Jurisprudence : CE 2/7 ch.-r., 16-02-2024, n° 467533, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 2/7 ch.-r., 16-02-2024, n° 467533, mentionné aux tables du recueil Lebon

A72882MU

Référence

CE 2/7 ch.-r., 16-02-2024, n° 467533, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/104938691-ce-27-chr-16022024-n-467533-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

01-03-01-02-01 Il résulte des articles L. 211-2, L. 211-5, L. 211-6 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) ainsi que de l’article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires que le refus de reconnaître l’imputabilité au service d’un accident est au nombre des décisions qui doivent être motivées. Si le respect des règles relatives au secret médical ne peut avoir pour effet d'exonérer l’administration de l'obligation de motiver sa décision, dans des conditions de nature à permettre au juge de l’excès de pouvoir d’exercer son contrôle, elle ne peut divulguer des éléments couverts par le secret médical. Toutefois, la circonstance que la décision comporterait de tels éléments n’est pas, par elle-même, susceptible de l’entacher d’illégalité.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 467533

Séance du 29 janvier 2024

Lecture du 16 février 2024

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 2ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

Mme C B a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2020 par lequel le directeur général de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service d'accidents survenus les 24 octobre et 3 décembre 2018. Par un jugement n° 2006484 du 20 octobre 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21LY04143 du 13 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Lyon⚖️ a rejeté l'appel formé par Mme B contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 septembre, 13 décembre 2022 et 27 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984🏛 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme A Prince, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Capron, avocat de Mme B ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B, agent de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) affectée à la direction régionale Auvergne-Rhône-Alpes, a déclaré les 15 novembre et 3 décembre 2018 avoir été victime de deux accidents de service, du fait de chocs psychologiques survenus les 24 octobre et 3 décembre 2018. Par un arrêté du 20 juillet 2020, le chef du département des ressources humaines de l'INSEE a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des deux accidents ainsi déclarés. Par un jugement du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme B tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme B se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Les personnes physiques () ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir () ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation () doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes de l'article L. 211-6 du même code🏛 : " Les dispositions du présent chapitre ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation () de faits couverts par le secret ". Aux termes de l'article L. 311-6 du même code : " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical () Les informations à caractère médical sont communiquées à l'intéressé, selon son choix, directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet, dans le respect des dispositions de l'article L. 1111-7 du code de la santé publique🏛 ". Aux termes de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires: " Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal () ".

3. Il résulte de la combinaison des dispositions législatives précitées que le refus de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident est au nombre des décisions qui doivent être motivées. Si le respect des règles relatives au secret médical ne peut avoir pour effet d'exonérer l'administration de l'obligation de motiver sa décision, dans des conditions de nature à permettre au juge de l'excès de pouvoir d'exercer son contrôle, elle ne peut divulguer des éléments couverts par le secret médical. Toutefois, la circonstance que la décision comporterait de tels éléments n'est pas, par elle-même, susceptible de l'entacher d'illégalité. Il suit de là qu'en jugeant inopérant le moyen tiré de l'irrégularité de la motivation de la décision litigieuse en ce qu'elle ferait mention d'éléments permettant d'en déduire la nature de la pathologie dont souffre Mme B, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit.

4. En deuxième lieu, Mme B ne peut utilement contester les motifs surabondants par lesquels la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que la protection organisée par l'article L. 1110-4 du code de la santé publique🏛 ne visait que les seuls professionnels de santé.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : / () 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants () / Toutefois, si la maladie provient () d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par () l'accident () ". Constitue un accident de service, pour l'application de ces dispositions, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

6. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que le directeur général de l'INSEE avait pu à bon droit rejeter la demande de prise en charge présentée par Mme B, la cour a estimé que, par elles-mêmes, l'annonce par la hiérarchie d'un réagencement des postes de travail au sein d'un service et la notification à un agent de la décision d'application du demi-traitement à l'issue d'une période de six mois en congé de maladie ordinaire relèvent de l'exercice ordinaire du pouvoir hiérarchique et ne sauraient être regardées comme des événements soudains et violents, susceptibles d'être qualifiés d'accident de service alors même qu'elles se rattachent au service. En statuant ainsi, la cour n'a pas commis d'erreur de droit. Par ailleurs, en mentionnant, au point 6 de son arrêt, à la suite d'une erreur de plume, des " lésions soudaines " au lieu d'" évènements soudains ", la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

7. En quatrième lieu, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en déniant aux événements invoqués le caractère d'accidents de service, sans se prononcer sur leur éventuelle imputabilité au service.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme C B et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

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