Jurisprudence : CA Paris, 18e ch., E, 29-06-2001, n° 01/30113

CA Paris, 18e ch., E, 29-06-2001, n° 01/30113

A9305A7R

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r0 4 Juit.. 2001
COUR D'APPEL DE PARIS AUDIENCE SOLENNELLE 18ème Chambre, section E ARRÊT DU 29 JUIN 2001
(N°, pages)
APPELANT
représenté par Me ... ...
Avocat à la Cour A 261
N° Répertoire Général 01/30113
AU FOND
CONTRADICTOIRE

PARTIES EN CAUSE
1°) M. Gérard Z

BONNEUIL SUR MARNE
2°) SA ARDENT ELECTRONIQUE
ZI La Poudrette 52 allée du Luxembourg
PAVILLONS SOUS BOIS
INTIMÉE
représentée par Me ...
Avocat au Barreau à la Cour P 472

COMPOSITION DE LA COUR, statuant en tant que Chambre Sociale
Président M. THEVENOT
Conseillers Mme ...
Mme ...
M. ...
Mme ...
GREFFIER Mme BETHERY, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
1ère page
MINISTÈRE PUBLIC représenté par M. ... S. M. le ... ....
SAISINE Sur renvoi après cassation d'un arrêt rendu le 29 mai 1998 par la 21ème Chambre B de la Cour d'Appel de PARIS.
REBATS A l'audience publique du 11 mai 2001.
ARRÊT prononcé publiquement par M. THEVENOT, Président lequel a signé la minute avec Mme BETHERY, Greffier.



La société "Ardent Electronique" s'est constituée le 12 novembre 1992 ; dans l'acte constitutif, Gérard Z a été désigné comme administrateur ; Gérard Z était titulaire d'une action de 100 francs sur un capital de 10.000.000 francs. Il a explicitement accepté cette fonction le même jour ; un conseil d'administration s'est tenu, toujours le même jour, qui est également celui du début d'activité effective de la société d'après l'extrait du registre du commerce.
Gérard Z et la société "Ardent Electronique" ont signé le 4 janvier 1993 un contrat de travail conférant au premier nommé des fonctions de directeur grands comptes, cadre niveau 3 coefficient 240.
La société "Ardent" a été immatriculée au registre du commerce le 7 janvier 1993.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 février 1995, Gérard Z a été convoqué, avec mise à pied conservatoire, à un entretien préalable au licenciement qui a eu lieu le 17 du même mois.
Gérard Z a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 février 1995, pour avoir indirectement informé une société concurrente de la stratégie commerciale de l'employeur, d'avoir témoigné d'un manque de collaboration flagrant susceptible de compromettre l'intégration du nommé Davy, et d'avoir fait entrer dans le capital de la société une société DEMO, concurrente d'une autre société, Normandie Protection, nouvellement intégrée. L'employeur lui précisait que sa qualité d'administrateur le privait du statut de salarié et notamment du droit aux ASSEDIC.
Gérard Z a saisi le Conseil des Prud'hommes de Bobigny pour obtenir la condamnation de la société "Ardent Electronique" à lui payer les sommes suivantes
- la somme de 72.000 francs à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - la somme de 7.200 francs à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, - la somme de 288.000 francs à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la somme de 20.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par jugement du 16 avril 1996, le Conseil des Prud'hommes de Bobigny a rejeté ces demandes.

Gérard Z a interjeté appel de cette décision devant la Cour d'Appel de Paris qui, par arrêt 29 mai 1998, a considéré que Gérard Z était bien dans un lien de subordination à l'égard de la société "Ardent Electronique", et a accueilli ses demandes dans le principe, réduisant à 144.000 francs le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et à 5.000 francs le montant de l'indemnité de procédure.

RG n° 01/30113 Ch. 18ème E date 29/6/2001 2ème page

Par arrêt du 19 juillet 2000, la Cour de Cassation a cassé cet arrêt au motif que le contrat de travail consenti à un administrateur en fonction, peu important le caractère symbolique ou non de son mandat, est nul de nullité absolue.
Devant la cour de renvoi, Gérard Z conclut à la confirmation du jugement dont appel, et donc à la condamnation de la société "Ardent" à lui payer
- la somme de 72.000 francs à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- la somme de 144.000 francs à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- la somme de 7.200 francs à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, - la somme de 20 .000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Au soutien de sa demande Gérard Z fait valoir que le contrat de travail passé entre lui et la société "Ardent" avait une réalité et un contenu ; que l'employeur a pris pour le rompre, les formes qui sont imposées par la loi ; que par contre ses fonctions d'administrateur n'avaient qu'un caractère purement symbolique, par le nombre de parts dont il était détenteur, d'abord, par l'absence de pouvoir exercé ensuite ; que les deux positions d'administrateur et de salarié peuvent se cumuler, à la condition que le contrat de travail soit antérieur à l'acquisition des fonctions d'administrateur ; qu'en l'espèce le contrat de travail a été conclu antérieurement à l'immatriculation de la société "Ardent" au registre du commerce ; que les personnes désignées pour remplir des fonctions de dirigeants sociaux n'acquièrent cette qualité que lorsque la société dispose de la personnalité morale, c'est à dire à compter de son immatriculation ; que donc Gérard Z n'est devenu effectivement administrateur de la société que le 7 janvier 1993, le contrat de travail datant du 4 janvier 1993 ; qu'au fond, il n'a commis aucune faute grave justifiant le licenciement ; que l'employeur n'en rapporte pas la preuve ; que le licenciement ne repose pas plus sur une cause réelle et sérieuse.
La société "Ardent" soutient que le Conseil des Prud'hommes de Bobigny était incompétent pour statuer sur la demande de Gérard Z ; qu'en effet, celui-ci avait la qualité d'administrateur dès la création de la société, dont il était membre fondateur ; que sa nomination comme administrateur est parfaitement régulière ; que c'est à tort que Gérard Z affirme que son rôle n'était que purement symbolique, alors que l'exercice de son mandat a été effectif ; que Gérard Z est d'ailleurs présent dans les autres sociétés qui constituent un groupe autour de la société "Ardent" ; que le contrat de travail n'est pas antérieur à la désignation de Gérard Z comme administrateur, puisque la date à prendre en considération est celle de l'acceptation, par le dirigeant social, du mandat qui lui est confié ; que le premier conseil d'administration s'est tenu le 12 novembre 1992 ; que l'activité de la société a été effective à compter de cette date, ce qui résulte des mentions de l'extrait du registre du commerce ; qu'au surplus, si l'existence d'un contrat de travail venait à être reconnue, le licenciement est parfaitement fondé en droit sur la faute grave commise par Gérard Z . La société "Ardent" demande ainsi que soit constatée la nullité du contrat de travail, voir déclare le Conseil des Prud'hommes de Bobigny incompétent pour connaître des demandes présentées par Gérard Z, et voir
RG n° 01/30113 Ch. 18ème E date 29/6/2001 3ème page
débouter Gérard Z de toutes se demandes, subsidiairement, déclarer justifiée la rupture du lien contractuel et confirmer le jugement du Conseil des Prud'hommes de Bobigny.
Aux termes de l'article 107 de la loi du 24 juillet 1966, "sous réserve des dispositions de l'article 93 et de l'article 97-1, les administrateurs ne peuvent recevoir de la société aucune rémunération, permanente ou non, autre que celles prévues aux articles 108, 109, 110 et 115 ; toute décision contraire est nulle". Il découle de ce texte que le contrat de travail conclu entre la société et un administrateur est nul de nullité absolue.
Il entraîne la nullité du contrat de travail conclu entre la société "Ardent" et Gérard Z, à la condition que ce dernier ait bien été administrateur en fonction au 4 janvier 1993.

Sur ce dernier point, il convient de constater que soit la nomination de Gérard Z comme administrateur a pris effet au jour de l'acceptation qu'il en a exprimé, soit au 12 novembre 1992, soit au jour de l'immatriculation de la société lui conférant la personnalité morale.
Le défaut de personnalité morale de la société avant son immatriculation ne fait certainement pas obstacle à ce que les membres fondateurs accomplissent les actes qui dépendent de leurs fonctions, et qu'ils accomplissent précisément en qualité de membres fondateurs. La désignation des premiers administrateurs ne peut donc dépendre, pour sa validité dans la période antérieure à l'immatriculation, de l'acquisition par la société de la personnalité morale. Au contraire, les fonctions des adminsitrateurs débutent dès leur acceptation, notamment pour le décompte de la durée maximale de ces fonctions. Il apparaît donc que le contrat de travail du 4 janvier a été signé par Gérard Z alors qu'il avait la qualité d'administrateur, quelle que soit la situation de la future société.
Cette conclusion correspond au voeu du texte de l'article 107 de la loi du 24 juillet 1966, dont la finalité est de iimiter strictement les situations génératrices de confusion des intérêts et des rôles contractuels, au détriment possible de la société. Dans cette perspective, c'est bien la succession de la nomination aux fonctions d'administrateur, puis de la conclusion d'un contrat de travail qui constitue la situation visée par le texte légal, et non l'acquisition par la société de la personnalité morale.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater la nullité du contrat de travail du 4 janvier 1993, en infirmant le jugement du Conseil des Prud'hommes de Bobigny. De cette nullité, il résulte non pas l'incompétence de la juridiction prud'homale, puisqu'elle est en mesure de rejeter les demandes présentées par Gérard Z sur le fondement du contrat de travail, statuant ainsi dans le cadre de sa compétence. Elle aurait au contraire été incompétente pour statuer sur des demandes présentées sur le droit commun contractuel. Le Conseil des Prud'hommes de Bobigny, comme la Cour, ne sont saisies d'aucune demande sur ce fondement.

RG n° 01/30113 Ch. 18ème E date 29/6/2001 4ème page

Gérard Z qui succombe dans l'instance, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS
La Cour,
- en la forme, déclare l'appel recevable,
- au fond, infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau,
- constate la nullité du contrat de travail conclu le 4 janvier 1993 entre Gérard Z et la société "Ardent",
- dit que cette nullité n'entraîne pas l'incompétence du Conseil des Prud'hommes de Bobigny pour statuer sur les demandes présentées sur le fondement du contrat de travail,
- déboute Gérard Z de toutes ses demandes,
- le condamne aux dépens d'instance et d'appel.. LE GREFFIER
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LE P f SIDENT
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RG n° 01/30113 Ch. 18ème E date 29/6/2001 Sème page

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