Jurisprudence : Cass. crim., 24-06-1985, n° 83-92.873, Rejet

Cass. crim., 24-06-1985, n° 83-92.873, Rejet

A4493AAN

Référence

Cass. crim., 24-06-1985, n° 83-92.873, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1018373-cass-crim-24061985-n-8392873-rejet
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Statuant sur le pourvoi forme par :

- X... raymond,

Contre un arret de la cour d'appel de bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 1983 qui, pour communication d'un secret de fabrique a l'etranger, l'a condamne a six mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'a des dommages-interets ;

Vu les memoires produits en demande et en defense ;

Sur les deux premiers moyens de cassation, reunis et pris : le premier : de la violation de l'article 388 du code de procedure penale, defaut de motifs et manque de base legale ;

" en ce que l'arret attaque a declare le sieur X... coupable de communication de secret de fabrique a un etranger et en repression l'a condamne a la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et a payer 800 000 francs de dommages et interets a la partie civile ;

" aux motifs que la societe rito possedait un departement de fraises a chaussures et avait employe le sieur X... comme ajusteur puis dessinateur de novembre 1961 a fevrier 1962 ;

Qu'apres son licenciement le sieur X... s'etait rendu en italie pour y fonder en avril 1972 avec Y..., d'ailleurs dirigeant de la societe stoc une societe universal frese, ou il etait associe par moitie et pour le compte de laquelle il avait debauche le rectificateur z...et le rectificateur ajusteur A..., jusqu'alors employes de la societe rito ;

Que d'apres les experts la fraise produite par universal frese etait la replique exacte de la fraise rito et qu'au surplus le sieur X... avait reconnu s'etre servi du procede de pliage des dents utilise par la societe rito, ajoutant il est vrai que ce procede public etait alors deja utilise par les societes aberle, stoc et gardosi ;

Que d'apres les experts la societe rito avait depose le 14 juin 1963 une demande pour faire breveter son procede de fabrication des fraises a chaussures mais qu'il suffisait a un technicien mediocrement averti d'examiner une telle fraise pour en deceler le procede de fabrication (rectification cylindrique sur la peripherie des dents en carbure de tungstene brasees sur un corps en acier, puis relevage des dents) ;

Que, toujours d'apres les experts, il convenait de caracteriser, au-dela du procede de fabrication proprement dit, l'industrialisation de ce procede, comprenant a) le choix du materiau constituant le corps de l'outil, b) la mise au point des outillages de relevage et enfin c) la mise au point d'un standard d'outillage permettant, avec un minimum de frais de reprofilage des meules, de couvrir toute la gamme des profils plus ou moins complexes demandes par la clientele puis la decomposition de l'ensemble des profils complexes a realiser en formes geometriques elementaires pouvant etre rectifies avec un nombre limite de meules simples a l'aide d'un minimum de perte par reprofilage ;

Que si les points a et b n'etaient pas secrets, en revanche, le point c constituait un important probleme d'exploitation technique et demandait un fort investissement ;

Que les experts etaient fondes, au vu des temoignages recueillis, a considerer que ce point c etait inconnu ou du moins peu connu des concurrents de la societe rito et constituait donc un secret de fabrique ;

Que c'etait X... qui avait communique ce secret a universal frese ;

" alors que le juge repressif ne peut statuer que sur les faits qui lui sont deferes par l'ordonnance de renvoi ;

Qu'en l'espece l'ordonnance de renvoi, adoptant quant a l'enonciation des faits reproches au sieur X... les mentions du requisitoire definitif, definissait expressement le secret de fabrique pretendument communique par l'inculpe comme celui " decrit dans un brevet du 14 juin 1963 qui n'avait pas ete publie precisement pour preserver le secret " ;

Qu'ainsi, des lors que la cour affirmait que ce procede-la n'etait pas secret, elle ne pouvait, sans exceder les limites de sa saisine, retenir d'autres faits pour caracteriser le secret de fabrique, faits d'ailleurs non vises dans la plainte initiale de la partie civile ;

Que ce faisant elle a excede ses pouvoirs ;

" le deuxieme : de la violation des articles 379, 417 et 418 du code penal, de la regle non bis in idem, de l'article 593 du code de procedure penale, defaut de motifs et manque de base legale ;

" en ce que l'arret attaque a declare le sieur X... coupable de communication de secret de fabrique a un etranger et en repression l'a condamne a la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et a payer 800 000 francs de dommages et interets a la partie civile ;

" alors que, d'une part, en reconnaissant que le procede communique par le sieur X... etait " peu connu " des tiers, mais connu neanmoins puisque les etablissements aberle en avaient use pour fabriquer des 1964-1965 des fraises a chaussures non pas en serie mais uniquement sur commande comme la societe gardosi, qui chiffrait a 3 306 le nombre de fraises fabriquees selon ce procede d'octobre 1968 a juin 1974 et comme la societe stoc, dont il etait difficile de chiffrer la production et en retenant pourtant que ce procede etait secret, la cour n'a pas tire les consequences legales de ses propres constatations, et a viole l'article 418 du code penal ;

" alors que, d'autre part, le sieur X... ayant ete relaxe du chef de vol de plans et documents, le juge repressif ayant alors pourtant expressement constate que la societe ou il etait associe possedait les copies des plans et descriptifs du procede litigieux, et que le sieur X... ayant deja ete condamne pour le fait d'avoir apporte la competence technique des ouvriers A... et z...a une societe etrangere, la cour d'appel ne pouvait, sans violer la regle non bis in idem, reprimer le fait pour le sieur X... d'avoir " reconstitue l'ancienne equipe rito " en italie et d'avoir " pris sur place les references " du procede sous la qualification de communication de secret de fabrique, ces faits ayant deja ete juges sous une autre qualification ;

" attendu qu'il appert de l'arret attaque que X... a ete renvoye devant le tribunal correctionnel, du chef du delit prevu par l'article 418 du code penal, pour avoir communique en 1972, a un ressortissant italien avec lequel il a fonde une societe dite " universal frese ", un procede de fabrication de fraises a chaussures qui appartenait a la societe francaise " rito " ou il avait ete employe pendant plus de dix ans, ce procede constituant un secret de fabrique " connu seulement de quelques salaries " ;

Que ce secret de fabrique avait ete decrit dans une demande de brevet d'invention deposee le 14 juin 1963 a l'institut de la production industrielle par la societe rito, mais retiree par cette derniere avant delivrance et publication " justement pour conserver le secret " ;

Attendu que la cour d'appel, pour declarer le prevenu coupable des faits poursuivis, et se fondant sur les conclusions de deux rapports d'experts successivement deposes au cours de la procedure, constate que les fraises a chaussures fabriquees par " universal frese " apres 1972 etaient " une replique exacte des fraises rito ", les unes et les autres etant " exactement similaires sinon identiques " ;

Que, selon l'arret, si deux des trois operations necessaires a l'industrialisation du procede de fabrication en cause pouvaient etre reproduites par un technicien quelque peu averti des problemes de fabrication des outils de coupe, la troisieme partie de ce procede, relative a " la mise au point d'un standard d'outillage permettant, avec un minimum de frais de reprofilage des meules, de couvrir toute la gamme des profils plus ou moins complexes demandes par la clientele ", constituait en revanche un secret de fabrique de la societe rito, n'ayant pu etre introduit a " universal frese " que par x... ;

Attendu qu'en l'etat de ces enonciations, relevant de leur pouvoir souverain d'appreciation des elements de preuve contradictoirement debattus devant eux, les juges, qui ont statue dans la limite de leur saisine et sans meconnaitre l'autorite de la chose jugee s'attachant a une decision de relaxe precedemment intervenue en faveur du prevenu du chef de vol de plans et documents au prejudice de la societe rito, ont donne une base legale a leur decision ;

Qu'ainsi les deux moyens reunis, qui ne sauraient non plus invoquer utilement une condamnation definitivement prononcee contre le demandeur pour des faits, au demeurant amnisties, constitutifs d'une infraction distincte, en ses elements tant legaux que materiels, du delit prevu et reprime par l'article 418 du code penal, ne sauraient etre retenus ;

Sur le troisieme moyen de cassation, pris de la violation des articles 418 du code penal, 55 de la constitution, 3, 34, 36, 59, 60 et 177 du traite instituant la communaute economique europeenne, defaut de motifs et manque de base legale ;

" en ce que l'arret infirmatif attaque a condamne un ressortissant francais pour avoir communique un secret de fabrique, avec cette circonstance aggravante que la communication dudit secret avait beneficie a un ressortissant etranger, en l'occurrence un italien ;

" alors que, d'une part, la circonstance aggravante figurant a l'article 418 du code penal francais, et tenant a ce que le secret de fabrique a beneficie a un etranger, des lors que cet etranger est ressortissant de la communaute economique europeenne, est directement contraire aux dispositions superieures du traite susvise, en ce qu'elles abolissent entre les etats membres les obstacles a la libre circulation des personnes, des services et des capitaux, et qu'ainsi ladite circonstance aggravante n'est plus applicable dans le cas d'une communication a un ressortissant de la communaute europeenne ;

" alors que, d'autre part, les decisions de la cour de cassation n'etant pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, ladite cour de cassation est tenue de saisir d'une question prejudicielle la cour de justice instituee par le traite des lors qu'elle estimerait que le point de savoir si la violation d'un droit de propriete industrielle ou d'un droit equivalent peut, sans violation du traite de rome, etre plus severement reprimee lorsque la violation commise par le ressortissant d'un etat membre de la communaute a beneficie au ressortissant d'un autre etat membre, necessite une interpretation du traite ;

" attendu qu'il ne saurait etre fait grief a l'arret attaque, en condamnant X... du chef du delit de revelation d'un secret de fabrique a l'etranger, en l'espece en italie, a un ressortissant d'un etat membre des communautes europeennes, d'avoir fait application d'un texte repressif de droit interne qui serait contraire aux dispositions superieures du traite de la communaute economique europeenne invoquees au moyen ;

Qu'en effet les stipulations du traite c. C. E., notamment en ce qu'elles posent le principe de la libre circulation des personnes, des marchandises ou des services et celui de la libre concurrence entre les etats membres, sont inapplicables aux situations ou comportements reconnus comme delictueux par l'ensemble des legislations nationales, telle la violation d'un secret professionnel dont le delit de communication d'un secret de fabrique, prevu et reprime par l'article 418 du code penal, ne constitue qu'un cas particulier ;

Qu'il n'y a lieu, des lors, de saisir en interpretation la cour de justice des communautes et que le moyen ne peut qu'etre ecarte ;

Et attendu que l'arret est regulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.

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