Jurisprudence : Cass. crim., 19-02-2003, n° 02-81.851, FS-P+F, Rejet



CRIM.
COUR DE CASSATION N° K 02-81.851 FS-P+FN° 1183
VD1 9 Février 2003
M. COTTE président,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, et de la société civile professionnelle BORÉ, XAVIER et BORÉ, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général ... ;

Statuant sur le pourvoi formé par
- La société MAES TRANSPORT BVBA,
civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, en date du 30 janvier 2002, qui, sur renvoi après cassation, après condamnation de René ... pour importation en contrebande de marchandises prohibées, l'a, notamment, déclarée civilement responsable de cette infraction commise par son employé et tenue solidairement avec celui-ci au paiement de l'amende douanière prononcée à son encontre ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européennede sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1134 et 1384, alinéa 5, du Code civil, 404 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Maes Transport BVBA civilement responsable de l'infraction douanière commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende à laquelle il a été condamné et en conséquence l'a déclarée tenue solidairement avec celui-ci au paiement de l'amende douanière de 400.000 francs, soit 60.979,61 euros à laquelle il a été condamné ;
"aux motifs que l'administration des Douanes agit sur le fondement de l'article 404 du Code des douanes qui lui permet de rechercher la responsabilité civile des propriétaires des marchandises à raison du fait de leurs employés en ce qui concerne non seulement les droits mais aussi les amendes et les confiscations ; ... que l'action de l'administration des Douanes vise seulement à voir la société Maes déclarer civilement responsable du fait de son salarié René ... et solidairement tenue des condamnations fiscales mises à la charge de celui-ci, en vertu de l'action qu'elle tient de l'article 404 du Code des douanes ;
"et aux motifs que, aux termes de l'article 404 du Code des douanes, les propriétaires des marchandises sont responsables civilement du fait de leurs employés en ce qui concerne les droits, confiscations amendes et dépens ; que cette responsabilité n'est pas subordonnée à l'existence d'un préjudice pour l'administration des douanes ; que la responsabilité civile des propriétaires de marchandises est engagée, même en l'absence de toute faute de leur part ; que la bonne foi de la société Maes, à la supposer établie, ne serait pas de nature à l'exonérer de cette responsabilité civile qui est indépendante de sa connaissance des agissements commis par son préposé; que l'article 404 du Code des douanes ne dérogeant pas à l'article 1384, alinéa 5, du Code civil en ce qui concerne sa mise en oeuvre, le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi hors de ses fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions ; que René ... a importé en contrebande les 48 cartons de cigarettes découvertes par les agents des douanes en utilisant le camion appartenant à la société Maes Transport BVBA qui l'employait, à l'occasion d'un transport de marchandises effectué pour le compte de cette société et pendant le temps de travail ; que, dés lors, même s'il l'a fait sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, René ... n'a pas agi hors de ses fonctions qui étaient les siennes de chauffeur routier chargé de convoyer des marchandises pour le compte de son employeur et l'infraction douanière qu'il a commise n'est pas indépendante du lien de préposition l'unissant à son employeur ; que la société Maes doit en conséquence être déclarée civilement responsable de l'infraction commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende fiscale prononcée par ce dernier ;
"alors que, d'une part, il résulte des conclusions de l'administration des Douanes que celle-ci a agi sur le seul fondement de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, demandant à la cour d'appel de déclarer la société Maes civilement responsable de son préposé René ..., et de la condamner à payer solidairement avec ce dernier une amende de 400.000 francs et la confiscation du moyen de transport saisi ; qu'en déclarant que l'administration des douanes avait agi sur le fondement de l'article 404 du Code des douanes qui prévoit que les propriétaires de marchandises sont responsables civilement du fait de leurs employés en ce qui concerne les droits, confiscations amendes et dépens, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'administration des douanes, et violé l'ensemble des textes précités ;
"alors que, d'autre part, en se fondant sur les dispositions de l'article 404 du Code des douanes, texte non invoqué par l'administration des Douanes dans ses conclusions, sans inviter les parties à conclure sur ce nouveau fondement, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire et violé l'ensemble des textes précités" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 343, 404, 414 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, 1384, alinéa 5, du Code civil, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Maes Transport BVBA responsable civilement de l'infraction douanière commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende à laquelle il a été condamné et en conséquence l'a déclarée tenue solidairement avec celui-ci au paiement de l'amende douanière de 400.000 francs, soit 60.979,61 euros à laquelle il a été condamné ;
"aux motifs que, aux termes de l'article 404 du Code des douanes, les propriétaires des marchandises sont responsables civilement du fait de leurs employés en ce qui concerne les droits, confiscations amendes et dépens ; que cette responsabilité n'est pas subordonnée à l'existence d'un préjudice pour l'administration des Douanes ; que la responsabilité civile des propriétaires de marchandises est engagée, même en l'absence de toute faute de leur part; que la bonne foi de la société Maes, à la supposer établie, ne serait pas de nature à l'exonérer de cette responsabilité civile qui est indépendante de sa connaissance des agissements commis par son préposé; que l'article 404 du Code des douanes ne dérogeant pas à l'article 1384, alinéa 5, du Code civil en ce qui concerne sa mise en oeuvre, le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi hors de ses fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions ; que René ... a importé en contrebande les 48 cartons de cigarettes découvertes par les agents des douanes en utilisant le camion appartenant à la société Maes Transport BVBA qui l'employait, à l'occasion d'un transport de marchandises effectué pour le compte de cette société et pendant le temps de travail ; que, dès lors, même s'il l'a fait sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, René ... n'a pas agi hors de ses fonctions qui étaient les siennes de chauffeur routier chargé de convoyer des marchandises pour le compte de son employeur et l'infraction douanière qu'il a commise n'est pas indépendante du lien de préposition l'unissant à son employeur; que la société MAES doit en conséquence être déclarée civilement responsable de l'infraction commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende fiscale prononcée par ce dernier ;
"alors qu' aux termes de l'article 404 du Code des douanes les propriétaires des marchandises sont responsables civilement du fait de leurs employés en ce qui concerne les droits, confiscations, amendes et dépens ; qu'il résulte des motifs de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 29 septembre 1998, devenus définitifs, que la société Maes Transport BVBA n'était pas propriétaire des marchandises introduites en contrebande par son employé René ... ; qu'en la déclarant civilement responsable de ce dernier sur le fondement de l'article 404 du Code des douanes, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les textes précités" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 343, 404, 414 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, 1384, alinéa 5, du Code civil, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Maes Transport BVBA responsable civilement de l'infraction douanière commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende à laquelle il a été condamné et en conséquence l'a déclarée tenue solidairement avec celui-ci au paiement de l'amende douanière de 400.000 francs, soit 60.979,61 euros à laquelle il a été condamné ;
"aux motifs que l'article 404 du Code des douanes ne dérogeant pas à l'article 1384, alinéa 5, du Code civil en ce qui concerne sa mise en oeuvre, le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi hors de ses fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions; que René ... a importé en contrebande les 48 cartons de cigarettes découvertes par les agents des douanes en utilisant le camion appartenant à la société MAES Transport BVBA qui l'employait, à l'occasion d'un transport de marchandises effectué pour le compte de cette société et pendant le temps de travail ; que, d7s lors, même s'il l'a fait sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, René ... n'a pas agi hors de ses fonctions qui étaient les siennes de chauffeur routier chargé de convoyer des marchandises pour le compte de son employeur et l'infraction douanière qu'il a commise n'est pas indépendante du lien de préposition l'unissant à son employeur; que la société MAES doit en conséquence être déclarée civilement responsable de l'infraction commise par son employé René ... en ce qui concerne l'amende fiscale prononcée par ce dernier ;
"alors que, d'une part, la responsabilité civile du commettant, fondée sur les dispositions de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, ne peut avoir pour objet que de réparer le dommage personnel et direct subi par la partie civile, et causé par le préposé du fait de l'infraction douanière qu'il a commise ; que ce dommage ne peut consister pour l'administration des Douanes que dans le défaut de paiement des droits de douanes normalement dus, ou l'obtention de droits indûs ; qu'en condamnant la société MAES à verser à l'administration des Douanes, partie civile, l'amende à laquelle son préposé a été condamné, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ;
"alors que, d'autre part, l'amende douanière prévue par les dispositions de l'article 414 du Code des douanes a le caractère d'une sanction à la fois pénale et fiscale ; qu'en condamnant la société Maes à son versement au titre d'une réparation civile, la cour d'appel a derechef violé l'ensemble des textes précités ;
"alors, qu'enfin, le principe de la personnalité des peines s'oppose à ce qu'en l'absence de toute disposition spéciale du Code des douanes le commettant, non propriétaire des marchandises, puisse être condamné à supporter l'amende proportionnelle infligée à son préposé ;que la société Maes n'est pas propriétaire des marchandises introduites en contrebande par René ... ; qu'en la condamnant néanmoins au paiement solidaire de l'amende infligée à son préposé du fait de cette infraction, la cour d'appel a violé ce principe ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, lors d'un contrôle effectué le 23 janvier 1995 dans le port de Marseille, les agents de l'administration des Douanes ont découvert dans un camion conduit par René ..., chauffeur salarié de la société Maes Transport BVBA, 48 cartons de cigarettes que celui-ci a déclaré avoir achetées en détaxe en Tunisie pour les revendre à son profit personnel en Belgique ; que l'intéressé a été déclaré coupable d'importation en contrebande de marchandises prohibées et condamné à une amende douanière et à la confiscation des cigarettes saisies ;
Attendu que, pour déclarer la société Maes Transport BVBA civilement responsable de l'infraction douanière commise par son employé et tenue solidairement au paiement de l'amende douanière prononcée par le tribunal, les juges du second degré, après avoir rappelé que René ... a importé en contrebande les cartons de cigarettes découverts par les agents des douanes, en utilisant le camion de son employeur lors d'un transport effectué pour le compte de celui-ci pendant le temps du travail, énoncent que, même s'il a agi sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, il n'était pas hors de ses fonctions, au sens de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, et que l'infraction douanière qu'il a commise n'est pas indépendante du lien de préposition l'unissant à son employeur ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations et dès lors que l'amende douanière, en raison de son caractère partiellement indemnitaire, peut être mise à la charge du civilement responsable, la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré M. ... président, Mme ... ... ... conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Dulin, Mme Desgrange, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, MM. Soulard, Samuel, conseillers référendaires ;
Avocat général Mme Commaret ;
Greffier de chambre Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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