Jurisprudence : CE 4/SS SSR, 15-05-2002, n° 239487

CE 4/SS SSR, 15-05-2002, n° 239487

A7356AY4

Référence

CE 4/SS SSR, 15-05-2002, n° 239487. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1092144-ce-4ss-ssr-15052002-n-239487
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 239487

M. BAUDOIN

M. Maus, Rapporteur
M. Schwartz, Commissaire du gouvernement

Séance du 4 avril 2002

Lecture du 15 mai 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème sous-section)

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistres les 29 octobre et 4 décembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude BAUDOIN, demeurant au centre hospitalier spécialisé à Cadillac (33410) ; M. BAUDOIN demande au Conseil d`Etat

1°) d'annuler l'ordonnance du 19 octobre 2001 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande de suspension de l'exécution de la décision verbale par laquelle le Dr Gérard médecin du centre hospitalier spécialisé de Cadillac, lui a interdit d'envoyer du courrier et de communiquer avec les autorités administratives et judiciaires ;

2°) d'ordonner la suspension de ladite décision verbale du Dr Gérard ;

3°) de condamner le centre hospitalier spécialisé de Cadillac à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative;

Après avoir entendu en séance publique

- le rapport de M. Maus, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. BAUDOIN,

- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement;

Considérant que l'ordonnance du 19 octobre 2001 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de M. BAUD0IN ne répond pas au moyen tiré par M. BAUDOIN des dispositions de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique, lesquelles fixent le régime des restrictions aux libertés individuelles des personnes atteintes de troubles mentaux hospitalisées sans leur consentement, notamment la liberté de communiquer; que, dès lors, M. BAUDOIN est fondé à soutenir que ladite ordonnance est insuffisamment motivée ; qu'il y a lieu de l'annuler;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative: "S'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut (...) régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de statuer sur la demande de référé présentée par M. BAUDOIN ;

Considérant que la demande présentée par M. BAUDOIN devant le juge des référés doit être regardée comme fondée sur les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative aux termes duquel : "Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public... aurait porté dans l'exercice de ses pouvoirs une atteinte grave et manifestement illégale" ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique

"Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux est hospitalisée sans son consentement... les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et la mise en oeuvre de son traitement... En tout état de cause, elle dispose du droit... de communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4... d'émettre et de recevoir du courrier... Ces droits peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d'agir dans l'intérêt du malade" ;

Considérant que M. BAUDOIN soutient que le médecin responsable du service du centre hospitalier spécialisé de Cadillac où il est hospitalisé lui a fait interdiction d'envoyer du courrier et de communiquer avec les autorités administratives et judiciaires; que le centre hospitalier, qui n'a pas produit d'observations, ne conteste pas l'existence de cette décision; que la mesure ainsi prise à son égard porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de communication que lui reconnaît l'article L. 3211-3 précité du code de la santé publique ; qu'eu égard à l'urgence, il y a lieu d'enjoindre au directeur du centre hospitalier spécialisé de Cadillac d'examiner la situation de M. BAUDOIN en vue de lui permettre d'exercer les droits de communication prévus par ces dispositions ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, d'appliquer ces dispositions et de condamner le centre hospitalier spécialisé de Cadillac à verser à M. BAUDOIN une somme de 1 000 euros ;

DECIDE:

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux du 19 octobre 2001 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au directeur du centre hospitalier spécialisé de Cadillac, dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la présente décision, de réexaminer la situation de M. BAUDOIN aux fins de lui permettre d'exercer ses droits de communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 du code de la santé publique et d'émettre et de recevoir du courrier.

Article 3 : Le centre hospitalier spécialisé de Cadillac versera à M. BAUDOIN la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Claude BAUDOIN, au centre hospitalier spécialisé de Cadillac et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

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