Directive communautaire
Directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil
du 20 mars 2000
concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 47, paragraphe 2, première et troisième phrases,
vu la proposition de la Commission,
vu l'avis du Comité économique et social(1),
statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 du traité(2),
considérant ce qui suit:
(1) La directive 73/183/CEE du Conseil du 28 juin 1973 concernant la suppression des restrictions à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services en matière d'activités non salariées des banques et autres établissements financiers(3), la première directive 77/780/CEE du Conseil du 12 décembre 1977 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice(4), la directive 89/299/CEE du Conseil du 17 avril 1989 concernant les fonds propres des établissements de crédit(5), la deuxième directive 89/646/CEE du Conseil du 15 décembre 1989 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice(6), la directive 89/647/CEE du Conseil du 18 décembre 1989 relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit(7), la directive 92/30/CEE du Conseil du 6 avril 1992 relative à la surveillance des établissements de crédit sur une base consolidée(8), et la directive 92/121/CEE du Conseil du 21 décembre 1992 relative à la surveillance et au contrôle des grands risques des établissements de crédit(9) ont été modifiées à plusieurs reprises et de façon substantielle. Il convient dès lors, pour des raisons de rationalité et de clarté, de procéder à la codification desdites directives en les regroupant en un texte unique.
(2) En application du traité, tout traitement discriminatoire en matière d'établissement et de prestation de services, fondé respectivement sur la nationalité ou sur le fait que l'entreprise n'est pas établie dans l'État membre où la prestation est exécutée, est interdit.
(3) Il est nécessaire, afin de faciliter l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, d'éliminer les différences les plus gênantes entre les législations des États membres en ce qui concerne le régime auquel ces établissements sont assujettis.
(4) La présente directive constitue l'instrument essentiel pour la réalisation du marché intérieur, décidée par l'acte unique européen et programmée par le livre blanc de la Commission, sous le double aspect de la liberté d'établissement et de la libre prestation des services, dans le secteur des établissements de crédit.
(5) Les travaux de coordination en matière d'établissements de crédit doivent, tant pour la protection de l'épargne que pour créer les conditions d'égalité dans la concurrence entre ces établissements, s'appliquer à l'ensemble de ceux-ci. Il faut toutefois tenir compte, lorsqu'il y a lieu, des différences objectives existant entre leurs statuts et leurs missions propres prévues par les législations nationales.
(6) Il est dès lors nécessaire que le champ d'application des travaux de coordination soit le plus large possible et vise tous les établissements dont l'activité consiste à recueillir du public des fonds remboursables aussi bien sous la forme de dépôts que sous d'autres formes telles que l'émission continue d'obligations et d'autres titres comparables et à octroyer des crédits pour leur propre compte. Des exceptions doivent être prévues concernant certains établissements de crédit auxquels la présente directive ne peut pas s'appliquer. La présente directive ne porte pas atteinte à l'application des législations nationales lorsqu'elles prévoient des autorisations spéciales complémentaires permettant aux établissements de crédit d'exercer des activités spécifiques ou d'effectuer des types spécifiques d'opération.
(7) La démarche retenue consiste en la réalisation de l'harmonisation essentielle, nécessaire et suffisante pour parvenir à une reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui permette l'octroi d'un agrément unique valable dans toute la Communauté et l'application du principe du contrôle par l'État membre d'origine. Dès lors, l'exigence d'un programme d'activité ne peut, dans cette optique, être considérée que comme un élément amenant les autorités compétentes à statuer sur la base d'une information plus précise, dans le cadre de critères objectifs. Un certain assouplissement est toutefois possible en ce qui concerne les exigences relatives aux formes juridiques des établissements de crédit et la protection des dénominations.
(8) Des exigences financières équivalentes requises des établissements de crédit sont nécessaires pour assurer des garanties similaires aux épargnants ainsi que des conditions de concurrence équitables entre les établissements d'une même catégorie. Dans l'attente d'une meilleure coordination, il convient de mettre au point des rapports appropriés de structure permettant, dans le cadre de la coopération entre les autorités nationales, d'observer, selon des méthodes unifiées, la situation des catégories d'établissements de crédit comparables. Cette manière de procéder est de nature à faciliter le rapprochement progressif des systèmes de coefficients définis et appliqués par les États membres. Il est nécessaire, cependant, de distinguer les coefficients visant à assurer la solidité de la gestion des établissements de crédit, de ceux ayant des finalités de politique économique et monétaire.
(9) Les principes de la reconnaissance mutuelle et du contrôle exercé par l'État membre d'origine exigent que les autorités compétentes de chaque État membre n'octroient pas ou retirent l'agrément au cas où des éléments comme le contenu du programme des activités, la localisation ou les activités effectivement exercées indiquent de manière évidente que l'établissement de crédit a opté pour le système juridique d'un État membre afin de se soustraire aux normes plus strictes en vigueur dans un autre État membre sur le territoire duquel il entend exercer ou exerce la majeure partie de ses activités. Un établissement de crédit qui est une personne morale doit être agréé dans l'État membre où se trouve son siège statuaire. Un établissement de crédit qui n'est pas une personne morale doit avoir une administration centrale dans l'État membre où il a été agréé. Par ailleurs, les États membres doivent exiger que l'administration centrale d'un établissement de crédit soit toujours située dans son État membre d'origine et qu'elle y opère de manière effective.
(10) Les autorités compétentes ne devraient pas accorder ou maintenir l'agrément d'un établissement de crédit lorsque les liens étroits qui unissent celui-ci à d'autres personnes physiques ou morales sont de nature à entraver le bon exercice de leur mission de surveillance. Les établissements de crédit déjà agréés doivent également satisfaire les autorités compétentes à cet égard. La définition dans la présente directive de "liens étroits" est constituée de critères minimaux. Cela ne fait pas obstacle à ce que les États membres visent également d'autres situations que celles envisagées par ladite définition. Le seul fait d'acquérir un pourcentage significatif du capital d'une société ne constitue pas une participation à prendre en considération au sens de la notion de "liens étroits" si cette acquisition n'est faite qu'en tant que placement temporaire, ne permettant pas d'exercer une influence sur la structure et la politique financière de l'entreprise.
(11) La référence faite au bon exercice par les autorités de contrôle de leur mission de surveillance englobe la surveillance sur une base consolidée qu'il convient d'exercer sur un établissement de crédit lorsque les dispositions du droit communautaire prévoient un tel type de surveillance. Dans un tel cas, les autorités auxquelles l'agrément est demandé doivent pouvoir identifier les autorités compétentes pour la surveillance sur une base consolidée de cet établissement de crédit.
(12) L'État membre d'origine peut par ailleurs édicter des règles plus strictes que celles fixées à l'article 5, paragraphe 1, premier alinéa, et paragraphe 2 et aux articles 7, 16, 30, 51 et 65 en ce qui concerne les établissements agréés par ses propres autorités compétentes.
(13) La suppression de l'agrément exigé des succursales d'établissements de crédit communautaires entraîne nécessairement la suppression du fonds de dotation.
(14) L'approche retenue consiste, grâce à la reconnaissance mutuelle, à permettre aux établissements de crédit agréés dans un État membre d'origine d'exercer, dans toute la Communauté, tout ou partie des activités figurant dans la liste de l'annexe I, par l'établissement d'une succursale, ou par voie de prestation de services. L'exercice des activités qui ne figurent pas dans ladite liste bénéficie des libertés d'établissement et de prestation de services selon les dispositions générales du traité.
(15) Il convient cependant d'étendre le bénéfice de la reconnaissance mutuelle aux activités figurant dans ladite liste, lorsqu'elles sont exercées par un établissement financier filiale d'un établissement de crédit, à condition que cette filiale soit incluse dans la surveillance sur base consolidée à laquelle est assujettie son entreprise mère et réponde à des conditions strictes.
(16) L'État membre d'accueil peut, pour l'exercice du droit d'établissement et de la libre prestation de services, imposer le respect des dispositions spécifiques de ses propres législations et réglementations nationales aux établissements qui ne sont pas agréés en tant qu'établissements de crédit dans l'État membre d'origine ou aux activités qui ne figurent pas dans ladite liste, pour autant que, d'une part, ces dispositions soient compatibles avec le droit communautaire et soient motivées par l'intérêt général et que, d'autre part, ces établissements ou ces activités ne soient pas soumis à des règles équivalentes en fonction de la législation ou de la réglementation de l'État membre d'origine.
(17) Les États membres doivent veiller à ce qu'il n'y ait aucun obstacle à ce que les activités bénéficiant de la reconnaissance mutuelle puissent être exercées de la même manière que dans l'État membre d'origine, pour autant qu'elles ne soient pas en opposition avec les dispositions légales d'intérêt général en vigueur dans l'État membre d'accueil.
(18) Il existe un lien nécessaire entre l'objectif pousuivi par la présente directive et la libération des mouvements de capitaux qui est réalisée au moyen d'autres actes législatifs communautaires; en tout état de cause, les mesures de libération des services bancaires doivent être en harmonie avec les mesures de libéralisation des mouvements de capitaux.
(19) Le régime appliqué aux succursales des établissements de crédit ayant leur siège en dehors de la Communauté devrait être analogue dans tous les États membres; il importe de prévoir que ce régime ne peut pas être plus favorable que celui des succursales des établissements provenant d'un État membre. Il convient de préciser que la Communauté peut conclure des accords avec des pays tiers prévoyant l'application de dispositions qui accordent à ces succursales un traitement identique sur tout son territoire, en tenant compte du principe de la réciprocité. Les succursales des établissements de crédit ayant leur siège en dehors de la Communauté ne bénéficient pas de la libre prestation des services, en vertu de l'article 49, deuxième alinéa, du traité, ni de la liberté d'établissement dans des États membres autres que celui où elles sont établies. Toutefois, les demandes d'agrément d'une filiale ou de prise d'une participation de la part d'une entreprise régie par la loi d'un pays tiers sont assujetties à une procédure qui vise à garantir que les établissements de crédit de la Communauté bénéficient d'un régime de réciprocité dans les pays tiers en question.
(20) Les agréments d'établissements de crédit, accordés par les autorités nationales compétentes, ont une portée communautaire, conformément aux dispositions de la présente directive, et non plus seulement nationale. Les clauses de réciprocité existantes sont en conséquence sans effet; il faut donc une procédure souple qui permette d'évaluer la réciprocité sur une base communautaire. Le but de cette procédure n'est pas de fermer les marchés financiers de la Communauté, mais, comme la Communauté se propose de garder ses marchés financiers ouverts au reste du monde, d'améliorer la libéralisation des marchés financiers globaux dans d'autres pays tiers. À cette fin, la présente directive prévoit des procédures de négociation avec des pays tiers ou, en dernier ressort, la possibilité de prendre des mesures consistant à susprendre de nouvelles demandes d'agrément ou à limiter les nouveaux agréments.
(21) Il convient que des accords soient conclus, sur une base de réciprocité, entre la Communauté et les pays tiers en vue de permettre l'exercice concret de la surveillance consolidée sur la base géographique la plus large possible.
(22) La responsabilité pour la surveillance de la solidité financière d'un établissement de crédit, et en particulier de sa solvabilité, appartient à l'autorité compétente de l'État membre d'origine de celui-ci; l'autorité compétente de l'État membre d'accueil conserve ses responsabilités en matière de surveillance de la liquidité et de politique monétaire. La surveillance du risque de marché doit faire l'objet d'une coopération étroite entre les autorités compétentes des États membres d'origine et d'accueil.
(23) Le fonctionnement harmonieux du marché intérieur bancaire nécessite, au-delà des normes juridiques, une coopération étroite et régulière des autorités compétentes des États membres; en ce qui concerne l'examen des problèmes afférents à un établissement de crédit individuel, le cadre du groupe de contact créé entre les autorités de contrôle des banques continue à être le plus approprié. Ce groupe constitue une enceinte adéquate pour l'information réciproque prévue à l'article 28.
(24) En tout état de cause, cette procédure d'information réciproque ne remplace pas la collaboration bilatérale instituée à l'article 28. L'autorité compétente de l'État membre d'accueil peut, sans préjudice de ses compétences de contrôle propres, continuer, soit en cas d'urgence sur son initiative, soit à l'initiative de l'autorité compétente de l'État membre d'origine, à vérifier que l'activité d'un établissement sur son territoire est conforme aux lois, aux principes d'une bonne organisation administrative et comptable et d'un contrôle interne adéquat.
(25) Il convient de permettre l'échange d'informations entre les autorités compétentes et des autorités ou organismes qui contribuent, de par leur fonction, à renforcer la stabilité du système financier. Pour préserver le caractère confidentiel des informations transmises, la liste des destinataires de celles-ci doit rester strictement limitée.