Directive communautaire
DEUXIÈME DIRECTIVE DU CONSEIL
du 15 décembre 1989
visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, et modifiant la directive 77/780/CEE
(89/646/CEE )
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2 première et troisième phrases,
vu la proposition de la Commission ( 1 ),
en coopération avec le Parlement européen ( 2 ),
vu l'avis du Comité économique et social ( 3 ),
considérant que la présente directive doit constituer l'instrument essentiel pour la réalisation du marché intérieur, décidée par l'acte unique européen et programmée par le Livre blanc de la Commission, sous le double aspect de la liberté d'établissement et de la libre prestation des services, dans le secteur des établissements de crédit;
considérant que la présente directive s'inscrit dans l'oeuvre législative communautaire déjà réalisée, notamment par la première directive 77/780/CEE du Conseil, du 12 décembre 1977, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice ( 4 ), modifiée en dernier lieu par la directive 86/524/CEE ( 5 ), la directive 83/350/CEE du Conseil, du 13 juin 1983, relative à la surveillance des établissements de crédit sur une base consolidée ( 6 ), la directive 86/635/CEE du Conseil, du 8 décembre 1986, concernant les comptes annuels et les comptes
consolidés des banques et autres établissements financiers ( 7 ) et la directive 89/299/CEE du Conseil, du 17 avril 1989, concernant les fonds propres des établissements de crédit ( 8 );
considérant que la Commission a adopté la recommandation 87/62/CEE ( 9 ) sur les grands risques des établissements de crédit et la recommandation 87/63/CEE ( 10 ) sur l'instauration d'un système de garantie des dépôts;
considérant que la démarche retenue consiste en la réalisation de l'harmonisation essentielle, nécessaire et suffisante pour parvenir à une reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui permette l'octroi d'un agrément unique valable dans toute la Communauté et l'application du principe du contrôle par l'État membre d'origine;
considérant que, dans ces conditions, la présente directive ne peut être mise en application que simultanément avec les harmonisations techniques complémentaires réalisées par des actes communautaires spécifiques en matière de fonds propres et de coefficient de solvabilité;
considérant que, par ailleurs, l'harmonisation des conditions d'assainissement et de liquidation des établissements de crédit est actuellement poursuivie;
considérant que l'harmonisation des instruments nécessaires au contrôle des risques de liquidité, de marché, de taux
d'intérêt et de change, supportés par les établissements de crédit, devra également être entreprise;
considérant que les principes de la reconnaissance mutuelle et du contrôle exercé par l'État membre d'origine exigent que
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les autorités compétentes de chaque État membre n'octroient pas ou retirent l'agrément au cas où des éléments comme le contenu du programme des activités, la localisation ou les activités effectivement poursuivies indiquent de manière évidente que l'établissement de crédit a opté pour le système juridique de cet État membre dans le but de se soustraire aux normes plus strictes en vigueur dans l'État membre sur le territoire duquel il entend poursuivre ou poursuit la majeure partie de ses activités; que, pour l'application de la présente directive, un établissement de crédit est considéré comme situé dans l'État membre où se trouve son siège statutaire et que les États membres doivent exiger que l'administration centrale soit située dans l'État membre où est fixé le siège statutaire;
considérant que l'État membre d'origine peut par ailleurs édicter des règles plus strictes que celles fixées aux articles 4, 5, 11, 12 et 16 en ce qui concerne les établissements agréés par ses propres autorités compétentes;
considérant que la responsabilité pour la surveillance de la solidité financière d'un établissement de crédit, et en particulier de sa solvabilité, appartient désormais à l'autorité compétente de l'État membre d'origine de celui-ci; que l'autorité compétente de l'État membre d'accueil conserve ses responsabilités en matière de surveillance de la liquidité et de politique monétaire; que la surveillance du risque de marché doit faire l'objet d'une coopération étroite entre les autorités compétentes des États membres d'origine et d'accueil;
considérant que l'harmonisation de certains services financiers et services en matière d'investissement est poursuivie, en tant que de besoin, par des actes communautaires spécifiques, notamment en vue d'assurer la protection des consommateurs et des investisseurs; que la Commission a proposé des mesures d'harmonisation du crédit hypothécaire de façon, entre autres, à permettre la reconnaissance mutuelle des techniques financières particulières à ce domaine;
considérant que l'approche retenue consiste, grâce à la reconnaisance mutuelle, à permettre aux établissements de crédit agréés dans un État membre d'origine d'exercer, dans toute la Communauté, tout ou partie des activités figurant dans la liste de l'annexe, par l'établissement d'une succursale, ou par voie de prestation de services;
considérant que l'exercice des activités qui ne figurent pas dans ladite liste bénéficie des libertés d'établissement et de prestation de services selon les dispositions générales du traité;
considérant qu'il convient cependant d'étendre le bénéfice de la reconnaissance mutuelle aux activités figurant dans la liste de l'annexe, lorsqu'elles sont exercées par un établissement financier filiale d'un établissement de crédit, à condition que cette filiale soit incluse dans la surveillance sur base consolidée à laquelle est assujettie son entreprise mère et réponde à des conditions strictes;
considérant que l'État membre d'accueil pourra, pour l'exercice du droit d'établissement et de la libre prestation de services, imposer le respect des dispositions spécifiques de ses
propres législations et réglementations nationales aux établissements qui ne sont pas agréés en tant qu'établissements de crédit dans l'État membre d'origine ou aux activités qui ne figurent pas dans ladite liste, pour autant que, d'une part, ces dispositions soient compatibles avec le droit communautaire et soient motivées par l'intérêt général et que, d'autre part, ces établissements ou ces activités ne soient pas soumis à des règles équivalentes en fonction de la législation ou réglementation de l'État membre d'origine;
considérant que les États membres doivent veiller à ce qu'il n'y ait aucun obstacle à ce que les activités bénéficiant de la reconnaissance mutuelle puissent être exercées de la même manière que dans l'État membre d'origine, pour autant qu'elles ne soient pas en opposition avec les dispositions légales d'intérêt général en vigueur dans l'État membre d'accueil;
considérant que la suppression de l'agrément exigé des succursales d'établissements de crédit communautaires à l'issue des harmonisations en cours entraîne nécessairement la suppression du fonds de dotation et que l'article 6 paragraphe 2 constitue un premier pas transitoire en ce sens, qui ne concerne cependant ni le royaume d'Espagne ni la République portugaise, conformément à l'acte d'adhésion de ces États à la Communauté;
considérant qu'il existe un lien nécessaire entre l'objectif poursuivi par la présente directive et la libération des mouvements de capitaux qui est réalisée au moyen d'autres actes législatifs communautaires; que, en tout état de cause, les mesures de libération des services bancaires doivent être en harmonie avec les mesures de libéralisation des mouvements de capitaux; que, au cas où les États membres peuvent invoquer, en vertu de la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité ( 11 ), des clauses de sauvegarde en ce qui concerne les mouvements de capitaux, ils peuvent suspendre la prestation des services bancaires, dans la mesure nécessaire pour la mise en oeuvre desdites clauses de sauvegarde;
considérant que les procédures prévues par la directive 77/780/CEE, notamment en matière d'agrément des succursales d'établissements de crédit agréés dans des pays tiers, continuent à s'appliquer à leur égard; que ces succursales ne bénéficient pas de la libre prestation des services, en vertu de l'article 59 deuxième alinéa du traité, ni de la liberté d'établissement dans des États membres autres que celui où elles sont établies; que, toutefois, les demandes d'agrément d'une filiale ou de prise d'une participation de la part d'une entreprise régie par la loi d'un pays tiers sont assujetties à une procédure qui vise à garantir que les établissements de crédit de la Communauté bénéficient d'un régime de réciprocité dans les pays tiers en question;
considérant que les agréments d'établissements de crédit, accordés par les autorités nationales compétentes, auront une portée communautaire, conformément aux dispositions de la présente directive, et non plus seulement nationale, et que les clauses de réciprocité existantes seront désormais sans effet; qu'il faut donc une procédure souple qui permette d'évaluer la réciprocité sur une base communautaire; que le
but de cette procédure n'est pas de fermer les marchés financiers de la Communauté, mais, comme la Communauté se propose de garder ses marchés financiers ouverts au reste du monde, d'améliorer la libéralisation des marchés financiers globaux dans d'autres pays tiers; que, à cette fin, la présente directive prévoit des procédures de négociation avec des pays tiers ou, en dernier ressort, la possibilité de prendre des mesures consistant à suspendre de nouvelles demandes d'agrément ou à limiter les nouveaux agréments;
considérant que le fonctionnement harmonieux du marché intérieur bancaire nécessitera, au-delà des normes juridiques, une coopération étroite et régulière des autorités compétentes des États membres; que, en ce qui concerne l'examen des problèmes afférents à un établissement de crédit individuel, le cadre du comité de contact créé entre les autorités de contrôle des banques et visé au dernier considérant de la directive 77/780/CEE continue à être le plus approprié; que ce comité constitue une enceinte adéquate pour l'information réciproque prévue à l'article 7 de ladite directive;
considérant que, en tout état de cause, cette procédure d'information réciproque ne remplace pas la collaboration bilatérale instituée par l'article 7 de la directive 77/780/CEE; que l'autorité compétente de l'État membre d'accueil pourra, sans préjudice de ses compétences de contrôle propres, continuer, soit en cas d'urgence sur son initiative, soit à l'initiative de l'autorité compétente de l'État membre d'origine, à vérifier que l'activité d'un établissement sur son territoire est conforme aux lois, aux principes d'une bonne organisation administrative et comptable et d'un contrôle interne adéquat;
considérant que des modifications techniques des règles détaillées figurant dans la présente directive pourront être nécessaires, à certains intervalles de temps, pour prendre en compte les nouvelles évolutions survenues dans le secteur bancaire; que la Commission procédera à de telles modifications, pour autant qu'elles seront nécessaires, après avoir consulté le comité consultatif bancaire, dans le cadre des pouvoirs d'exécution conférés à la Commission par les dispositions du traité; que, dans ce cas, ce comité siège en tant que "comité de réglementation" conformément aux règles de procédure fixées à l'article 2 [procédure III variante b)] de la décision 87/373/CEE du Conseil, du 13 juillet 1987, fixant les modalités de l'exercice des compétences d'exécution conférées à la Commission ( 12 ),
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
TITRE PREMIER
Définitions et champ d'application
Article premier Au sens de la présente directive, on entend par :
1 ) établissement de crédit : un établissement de crédit
au sens de l'article 1er premier tiret de la directive 77/780/CEE;
2 ) agrément : un agrément au sens de l'article 1er deuxième tiret de la directive 77/780/CEE;
3 ) succursale : un siège d'exploitation qui constitue une partie dépourvue de personnalité juridique d'un établissement de crédit et qui effectue directement, en tout ou en partie, les opérations inhérentes à l'activité d'établissement de crédit; plusieurs sièges d'exploitation créés dans le même État membre par un établissement de crédit ayant son siège social dans un autre État membre sont considérés comme une seule succursale;
4 ) fonds propres : les fonds propres au sens de la directive 89/299/CEE;
5 ) autorités compétentes : les autorités compétentes au sens de l'article 1er de la directive 83/350/CEE;
6 ) établissement financier : une entreprise, autre qu'un établissement de crédit, dont l'activité principale consiste à prendre des participations ou à exercer une ou plusieurs activités visées aux points 2 à 12 de la liste figurant à l'annexe;
7 ) État membre d'origine : l'État membre dans lequel un établissement de crédit a été agréé conformément à l'article 3 de la directive 77/780/CEE;
8 ) État membre d'accueil : l'État membre dans lequel un établissement de crédit a une succursale ou fournit des services;
9 ) contrôle : le lien qui existe entre une entreprise mère et une filiale, tel que prévu à l'article 1er de la directive 83/349/CEE ( 13 ), ou une relation de même nature entre toute personne physique ou morale et une entreprise;
10 ) participation qualifiée : le fait de détenir dans une entreprise, directement ou indirectement, au moins 10 % du capital ou des droits de vote, ou toute autre possibilité d'exercer une influence notable sur la gestion de l'entreprise dans laquelle est détenue une participation
Aux fins de l'application de la présente définition, dans les articles 5 et 11, et des autres taux de participation visés à l'article 11, les droits de vote, visés à l'article 7 de la directive 88/627/CEE ( 14 ), sont pris en considération;
11 ) capital initial : le capital au sens de l'article 2 paragraphe 1 points 1 et 2 de la directive 89/299/CEE;
12 ) entreprise mère : une entreprise mère au sens des articles 1er et 2 de la directive 83 /349/CEE;
13 ) filiale : une entreprise filiale au sens des articles 1er et 2 de la directive 83/349/CEE; toute entreprise filiale
d'une entreprise filiale est aussi considérée comme filiale de l'entreprise mère qui est à la tête de ces entreprises;
14 ) ratio de solvabilité : le coefficient de solvabilité