Jurisprudence : CE 8/9 SSR, 24-03-1999, n° 170982

CE 8/9 SSR, 24-03-1999, n° 170982

A4722AX8

Référence

CE 8/9 SSR, 24-03-1999, n° 170982. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1075711-ce-89-ssr-24031999-n-170982
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Conseil d'Etat

Statuant au contentieux


N° 170982

8 / 9 SSR

Vilain

Mme Liebert-Champagne, Rapporteur

M Bachelier, Commissaire du gouvernement

M Groux, Président

Lecture du 24 Mars 1999


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête enregistrée le 13 juillet 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M Pierre VILAIN, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de gérant de la SCI SIMENIN, dont le siège est 22, rue de l'Eau, à Luxembourg ; M VILAIN demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 23 mars 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, après l'avoir déchargé, à concurrence de 94 % de leur montant, des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti, au nom de la SCI SIMENIN, au titre de l'année 1980 et, en son nom personnel, au titre des années 1981 à 1986, à raison d'un immeuble sis rue du Maréchal Leclerc à Hénin-Beaumont, a, par voie de mutation de cote, mis ces impositions à la charge des héritiers de M et Mme Louis Vilain et rejeté le surplus des conclusions de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme Liebert-Champagne, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Le Bret, Laugier, avocat de M VILAIN,

- les conclusions de M Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une convention du 31 octobre 1933, la société des mines de Dourges, aux droits de laquelle se trouvent les Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais, a donné à bail, pour une durée de trente ans renouvelable, à M Louis Vilain, un terrain situé à Hénin-Beaumont afin qu'il y construise des bâtiments scolaires ; que ces bâtiments, dont la vocation scolaire devait être maintenue, ont été donnés à bail par M Louis Vilain à l'Association Saint-Louis, par acte du 10 mars 1934 ; que, par un arrêt, devenu définitif, du 6 juillet 1971, confirmant un jugement du tribunal de grande instance de Béthune du 23 juin 1970, la cour d'appel de Douai a désigné les Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais comme étant le propriétaire, par voie d'accession, des bâtiments édifiés sur le terrain pris à bail par M Louis Vilain et a jugé que les héritiers de ce dernier étaient titulaires d'une créance mobilière, au titre de ces bâtiments ; qu'en 1980, M Pierre VILAIN a fait apport de sa créance mobilière à la SCI SIMENIN ; que, s'agissant des bâtiments dont les Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais ont été reconnues propriétaires, l'administration a établi la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de l'année 1980, au nom de M Pierre Vilain, en tant que gérant de la SCI SIMENIN, et, au titre des années 1981 à 1986, au nom personnel de M Pierre Vilain, puis a mis la taxe due au titre de l'année 1980 à la charge personnelle de M Pierre VILAIN, par voie de mutation de cote ; que, regardant la convention, précitée, du 31 octobre 1933, comme un bail à construction, la cour administrative d'appel de Nancy a jugé, par l'arrêt attaqué, que la taxe due pour l'ensemble des années 1980 à 1986 avait pour redevables les héritiers de M Louis Vilain, en tant que preneurs de ce bail, et ce, par application des dispositions alors insérées au II de l'article 1 400 du code général des impôts et selon lesquelles : "Lorsqu'un immeuble est loué par bail à construction, la taxe foncière est établie au nom du preneur à bail à construction" ;

Considérant que ces dispositions sont issues du décret n° 65-1062 du 3 décembre 1965, portant incorporation dans le code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code, dont les auteurs ont entendu tirer les conséquences de la loi n° 64-1247 du 16 décembre 1964, instituant le bail à construction et relative aux opérations d'urbanisme ;

Considérant, toutefois, que les dispositions de cette loi, et notamment celles de son article 4, aux termes desquelles "le preneur est tenu de toutes les charges, taxes et contributions relatives tant aux constructions qu'au terrain", n'ont eu, ni pour objet, ni pour effet de désigner le redevable légal de la taxe foncière, mais seulement de régir les relations entre les parties pour ce qui est des charges, taxes et contributions ci-dessus mentionnées ; qu'ainsi, le décret du 3 décembre 1965 est entaché d'incompétence en tant qu'il désigne comme redevable de la taxe foncière le preneur d'un bail à construction ; qu'avant l'entrée en vigueur de l'article 39 de la loi n° 90-1169 du 29 décembre 1990, portant loi de finances rectificatives pour 1990, était seule applicable la règle énoncée par l'article 3 de l'ordonnance n° 59-108 du 7 janvier 1959, portant réforme des impositions perçues au profit des collectivités locales et de divers organismes, et rendue applicable par la loi n° 73-1229 du 31 décembre 1973, aux termes delaquelle : "La taxe foncière sur les propriétés bâties est due par les propriétaires ou usufruitiers " ; qu'ainsi, en se fondant sur les dispositions précitées du II de l'article 1 400 du code général des impôts pour juger que les impositions contestées devaient être mises à la charge des héritiers de M Louis Vilain, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit ; que les articles 3, 4 et 5 de son arrêt doivent, en conséquence, être annulés ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que, par un arrêt du 6 juillet 1971 de la cour d'appel de Douai, les Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais ont été désignées comme étant le propriétaire des bâtiments édifiés sur le terrain qui avait été pris à bail en 1933 par M Louis Vilain ; que, par suite c'est à tort que M Pierre VILAIN a été assujetti à la taxe foncière sur les propriétés bâties en tant que propriétaire de ces constructions ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, par application de l'article 1 404 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993, de décharger M Pierre VILAIN des impositions contestées et de mettre celles-ci à la charge des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 3, 4 et 5 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 23 mars 1995 sont annulés.

Article 2 : M Pierre VILAIN est déchargé de la taxe foncière sur les propriétés bâties, à laquelle il a été assujetti, au titre des années 1980 à 1986, dans les rôles de la commune d'HéninBeaumont, à raison des bâtiments de l'association Saint-Louis.

Article 3 : Ces impositions sont mises à la charge des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M Pierre VILAIN, à Mme Marie-Louise RingoVilain, à M Henri Vilain, à M Jacques Vilain, à M Joseph Vilain, à M Philippe Vilain, à Mme Lucie Bécu-Vilain, à Mme Bernadette Bouttes-Vilain, aux Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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