Jurisprudence : Chbre mixte, 06-09-2002, n° 98-22.981, Cassation partielle.

Chbre mixte, 06-09-2002, n° 98-22.981, Cassation partielle.

A2644AZX

Référence

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Abstract

La Chambre mixte de la Cour de cassation, par deux arrêts rendus le 6 septembre, est venue apporter des précisions sur le fondement de la responsabilité des organisateurs de loteries publicitaires trompeuses.



L.G.
COUR DE CASSATION
CHAMBRE MIXTE
Audience publique du 6 septembre 2002
Cassation partielle
M. CANIVET, premier président,
Pourvoi n° D 98-22.981
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. Z.
Admission du Bureau juridictionnelle
près la Cour de Cassation
en date du 3 février 2000.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par

1°/ l'association UFC Que Choisir, dont le siège est Paris,

2°/ M. Laurent Z, demeurant Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 octobre 1998 par la cour d'appel de Paris (25e chambre, section B), au profit

1°/ de la société Maison française de distribution (MFD), société anonyme, dont le siège est Paris,

2°/ de M. W, domicilié Levallois-Perret, ès qualités de liquidateur de la société MFD,
défendeurs à la cassation ;
Par arrêt du 13 décembre 2001, la Deuxième chambre civile a renvoyé le pourvoi devant une Chambre mixte. Le premier président a, par ordonnance du 9 juillet 2002, indiqué que cette Chambre mixte sera composée des Première, Deuxième et Troisième chambres civiles, de la Chambre commerciale, financière et économique et de la Chambre criminelle ;
Les demandeurs invoquent, devant la Chambre mixte, les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Ces moyens ont été formulés dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de Cassation par la SCP Vier et Barthélemy, avocat de l'association UFC Que Choisir et de M. Laurent Z ;
Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de Cassation par la SCP Gatineau, avocat de la société MFD et de M. W ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en Chambre mixte, en l'audience publique du 12 juillet 2002, où étaient présents M. T, premier président, MM. S, S, S, S, S, présidents, M. R, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, Mlle Fossereau, MM. Pierre, Tricot, Le Gall, Peyrat, Cachelot, Lesueur de Givry, Mme Tric, MM. Mazars, Le Corroller, Mmes Lardennois, Thin, M. Charruault, conseillers, M. Q Q, premier avocat général, Mme P, greffier en chef ;
Sur le rapport de M. R, conseiller, assisté de M. O, greffier en chef, les observations de la SCP Vier et Barthélemy, de la SCP Gatineau, les conclusions de M. Q Q, premier avocat général, auxquelles les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z a reçu de la société de vente par correspondance Maison française de distribution (la société) deux documents le désignant, de façon nominative et répétitive, en
gros caractères, comme ayant gagné 105 750 francs, avec annonce d'un paiement immédiat, pourvu que fût renvoyé dans les délais un bon de validation joint ; que cette pièce fût aussitôt signée et expédiée ; que la société n'ayant jamais fait parvenir ni lot ni réponse, M. Z l'a assignée en délivrance du gain et, subsidiairement, en paiement de l'intégralité de la somme susmentionnée pour publicité trompeuse, née de la confusion entretenue entre gain irrévocable et pré-tirage au sort ; que l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir (UFC) a demandé le paiement d'une somme de 100 000 francs de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif des consommateurs ; que l'arrêt leur a respectivement accordé les sommes de 5 000 francs et un franc ;
Sur le premier moyen
Attendu que l'UFC fait grief à la cour d'appel d'avoir limité à un franc la réparation de son préjudice, alors, selon le moyen, que si les juges apprécient souverainement le montant des dommages-intérêts dans la limite des conclusions des parties, il leur appartient cependant d'évaluer le préjudice d'après les éléments dont ils disposent, au besoin après avoir ordonné toutes mesures utiles, sans pouvoir se borner à allouer une indemnité symbolique en raison d'un montant incertain du dommage ; qu'en l'espèce, l'UFC Que Choisir, dont la mission est de poursuivre la réparation de préjudices subis par une multitude de consommateurs, invoquait le préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs du fait des procédés agressifs et mensongers des sociétés par correspondance consistant à faire croire aux consommateurs qu'ils ont gagné un lot important pour obtenir des commandes et évaluait ce préjudice à la somme de 100 000 francs ; qu'en se bornant à considérer que l'intérêt collectif des consommateurs était, au regard des circonstances de l'espèce, exactement réparé par l'octroi d'une somme d'un franc à titre de dommages-intérêts sans préciser les éléments sur lesquels elle se fondait pour évaluer le préjudice à une telle somme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a apprécié souverainement le montant du préjudice dont elle a justifié l'existence par l'évaluation qu'elle en a faite, sans être tenue d'en préciser les divers éléments ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le moyen de pur droit, relevé d'office après avertissement donné aux parties
Vu l' article 1371 du Code civil ;
Attendu que les quasi-contrats sont les faits purement volontaires de l'homme dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers ;
Attendu que pour condamner la société à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à M. Z, l'arrêt retient qu'en annonçant de façon affirmative une simple éventualité, la société avait commis une faute délictuelle constituée par la création de l'illusion d' un gain important et que le préjudice ne saurait correspondre au prix que M. Z avait cru gagner ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa s'oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu' il a condamné la société MFD à verser à M. Z la somme de 5 000 francs, l'arrêt rendu le 23 octobre 1998, entre les parties, par la cour de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Maison française de distribution et M. W, ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, siégeant en Chambre mixte, et prononcé par le premier président en son audience publique du six septembre deux mille deux.
LE CONSEILLER RAPPORTEUR, LE PREMIER PRÉSIDENT,
LE GREFFIER EN CHEF.
Moyens produits par la SCP Vier et Barthélémy, avocat aux Conseils, pour l'association UFC Que choisir et M. Z.
Moyens annexés à
l'arrêt n° 212 P (Chambre mixte)
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir limité à un franc le montant de la réparation du préjudice subi par l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir ;
AUX MOTIFS QU' en annonçant de façon aussi affirmative une simple éventualité, la société MFD a commis une faute de nature délictuelle dont elle doit réparation ; que l'intérêt collectif des consommateurs sera, au regard des circonstances de l'espèce, exactement réparé par l'octroi d'une somme de un franc à titre de dommages-intérêts ;
ALORS QUE si les juges apprécient souverainement le montant des dommages-intérêts dans la limite des conclusions des parties, il leur appartient cependant d'évaluer le préjudice d'après les éléments dont ils disposent, au besoin, après avoir ordonné toute mesures utiles, sans pouvoir se borner à allouer une indemnité symbolique en raison d'un montant incertain du dommage ; qu'en l'espèce, l'UFC Que Choisir, dont la mission est de poursuivre la réparation de préjudices subis par une multitude de consommateurs, invoquait le préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs du fait des procédés agressifs et mensongers des sociétés par correspondance consistant à faire croire aux consommateurs qu'ils ont gagné un lot important pour obtenir des commandes et évaluait ce préjdice à la somme de 100 000 francs ; qu'en se bornant à considérer que l'intérêt collectif des consommateurs était, au regard des circonstances de l'espèce, exactement réparé par l'octroi d'une somme d'un franc à titre de dommages-intérêts sans préciser les éléments sur lesquels elle se fondait pour évaluer le préjudice à une telle somme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
SECOND MOYEN
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé à 5 000 francs le montant des dommages-intérêts accordés à M. Laurent Z en réparation de son préjudice ;
AUX MOTIFS QUE le préjudice subi par Laurent Z ensuite de cette faute, constitué par la vaine croyance en un gain important, ne saurait correspondre au montant du prix que l'appelant a cru avoir gagné, de sorte qu'il sera exactement réparé par l'octroi de dommages-intérêts de 5 000 francs ;
ALORS QUE l'indemnisation accordée doit réparer intégralement le préjudice subi par le demandeur ; que dans ses conclusions, M. Z faisait valoir que, vivant au seuil de la pauvreté, il avait fondé de nombreux projets pour sortir de cette situation grâce à la somme de 105 750 francs promise par la société MFD et il insistait sur l'importance de son préjudice qu'il évaluait au montant de la somme qu'il aurait dû percevoir ; qu'en se contentant d'accorder 5 000 francs de dommages-intérêts à M. Z, sans s'expliquer sur les circonstances particulières relevées par ses conclusions propres à influencer de ce préjudice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.
LE GREFFIER EN CHEF.

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