Jurisprudence : Cass. crim., 04-02-1998, n° 96-81.425, Rejet

Cass. crim., 04-02-1998, n° 96-81.425, Rejet

A8179AHE

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Cass. crim., 04-02-1998, n° 96-81.425, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1050014-cass-crim-04021998-n-9681425-rejet
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Criminelle
04 Février 1998
Pourvoi N° 96-81.425
... Philippe
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant
Sur le rapport de Mme le conseiller ..., les observations de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN et de Me Le PRADO, avocats en la Cour, et les conclusions de M l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par
- ... Philippe, contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 25 janvier 1996, qui, pour non-assistance à personne en péril, l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 485, 510, 512, 591 et 592 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la Cour était composée, lors des débats, de M. ..., président de la chambre, de M. ... et de Mme Duroche, conseillers, et, lors du prononcé de l'arrêt, de M. ..., président de la chambre, de M. ..., faisant fonction de président, spécialement désigné à cet effet par ordonnance de M le premier président en date du 18 janvier 1996, et de Mme ... et de M. Gatty, conseillers ;
"1°) alors qu'aux termes de l'article 592 du Code de procédure pénale, les arrêts et jugements en dernier ressort sont déclarés nuls lorsqu'ils ne sont pas rendus par le nombre de juges prescrits; que la composition des tribunaux est d'ordre public; qu'en l'espèce, il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, lors du prononcé de l'arrêt, la cour d'appel était composée de M. ..., président de la chambre, de M. ..., faisant fonction de président, spécialement désigné à cet effet par ordonnance de M le premier président en date du 18 janvier 1996, et de Mme ... et de M. Gatty, conseillers, les magistrats étant donc au nombre de quatre; que, dès lors, la cour d'appel a violé les articles susvisés ; "2°) alors qu'aux termes de l'article 592 du Code de procédure pénale, sont nulles les déclarations rendues par les juges qui n'ont pas assisté à toutes les audiences au cours desquelles la cause a été instruite, plaidée ou jugée; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué, qui mentionne une composition de la cour d'appel différente pour les débats et le prononcé de l'arrêt, sans préciser la composition lors du délibéré, et qui ne constate pas que les débats auraient été réouverts en présence de Mme ..., de M. ... et de M. ..., ne justifie pas de la régularité de la composition de la cour d'appel" ;
Attendu que les mentions de l'arrêt attaqué suffisent à établir que les mêmes magistrats ont participé aux débats et au délibéré, et que l'arrêt a été prononcé par l'un d'eux, conformément aux dispositions des articles 485 et 512 du Code de procédure pénale ;
Qu'il n'importe qu'à cette audience, cette lecture ait été faite en présence d'autres magistrats de la chambre ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 63 de l'ancien Code pénal, des articles 111-4, 122-7 et 223-6 du nouveau Code pénal, et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Philippe ... coupable du délit de non-assistance à personne en danger et l'a condamné, sur l'action publique, aux peines de dix mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, et, sur l'action civile, à verser aux parties civiles la somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts ;
"aux motifs qu'il résulte de l'enquête et des débats que, le dimanche 20 février 1994, vers 20 heures 30, M et Mme ... ont appelé le docteur ... qui était de garde; que celui-ci étant en visite, une personne leur a indiqué que le médecin les rappellerait dès son retour; que le docteur ... a effectivement appelé vers 21 heures; que les parents ont alors expliqué que l'enfant, âgé de 11 mois, sous antibiotiques depuis quinze jours, avait 40,7° de température, que suppositoire et bains s'étaient révélés inefficaces, qu'en outre, c'était un enfant qui avait déjà fait des convulsions, était fragile et avait des problèmes immunitaires; que M et Mme ... soutiennent que le médecin leur a alors dit de mettre le bébé au lit et d'appeler le médecin traitant le lendemain matin; qu'il leur a dit qu'il ne se déplacerait pas à cause du mauvais temps; que, face à ce refus d'intervention, ils ont appelé les pompiers qui ont conduit l'enfant à l'hôpital où il est resté trois jours; que, pour sa part, Philippe ... soutient que, compte-tenu de son activité ce jour-là, de la distance à parcourir avec la neige qui tombait et de la température de l'enfant, il a dit aux parents de se rendre directement à l'hôpital dans la mesure où son intervention serait tardive et ne servirait à rien; que la mère s'est mise en colère en disant qu'elle ne sortirait pas la voiture vu l'état de la route; qu'aucun élément du dossier ne permet de conforter l'une ou l'autre thèse quant aux propos tenus par le médecin; qu'on peut relever cependant que l'affirmation de ce dernier quant au refus de la mère de sortir la voiture, compte-tenu des conditions climatiques, est contredite par le fait que les parents se sont rendus à l'hôpital en suivant les pompiers, dans leur véhicule personnel, quelques instants plus tard; qu'en tout état de cause, est puni celui qui s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ni pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par action personnelle, soit en provoquant un secours; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que l'enfant, très jeune, immuno-déficitaire, sujet à convulsions, sous antibiotiques depuis de nombreux jours et présentant cependant ce jour-là une très forte fièvre, voyait sa santé menacée; qu'en outre, on était un dimanche ce qui excluait la possibilité de joindre le médecin traitant; que le péril imminent est donc caractérisé; que ni son existence ni la connaissance qu'en avait le prévenu ne sont d'ailleurs contestées; que, cependant, face à ce péril, le docteur ... non seulement ne s'est pas déplacé pour donner des soins, ou à tout le moins établir un diagnostic, mais n'a pas non plus provoqué de secours; que si son non-déplacement peut s'expliquer, sans pour autant le justifier, par le fait qu'il devait se rendre chez un autre malade souffrant d'épilepsie et que, par ailleurs, les chutes de neige de ce jour rendaient difficile et long le déplacement jusqu'au domicile de M et Mme ... distant de 4 km, il n'en reste pas moins que le médecin, ainsi que le lui impose le texte, devait alors provoquer un secours; que tel n'a pas été le cas, même si l'on retient la version de Philippe ... selon laquelle il aurait dit aux parents d'aller à l'hôpital; qu'en effet, en procédant ainsi, le médecin n'a pas provoqué le secours mais s'est contenté de se décharger de son obligation d'assistance sur un tiers; qu'il reconnaît en effet ne pas avoir appelé le SAMU, ne pas avoir appelé les pompiers ni même l'hôpital pour préparer la venue de l'enfant; que ces éléments caractérisent la culpabilité du docteur ... quant au délit qui lui est reproché; que, s'agissant d'un médecin, le délit de non-assistance à personne en danger revêt un caractère particulièrement grave; que le docteur ..., non seulement a failli à son obligation de secours, mais a en outre fait la preuve de son total désintérêt pour cet enfant malade puisqu'à aucun moment il ne s'est manifesté pour savoir ce qu'il en était advenu, s'il avait été hospitalisé, si son état s'était amélioré ou s'il pouvait encore intervenir après avoir soigné l'épileptique dont il a fait état; qu'il n'a manifesté à l'audience aucune remise en cause de son comportement; qu'il sera condamné à dix mois d'emprisonnement assorti du sursis et à une amende de 10 000 francs ;
"1°) alors que la provocation d'un secours par le médecin n'implique pas nécessairement - et particulièrement lorsqu'il se trouve en situation d'opérer un choix entre plusieurs appels urgents et que son intervention sera inutile - qu'il le fasse personnellement; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si le docteur ..., par le conseil prodigué aux parents de l'enfant d'emmener ce dernier directement à l'hôpital, seul endroit où le malade pouvait recevoir les soins adéquats, avait provoqué le secours le plus approprié compte tenu de la situation d'urgence dans laquelle il se trouvait, étant préalablement appelé par un autre malade, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que l'article 223-6 du nouveau Code pénal n'impose à celui qui est informé du danger qu'une intervention sans risque pour lui ni pour les tiers; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si le docteur ..., en refusant de se déplacer au chevet de l'enfant en raison de la tardiveté de son intervention eu égard aux conditions climatiques et de l'inutilité de son intervention eu égard à l'absence de matériel adéquat que seul un hôpital détenait, évitait ce faisant une intervention comportant un risque pour l'enfant d'être en définitive soigné trop tard, de même qu'elle évitait un risque pour le malade atteint d'épilepsie qui requérait également son intervention immédiate, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"3°) alors qu'en s'abstenant de rechercher si la nécessité d'intervenir immédiatement auprès du malade souffrant d'une grave crise d'épilepsie, ne constituait pas un cas de force majeure ou de contrainte morale, ayant conduit le demandeur à décider, après analyse de la situation pathologique de l'enfant, de conseiller aux parents de le conduire directement à l'hôpital, sachant qu'il ne pouvait provoquer directement ledit secours, faute de temps à raison de ce qu'un autre de ses malades se trouvait également en danger, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles susvisés" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré M. ... conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, Mme ... conseiller rapporteur, MM Massé de Bombes, Le Gall, Farge, Pelletier conseillers de la chambre, MM Poisot, Soulard, Sassoust conseillers référendaires ;
Avocat général M. Amiel ;
Greffier de chambre Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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