Jurisprudence : CAA Nancy, 19-12-1989, n° 89NC00003

Cour administrative d'appel de Nancy

Statuant au contentieux
Philippe HOUOT


JACQ, Rapporteur
FRAYSSE, Commissaire du gouvernement


Lecture du 19 décembre 1989



R E P U B L I Q U E   F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


    Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 janvier 1987 sous le n° 84625, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le n° 89NC00003, présentée pour M. Philippe HOUOT, architecte, demeurant route de Dijon à SAINT-DIE et tendant à ce que la Cour annule le jugement en date du 26 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif de NANCY l'a condamné à verser à la commune de COMMERCY les sommes de 649 200 F pour les désordres affectant la superstructure de la piscine de COMMERCY, 196 000 F pour les désordres affectant la toiture, 16 700 F pour ceux affectant les rives entre couverture et couvertine et, solidairement avec l'entreprise TOLLINI, 34 220 F pour les désordres survenus dans le bureau des maîtres nageurs ;

    Vu le nouveau mémoire en défense enregistré le 9 juin 1989, présenté pour la commune et tendant à ce que M. HOUOT soit condamné à lui verser la somme de 7 000 F au titre des frais de procédure ;

    Vu le mémoire en réponse enregistré le 13 novembre 1989, présenté pour la société S.P.A.P.A. et tendant au rejet de la requête et à ce que M. HOUOT soit condamné à lui verser la somme de 3 000 F au titre des frais de procédure ;

    Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;

    Vu le jugement attaqué ;

    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code des marchés publics ;

    Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

    Vu la loi 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et les décrets n° 88-906 et 88-907 du 2 septembre 1988 ;

    Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

    Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 décembre 1989 :

    - le rapport de M. JACQ, Conseiller ;

    - les observations de Me DUCROCQ, substituant la SCP CELICE-BLANCPAIN, avocat de la Commune de COMMERCY, Me BARTHELEMY, de la SCP VIER-BARTHELEMY, avocat de la Société WEISROCK, Me LE BRET-DESACHE, substituant Me ODENT, avocat de la Société DUDIK et Me BERRODIER, de la SCP BERRODIER-GOTTLICH, avocat de la Société S.P.A.P.A. ;

    - et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;


    Sur les désordres affectant la surperstructure bois-métal :

    Considérant que les désordres litigieux consistant, d'une part, en un pourrissement des poteaux et des poutres en lamellé-collé supportant l'ensemble charpente-couverture et, d'autre part, en un défaut d'étanchéité entre la lisse basse de la charpente et la maçonnerie de la piscine sont apparus postérieurement à la réception définitive des travaux et sont, en raison de leur importance, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ; qu'ils permettent, par suite, à la commune de COMMERCY de mettre en jeu la garantie décennale prévue par les articles 1792 et 2270 du code civil ;

____Considérant que, d'une part, il résulte de l'instruction que le devis descriptif établi par M. HOUOT, architecte, n'a pas prévu de peinture de protection des poteaux et poutres contre l'humidité ambiante de la piscine ; que cette lacune révèle un vice de conception imputable à l'architecte ; que le syndicat intercommunal à vocation multiple de la région de COMMERCY, qui a remis l'ouvrage achevé à la commune et qui a appliqué, postérieurement à la réception définitive, une peinture filmogène qui a eu pour effet d'aggraver les désordres initiaux, a commis une faute de nature à atténuer la responsabilité de l'architecte ; que, pour s'exonérer de la responsabilité qu'elle encourt, la commune ne peut utilement invoquer, après la réception définitive qui a marqué la fin des rapports contractuels, une faute de l'architecte dans son obligation de conseil ; que, d'autre part, le défaut d'étanchéité entre la lisse basse et la maçonnerie résulte essentiellement d'un vice de conception imputable à l'architecte qui n'a pas prévu de relevé de maçonnerie au devis descriptif et qui, pour pallier cette carence, a préconisé la mise en oeuvre d'un système d'étanchéité contraire aux règles de l'art ; que ces désordres sont également imputables à l'entreprise TOLLINI qui n'a pas exécuté un relevé de maçonnerie ni fait aucune réserve auprès de l'architecte ; que, par contre, ils ne sont pas imputables à l'entreprise WEISROCK, titulaire du lot charpente qui a fait à plusieurs reprises toutes réserves sur le vice de conception susmentionné ; qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il sera fait une exacte appréciation des différentes responsabilités encourues en laissant à la charge de la commune de COMMERCY 10 % du coût de réfection des désordres affectant la superstructure bois-métal de la piscine, que l'expert commis par ordonnance de référé en date du 9 août 1983 a évalué à la somme de 649 200 F, en condamnant M. HOUOT à verser à la commune la somme de 584 280 F et l'entreprise TOLLINI à garantir M. HOUOT de 10 % de la condamnation prononcée contre lui ; qu'il convient, par suite, de réformer en ce sens le jugement attaqué ;

    Sur les désordres affectant la toiture :


    Considérant qu'il résulte de l'instruction que les désordres affectant la toiture de la piscine proviennent d'une ventilation insuffisante et sont, par leur importance, de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; que le système de ventilation en égout et au faîtage préconisé par l'architecte était inadapté en raison des efforts d'arrachement auxquels la toiture aurait été soumise ; que ce vice de conception engage la responsabilité de M. HOUOT vis-à-vis de la commune de COMMERCY ; que, si aucune autre solution n'a été proposée à l'architecte par la SARL DUDIK qui a exécuté les travaux de couverture sans ventilation appropriée sous la direction de l'architecte, cette circonstance n'a pas, en l'espèce, constitué une faute de nature à décharger de sa responsabilité, même pour partie, M. HOUOT qui ne pouvait ignorer les conséquences dommageables des graves lacunes de son projet ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise complémentaire, M. HOUOT n'est pas fondé à demander que la SARL DUDIK le garantisse des condamnations prononcées contre lui par le jugement attaqué à raison des désordres affectant la toiture de la piscine ;

    Sur les autres désordres :

    Considérant qu'il résulte de l'instruction que les désordres affectant les rives entre couverture et couvertine ainsi que les infiltrations constatées dans le bureau des maîtres-nageurs sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination alors même qu'ils pouvaient être réparés par des travaux d'un coût peu élevé par rapport au montant du marché ; que, par suite, ils permettaient à la commune de mettre en jeu la garantie décennale prévue par les articles 1792, et 2270 du code civil ;

    Considérant que, d'une part, l'étanchéité entre couverture et couvertine n'était pas prévue au devis descriptif annexé au marché ; que cette lacune engage la responsabilité de l'architecte qui n'est pas fondé à appeler en garantie l'entreprise DUDIK dès lors que celle-ci avait préconisé, pour pallier le vice de conception initial, une solution technique qui n'a pas été retenue ; que, d'autre part, les désordres affectant le bureau des maîtres nageurs sont imputables à la fois à un vice de conception et à une exécution défectueuse des travaux par l'entreprise TOLLINI ; qu'ils engageaient, par suite, la responsabilité solidaire de l'architecte et de cet entrepreneur vis-à-vis de la commune de COMMERCY et justifiaient un partage à parts égales de la charge définitive dont le montant de 34 220 F n'est pas contesté ; que de ce qui précède il résulte, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée, que M. HOUOT n'est pas fondé à contester, en ce qui concerne lesdits désordres, le jugement attaqué ;

    Sur les frais de procès non compris dans les dépens :

    Considérant que ni la commune de COMMERCY ni l'entreprise S.P.A.P.A. n'apportent de justifications à l'appui de leur demande tendant à la condamnation de M. HOUOT à leur verser respectivement 7 000 F et 3 000 F, par application des dispositions de l'article 1er du décret 88-907 du 2 septembre 1988 ; que, dès lors, ces conclusions ne sauraient être accueillies ;


Article 1 : La somme que M. Philippe HOUOT a été condamné à verser à la commune de COMMERCY, au titre des désordres affectant la superstructure de la piscine de COMMERCY, par le jugement du tribunal administratif de NANCY en date du 26 décembre 1986 est ramenée de 649 200 F à 584 280 F.
Article 2 : L'entreprise TOLLINI est condamnée à garantir M. HOUOT à concurrence de 10 % de la condamnation prononcée contre lui à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de NANCY du 26 décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. HOUOT et les conclusions relatives aux frais de procès de la commune de COMMERCY et de la société S.P.A.P.A. sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe HOUOT, à la commune de COMMERCY, à l'entreprise TOLLINI, aux établissements WEISROCK, à la SARL DUDIK et à la société S.P.A.P.A.

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