Jurisprudence : Cass. crim., 09-12-1997, n° 96-85.958, Cassation partielle sans renvoi et action publique éteinte

Cass. crim., 09-12-1997, n° 96-85.958, Cassation partielle sans renvoi et action publique éteinte

A1363ACH

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Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 9 Décembre 1997
Cassation partielle sans renvoi et action publique éteinte
N° de pourvoi 96-85.958
Président M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.

Demandeur Claude ...
Rapporteur M. ....
Avocat général M de Gouttes.
Avocats la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Ancel et Couturier-Heller.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
CASSATION PARTIELLE sans renvoi et ACTION PUBLIQUE ETEINTE sur le pourvoi formé par X, contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 18 juillet 1996, qui, pour homicide involontaire et violation par un militaire d'une consigne relative à la sécurité des travailleurs, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et à 30 000 francs d'amende avec sursis, et ordonné la dispense d'inscription de la condamnation sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 465, alinéa 1, du Code de justice militaire, 5 à 12 du décret du 8 janvier 1965 intégré dans la consigne de sécurité de la BAN, 319 du Code pénal abrogé, 221-6 du Code pénal, 121-3 du même Code dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996, 112-1 du même Code, violation du principe de la rétroactivité in mitius, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X coupable d'homicide involontaire dans le cadre du travail, et de non-respect d'une consigne militaire ;
" aux motifs que le capitaine de vaisseau X commandait la base aéronavale de Y à l'époque des faits ; qu'en couvrant l'initiative du capitaine de frégate Z de faire exécuter les travaux de couverture par les services techniques de la base et non par une entreprise civile rompue aux problèmes de sécurité, tout en omettant de s'assurer de l'existence et de la mise en uvre des moyens de sécurité, c'est-à-dire de l'installation d'un dispositif de protection collective ou d'un système de protection individuelle appropriée, le capitaine de vaisseau X a commis une faute personnelle sans laquelle l'accident ne se serait pas produit ;
" alors, d'une part, que X faisant valoir devant la cour d'appel que, si le capitaine de frégate Z (en réalité son supérieur hiérarchique, le commandant de la base) avait, en mars 1990, compte tenu des consignes d'économie données par le service central A, proposé la réalisation de la pose de la couverture du hangar par les services industriels de la base, la décision dans ce sens avait été prise par le service central de l'aéronautique, en été 1990, antérieurement à sa prise de fonctions, en qualité de commandant, en août 1990 ; qu'en motivant la déclaration de culpabilité par le fait que le capitaine de vaisseau X avait "couvert l'initiative du capitaine de frégate Z de faire exécuter les travaux de couverture par les services techniques de la base et non par une entreprise civile rompue aux problèmes de sécurité", sans répondre à cette articulation essentielle du prévenu, de nature à écarter toute faute personnelle de sa part, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
" alors, d'autre part, que l'article 121-3 du Code pénal tel qu'issu de la loi du 13 mai 1996, texte restreignant le champ de l'élément intentionnel des infractions involontaires, et donc immédiatement applicable comme comprenant des dispositions moins sévères, oblige désormais les juges répressifs, en cas d'infraction involontaire par manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou les règlements, à rechercher si l'auteur des faits a, ou non, accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, étant précisé que le prévenu qui a accompli les diligences normales compte tenu de ses fonctions et des moyens dont il disposait doit être relaxé, l'élément intentionnel faisant état ; que, en s'abstenant de procéder à cette recherche, devenue obligatoire au moment où les juges d'appel ont statué, la cour d'appel a privé la décision de toute base légale au regard de l'article 121-3 du Code pénal" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement entrepris que, le 17 janvier 1991, alors qu'il était occupé à une hauteur de plus de 3 mètres, à la pose du toit d'un hangar sur la base aéronavale de Y, B, ouvrier d'Etat employé au service industriel de la base, a fait une chute mortelle ; que, lors de l'accident, aucun dispositif de sécurité, individuel ou collectif, n'était mis en place ; qu'à la suite de ces faits le capitaine de vaisseau X, commandant de la base, a été poursuivi, ainsi que plusieurs autres personnes, notamment, pour homicide involontaire ;
Attendu que, pour confirmer le jugement ayant déclaré le prévenu coupable de ce chef, la cour d'appel retient, après avoir estimé être en possession d'éléments d'information suffisants pour apprécier "les problèmes de gestion budgétaire" invoqués par X, que celui-ci a commis une faute personnelle en laissant exécuter les travaux concernés par les services techniques de la base plutôt que "par une entreprise civile rompue aux problèmes de sécurité" et en ne s'assurant pas, en sa qualité de commandant de base, de l'existence et de la mise en uvre des dispositifs de protection individuelle ou collective appropriés ; que les juges précisent que l'intéressé connaissait parfaitement la nécessité d'installer ces dispositifs, exigés par l'ordre particulier n° 11/80 du 27 octobre 1980 relatif à la prévention des risques de chute en hauteur, intégrant et complétant les prescriptions correspondantes du décret du 8 janvier 1965 ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que X, qui était responsable de l'application des règles d'hygiène et de sécurité du travail au sein de la base en vertu de l'article 9 du décret n° 85-755 du 19 juillet 1985, n'a pas accompli toutes les diligences normales qui s'imposaient à lui compte tenu, notamment, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, la cour d'appel a justifié sa décision tant au regard des articles 319 ancien et 221-6 nouveau du Code pénal qu'au regard des articles 121-3 de ce Code dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996 et 16-1 de la loi du 13 juillet 1972, issu de la loi du 19 décembre 1996 ;
Qu'il ne résulte d'aucune énonciation de l'arrêt attaqué, ni d'aucunes conclusions régulièrement déposées que le prévenu ait soutenu devant les juges du second degré que la décision de confier les travaux de couverture du hangar aux services techniques de la base avait été arrêtée avant sa prise de fonctions, cette circonstance, à la supposer établie, étant au demeurant inopérante, en l'état des manquements relevés par ailleurs à l'encontre du prévenu ;
D'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait en sa première branche, doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 17 et 25-28° de la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que la cour d'appel a omis de constater que le bénéfice de l'amnistie était acquis à X ;
" alors que, aux termes de l'article 7 de la loi d'amnistie du 3 août 1995, sont amnistiées les infractions commises avant le 18 mai 1995 qui sont ou seront punies de peines d'amende ou de peines d'emprisonnement inférieures ou égales à neuf mois en application du sursis simple ; que, si, aux termes de l'article 17 de cette loi, l'amnistie n'est acquise qu'après le paiement de l'amende, elle est acquise immédiatement lorsque, comme en l'espèce, la peine d'amende est assortie d'un sursis ; que, si, en vertu de l'article 25-28° de la même loi, sont exclues du bénéfice de l'amnistie les infractions d'atteintes involontaires à la vie prévues par les articles 319 du Code pénal abrogé et 221-6 du Code pénal, commises par un employeur en raison de manquements aux obligations qui lui incombent en application des dispositions de la législation et de la réglementation du travail en matière de santé et de sécurité des travailleurs, ce texte n'est pas applicable à X qui a été poursuivi et condamné du chef d'homicide involontaire par non-respect d'une consigne militaire, étant précisé que la législation et la réglementation du Code du travail étaient, de toute façon, inapplicables en l'espèce ; qu'il s'ensuit que le bénéfice de l'amnistie était acquis à X, ce que la cour d'appel ne pouvait que constater" ;
Attendu que le prévenu ne saurait soutenir que les juges du second degré auraient dû constater l'amnistie prévue par l'article 7 de la loi du 3 août 1995 en raison du quantum ou de la nature de la peine prononcée, dès lors que cette amnistie ne peut être acquise, aux termes de l'article 11 de ladite loi, qu'après condamnation devenue définitive ; que tel n'est pas le cas d'une décision de condamnation susceptible de pourvoi en cassation ;
Qu'au surplus, contrairement à ce que soutient le demandeur, l'homicide involontaire résultant, comme en l'espèce, de manquements aux dispositions de la législation et de la réglementation du travail en matière de sécurité des travailleurs est exclu du bénéfice de l'amnistie par application de l'article 25-28° de la loi précitée, même si ces manquements ne peuvent être pénalement sanctionnés ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être admis ;
Mais sur le moyen de cassation relevé d'office, pris de la violation de l'article 3 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, est amnistié, lorsqu'il a été commis avant le 18 mai 1995, le délit de violation d'une consigne par un militaire prévu par l'article 465 du Code de justice militaire ;
Attendu que la cour d'appel a déclaré X coupable de ce chef ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les faits reprochés au prévenu ont été commis en 1991, les juges du second degré, qui auraient dû constater l'extinction de l'action publique, ont méconnu le texte susvisé ;
Que, toutefois, la déclaration de culpabilité et les peines prononcées étant justifiées, tant au regard de l'article 319 ancien du Code pénal que de l'article 19 de la loi précitée, du chef du délit d'homicide involontaire, non amnistié, dont le prévenu a été également déclaré coupable, la cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de Cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit, ainsi que le permet l'article L 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, en date du 18 juillet 1996, mais seulement en ce qu'elle a déclaré le prévenu coupable de violation d'une consigne par un militaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
CONSTATE l'amnistie de droit du délit précité ;
DÉCLARE l'action publique éteinte de ce chef.

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