Jurisprudence : Cass. crim., 12-03-1992, n° 91-86.843, Cassation partielle

Cass. crim., 12-03-1992, n° 91-86.843, Cassation partielle

A0745AB9

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Cass. crim., 12-03-1992, n° 91-86.843, Cassation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1034574-cass-crim-12031992-n-9186843-cassation-partielle
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CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :

- X...,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, du 6 novembre 1991, qui, sur renvoi après cassation, dans la procédure suivie notamment contre lui pour complicité d'escroqueries et d'abus de biens sociaux, a annulé partiellement un procès-verbal de perquisition et ordonné la cancellation de la partie annulée dudit procès-verbal.



LA COUR,



Vu l'ordonnance du 13 janvier 1992 par laquelle le président de la chambre criminelle a, en application des articles 570 et 571 du Code de procédure pénale, prescrit l'examen immédiat du pourvoi ;


Vu le mémoire produit ;


Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 56-1, 57, 66, 95, 802 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, violation des droits de la défense :


" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal de transport sur les lieux et de perquisition-saisie ;


" aux motifs que le procès-verbal de transport sur les lieux et de perquisition-saisie du 22 juin 1989 n'a pas été rédigé sur-le-champ, a été signé par le juge d'instruction et le greffier uniquement sur le dernier feuillet et ne comporte pas la signature de Me X..., au cabinet de qui la perquisition était effectuée, ni celle du représentant du bâtonnier ; que l'inobservation de ces formalités substantielles n'entraîne la nullité du procès-verbal de saisie que si ces irrégularités ont eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de l'inculpé concerné, par application de l'article 802 du Code de procédure pénale ; qu'il n'est ni établi ni même allégué que le défaut d'établissement du procès-verbal de perquisition sur-le-champ a porté atteinte aux intérêts de Me X... ; que celui-ci ne conteste pas avoir assisté, le 22 juin 1989, à compter de 10 heures 35, heure à laquelle il a été placé en garde à vue, à la perquisition de son cabinet ; que l'ensemble des pièces saisies énumérées dans le procès-verbal de transport-perquisition a fait l'objet de scellés numérotés de 1 à 9 ; que chacun des scellés porte la signature du magistrat instructeur, du greffier, des officiers de police judiciaire assistant le magistrat, de Me X... et du représentant du bâtonnier ; que, dans ces conditions, le défaut de signature du procès-verbal de transport-perquisition-saisie par Me X... et le représentant du bâtonnier et l'absence de signature de certains feuillets par le magistrat instructeur et le greffier, n'ont pas eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de Me X... ;


" alors que les procès-verbaux de visites domiciliaires ou de perquisitions doivent être rédigés sur-le-champ et porter la signature au bas de chacun des feuillets du magistrat instructeur et comporter la signature du perquisitionné et de celle du représentant du bâtonnier ; que l'inobservation de ces règles entraîne la nullité du procès-verbal si elle est de nature à compromettre les droits de la défense ou à porter atteinte au secret professionnel ; que la chambre d'accusation, qui s'est abstenue de rechercher si tel était le cas, en l'espèce, a méconnu les textes relatifs à la rédaction et à la signature des procès-verbaux " ;


Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le juge d'instruction s'est transporté au cabinet de X..., avocat, qui n'était pas alors inculpé, pour y effectuer une perquisition avec l'assistance de deux officiers de police judiciaire ; qu'en présence de l'intéressé et d'un délégué du bâtonnier il a saisi divers documents qu'il a placés sous scellés ; que chacun des neuf scellés porte les signatures du juge, du greffier, des officiers de police judiciaire, de X... et du représentant du bâtonnier ; qu'ayant regagné son cabinet, le juge a relaté les opérations de transport, de perquisition et de saisie dans un procès-verbal portant seulement sa signature et celle du greffier ;


Attendu que pour écarter, par application de l'article 802 du Code de procédure pénale, le moyen de nullité tiré de ce que le procès-verbal, non rédigé sur-le-champ, n'avait été ni signé par le juge sur chacun de ses feuillets, ni émargé par X..., la chambre d'accusation retient que l'inobservation de ces formalités n'a pas porté atteinte aux intérêts de ce dernier dès lors, d'une part, qu'il reconnaît avoir assisté aux opérations de saisie, d'autre part, que les scellés ont été signés par toutes les personnes présentes ;


Attendu qu'en l'état de ces énonciations la chambre d'accusation a justifié sa décision ;


D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;


Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 56, 56-1, 172, 173 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, violation des droits de la défense, excès de pouvoir :


" en ce que l'arrêt attaqué a annulé le procès-verbal de transport-perquisition-saisie du 22 juin 1989 (cote D. 461) en ce qu'il concerne les opérations décrites page 2, de la ligne 25 commençant par : nous plaçons l'inspecteur A... à la ligne 37 incluse finissant par : ...entre un client et son conseil et a ordonné la cancellation dudit procès-verbal, page 2, de la ligne 25 incluse à la ligne 37 incluse, sans en prononcer toute la nullité, en le laissant au dossier et sans rechercher si l'annulation s'étend à tout ou partie de la procédure ultérieure ;


" aux motifs que l'absence de Me X..., lors des premières opérations de perquisition, est une cause de nullité d'ordre public étrangère aux dispositions de l'article 802 du Code de procédure pénale ; que, toutefois, l'annulation du procès-verbal de transport ne doit porter que sur les opérations entachées d'irrégularité ; qu'en effet, les opérations irrégulières ont été recommencées à l'arrivée de Me X... et ne forment donc pas, avec ces dernières, un tout indivisible ; qu'il convient donc d'ordonner la cancellation du procès-verbal de perquisition-saisie du 22 juin 1989 ;


" alors que la simple cancellation d'actes, effectuée de façon à rendre illisibles certains mots ou certains passages, n'est pas prévue par la loi comme actes matériels d'annulation d'actes viciés ; que, selon l'article 173 du Code de procédure pénale, les actes annulés sont retirés du dossier d'information et qu'il est interdit d'y puiser aucun renseignement contre les parties au débat ; qu'en outre, la chambre d'accusation, qui annule un acte de l'information, doit, en vertu de l'article 172 du même Code, rechercher si l'annulation s'étend à tout ou partie de la procédure ultérieure ; qu'en l'espèce, le procès-verbal de transport-perquisition-saisie du 22 juin 1989 ayant été annulé par la chambre d'accusation, celle-ci ne pouvait se borner à ordonner la cancellation des mentions relatives à la perquisition effectuée avant l'arrivée de Me X... et devait prononcer la nullité entière du procès-verbal formant un tout indivisible afin qu'il soit retiré du dossier d'information pour être classé au greffe de la cour d'appel, et rechercher si l'annulation s'étend à tout ou partie de la procédure ultérieure ; qu'en s'abstenant de le faire, la chambre d'accusation a violé les principes susvisés " ;


Attendu qu'après avoir annulé la première partie du procès-verbal précité, qui relatait des opérations de perquisition effectuées en l'absence de X..., les juges ordonnent la cancellation des mentions relatives à ces opérations qu'ils estiment irrégulières ;


Attendu que, s'il est vrai que la cancellation des actes jugés irréguliers n'est pas prévue par la loi, la chambre d'accusation n'a pas, en l'espèce, encouru les griefs allégués dès lors que, la suite des opérations ayant été jugée régulière, il était nécessaire que le procès-verbal les relatant demeurât au dossier de la procédure ; qu'en outre, l'annulation partielle de la perquisition - dont les opérations avaient été recommencées dès l'arrivée de X... à son cabinet - ne pouvait justifier l'annulation de tout ou partie de la procédure ultérieure ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


Mais sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 56, 56-1, 57, 59 du Code de procédure pénale, 593 et 802 du même Code, violation des droits de la défense :


" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler la saisie de la lettre adressée par Y... à son conseil en date du 24 novembre 1988 ;


" aux motifs que, dans ce courrier, l'inculpé Y... écrit à Me X... : réunissez et lisez à tout le monde et faites lire ; qu'il donne ensuite des instructions à son conseil qui paraissent incompatibles avec les rapports devant exister entre un avocat et son client ; qu'en l'état des soupçons pesant sur Me X... d'avoir participé aux faits litigieux, soupçons qui avaient conduit l'officier de police judiciaire, agissant sur commission rogatoire, à prendre à son encontre une mesure de garde à vue au temps de la perquisition, la saisie de cette correspondance étrangère aux relations normales entre un avocat et son client avait pour seul but de recueillir des renseignements sur les activités de Me X... qui ont d'ailleurs motivé son inculpation ;


" alors qu'en vertu du principe de la libre défense qui domine la procédure pénale, les correspondances adressées par un client à son conseil sont couvertes par le secret et échappent à toute saisie ; qu'en l'espèce, la chambre d'accusation, qui se fonde sur les soupçons pesant sur Me X... pour justifier la violation du secret de la correspondance, sans rechercher si le document litigieux n'était pas étranger à l'instruction poursuivie et devait être exclu de toute saisie, n'a pas donné de base légale à sa décision " ;


Vu lesdits articles ;


Attendu que si le juge d'instruction est, selon l'article 96 du Code de procédure pénale, investi du pouvoir de saisir les objets et documents utiles à la manifestation de la vérité, ce pouvoir trouve sa limite dans le principe de la libre défense, qui domine toute la procédure pénale et qui commande de respecter les communications confidentielles des inculpés avec les avocats qu'ils ont choisis ou veulent choisir comme défenseurs ; que la saisie des correspondances échangées entre un avocat et son client ne peut, à titre exceptionnel, être ordonnée ou maintenue qu'à la condition que les documents saisis soient de nature à établir la preuve de la participation de l'avocat à une infraction ;


Attendu que le juge d'instruction a saisi et placé sous scellé n° 7, malgré les protestations du délégué du bâtonnier, une lettre adressée par l'inculpé Y... à son avocat X..., ainsi qu'un document joint à cette lettre ;


Attendu que pour dire n'y avoir lieu d'annuler cette saisie, les juges énoncent " qu'en l'état des soupçons pesant sur Me X... d'avoir participé aux faits litigieux, soupçons qui avaient conduit l'officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire à prendre à son encontre une mesure de garde à vue au temps de la perquisition, la saisie de cette correspondance, étrangère aux relations normales entre un avocat et son client, avait pour seul but de recueillir des renseignements sur les activités de Me X..., qui ont d'ailleurs motivé son inculpation " ;


Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs d'où il ne résulte pas que les documents saisis aient été de nature à prouver la participation de X..., à une activité délictueuse, la chambre d'accusation n'a pas justifié sa décision au regard du principe ci-dessus rappelé ;


D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;


Par ces motifs :


CASSE ET ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 6 novembre 1991, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à annulation de la saisie des documents placés sous scellé n° 7, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;


Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi dans la limite de la cassation ainsi prononcée :


RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.


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