Jurisprudence : Cass. soc., 09-01-2001, n° 98-44.947, Rejet

Cass. soc., 09-01-2001, n° 98-44.947, Rejet

A4318ARD

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Cass. soc., 09-01-2001, n° 98-44.947, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1055864-cass-soc-09012001-n-9844947-rejet
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Chambre sociale
Audience publique du 9 janvier 2001
Pourvoi n° 98-44.947
société Fermière du casino municipal de Cannes
SOC.
PRUD'HOMMESC.M.
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 janvier 2001
Rejet
M. WAQUET, conseiller doyen, faisant fonctions de président
Arrêt n° 16 F D
Pourvoi n° E 98-44.947
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
_________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par la société Fermière du casino municipal de Cannes, dénommée Casino Croisette, dont le siège est Cannes ,
en cassation de l'arrêt rendu le 26 mai 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18ème chambre sociale), au profit de M. Jean-Pierre Y, demeurant Le Cannet-Rocheville,
défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 14 novembre 2000, où étaient présents M. Waquet, conseiller doyen, faisant fonctions de président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, M. Finance, Mme Quenson, conseillers, Mme Maunand, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de la société Fermière du casino municipal de Cannes, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Y, au service de la société Fermière du casino municipal de Cannes en qualité d'employé des jeux, a été mis en examen pour escroquerie le 17 novembre 1989 et licencié pour faute lourde le 29 novembre 1989 ; qu'il a bénéficié d'une ordonnance de non lieu le 28 août 1992 ; que contestant le bien fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen
Attendu que la société Fermière du casino municipal de Cannes fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 mai 1998) d'avoir dit que le licenciement de M. Y était dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen
1°) que la rupture immédiate du contrat de travail consécutive à un cas de force majeure ne s'analyse pas en un licenciement et doit seulement être constatée par l'employeur, qui n'est tenu, dans ce cas, ni au respect de la procédure prévue aux articles L. 122-14 et suivants du Code du travail, ni au paiement des indemnités prévues en cas de licenciement ; que constitue notamment un cas de force majeure privatif des indemnités de rupture, le retrait de l'agrément administratif donné au salarié d'un casino exerçant une fonction dans une salle de jeux, l'employeur étant alors tenu, conformément aux prescriptions de l'article 8 du décret du 22 novembre 1959, de congédier sans délai le salarié ; qu'ainsi, en estimant que le licenciement de M. Y était dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans répondre aux conclusions d'appel de l'employeur qui faisait valoir que la rupture était justifiée non seulement par la faute lourde du salarié, mais également par le retrait de l'agrément de ce dernier, constitutif d'un cas de force majeure, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2°) que l'évènement constitutif d'un cas de force majeure justifie la rupture immédiate et sans indemnité du contrat de travail, sans que l'employeur soit tenu de respecter la procédure applicable en matière de licenciement ni, partant, d'énoncer le motif constitutif de la force majeure dans la lettre de rupture ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que la lettre de licenciement du 29 novembre 1989 ne visait pas le contrôle judiciaire imposé au salarié dès le 17 novembre de la même année et lui faisant défense de reparaître dans un casino, pour en déduire que cette mesure ne pouvait être invoquée par l'employeur à l'appui de sa décision de rompre le contrat de travail, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par la société Fermière du casino municipal de Cannes, si la mise sous contrôle judiciaire du salarié et l'interdiction faite à ce titre à ce dernier de pénétrer dans l'établissement où il exerçait son activité professionnelle, ne constituait pas pour l'employeur un cas de force majeure justifiant la rupture immédiate et sans indemnités du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1148 du Code civil ;
3°) que la légitimité d'un motif de rupture du contrat de travail s'apprécie à la date à laquelle celle-ci est prononcée ; qu'en estimant au contraire que le motif du licenciement, prononcé le 29 novembre 1989, qui était tiré de l'ordonnance de mise sous contrôle judiciaire n'était pas sérieux dès lors qu'une ordonnance de main levée de cette mesure avait été rendue le 2 janvier 1990, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu d'abord, que le pourvoi est irrecevable à invoquer la force majeure, alors que la lettre de licenciement ne visait que la faute lourde ;
Et attendu ensuite, que le licenciement n'est effectif qu'à compter de la réception ou de la première présentation par le salarié de la lettre par laquelle l'employeur lui notifie la rupture de son contrat de travail ; que la cour d'appel qui a constaté d'une part, que l'employeur n'avait invoqué, dans la lettre de licenciement, que l'inculpation du salarié et la gravité des agissements fautifs qui lui étaient reprochés ayant induit une perte de confiance, à un moment où la réalité de ces agissements n'était pas démontrée, et d'autre part, que le salarié n'avait eu connaissance de son licenciement que le 5 janvier 1990, alors que la mesure de contrôle judiciaire avait été levée le 2 janvier précédent, a décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen
Attendu que la société Fermière du casino municipal de Cannes fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Y la somme de 231 840 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen
1°) que les faits postérieurs au licenciement ne peuvent à eux seuls caractériser, à la charge de l'employeur, une faute justifiant l'allocation pour le salarié d'une indemnité supérieure au minimum légal de six mois de salaires prévu par l'article L. 122-14-4 du Code du travail ; qu'en se déterminant par la seule circonstance que l'employeur avait refusé, postérieurement au licenciement, de réexaminer la situation du salarié, pour en déduire que ce dernier était en droit d'obtenir le paiement de six mois de salaires supplémentaires à titre de dommages-intérêts en sus de l'indemnité minimum fixée par l'article L. 122-14-4, la cour d'appel a donc violé ce texte, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
2°) que les juges du fond ne peuvent méconnaître les termes du litige, déterminés par les prétentions respectives des parties, ni par conséquent accorder à un plaideur plus qu'il n'était réclamé ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué et des conclusions d'appel du salarié, que ce dernier se prévalait d'un salaire moyen de 19 320 francs, sur la base duquel devait être calculé le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, évalués par lui à la somme de 231 840 francs qui, d'après le salarié, devait s'ajouter à celle de 4 000 francs accordée par une précédente décision pour non-respect de la procédure de licenciement ; qu'ainsi, en retenant que le salaire moyen du salarié servant de base de calcul aux indemnités devait être fixé à la somme de 19 739 francs, ce qui permettait au salarié de prétendre théoriquement au paiement d'une indemnité de 236 868 francs représentant 12 mois de salaires, pour allouer à M. Y l'indemnité qu'il réclamait, tout en relevant qu'en application des dispositions de l'article L. 122-14-4 du Code du travail cette indemnité devait intégrer la somme de 4 000 francs déjà reçue au titre du non respect de la procédure, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel qui n'a pas alloué au salarié une somme supérieure à celle qu'il réclamait, a évalué souverainement le préjudice subi par le salarié ; que le moyen qui ne tend qu'à remettre en cause cette évaluation, ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen
Attendu que l'employeur fait enfin grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à son ancien salarié la somme de 128 000 francs à titre d'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen
1°) qu'en relevant d'abord que le salarié avait été employé à compter du mois de janvier 1967 et avait donc 23 ans d'ancienneté au jour de la rupture, puis qu'il avait été employé par la société Fermière de 1970 à 1989, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires et a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2°) que conformément à l'article L. 122-10 du Code du travail, les périodes de suspension du contrat de travail ne doivent pas être prises en compte pour le calcul de l'ancienneté servant de base à la détermination de l'indemnité de licenciement ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que le salarié justifiait d'une ancienneté de 23 ans pour avoir été employé de janvier 1967 à novembre 1989, et non d'une ancienneté de 10,5 années comme le soutenait l'employeur, sans rechercher, comme ce dernier l'y invitait dans ses conclusions d'appel en réponse, si l'ancienneté du salarié ne devait pas être calculée en excluant les périodes de suspension du contrat de travail dues au caractère saisonnier de l'activité du casino, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord, que la cour d'appel a constaté que le salarié produisait des bulletins de salaire justifiant qu'il avait été employé à compter du 1er janvier 1967 ;
Et attendu ensuite qu'ayant constaté que l'article 11 de la convention collective des personnels des jeux dans les casinos autorisés prévoyait que l'indemnité de licenciement devait être calculée à raison de 1/6 de mois pendant six ans, puis de 1/3 de mois à compter de la septième année sans que le montant total ne puisse dépasser dix mois de salaire, a fait une exacte application du texte susvisé ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Fermière du casino municipal de Cannes aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Fermière du casino municipal de Cannes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille un.

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