Jurisprudence : CAA Paris, 5e ch., 09-03-2000, n° 97PA01927

CAA Paris, 5e ch., 09-03-2000, n° 97PA01927

A8938BHI

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CAA Paris, 5e ch., 09-03-2000, n° 97PA01927. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1193303-caa-paris-5e-ch-09032000-n-97pa01927
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Cour administrative d'appel de Paris

Statuant au contentieux
MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE c/ Société La Chemise Lacoste


M. BOSSUROY, Rapporteur
M. HAIM, Commissaire du gouvernement


Lecture du 9 mars 2000



R E P U B L I Q U E   F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


    (5ème chambre)

    VU, enregistré au greffe de la cour le 22 juillet 1997, le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :

    1 ) de réformer le jugement n° 9206457/1 et 9212623/1 en date du 7 novembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a prononcé la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société La Chemise Lacoste a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 ;

    2 ) de remettre ces impositions à la charge de la société La Chemise Lacoste à concurrence des droits correspondant, en base, à 9.723.712 F au titre de l'année 1984 et à 1.853.405 F au titre de l'année 1985 ;

    VU les autres pièces du dossier ;

    VU le code général des impôts ;

    VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

    VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

    Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

    Après avoir entendu à l'audience publique du 24 février 2000 :

    - le rapport de M. BOSSUROY, premier conseiller,

    - les observations de Me GUILMOTO, avocat, pour la société La Chemise Lacoste,

    - et les conclusions de M. HAIM, commissaire du Gouvernement ;


    Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société La Chemise Lacoste portant sur les années 1984 et 1985, l'administration a refusé la déduction, d'une part, des indemnités consenties à trois sociétés étrangères dans le cadre de protocoles d'accord relatifs à l'utilisation de marques représentant un crocodile et, d'autre part, de frais de collection ; que le ministre fait appel du jugement du tribunal administratif de Paris du 22 juillet 1997 en tant qu'il a accordé à la société une réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie à la suite de ce contrôle, à concurrence des droits et pénalités correspondant à ces redressements ;

    Sur les indemnités versées à trois sociétés étrangères :

    Considérant que la société La Chemise Lacoste a conclu en 1983 et en 1985 des accords avec deux sociétés établies à Singapour et en Thaïlande, destinés à mettre fin aux litiges en cours et à éviter les litiges futurs quant à l'usage sur un territoire déterminé de leurs marques respectives représentant un crocodile, à s'autoriser mutuellement à utiliser de telles marques, ainsi qu'à unir leurs efforts pour combattre les tiers contrefacteurs ; que ces accords prévoyaient le versement par la société La Chemise Lacoste à chacune de ces sociétés des sommes respectives de 1.500.000 dollars et 150.000 dollars, destinées, selon les stipulations de ces contrats, à leur rembourser les dépenses qu'elles avaient exposées pour la protection et la défense de marques représentant un crocodile ; qu'elle a de même conclu en 1985 un accord avec une société allemande destiné à aménager leurs droits respectifs dans l'usage de telles marques, en fonction de la nature des produits concernés par l'activité de chacune, prévoyant le versement à la société allemande d'une somme de 100.000 marks en contrepartie de services rendus à la société française ; que l'administration soutient que le versement de ces sommes n'avait pas, en réalité, pour contrepartie des prestations de service mais l'acquisition par la société La Chemise Lacoste d'éléments incorporels d'actif ;

    Considérant, cependant, d'une part, que l'administration n'établit pas que, contrairement à ce que soutient l'intimée, les dépenses exposées par ses cocontractantes pour les besoins d'actions engagées contre des tiers pour la protection de marques similaires à la sienne n'étaient pas de nature à favoriser également la protection de ses propres marques et que, dès lors, l'objet des versements stipulé aux contrats pourrait ne pas correspondre à la réalité ;


    Considérant, d'autre part, qu'à supposer même que les versements en cause aient eu un objet autre que celui de rembourser des services rendus auparavant à la société la Chemise Lacoste, il résulte des termes des contrats que celle-ci, propriétaire de marques représentant un crocodile était déjà, avant les accords précités, titulaire dans les territoires concernés d'enregistrements ou de demandes d'enregistrement de ces marques ; que si ces conventions avaient pour effet d'écarter le risque de contestations de la part d'autres sociétés propriétaires de marques similaires, elles ne lui attribuaient pas pour autant de droits nouveaux susceptibles de constituer pour elle un élément d'actif incorporel distinct ; que si, par ailleurs, ces accords devaient permettre, sur les marchés en cause, de réaliser les ventes sur lesquelles elle reçoit des redevances dans des conditions de sécurité juridique accrue, ils n'entraînaient pas pour autant l'acquisition d'une clientèle ou une restriction de la concurrence de nature à accroître la valeur de son fonds de commerce ;

    Considérant qu'il suit de là que la société La Chemise Lacoste était en droit de déduire lesdites sommes de sa base imposable ;

    Sur les frais de collection :

    Considérant que la société La Chemise Lacoste a déduit les frais de création des modèles des collections automne-hiver 1985-1986 et 1987-1988 et de présentation de ces collections au fabricant et aux distributeurs licenciés dans les charges des exercices 1984 et 1985 au cours desquels elle avait exposé de tels frais ; que le service a refusé ces déductions au motif que la société ne perçoit qu'au cours des exercices ultérieurs les redevances qui lui sont versées par les sociétés licenciées sur la vente des articles correspondants ;

    Considérant, d'une part, que les frais exposés au cours d'un exercice pour la création des modèles en cause ont eu pour contrepartie des prestations de services et des livraisons de biens réalisées ou effectuées à son profit au cours du même exercice ; qu'elles devaient dès lors être déduites de la base imposable au titre de cet exercice ; que même si la création de ces modèles ne pouvait produire des effets sur le chiffre d'affaires de l'entreprise que postérieurement à la clôture de cet exercice, les dépenses exposées à cette fin ne constituaient pas des charges payées ou constatées d'avance ayant pour contrepartie des prestations de services ou des livraisons de biens réalisées ou effectuées au cours d'un exercice ultérieur, dont la déduction de la base imposable doit être reportée audit exercice ;

    Considérant, d'autre part, qu'aucune disposition de la loi fiscale ni du plan comptable général de 1982 n'impose aux entreprises de différer la comptabilisation de charges ayant eu pour contrepartie des prestations de service ou des livraisons de biens effectives, jusqu'à la perception des produits correspondants ;

    Considérant que, dès lors, c'est à bon droit que la société La Chemise Lacoste a déduit ses frais de création des modèles de la collection automne-hiver de l'exercice au cours duquel ils ont été exposés ;


    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la Société la Chemise Lacoste a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 ;


Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

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