Jurisprudence : Cass. soc., 18-12-2000, n° 98-44.577, Cassation partielle

Cass. soc., 18-12-2000, n° 98-44.577, Cassation partielle

A9844ATR

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Cass. soc., 18-12-2000, n° 98-44.577, Cassation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1055692-cass-soc-18122000-n-9844577-cassation-partielle
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COUR DE CASSATION
Chambre sociale
Audience publique du 18 Décembre 2000
Pourvoi n° 98-44.577
M. Pascal Z ¢
société Moorea Underwater Scuba-Diving Tahiti (MUST)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par M. Pascal Z, demeurant à Moorea,
en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1998 par la cour d'appel de Papeete (Chambre sociale), au profit de la société Moorea Underwater Scuba-Diving Tahiti (MUST), dont le siège social est Moorea,
défenderesse à la cassation ;
La société Moorea Underwater Scuba-Diving Tahi a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 7 novembre 2000, où étaient présents M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Frouin, conseiller référendaire rapporteur, MM. Carmet, Boubli, Ransac, Chagny, Bouret, Lanquetin, Coeuret, conseillers, Mmes Trassoudaine-Verger, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, MM Rouquayrol de Boisse, Funck-Brentano, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Frouin, conseiller référendaire, les observations de Me Blondel, avocat de M. Z, de SCP Guiguet, Bachellier et Potier de La Varde, avocat de la société Moorea Underwater Scuba-Diving Tahiti, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Z a travaillé en qualité de moniteur de plongée pour la société Société Moorea Underwater Scuba-Diving Tahiti (MUST), à compter du 27 septembre 1994, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'il a été licencié pour motif économique le 15 mars 1996 à la suite de son refus d'une modification de son contrat de travail ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal
Attendu que M. Z fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir dire et juger que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen
1 / que la seule référence aux documents versés aux débats sans analyse -fût-elle succincte- de ceux-ci ne peut satisfaire aux exigences de l article 455 du nouveau Code de procédure civile ; qu'en se contentant de dire, par motifs propres et adoptés, qu il résulte des documents régulièrement versés aux débats que la société connaissait une baisse sensible d activité dans un contexte économique défavorable, la cour d'appel, qui se contente de viser les résultats d exploitation et le nombre moyen de plongeurs par jour, sans autre explication et analyse, viole le texte précité ;
2 / qu'en toute hypothèse, la cour d'appel, qui se borne à faire état d une baisse sensible d activité dans un contexte économique défavorable sans en dire davantage par rapport à la situation économique de la société qui aurait postulé de nécessaires suppressions de postes, ne permet pas à la Cour de Cassation d exercer son contrôle au regard de la notion de licenciement économique, si bien que l arrêt n est pas légalement justifié au regard de l article L 321-1 du Code du travail, ensemble de l article 14 de la délibération n° 91-002 AT du 16 janvier 1991 portant application des dispositions du chapitre II du titre I du livre I de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 et relative au contrat de travail ;
3 / que, dans ses écritures du 24 septembre 1997 (cf p 8, 9 et 10), le salarié faisait valoir que l employeur ne pouvait sérieusement invoquer, pendant la même période, d un côté, les événements liés aux essais nucléaires qui auraient fait fuir la clientèle et, d un autre, l apparition, à la même période, de trois nouveaux clubs de plongée, alors qu il affirme lui-même avoir eu une fréquentation exceptionnelle en octobre 1995 avec une moyenne de 21,5 plongeurs par jour ; que, d ailleurs, le nombre croissant de moniteurs, 3 à partir de juin, puis 4 depuis octobre 1996, démontrent parfaitement la bonne santé de la société MUST ; que l analyse du livre des plongées permet en effet de suivre l évolution mensuelle du nombre de clients et de moniteurs de la société MUST entre décembre 1995 et novembre 1996 et de constater que le taux de fréquentation de la société MUST est tout autre depuis les licenciements et est loin d être dramatique comme le prétend M. ... ;
que l analyse du livre des plongées permet de constater que le taux de fréquentation a très sensiblement augmenté depuis le 29 février 1996, passant de 13,4 plongeurs encadrés par jour ouvré à 15,4 par jour, soit une augmentation de 20 % ; qu'en ne répondant pas à ce moyen circonstancié faisant clairement ressortir l absence de motif économique réel et sérieuxde licenciement, la cour d'appel viole l article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / que le salarié faisait valoir (cf p 10 des conclusions du 24 septembre 1997) que si, entre le 1er décembre 1995 et le 29 février 1996, on ne dénombre en moyenne qu un dépassement tous les treize jours ouvrés, entre le 1er mars 1996 et le 17 novembre 1996, on décompte pas moins de 95 dépassements à trois plongées et 12 dépassements à quatre plongées par jour pour un moniteur, soit une moyenne de plus d un dépassement tous les deux jours ouvrés ; qu en ne répondant pas davantage à ce moyen circonstancié d où ressortait l activité de l entreprise et sa façon de procéder, la cour d'appel méconnaît de plus fort les exigences de l article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
5 / qu'en toute hypothèse, si la cour d'appel relève que le licenciement a été prononcé à la suite du refus du salarié d accepter une modification substantielle de son contrat de travail, elle-même consécutive à des difficultés économiques rencontrées par l entreprise, à aucun moment les juges du fond ne constatent que cette modification substantielle unilatéralement imposée répondait à l intérêt réel de l entreprise ; qu ainsi, l arrêt n est pas légalement justifié au regard de l article L 321-1 du Code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments qui lui étaient produits, et notamment les résultats d'exploitation et la courbe d'activité de la société, la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que la société connaissait dans un contexte économique défavorable une baisse importante et durable de son chiffre d'affaires caractérisant des difficultés économiques de nature à justifier la proposition faite au salarié d'une modification de son contrat de travail ;
qu'elle a ainsi, sans encourir aucun des griefs du moyen, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal
Attendu que M. Z reproche encore à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement abusif, alors, selon le moyen, que, dans ses écritures d appel datées du 24 septembre 1997, le salarié faisait valoir le moyen suivant "l article 19 de la délibération 91-002 at du 16 janvier 1991 prévoit les critères de licenciement constitués par les qualités professionnelles, l ancienneté dans l entreprise et la situation familiale. Or, un seul des trois moniteurs de plongée, salarié de l entreprise, M. ... a été conservé, celui-ci n° a en fait été embauché que le 23 janvier 1996. Aussi, alors que les qualités professionnelles de M. Z ne sont pas en cause, qu il bénéficie d une ancienneté bien plus importante que M. ..., l employeur en procédant à son licenciement nonobstant cette ancienneté, les autres critères étant par ailleurs au moins égaux, a méconnu les dispositions de l article 19 susvisé. De ce chef, le licenciement est abusif" (cf p 13 des conclusions) ; qu en ne répondant pas à ce moyen de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la cour d'appel viole l article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que, sur trois moniteurs, deux ont été licenciés, le troisième ayant accepté la modification de son contrat de travail ; qu'il n'y avait, dès lors, pas lieu à mise en oeuvre de l'ordre des licenciements et, qu'ainsi, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal

Vu les articles L 122-6 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour limiter le préavis du salarié à un mois et le débouter de sa demande d'indemnité compensatrice de ce chef, la cour d'appel a énoncé que M. Z ne justifiait pas de la qualité de cadre ou d'un contrat particulier prévoyant un préavis de trois mois ; que, dès lors, le préavis qui lui était applicable était d'un mois ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions légales fixant la durée du préavis ne sont applicables qu'à défaut de loi particulière, de contrat de travail, de convention ou accord collectif de travail ou d'usages conduisant à un délai-congé plus favorable pour le salarié concerné, la cour d'appel, qui n'a pas vérifié si, comme il était soutenu par le salarié, il n'existait pas dans l'entreprise un usage fixant le délai-congé à trois mois, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident
Vu l'article 2 du Code civil, l'article 7 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986, en sa rédaction applicable à la cause, et l'article 3 de la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 ;
Attendu que, pour déclarer irrégulier le licenciement de M. Z et condamner la société MUST à lui payer une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, la cour d'appel a énoncé qu'il résultait de l'alinéa 5 de l'article 7 de la loi du 17 juillet 1986, modifiée par l'article 3 de la loi n° 96609 du 5 juillet 1996, que "avant de décider de licencier un salarié, l'employeur le convoque à un entretien contradictoire. A cette fin, il lui signifie en temps utile l'objet de cette convocation et la faculté qu'il a de se faire assister d'une personne de l'entreprise. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié" ; qu'en l'espèce, le salarié n'avait pas été convoqué à un entretien préalable à son licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du Travail et des tribunaux du travail en Polynésie Française, en sa rédaction applicable à la cause, ne prévoyait pas que le licenciement pour motif économique devait être précédé d'un entretien préalable et que la loi du 17 juillet 1996, qui a modifié sur ce point la loi de 1986 et imposé un tel entretien, ne pouvait s'appliquer à un licenciement déjà prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la demande d'indemnité de préavis et la demande d'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 14 mai 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille.

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