Jurisprudence : Cass. civ. 1, 24-10-2000, n° M 98-14.386

Cass. civ. 1, 24-10-2000, n° M 98-14.386

A7631AH4

Référence

Cass. civ. 1, 24-10-2000, n° M 98-14.386. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1055160-cass-civ-1-24102000-n-m-9814386
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Abstract

Ne méconnaît pas la liberté de religion consacrée par l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales la cour d'appel qui, pour suspendre le droit de visite d'un père à l'égard de ses deux filles, retient les pressions morales et psychologiques que ce père faisait peser sur ses filles encore très jeunes, notamment en exigeant le port du " voile islamique " et le respect de l'interdiction de se baigner en piscine publique, ainsi que l'absence d'évolution de sa réflexion pour prendre en compte leur développement psycho-affectif et laisser une place à la mère, la décision étant ainsi fondée sur la considération primordiale de l'intérêt supérieur des enfants.



COUR DE CASSATION
Audience publique du 24 octobre 2000
Rejet
M. ..., président
Arrêt n° 1606 F-P
Pourvoi n° M 98-14.386
Aide juridictionnelle totale en défense au profit de Mme Golutchmy .... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de Cassation en date du 21 janvier 1999.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Abdellatif El ..., demeurant Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 3 février 1998 par la cour d'appel de Paris (24e chambre, section A), au profit de Mme Golutchmy ..., divorcée ... ..., demeurant Vigneux-sur-Seine, défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt,

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 juillet 2000, où étaient présents M. Lemontey, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, Mme Petit, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre,
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SCP Bouzidi, avocat de M. El ..., de la SCP Tiffreau, avocat de Mme ..., les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi 1 Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu que M. El ... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 3 février 1998) d'avoir suspendu tout droit de visite à l'égard des deux filles nées de son mariage avec Mme ... ; qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir motivé sa décision par référence à des décisions rendues par d'autres juridictions, et d'avoir méconnu le droit du père de famille d'inciter ses enfants à la pratique religieuse, méconnaissant ainsi la liberté de religion consacrée par l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
Mais attendu que la cour d'appel a fondé sa décision sur les pressions morales et psychologiques que M. El ... faisait peser sur ses filles encore très jeunes, notamment en exigeant le port du "voile islamique" et le respect de l'interdiction de se baigner dans des piscines publiques, et sur l'absence de "signe d'évolution de sa réflexion pour prendre en compte leur développement psycho-affectif et laisser une place à la mère"; que, par ces motifs, qui ne constituent pas une simple référence à d'autres décisions, et ne méconnaissent pas la Convention précitée, la cour d'appel a légalement justifié sa décision fondée sur la considération primordiale de l'intérêt supérieur des enfants,

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi,
Condamne M. El ... aux dépens;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille.
Moyen produit par la SCP Bouzidi, avocat aux Conseils, pour M. Abdellatif El ....
LE POURVOI REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUE d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qui concerne le droit de visite du père, d'avoir suspendu tout droit de visite de Monsieur ... ... et de ne lui avoir en conséquence accordé aucun droit d'hébergement;
AUX MOTIFS QLE le juge des enfants a dû le 6 juillet 1995 meure en place un accueil des deux enfants dans un lieu neutre et suspendre le droit de visite et d'hébergement des deux parents au vu des premières conclusions du service social de l'Enfance, leur laissant uniquement la possibilité de contacts écrits et téléphoniques ; qu'il a maintenu, le 9 novembre 1995, un simple droit de correspondance pour le père ; que l'arrêt confirmatif du 2 juillet 1996 de cette Cour a indiqué que le service éducatif avait noté que Monsieur ... ... se sentait persécuté et ne laissait aucun espace de liberté à ses filles qui avaient peur de lui et que l'aide sociale à l'enfance avaient constaté qu'il inondait ses filles d'appels téléphoniques posant des interdits (porter le voile, ne pas se baigner en piscine) culpabilisant les enfants. et se livrant à des menaces verbales ; que les décisions du 10 juillet 1996 remettant les enfants à leur mère, puis du 10 octobre 1996 maintenant la mesure éducative en milieu ouvert, ont reconduit cette suspension 'des contacts entre Monsieur ... ... et ses filles à l'exception du droit de correspondance ; que- dans ces conditions., compte tenu des pressions morales - et psychologiques que Monsieur ... ... a été capable de faire peser sur ses filles, encore très jeunes, de l'absence de signe d'évolution de sa réflexion pour prendre en compte leur développement psycho-affectif et laisser une place à la mère, il y a lieu en l'état de suspendre le droit de visite organisé par le premier dans un lieu neutre que le droit de visite et d'hébergement sera réservé.
ALORS D'UNE PART QUE si les juges du fond peuvent motiver leurs décisions par référence à une décision rendue dans la même affaire ils ne peuvent motiver leur décision par référence à des décisions rendues par une autre juridiction qu'en se référant aux décisions rendues par le Juge des Enfants et à une décision rendue par elle sur un appel d'une décision du Juge des Enfants, la Cour s'est référée à des décisions rendues dans d'autres instances et a par là même, violé l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile
ALORS D'AUTRE PART QUE toute personne a droit à la liberté de penser. de conscience, de religion, que ce droit implique la liberté de manifester sa religion individuellement ou collectivement ; que la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi. constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique à la sécurité publique.. à la protection de l'ordre, de la santé ou de la moralité publique ou à la protection des droits ou des libertés d'autrui . qu'un père de famille a le droit de veiller au respect de sa religion par ses enfants. ou au moins. lorsqu'il n'a pas la garde de ceux-ci de les inciter à pratiquer sa religion et de leur en faire connaître les règles ; que ceci participe du droit à l'éducation qui appartient à tout parent ; qu'en demandant à ses filles de porter le voile (islamique) ce qui n'est en rien un interdit- et de ne pas se baigner en piscine (en public) l'exposant n'a fait qu'user des droits qui appartiennent à tout père de famille . que les juges du fond. en affirmant qu'il s'agissait d'interdits, sans rechercher si l'article 9 de la Cour Européenne des Droits de l'Homme ne conférait pas à l'exposant le droit qu'il a exercé et en tout cas, si l'interdiction faite à l'exposant d'inculquer des notions religieuses a ses enfants et de leur faire respecter sa religion était contraire à la sécurité, à l'ordre, à la santé à la morale public.
au droits et à la liberté d'autrui, les juges du fond ont privé leur arrêt au regard de l'article 9 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales.

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