Jurisprudence : CA Metz, 12-02-2014, n° 13/00034, Confirmation

CA Metz, 12-02-2014, n° 13/00034, Confirmation

A7454MES

Référence

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
RG N° 13/00034
(1)
Z C/
SARL SKFI
ARRÊT N°13/00033
COUR D'APPEL DE METZ 1ère Chambre
ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2014

APPELANT
Maître Jean Z

NANCY
représenté par Me HAXAIRE, avocat à la Cour d'Appel de METZ
INTIMÉE
SARL SKFI représentée par son représentant légal

MAXEVILLE
représentée par Me HEINRICH, avocat postulant, avocat à la Cour d'Appel de METZ, et Me ..., avocat plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
PRÉSIDENT Madame STAECHELE, Président de Chambre
ASSESSEURS Monsieur RUFF, Conseiller
Madame MARTINO, Conseiller
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS Mme SCHOLTES
DATE DES DÉBATS A l'audience publique du 05 Décembre 2013, tenue par Madame
STAECHELE, Président de Chambre et Magistrat chargé d'instruire l'affaire, laquelle a, en présence de Madame MARTINO, Conseiller, entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, et en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 12 Février 2014.

Saisi par la SARL SKFI d'une demande tendant à la condamnation de Me Jean Z sur le fondement de l'article 1147 du Code civil à lui payer la somme de 79 719,77 euros représentant le montant des sommes qu'elle a été condamnée à payer à son ancien salarié Thierry ...,
et saisi par M. Jean Z de conclusions tendant à voir dire et juger que l'action entreprise à son encontre est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir et subsidiairement au fond au rejet des demandes dirigées contre lui,
le tribunal de grande instance de Metz, par jugement du 8 novembre 2012, a - déclaré la demande recevable,
- déclaré Me Z responsable du préjudice subi par la société SKFI à la suite de la rédaction d'une lettre de prise d'acte de démission qu'il a fait adresser par cette société à son salarié Thierry ..., alors qu'une telle prise acte était, au vu des circonstances de l'espèce, juridiquement impossible,
- condamné Me Z à payer à la société SKFI la somme de 79 719,77 euros correspondant aux condamnations prononcées par le conseil des prud'hommes de Nancy et la somme de 2000 euros pour frais irrépétibles,
- ordonné l'exécution provisoire de sa décision,
- rejeté les autres demandes,
- condamné Me Z aux dépens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a rejeté la fin de non recevoir soulevée par Me Z et au fond le tribunal, après avoir rappelé le contexte dans lequel le dirigeant des sociétés INTERMETAL et SKFI avait contacté son conseil habituel Me Z et que Me Z est un spécialiste en droit social ainsi que le mentionne l'en-tête des courriers, a constaté que la décision du conseil de prud'hommes du 15 décembre 2009, ayant considéré que le courrier adressé par M. ... à son employeur ne pouvait s'analyser en une démission et que l'employeur aurait dû, après mise en demeure adressée au salarié de reprendre son poste de travail, initier une procédure de licenciement, est conforme aux très nombreuses et constantes décisions de la chambre sociale de la Cour de Cassation ainsi qu'aux articles de doctrine versés aux débats par la défenderesse.
Le tribunal en a déduit que M. Z, qui a conseillé au responsable de la société SKFI de prendre acte de la démission de M. ... et a formalisé un projet de lettre en ce sens, choix, qui compte tenu des circonstances de l'espèce et de l'état de la jurisprudence est de la doctrine ne pouvait que conduire à une procédure prud'homale requalifiant la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et à une condamnation de la société SKFI, a ce faisant commis une faute en donnant à son client, non juriste, un conseil inapproprié ayant conduit à la condamnation de ce dernier, le tribunal ajoutant que le conseil de prud'hommes n'ayant fait qu'appliquer une jurisprudence bien établie il aurait été fort surprenant que la cour d'appel saisie d'un recours adopte une solution différente.
Le tribunal a évalué le préjudice de la société SKFI au montant des condamnations mises à sa charge par le conseil de prud'hommes de Nancy.

Par déclaration d'appel du 7 janvier 2013,Me Jean Z a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 5 avril 2013,Me Z demandé à la cour
- de juger l'appel recevable et bien fondé,
- d'infirmer le jugement entrepris,
- de débouter la société SKFI de ses demandes,
- de la condamner au paiement de la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- subsidiairement, de juger que le préjudice allégué ne peut s'analyser que comme une perte de chance, qui ne saurait excéder 5 % du préjudice dudit préjudice,
- de decondamner la société SKFI aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions du 13 mai 2013,la SARL SKFI a demandé à la cour
- de rejeter l'appel comme non fondé,
- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- de condamner Me Z au paiement de la somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et de 3500 euros pour frais irrépétibles,
- de le condamner aux entiers dépens.

Motifs de la décision
Vu les conclusions des parties en date du 5 avril 2013 et 13 mai 2013, les énonciations du jugement attaqué et les pièces versées aux débats
Attendu qu'il y a lieu de relever que la fin de non recevoir soulevée par M. Z devant les premiers juges et écartée par ceux-ci n'a pas été reprise en cause d'appel ;
Attendu que, au vu des pièces produites, savoir les courriers échangés entre la société SKFI et son salarié (courrier de M. ... 17 novembre 2008 dans laquelle évoquant une altercation avec l'employeur et l'impossibilité pour lui de supporter plus avant la fumée de cigarettes indiquait exercer son droit de retrait - réponses de l'employeur selon deux missives en date 8 novembre 2008 mettant en demeure M. ... de reprendre son poste, l'avisant qu'à défaut de reprendre son travail il serait serait engagé contre lui les dispositions s'imposant pour abandon de poste caractérisé et lui délivrant un avertissement) le projet de lettre adressé par Me Z à sa cliente datée du 21 novembre 2008 et le courrier de Me Z en date du même jour accompagnant ce projet de lettre recommandant à sa cliente d'adresser le modèle de lettre joint en recommandé avec accusé de réception le jour même à M. ...,et surtout eu égard à la jurisprudence effectivement constante de la Cour de Cassation, selon laquelle la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin aux contrat de travail et que pour être admise la démission doit s'exprimer librement et de façon explicite, avec cette conséquence que la volonté de démissionner ne peut se déduire du comportement du salarié qu'il s'agisse d'une absence injustifiée ou d'un abandon de poste ou encore d'un départ de l'entreprise pris dans un mouvement d'humeur, sous le coup de la colère ou de l'émotion,la cour ne peut que confirmer le jugement dont appel en se référant à la motivation adoptée par le tribunal de grande instance de Metz, motivation détaillée et exempte d'insuffisance ou de contradiction ;
Attendu qu'au surplus Me Z ne peut être admis à soutenir que le préjudice de la partie adverse ne peut être équivalent au montant des condamnations du conseil de prud'hommes ayant requalifié la démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et devrait au contraire s'analyser en une simple perte de chance, dès lors que précisément en raison de cette jurisprudence constante l'employeur, qui considère que le contrat est rompu du fait du salarié, doit mettre en oeuvre une procédure de licenciement et ne peut se borner à prendre acte de la démission de son cocontractant,
que Me Z, en sa qualité de professionnel du droit est en la qualité revendiquée par lui de spécialiste en matière de droit social, ne pouvait ignorer et méconnaître une telle jurisprudence,
et que le projet de lettre qu'il a fait parvenir à son client et que celui-ci, faisant confiance à son conseil, a lui-même adressé à son salarié conduisait nécessairement au prononcé d'une décision de condamnation de la part de la juridiction prud'homale et immanquablement de la part de la cour d'appel si elle avait été saisie d'un recours par l'employeur, de sorte que c'est de façon avisée et en évitant des frais inutiles que la société SKFI n'a pas formé appel à l'encontre de la décision du conseil de prud'hommes ;
Que par suite il y a lieu de juger que le préjudice de la société SKFI correspond exactement au montant des condamnations prononcées contre elle par le conseil de prud'hommes de Nancy ;
Attendu par ailleurs que Me Z ne rapporte pas la preuve de l'entretien qu'il aurait eu avec les dirigeants de la société SKFI au cours duquel il lui aurait proposé soit la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, soit la simple prise d'acte de la démission du salarié en détaillant à l'intention de sa cliente les avantages et inconvénients de chacune des solutions proposées, entretien à la suite duquel le dirigeant aurait seul choisi l'option lui convenant ;
Qu'en dehors du fait que cette allégation n'est assortie d'aucune preuve il y a lieu de se reporter au caractère tout à fait impératif du courrier de Me Z accompagnant l'envoi du projet de lettre de prise d'acte de démission et d'observer que les soi-disant alternatives proposées ne sont pas évoquées dans cette missive, de façon à couvrir son auteur des conséquences dommageables d'un conseil inadéquat et non conforme aux obligations découlant pour lui des dispositions de l'article 1147 du Code civil et des exigences accrues liées à sa qualité d'avocat;
Attendu que précisément encore en raison de cette qualité de professionnel du droit et de spécialiste en matière de droit social la cour juge que Me Z a abusé de son droit de former appel et que cette nouvelle faute ouvre droit à indemnisation au profit de l'intimée et ceux à concurrence de la somme de 3000 euros qu'elle a mise en compte ;
Que, partie perdante, Me Z devra en outre supporter les entiers dépens d'appel et payer à la société SKFI une indemnité de 3500 euros en compensation des frais irrépétibles que celle-ci a été contrainte d'exposer pour la défense de ses intérêts devant la cour à la suite de cet appel jugé infondé ;

Par ces motifs
Par arrêt contradictoire, prononcé publiquement
*Juge l'appel recevable en la forme, mais non fondé et le rejette ;
*Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 novembre 2012 par le tribunal de grande instance de Metz ;
*Condamne en outre Me Jean Z à payer à la SARL SKFI une indemnité de 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et une indemnité de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
*Condamne Me Jean Z aux entiers dépens d'appel.
Le présent arrêt a été prononcé publiquement le 12 février 2014 par Mme ..., président de chambre, assistée de Mme ..., greffier, et signé par elles.

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