Jurisprudence : Cass. crim., 07-03-1988, n° 87-80.931, Cassation sans renvoi

Cass. crim., 07-03-1988, n° 87-80.931, Cassation sans renvoi

A7902AAW

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Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 7 Mars 1988
Cassation sans renvoi
N° de pourvoi 87-80.931
Président M. Ledoux

Demandeur Forni Raymond
Rapporteur M. Y
Avocat général M. Robert
Avocats la SCP Waquet et Farge, M. W
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par Forni Raymond, contre un arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, du 29 octobre 1986, qui, pour infraction à l'article 226 du Code pénal, l'a condamné à 1 000 francs d'amende avec sursis et à des réparations civiles
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 26 de la Constitution, 226 du Code pénal, 592 et 593 du Code de procédure pénale
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'immunité tirée de l'article 26 de la Constitution, et condamné Forni, député, président de la commission des lois et rapporteur à l'Assemblée nationale du projet de loi sur la Nouvelle-Calédonie, du chef du délit prévu et réprimé par l'article 226 du Code pénal ;
" aux motifs que ni le contenu de la déclaration (relative à une décision de justice), ni les circonstances dans lesquelles elle avait été obtenue (par téléphone, sur interview d'un journaliste, au domicile de Forni et quelques jours après son retour de Nouméa) ne permettent pas de considérer que, lorsqu'il avait émis sa critique de la décision judiciaire précitée, Forni se trouvait, en tant que parlementaire et plus spécialement en tant que rapporteur du projet de loi sur la Nouvelle-Calédonie, dans l'exercice même de ses fonctions ;
" alors, d'une part, que Forni, ayant été invité à s'exprimer sur l'antenne d'une radio en tant que député et président de la commission des lois et rapporteur du projet de loi sur la Nouvelle-Calédonie, et lui-même ayant pris cette qualité, les propos qui lui sont reprochés, relatifs à une décision de justice condamnant M. V, leader du FLNKS, du chef d'atteinte à l'intégrité territoriale, intéressant les problèmes posés par le statut de la Nouvelle-Calédonie, ne pouvaient être considérés comme tenus hors l'exercice des fonctions de parlementaire de Forni, rapporteur du projet de loi sur la Nouvelle-Calédonie ;
" et alors que, d'autre part, l'arrêt attaqué ne pouvait sans contradiction affirmer que ces propos avaient été tenus hors l'exercice des fonctions, et retenir, pour condamner Forni, que ces mêmes propos, tenus " par le président de la commission des lois à l'Assemblée nationale, qui s'était présenté comme tel ", étaient dès lors de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué, d'une part, que les propos imputés à Raymond Z n'ont pas été tenus au cours de l'une des activités prévues aux titres IV et V de la Constitution, pouvant seules caractériser l'exercice des fonctions parlementaires, non plus qu'au sein de l'Assemblée nationale ;
Que, d'autre part, la circonstance que la qualité du prévenu de président de la commission des lois ait été invoquée à l'occasion des déclarations faites par lui ne suffit pas à donner à celles-ci le caractère d'acte de la fonction parlementaire ;
D'où il suit que c'est à bon droit et sans contradiction que les juges du fond n'ont pas fait bénéficier Forni de l'immunité prévue par l'alinéa 1 de l'article 26 de la Constitution non plus d'ailleurs que de celle établie par l'alinéa 1er de l'article 41 de la loi sur la presse et que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 226 du Code pénal, 2, 592 et 593 du Code de procédure pénale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'Association professionnelle des magistrats pour mettre en mouvement l'action publique sur le fondement des articles 226 et 227 du Code pénal ;
" aux motifs qu'aux termes de l'article 411-11 du Code du travail, les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; que l'APM, syndicat de magistrats, est ainsi recevable à mettre en mouvement l'action publique tant sur le fondement de l'article 226 du Code pénal qui tend à protéger l'autorité et l'indépendance de la justice, donc de la magistrature, que sur le fondement de l'article 227 qui a pour objet de protéger notamment les juridictions de jugement, c'est-à-dire les magistrats les composant, des pressions pouvant être exercées sur elles par la voie de certains commentaires ;
" alors que les infractions visées par les articles 226 et 227 du Code pénal ne sont punissables que lorsqu'il est porté atteinte à l'intérêt de la justice comme constitution fondamentale de l'Etat, et non aux magistrats qui concourent à la justice ; que, dès lors, le dommage qui peut en résulter est subi par la collectivité entière, et seul le ministère public est habilité à poursuivre la répression de telles infractions " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que l'infraction prévue par l'article 226 du Code pénal a pour objet exclusif la protection de l'intérêt général qui s'attache à l'autorité de la justice qu'assure seul le ministère public ;
Attendu que pour déclarer recevable l'action du syndicat " Association professionnelle des magistrats " (APM) qui avait cité directement Forni devant la juridiction répressive pour infraction à l'article 226 du Code pénal les juges considèrent que les propos tenus par le prévenu qu'ils estiment de nature à discréditer une décision juridictionnelle dans des conditions pouvant porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance, a causé " un préjudice moral à l'intérêt collectif de la profession représentée par la partie civile " ;
Mais attendu qu'en se prononçant comme elle l'a fait la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé et que la cassation est encourue ;

Et attendu que l'action publique n'ayant pas été régulièrement mise en mouvement il ne reste rien à juger ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen de cassation proposé
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, du 29 octobre 1986 en ses dispositions condamnant Forni tant pénalement qu'en matière de réparation civile ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi

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