Jurisprudence : Cass. civ. 3, 26-10-2023, n° 22-11.307, F-D, Rejet

Cass. civ. 3, 26-10-2023, n° 22-11.307, F-D, Rejet

A71891QC

Référence

Cass. civ. 3, 26-10-2023, n° 22-11.307, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/101032212-cass-civ-3-26102023-n-2211307-fd-rejet
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Abstract

► Si la locataire n'avait pas fait vérifier ou contrôler ses installations techniques par les organismes compétents, ces contrôles n'apportaient pas, selon l'expert, la garantie qu'un incendie ou une explosion ne puisse se produire, la cour d'appel, qui en a souverainement déduit que le lien de causalité entre cette omission et l'incendie n'était pas démontré par la bailleresse, a légalement justifié sa décision de rejeter les demandes d'indemnisation du bailleur à l'encontre de la locataire.


CIV. 3

VB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 octobre 2023


Rejet


Mme TEILLER, président


Arrêt n° 712 F-D

Pourvoi n° V 22-11.307


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 OCTOBRE 2023


Mme [L] [B], domiciliée lieu-dit [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-11.307 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2021 par la cour d'appel de Rennes (chambre des baux ruraux), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [M] [Aa], épouse [R],

2°/ à M. [D] [R],

domiciliés tous deux lieu-dit [Adresse 3],

3°/ à la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de La Loire, Ab A, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Bosse-Platière, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [B], de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. et Mme [R] et de la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de La Loire, Ab A, après débats en l'audience publique du 19 septembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Bosse-Platière, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 2 décembre 2021), par acte du 1er juillet 2006, Mme [B] (la bailleresse) a donné à bail rural un poulailler à Mme [R] (la locataire).

2. Le 16 mai 2017, un incendie a détruit le bâtiment d'élevage.

3. Le 8 août suivant, la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de La Loire (Ab A), assureur de la locataire, a dénié sa garantie en invoquant l'absence de faute grave de la part de celle-ci.

4. Le 8 avril 2019, la bailleresse a, après expertise, saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en indemnisation de son préjudice.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La bailleresse fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre la locataire et Ab A, alors :

« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que Mme [L] [B], qui reprochait à Mme [R] de ne pas avoir satisfait à son obligation d'assurer l'entretien et le contrôle des installations du poulailler, se prévalait de l'arrêté du 27 décembre 2013, qu'elle versait aux débats, comportant des prescriptions générales s'imposant aux élevages de volailles relevant du régime de l'autorisation au titre de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, en édictant notamment des règles à l'attention de l'exploitant dans le cadre d'un dispositif de prévention des accidents et incendies ; qu'en énonçant pourtant, pour considérer que la faute grave de Mme [R] n'était pas établie, que Mme [B], bailleresse, reprochait au preneur ''l'absence de vérification et de contrôle des installations par le preneur, mais ne précise pas, dans ses conclusions, le fondement juridique de ces vérifications et contrôle'', la cour d'appel a dénaturé, par omission, ce document et ainsi violé le principe susvisé ;

2°/ que en tout état de cause, le juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit examiner les faits invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions sous tous leurs aspects juridiques, conformément aux règles de droit qui leur sont applicables ; qu'en retenant, pour considérer que la faute grave de Mme [R] n'était pas établie, que Mme [B], bailleresse, ne précisait pas le fondement juridique des obligations de vérification et de contrôle des installations dont le manquement était reproché au preneur et qu'elle ne spécifiait pas le texte prévoyant l'obligation de remplacer les tuyaux et les flexibles tous les 10 ans, dont le manquement était également reproché à Mme [R], quand il lui appartenait d'examiner les manquements reprochés sous tous leurs aspects juridiques, conformément aux règles de droit qui leur sont applicables et au besoin, de déterminer elle-même la réglementation applicable au regard des règles de sécurité s'imposant à l'exploitant avicole, la cour d'appel a méconnu son office en violation de l'article 12 du code de procédure civile🏛 ;

3°/ que lorsque l'exploitant d'un immeuble incendié a commis un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou un règlement ou toute autre faute résultant d'une imprudence, inattention ou négligence dans son obligation de veiller à la sécurité du bâtiment, il commet ce faisant une faute en lien de causalité avec le dommage consécutif à un incendie qu'il a contribué à occasionner ; qu'en énonçant, pour rejeter les demandes indemnitaires dirigées contre Mme [R], après avoir constaté que ''Mme [R] n'a pas fait vérifier ou contrôler ses installations techniques par les organismes compétents'' et a ainsi commis une faute ''quant à l'absence de contrôle'', que pour autant, ''le lien de causalité entre cette absence et l'incendie n'est pas démontré'', dès lors que, selon l'expert, ''ces contrôles n'apportent pas la garantie qu'un incendie ou une explosion ne puisse se produire'', quand les manquements constatés à l'encontre de Mme [R] entretenaient nécessairement un lien causal avec le dommage, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 415-3 du code rural et de la pêche maritime🏛 ;

4°/ que lorsque l'exploitant d'un immeuble incendié a commis un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou un règlement ou toute autre faute résultant d'une imprudence, inattention ou négligence dans son obligation de veiller à la sécurité du bâtiment, il commet ce faisant une faute en lien de causalité avec le dommage consécutif à un incendie qu'il a contribué à occasionner ; qu'en se bornant à énoncer, pour rejeter les demandes indemnitaires dirigées contre Mme [R], après avoir constaté que ''Mme [R] n'a pas fait vérifier ou contrôler ses installations techniques par les organismes compétents'' et a ainsi commis une faute ''quant à l'absence de contrôle'', que pour autant, ''le lien de causalité entre cette absence et l'incendie n'est pas démontré'', sans s'expliquer sur les constatations de l'expert dont se prévalait Mme [B] dans ses conclusions d'appel, mettant en évidence l'intérêt du respect des normes en matière de vérifications et de contrôles des installations techniques, d'électricité et de gaz, au regard de la prévention des incendies en ce qu'il aurait permis de remédier à d'éventuelles non-conformités, et ainsi éviter le dommage, la cour d'appel, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 415-3 du code rural et de la pêche maritime. »


Réponse de la Cour

6. Ayant relevé que, si la locataire n'avait pas fait vérifier ou contrôler ses installations techniques par les organismes compétents, ces contrôles n'apportaient pas, selon l'expert, la garantie qu'un incendie ou une explosion ne puisse se produire, la cour d'appel, qui en a souverainement déduit que le lien de causalité entre cette omission et l'incendie n'était pas démontré par la bailleresse, a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches, légalement justifié sa décision de rejeter les demandes d'indemnisation.

7. Par conséquent, le moyen, inopérant en ses première et deuxième branches, ne peut être accueilli.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par Mme [B] et la condamne à payer à la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de La Loire la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-trois.

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