Jurisprudence : CAA Paris, 2e ch., 01-02-2001, n° 96PA02337

Cour administrative d'appel de Paris

Statuant au contentieux
MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES c/ Association Nationale des Polios de France


Mme de ROCCA, Rapporteur
M. MORTELECQ, Commissaire du gouvernement


Lecture du 1 février 2001



R E P U B L I Q U E   F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


    (2ème chambre A)

    VU le recours, enregistré le 9 août 1996, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le ministre demande à la cour :

    1 ) d'annuler l'article 1er du dispositif du jugement n 9209957/2, 9209958/2 et 9210006/2 en date du 1er février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé l'association nationale des Polios de France de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 1981, de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamée pour la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1983, ainsi que de la taxe d'apprentissage et de la cotisation complémentaire auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1983 ;

    2 ) de remettre à la charge de l'association les impositions et taxes en cause ;

    VU les autres pièces produites et jointes à la requête ;

    VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

    VU le code de justice administrative ;

    Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

    Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 2001 :

    - le rapport de Mme de ROCCA, premier conseiller,

    - et les conclusions de M. MORTELECQ, commissaire du Gouvernement ;


    Considérant que, pour demander l'annulation de l'article 1er du dispositif du jugement du tribunal administratif de Paris du 1er février 1996 déchargeant l'Association Nationale des Polios de France de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'impôt sur les sociétés, de la taxe d'apprentissage et de la cotisation complémentaire à cette taxe, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient que ladite association se livre à une exploitation de caractère lucratif ;

    En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée assignée pour la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1983 :

    Considérant qu'aux termes du 7 de l'article 261 du code général des impôts : 'Sont exonérées de taxe sur la valeur ajoutée ... 1 - b) les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des oeuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient ...' ; qu'il résulte de ces dispositions que les associations qui poursuivent un objet social ou philanthropique sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, que leur gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'elles rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée lui reste acquise si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales ;

    Considérant que l'Association Nationale des Polios de France, fondée en 1952, avait pour but, selon l'article 2 de ses statuts, 'd'assurer le développement de relations entre ses membres en veillant à leurs intérêts matériels et moraux, ainsi que le reclassement professionnel de tous les handicapés physiques' ; qu'elle gérait une maison de retraite spécialisée pour handicapés de plus de 60 ans et publiait un bulletin trimestriel intitulé 'Polio France' ; qu'elle constituait ainsi un organisme à caractère social ou philanthropique ;


    Considérant, en premier lieu, que tant en première instance qu'en appel, le ministre n'établit pas, ni même n'allègue, que les dirigeants de l'association ont perçu des rémunérations prélevées sur ses recettes ou ont bénéficié d'avantages autres que le simple remboursement de frais exposés ; qu'il résulte de l'instruction que la majeure partie des bénéfices que réalisait l'association grâce à la revente de petits objets en cuir ou en plastique (tels porte-clefs, étuis à lunette, porte-monnaie) servait à l'acquisition et à la gestion de la maison de retraite pour handicapés agés ; que la circonstance qu'une partie des bénéfices ait été également versée à la coopérative de production qui fabriquait les objets susmentionnés n'est pas de nature à caractériser l'absence d'une gestion désintéressée dès lors qu'il est constant que ladite coopérative employait majoritairement des travailleurs handicapés par la poliomyélite ;

    Considérant, en second lieu, qu'il est constant que les produits vendus par l'association l'étaient à des prix très sensiblement supérieurs à ceux pratiqués par le secteur commercial ; qu'ainsi, son activité n'entrait pas en concurrence avec les entreprises exerçant une activité similaire ; que, dès lors, le ministre ne peut utilement faire valoir que l'association utilisait des méthodes commerciales de démarchage et de publicité pour promouvoir la vente de ses objets ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a considéré que l'Association Nationale des Polios de France entrait dans le champ d'application de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ouverte aux associations dont l'activité est dénuée de caractère lucratif ;

    En ce qui concerne les cotisations à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1981 :

    Considérant qu'aux termes du 5 bis de l'article 207-1 du code général des impôts : 'sont exonérés de l'impôt sur les sociétés ... les organismes sans but lucratif mentionnés au 1 du 7 de l'article 261 pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée' ; que, pour les motifs sus-énoncés, l'ensemble des opérations réalisées en 1981 par l'Association Nationale des Polios de France devait être exonéré de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé ladite association de l'impôt sur les sociétés auquel elle avait été assujettie au titre de l'année 1981 ;

    En ce qui concerne la taxe d'apprentissage et la cotisation complémentaire mises à la charge de l'association au titre des années 1980 à 1983 :

    Considérant qu'aux termes de l'article 224 du code général des impôts, la taxe d'apprentissage est due ' ... par les sociétés, associations et organismes passibles de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206, à l'exception de ceux désignés au 5 de l'article précité, quel que soit leur objet' ; que, par suite, les opérations de l'Association Nationale des Polios de France devaient être exonérées, comme l'a jugé le tribunal administratif, de la taxe d'apprentissage et de la cotisation complémentaire mises à sa charge au titre des années 1980 à 1983 ;


    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif du 1er février 1996 ;


Article 1er : Le recours du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.

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