annuels du compte dont 240.000 F pour elle-même et 80.000 F de valeurs mobilières, pour M. Y 240.000 F de revenus et 40.000 F de valeurs mobilières ; que les 20.000 F par mois pour chacun étaient en réalité les rémunérations qu'ils escomptaient et qu'ils se sont d'ailleurs octroyées en tant que co-dirigeants de la société OSCAR ; que le maintien de cette rémunération supposait que la société soit prospère ; que les appelants font valoir que le bilan arrêté au 30 septembre 1997 révélait notamment un chiffre d'affaires de 235.548 F et un résultat d'exploitation négatif de 284.269 F, ce que n'ignorait pas la banque lorsqu'elle a accordé, le 25 janvier 1998 et le 18 mai 1998 de nouveaux prêts cautionnés pour des sommes principales respectives de 165.000 F et 124.000 F ; mais que Mme ... et M. Y connaissaient aussi bien que la BNP la situation de la société et étaient demandeurs des crédits ; qu'ils n'établissent pas que la banque aurait commis des fautes dont, en leur qualité de cautions dirigeants, ils pouvaient se prévaloir, dans le recueil des engagements de caution ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède, des motifs non contraires du Tribunal et de ceux de l'arrêt du 20 novembre 2003 susvisé que la Cour ne peut faire droit à aucune des demandes de dommages et intérêts compensatoires des appelants ;
Attendu qu'eu égard au débat sur l'application de l'article L 341-4 du code de la consommation, qui aurait pu, le cas échéant, rendre inutile celui sur le moyen tiré de l'ancien article 48 de la loi du 9 mars 1984 devenue article L 313-2 du code monétaire et financier, la Cour n'a pas statué sur ce dernier moyen dont elle était saisie avant la réouverture des débats ;
Attendu que la BNP PARIBAS produit des lettres d'information des cautions en date du 11 mars 1998 non conformes aux dispositions du texte précité faute de distinguer le capital et les intérêts et d'indiquer le montant de ces derniers, ne comprenant en fait qu'un seul chiffre, le montant du principal ; que les mises en demeure du 10 novembre 1998 sont des demandes de paiement et non des lettres d'information, lesquelles sont habituellement envoyées en mars ; qu'elles ne sont pas non plus conformes à la loi, indiquant les échéances impayées avant déchéance du terme et non les montants globalement dus et sans distinguer le capital des intérêts ; que la BNP PARIBAS est déchue du droit aux intérêts ; que cette déchéance n'est pas assimilable à la nullité d'un taux contractuel qui aurait pour effet de substituer le taux légal au taux contractuel mais est une déchéance de tous intérêts, sauf ceux dus par les cautions au taux légal au titre de leur dette personnelle à compter de la mise en demeure, sur le capital restant dû ; que les mises en demeure du 10 novembre 1998 sont partielles, ne concernant que les échéances alors impayées en capital et intérêts ; que la BNP ne justifie pas de mises en demeure visant l'ensemble du capital restant dû antérieure aux assignations du 26 mars 1999 ; qu'en définitive les cautions doivent, selon les décomptes de la banque non contestés quant au capital restant dû au titre des quatre crédits
50 % de 100.883,44 E soit 50.441,72 E 50 % de 7.956,57 E soit 3.978,28 E
18.629,37 E et 36.874,77 E soit un total de 109.924_14 E avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1999 au titre de leur dette personnelle.
Attendu que ce montant est proche de la demande de la BNP ; que les appelants qui bénéficient de l'aide juridictionnelle totale, déclarent qu'ils ne peuvent faire face à leur dette et qu'ils n'ont "aucune faculté patrimoniale" ; que la Cour ne pourrait leur accorder un délai de plus de vingt quatre mois ; qu'il est hautement improbable qu'ils puissent se libérer dans ce délai ; que la Cour ne saurait accorder des délais de paiement qui ne seraient pas utiles ;
Attendu qu'eu égard notamment à la situation économique respective des parties, il est équitable de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, tant pour les frais irrépétibles de première instance que pour ceux d'appel ;

PAR CES MOTIFS
- Infirme le jugement entrepris sur le montant de la condamnation principale et en ce qu'il a prononcé une condamnation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- Condamne Mme Marie-France Z épouse Z et M. Pascal Y à payer à la BNP PARIBAS la somme de 109.924,14 £ avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1999 ;
- Confirme le jugement pour le surplus ;
- Déboute les parties de leurs autres demandes
- Met à la charge des appelants les dépens d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT


N. VERA
A. LE 1FEVRE

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