Jurisprudence : CA Dijon, 24-10-2013, n° 13/00521, Confirmation partielle



RV/FG
Roland Z
C/
Société ART INDUSTRIE
SAS MCTI
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAONE-ET-LOIRE (C.P.A.M.)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2013

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 13/00521
Décision déférée à la Cour AU FOND du 16 MAI 2013, rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE DE SAONE-ET-LOIRE
RG 1ère instance R12-190

APPELANT
Roland Z

CRISSEY
comparant en personne,
assisté de Maître Frédéric LE BONNOIS, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Maître Anne-Claire MASSON, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES
Société ART INDUSTRIE FRAGNES
représentée par Maître Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL DANA & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, substitué par Maître Sophie CHATAGNON-GRENOT, avocat au barreau de LYON
SAS MCTI

ST LAURENT SUR SAONE
représentée par Maître William ROLLET, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAONE-ET-LOIRE (C.P.A.M.)
113 rue de Paris
MACON CEDEX 9
représentée par Madame Michèle ... (Responsable contentieux) en vertu d'un mandat en date du 20 septembre 2013

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 24 septembre 2013 en audience publique devant la Cour composée de
Marie-Françoise ROUX, Conseiller, Président,
Robert VIGNARD, Conseiller,
Marie-Françoise BOUTRUCHE, Conseiller,
qui en ont délibéré,
GREFFIER LORS DES DÉBATS Josette ARIENTA,
ARRÊT rendu contradictoirement,
PRONONCE publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNE par Marie-Françoise ROUX, Conseiller, et par Josette ARIENTA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur Roland Z, employé intérimaire de la Société MCTI travail temporaire en qualité d'électromécanicien a été mis à la disposition de l'entreprise ART INDUSTRIE par contrat du 22 Novembre 2010.
Il a été victime d'un accident du travail alors qu'il se rendait, dans le cadre de sa mission, en Corée du Sud dès son arrivée à Séoul, en présence de troubles neurologiques, il a été hospitalisé et il a été diagnostiqué un "AVC ischémique jonctíonnel gauche sur une occlusion de l'artère carotide interne gauche".
Il n'est pas encore consolidé mais s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé et un taux d'incapacité de 80 % lui a été attribué par la Maison des personnes handicapées.
L'enquête pénale a été classée sans suite au motif que l'infraction n'était pas caractérisée.
La procédure de conciliation a conduit à un procès-verbal de non-conciliation en date du 6 Février 2012.
Par lettre recommandée du 6 Avril 2012, Monsieur Roland Z a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Mâcon en vue de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur.
Statuant par jugement du 16 mai 2013, la juridiction de première instance de la sécurité sociale a - dit le recours de Monsieur Roland Z recevable';
- dit irrecevable les demandes d'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle';
- débouté Monsieur Roland Z de l'intégralité de ses demandes';
- dit n'y avoir lieu à accorder des sommes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur Roland Z a interjeté appel de cette décision le 24 mai 2013.
Selon conclusions soutenues oralement, l'appelant sollicite la cour de
* A TITRE PRINCIPAL
- dire que l'employeur de Roland Z et l'entreprise utilisatrice se sont rendus coupables d'une faute inexcusable à l'origine de l'accident du 22.11.2010,
- surseoir à statuer, dans l'attente de sa consolidation par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Saône-et-Loire quant à la majoration au taux maximum de la rente allouée ou l'allocation de l'indemnité forfaitaire telle que visée à l'article L 452-3 du Code de la sécurité sociale';
- dire que le salarié a droit à l'indemnisation de ses préjudices complémentaires suite à l'accident du 24.11.2010,
-dire que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Saône-et-Loire devra faire l'avance de l'indemnisation de Roland Z de l'ensemble des préjudices visés dans le code de la sécurité sociale
* les frais de parapharmacie demeurés à sa charge,
* son DFTT et son DFTP (sic),
* l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne,
* l'aménagement de son logement,
* l'aménagement de son véhicule,
* son préjudice sexuel,
* son préjudice d'établissement ou de réalisation d'un projet de vie familiale,
* ses éventuels préjudices exceptionnels,
- ordonner une expertise médicale confiée à tel expert médecin qu'il plaira avec mission habituelle en la matière et notamment de
- dire si la victime a conservé des frais de parapharmacie à sa charge et les lister,
- indiquer la durée de la période durant laquelle la victime a été dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles et évaluer le taux de cette incapacité (DFTT et DFTP),
- dire si l'état de la victime a nécessité/nécessite l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne et, dans l'affirmative, préciser la nature de l'assistance et sa durée quotidienne,
- dire si l'état de la victime nécessite l'aménagement de son logement,
- dire si l'état de la victime nécessite ou a nécessité un aménagement de son véhicule,
- dire si la victime subit une éventuelle perte de chance de promotion professionnelle,
- dire si la victime subit, avant et après consolidation, un préjudice esthétique,
- décrire les souffrances physiques et morales endurées par la victime et les évaluer,
- dire si les séquelles de la victime sont susceptibles d'entraîner un préjudice d'agrément,
- dire si la victime subit un préjudice sexuel,
- dire si la victime subit un préjudice d'établissement ou de réalisation d'un projet de vie familiale,
- dire si la victime subit des préjudices exceptionnels et s'en expliquer,
- allouer à Roland Z une indemnité provisionnelle de 30.000 euros,
- allouer à Roland Z une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner l'employeur et l'entreprise utilisatrice aux entiers dépens de procédure avec distraction au profit de la SELARL REMY LE BONNOIS en application des articles 699 et suivants du Code de procédure civile,
- rendre l'arrêt à intervenir commun à la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire. * A TITRE SUBSIDIAIRE ET AVANT DIRE DROIT
- ordonner une expertise médico-légale confiée à tel expert qu'il plaira et avec mission de dire notamment si l'AVC dont a été victime Roland Z pouvait être détecté avant son départ le 22.11.2010 notamment dans le cadre de l'organisation d'une visite médicale d'embauche et de dire si une prise en charge dudit AVC dès le 22.11.2010 aurait pu éviter les séquelles dont il est aujourd'hui atteint.
- dire que l'expert aura également pour mission de se prononcer sur l`évaluation des préjudices en lien avec ce retard de prise en charge médical.
Sur la base de conclusions développées verbalement, la société MCTI demande à la cour de

- dire et juger que l'accident survenu à Monsieur Roland Z n'est pas un accident du travail';
- débouter Monsieur Roland Z de l'intégralité de ses demandes';
* à titre subsidiaire, dire que la société MCTI n'a pas commis de faute';
- débouter Monsieur Roland Z de l'intégralité de ses demandes';
* à titre infiniment subsidiaire, ordonner une expertise avant de statuer sur l'existence d'une faute inexcusable en complétant la mission de l'expert ainsi
- déterminer la date de l'accident
- dire si l'accident a une cause liée au travail ou extérieure au travail
- déterminer les conséquences liées au 1er AVC et au 2nd AVC
dans l'hypothèse où la faute inexcusable serait retenue à l'égard de la société MCTI,
- dire et juger les conséquences de la faute inexcusable opposables à la société A.R.T. INDUSTRIE';
* en conséquence, condamner la société A.R.T. INDUSTRIE à relever et garantir la société MCTI de toute éventuelle condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre';
* en tout état de cause, condamner Monsieur Roland Z ou qui mieux le devra au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Reprenant à la barre des conclusions écrites, la société A.R.T. INDUSTRIE a prié la cour de * à titre principal, dire qu'il n'y a pas faute inexcusable';
* subsidiairement, dire n'y avoir lieu en l'état à l'octroi d'une provision à l'encontre de la société A.R.T. INDUSTRIE';
- dire tant la caisse primaire d'assurance maladie que Monsieur Roland Z irrecevables à diriger leurs demandes à l'encontre de la société A.R.T. INDUSTRIE';
- donner acte à la société A.R.T. INDUSTRIE de ce qu'elle ne s'oppose pas à l'organisation d'une mesure d'expertise médico-légale et compléter la mission de l'expert
- dire si la lésion est indépendante du travail,
- établir l'origine exacte de la lésion et déterminer l'imputabilité de l'AVC,
- dire si l'accident a une cause totalement étrangère au travail';
- débouter la société MCTI de son action récursoire à l'encontre de la société A.R.T. INDUSTRIE.
Renvoyant la cour à des observations formulées par écrit, la caisse primaire d'assurance maladie a sollicité la juridiction de
- juger ce que de droit sur la reconnaissance de la faute inexcusable et les divers préjudices qui seraient alloués selon les dispositions légales et la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010 et l'ensemble de ses conséquences';
- confirmer l'opposabilité à l'employeur de l'accident du 24 novembre 2010';
- dire n'y avoir lieu à condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie de Saône- et-Loire à payer une quelconque somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dans la mesure où la procédure est gratuite pour le justiciable et sans représentation obligatoire par ministère d'avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour entend se référer à la décision entreprise et aux écritures susvisées.

SUR QUOI,
Sur la contestation du caractère professionnel de l'accident
Attendu que l'article R. 441-14 du Code de la sécurité sociale, dans ses alinéas 3 et 4 dispose
"Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.
La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief."
Que l'article R. 142-1 alinéas 1 et 2 du même code prévoit
"Les réclamations relevant de l'article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme.
Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation. La forclusion ne peut être opposée aux intéressés que si cette notification porte mention de ce délai."';
Attendu en l'espèce que, par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 avril 2011, reçue par la société MCTI le 21 avril 2011, l'entreprise a été informée par la caisse qu'elle avait la possibilité, l'instruction étant terminée, de venir consulter les pièces du dossier, la décision de l'organisme devant intervenir le 10 mai suivant'; que la société concernée n'a pas donné suite à cette invitation';
Que, par une nouvelle lettre recommandée datée du 10 mai 2011, reçue le 12 mai 2011 par l'employeur, il a été notifié à celui-ci la prise en charge de l'accident survenu à Monsieur Roland Z, au titre de la législation professionnelle';
Que la même correspondance l'informait qu'en cas de contestation de la décision de l'organisme, il devait saisir la commission de recours amiable, dont l'adresse lui était précisée, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de deux mois à compter de la réception du courrier de notification';
Qu'ayant négligé d'élever toute contestation, la société MCTI, est irrecevable à le faire pour la première fois dans le cadre de cette procédure contentieuse, étant forclose dans son recours'; que le jugement entrepris qui a dit irrecevables les demandes d'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle doit être confirmé de ce chef';
Sur le principe de la faute inexcusable
Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail'; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver';
Attendu qu'en l'espèce, pour obtenir que soit reconnue la faute inexcusable de son employeur et de l'entreprise utilisatrice, le salarié fait valoir que constitue une faute inexcusable le fait pour l'employeur de ne l'avoir fait soumettre ni à la visite médicale d'embauche, ni à celle prévue par l'article 3 de l'accord du 2 décembre 1986 sur les conditions de détachement des salariés temporaires à l'étranger';
Que cette faute inexcusable est encore caractérisée, selon lui, par le fait que son employeur, comme la société utilisatrice, ayant connaissance de ses troubles apparents lors de son arrivée à l'aéroport n'ont pris aucune initiative pour différer son départ et le faire préalablement examiner par un médecin';
Attendu cependant que, ni l'employeur ni l'entreprise utilisatrice n'ayant eu le jour d'embarquement de contact avec Monsieur Roland Z autre que téléphonique, ce dernier ne peut soutenir que ses troubles d'élocution étaient de nature à les avertir de la gravité de son état'; qu'il ressort en effet des pièces aux débats qu'il a fallu trois jours aux médecins, lorsque Monsieur Roland Z est arrivé à Séoul, pour apprécier la réalité de son problème de santé, sans que quiconque ne les taxe d'incompétence ou de négligence';
Mais attendu qu'aux termes de l'article R. 4624-10 du Code du travail, l'employeur est tenu de soumettre ses salariés à une visite médicale avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai ; qu'en application de l'article D. 4625-1 du Code du travail, les entreprises de travail temporaire sont soumises aux mêmes obligations ;
Que l'accord du 2 décembre 1986 sur les conditions de détachement des salariés temporaires à l'étranger, étendu par arrêté ministériel du 22 juin 1987, prévoit en son article 7 que la visite médicale d'embauche ainsi que, le cas échéant, les examens complémentaires relevant de la surveillance médicale spéciale, au sens de la réglementation relative à la médecine du travail, doivent être effectués avant le départ du salarié lorsque celui-ci est détaché dans des conditions ne lui permettant pas de se rendre à une convocation ultérieure';
Qu'à l'évidence, le départ du salarié en extrême orient interdisait que la visite médicale d'embauche fût réalisée pendant sa période d'essai fixée au contrat à deux jours'; qu'elle devait nécessairement être réalisée avant son départ à l'étranger';
Que, c'est par une interprétation erronée de l'obligation pesant sur l'employeur de soumettre ses salariés à une visite médicale d'embauche que les premiers juges ont retenu que pouvait en tenir lieu une visite médicale passée le 8 septembre 2008'; qu'il ressort de l'examen de cette pièce, d'une part que cette visite d'embauche a été passée au service médical du travail de Saône-et-Loire, non à l'occasion de l'embauche par la société MCTI mais à celle d'une embauche de Monsieur Roland Z par la société A.R.T. INDUSTRIE'; que d'autre part et superfétatoirement, cette visite était ancienne de plus de deux ans lorsque est survenu l'accident du travail';
Que dès lors, quand bien même, ce qui nécessairement n'est pas le cas, Monsieur Roland Z serait demeuré salarié de A.R.T INDUSTRIE sans discontinuer depuis cette date, elle n'est pas de nature à démontrer que l'employeur a satisfait à ses obligation en matière de protection de la santé de ses salariés puisqu'une visite médicale est obligatoire tous les deux ans'; qu'enfin la société MCTI n'excipe d'aucun des cas de dispense de visite médicale d'embauche visés à l'article R. 4625-10 du Code du travail';
Attendu qu'au regard de ces circonstances, il est sans emport qu'une telle visite n'ait probablement pas permis de pronostiquer l'affection dont Monsieur Roland Z a été atteint, étant observé qu'elle aurait peut-être permis de mettre en évidence des facteurs de risque chez le sujet, susceptibles d'affecter son aptitude au poste pour lequel il était embauché (Soc. 14 mars 2013, 11-27989)';
Qu'en conséquence, la cour juge que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat'; qu'infirmant le jugement entrepris, elle juge que la société MCTI a commis une faute inexcusable causale à laquelle peut être imputée l'accident survenu à son salarié';
Sur les conséquences de la faute inexcusable
Attendu qu'aux termes de l'article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail dû à la faute inexcusable de l'employeur reçoit une majoration des indemnités qui lui sont dues, que celles-ci prennent la forme d'un capital ou d'une majoration de rente ; que les articles L. 452-2 et L. 452-3 du même code donnent la liste des préjudices dont le droit à indemnisation est reconnu au salarié victime d'un accident dû à la faute inexcusable de son employeur';
Que cependant par une décision 2010-8 du 18 juin 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la constitution les articles L. 451-1 et L. 452-2 à L. 452-5 du Code de la sécurité sociale, sous une réserve formulée dans un considérant 18 qui, pour sa compréhension, ne peut cependant être dissocié du considérant 17, lesquels sont ainsi rédigés
'17. Considérant que, lorsque l'accident ou la maladie est dû à la faute inexcusable de l'employeur, la victime ou, en cas de décès, ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leurs sont dues ; qu'en vertu de l'article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale, la majoration du capital ou de la rente allouée en fonction de la réduction de capacité de la victime ne peut excéder le montant de l'indemnité allouée en capital ou le montant du salaire ; qu'au regard des objectifs d'intérêt général précédemment énoncés, le plafonnement de cette indemnité destinée à compenser la perte de salaire résultant de l'incapacité n'institue pas une restriction disproportionnée aux droits des victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;
18. Considérant, en outre, qu'indépendamment de cette majoration, la victime ou, en cas de décès, ses ayants droit peuvent, devant la juridiction de sécurité sociale, demander à l'employeur la réparation de certains chefs de préjudice énumérés par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de ce texte ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale' ;
Qu'il y a donc lieu reconnaître le droit de Monsieur Roland Z, outre aux majorations visées à l'article L. 452-2, à se voir indemniser de ses chefs de préjudice visés par l'article L. 452-2 et L. 452-3 dans les conditions prévues par ce même code et des préjudices non visés par ce code dans les conditions de droit commun';
Mais attendu qu'à la date où cette affaire est venue à l'audience Monsieur Roland Z
n'était pas consolidé'; qu'il ne peut dans ces conditions être ordonnée une expertise visant à recueillir l'avis d'un homme de l'art sur la nature et le quantum de ses préjudices personnels';
Qu'aussi sera-t-il sursis à statuer plus amplement sur ce point et lui sera-t-il allouée une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice d'un montant de 10.000 euros'dont la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire lui fera l'avance, charge à elle de recouvrer la somme ainsi avancée sur l'auteur de la faute inexcusable';
Sur l'action récursoire de la société MCTI
Attendu que la société MCTI entend être relevée des condamnations mises à sa charge par la société A.R.T. INDUSTRIE, entreprise utilisatrice';
Mais attendu que la cour a retenu que la faute inexcusable de l'employeur était en cette affaire caractérisée exclusivement par le défaut de visite médicale d'embauche';
Qu'il incombe à l'entreprise de travail temporaire de faire procéder à la visite médicale d'embauche en application de l'article R. 4625-9 du Code du travail';
Qu'en absence de toute faute de l'entreprise utilisatrice, la société MCTI doit être déboutée de son action récursoire à son encontre';
Sur les frais irrépétibles
Attendu que la société MCTI doit être déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile'; qu'au contraire, sur le même fondement, elle sera condamnée à payer à Monsieur Roland Z la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'instance';

PAR CES MOTIFS La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit irrecevables les demandes d'inopposabilité de la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident survenu à Monsieur Roland Z le 22 novembre 2010,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,
Dit que l'accident dont a été victime Monsieur Roland Z le 22 novembre 2010 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société MCTI,
Dit que Monsieur Roland Z a le droit d'obtenir les majorations prévues par l'article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale et de se voir indemniser de ses chefs de préjudice visés par l'article L. 452-3, dans les conditions prévues par ce même code et des préjudices non visés par ce code dans les conditions de droit commun,
Constate que Monsieur Roland Z n'étant pas consolidé, en l'état son expertise médicale ne peut être ordonnée,
D'ores et déjà alloue à Monsieur Roland Z une somme de 10.000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de ses divers chefs de préjudice personnels,
Renvoie Monsieur Roland Z devant la caisse pour liquidation des droits qui lui ont été ci-dessus reconnus par le présent arrêt,
Dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Saône-et-Loire devra payer les sommes dues à Monsieur Roland Z, charge à elle d'en récupérer le montant auprès de la société MCTI',
Déboute la société MCTI de son action récursoire à l'encontre de la société A.R.T. INDUSTRIE,
Déboute la société MCTI de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la société MCTI à payer à Monsieur Roland Z une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile'au titre de ses frais irrépétibles d'instance,
Sursoit à statuer plus amplement,
Ordonne la radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours,
Dit que l'affaire pourra être rétablie au rôle, à la demande de l'une des parties, sur justification de la consolidation de l'état de santé de Monsieur Roland Z.
Le greffier Le président
Josette ARIENTA Marie-Françoise ...
10

Article, R4624-10, C. trav. Article, L452-3, CSS Article, L452-1, CSS Article, L452-2, CSS Article, R441-14, CSS Article, R142-1, CSS Article, L451-1, CSS Article, D4625-1, C. trav. Article, L452-2 à L452-5, CSS Article, R4625-10, C. trav. Article, R4625-9, C. trav. Contestation du caractère professionnel Date de réception Délai de recours Maladie professionnelle Conseil d'administration Forclusion Recours amiable À titre professionnel Contrat de travail Obligation de résultat Manquement à l'obligation de sécurité Faute inexcusable Détachement d'un salarié Salarié temporaire Société utilisatrice Entreprise utilisatrice Visite médicale Période d'essai Travail temporaire Surveillance médicale Médecine du travail Service médical du travail Santé du salarié Faute d'une société Victime d'un accident Rente majorée Indemnité majorée Réduction de la capacité Salaire Intérêt général Perte de salaire Accident du travail Expertise Préjudice personnel Provision à valoir Action récursoire Frais répétibles

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