Jurisprudence : Cass. civ. 2, 21-12-2023, n° 21-22.127, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 21-12-2023, n° 21-22.127, F-B, Cassation

A844419M

Référence

Cass. civ. 2, 21-12-2023, n° 21-22.127, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/102708452-cass-civ-2-21122023-n-2122127-fb-cassation
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Abstract

Il incombe au juge de liquider, en principal et intérêt, le montant de la créance pour laquelle il autorise la saisie des rémunérations


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 décembre 2023


Cassation


Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 1270 F-B

Pourvoi n° K 21-22.127


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 DÉCEMBRE 2023


M. [U] [C], domicilié [… …], a formé le pourvoi n° K 21-22.127 contre l'arrêt rendu le 4 février 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 10), dans le litige l'opposant à la société MCS et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [C], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 février 2021), un jugement contradictoire du 20 février 1989 a condamné solidairement MM. [C], [V] et [N] à payer à la société BNP Paribas, aux droits de laquelle se trouve la société MCS et associés (la société), une certaine somme avec intérêts conventionnels.

2. La société a signifié le jugement à M. [C] par acte du 12 décembre 2018 puis a sollicité, sur le fondement de ce jugement, la saisie des rémunérations de ce dernier.

3. Par jugement du 21 novembre 2019, un tribunal d'instance a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par le débiteur et ordonné la saisie des rémunérations.


Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. M. [C] fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble des fins de non-recevoir qu'il a soulevées, de confirmer le jugement ayant ordonné la saisie de ses rémunérations en paiement des condamnations solidaires mises à sa charge par le jugement rendu le 20 février 1989 et signifié le 12 décembre 2018, ensemble de rejeter ses demandes tendant à ce que soit déclaré nul et de nul effet l'acte de signification de ce même jugement et à voir, en conséquence, déclaré ce jugement insusceptible d'exécution, alors « que les dispositions de l'article 13 du décret n° 89-511 du 20 juillet 1989🏛, dont est issue la règle, énoncée à l'article 528-1 du code de procédure civile🏛, selon laquelle si le jugement n'a pas été notifié dans le délai de deux ans de son prononcé, la partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer un recours après l'expiration dudit délai, ne sont applicables qu'aux recours formés contre les jugements rendus après l'entrée en vigueur de ce décret ; qu'en considérant, sur le fondement de l'article 528-1 précité, que M. [C] ne pouvait se prévaloir utilement des irrégularités entachant la signification qui lui avait été faite, le 12 décembre 2018, du jugement du 20 février 1989, au motif que ce jugement était de toute façon insusceptible de recours depuis le 20 février 1991, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 2 du code civil🏛 et 34, alinéa 2, du décret n° 89-511 du 20 juillet 1989 et, par fausse application, l'article 528-1 précité. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 528-1 du code de procédure civile et 34, alinéa 2, du décret n° 89-511 du 20 juillet 1989 :

5. Aux termes du premier de ces textes, créé par l'article 13 du décret du 20 juillet 1989, si le jugement n'a pas été notifié dans le délai de deux ans de son prononcé, la partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer un recours à titre principal après l'expiration dudit délai. Selon le second, les dispositions de l'article 13 ne seront applicables qu'aux recours formés contre les jugements rendus après l'entrée en vigueur du décret du 20 juillet 1989.

6. Pour confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a fixé la créance de la société à la somme totale de 40 645,61 euros, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le jugement du 20 février 1989, rendu contradictoirement, est définitif depuis le 20 février 1991 en application de l'article 528-1 du code de procédure civile, de sorte que le débiteur ne saurait se prévaloir utilement du défaut de mention des voies de recours ouvertes dans l'acte de signification du 12 décembre 2018.

7. En statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article 528-1 n'étaient pas applicables au jugement rendu, le 20 février 1989, avant l'entrée en vigueur de ces dispositions, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


Et sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

8. M. [C] fait grief à l'arrêt d'ordonner, par confirmation du jugement, la saisie de ses rémunérations en paiement des condamnations solidaires mises à sa charge par le jugement du 20 février 1989 et signifié le 12 décembre 2018 et, infirmant de ce chef le jugement entrepris, de fixer la créance de la société à la somme principale de 53 809,46 euros, de dire que sont dus les intérêts au taux de 13,05 % sur la somme de 53 047,22 euros, à compter du 25 octobre 1988 jusqu'au 11 août 1994, du 18 janvier 2011 au 17 octobre 2011 et du 6 mars 2013 au 6 mars 2018 et que devront s'imputer les paiements d'un montant total de 56 445,61 euros en fonction de leur date de paiement, d'abord sur les intérêts non prescrits, puis sur le capital, alors « que seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des rémunération de son débiteur ; qu'il appartient au juge, en cas de contestation, de vérifier et de fixer le montant de la créance en principal, intérêts et frais, la saisie ne pouvant être ordonnée qu'après l'accomplissement de cette étape préalable, de façon que le greffe n'ait plus qu'à établir l'acte de saisie ; qu'en se bornant à fixer les règles de computation des intérêts prétendument dus sur la condamnation principale prononcée par le jugement du 20 février 1989 et à préciser les règles d'imputation des paiements effectués à hauteur de la somme de 56.445,61 euros, sans liquider elle-même la créance en fixant le solde qui seul pouvait justifier la saisie, la cour d'appel n'a pas accompli son office, ce en quoi elle a violé les articles R.3252-1 et R.3252-19, alinéa 3, du code du travail🏛🏛, ensemble l'article 12 du code de procédure civile🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 12 du code de procédure civile, R. 3252-19 et R. 3252-22 du code du travail :

9. Selon le premier de ces textes, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

10. Selon le deuxième, si les parties ne se sont pas conciliées, il est procédé à la saisie après que le juge a vérifié le montant de la créance en principal, intérêts et frais et, s'il y a lieu, tranché les contestations soulevées par le débiteur. Selon le troisième, l'acte de saisie établi par le greffe contient, notamment, le décompte distinct des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts.

11. L'arrêt fixe la créance de la société à la somme en principal de 53 809,46 euros, dit que sont dus les intérêts au taux de 13,05 % sur la somme de 53 047,22 euros à compter du 25 octobre 1988 jusqu'au 11 août 1994, du 18 janvier 2011 au 17 octobre 2011 et du 6 mars 2013 au 6 mars 2018 et dit que devront s'imputer les paiements d'un montant total de 56 445,61 euros, en fonction de leur date de paiement, d'abord sur les intérêts non prescrits puis sur le capital.

12. En statuant ainsi, alors qu'il incombe au juge de liquider, en principal et intérêt, le montant de la créance pour laquelle il autorise la saisie, la cour d'appel, qui n'a pas procédé à cette liquidation, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

13. En application de l'article 624 du code de procédure civile🏛, la cassation des dispositions de l'arrêt confirmant le jugement, fixant la créance de la société à la somme en principal de 53 809,46 euros, disant que sont dûs les intérêts au taux de 13,05 % sur la somme de 53 047,22 euros, à compter du 25 octobre 1988 jusqu'au 11 août 1994, du 18 janvier 2011 au 17 octobre 2011 et du 6 mars 2013 au 6 mars 2018 et disant que devront s'imputer les paiements d'un montant total de 56 445,61 euros, en fonction de leur date de paiement, d'abord sur les intérêts non prescrits puis sur le capital entraîne la cassation des autres chefs de dispositif, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société MCS et associés aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, condamne la société MCS et associés à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-trois.

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