Jurisprudence : CJCE, 08-06-2000, aff. C-396/98, Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR c/ Finanzamt Paderborn

CJCE, 08-06-2000, aff. C-396/98, Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR c/ Finanzamt Paderborn

A1801AWM

Référence

CJCE, 08-06-2000, aff. C-396/98, Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR c/ Finanzamt Paderborn. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1008159-cjce-08062000-aff-c39698-grundstuckgemeinschaft-schlo-stra-e-gbr-c-finanzamt-paderborn
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Cour de justice des Communautés européennes

8 juin 2000

Affaire n°C-396/98

Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR
c/
Finanzamt Paderborn



61998J0396

Arrêt de la Cour (sixième chambre)
du 8 juin 2000.

Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR contre Finanzamt Paderborn.

Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.

Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Article 17 de la sixième directive 77/388/CEE - Déduction de la taxe payée en amont - Impossibilité d'opérer la déduction en raison d'une modification de la législation nationale qui supprime la possibilité d'opter pour la taxation de la location de biens immeubles.

Affaire C-396/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-4279

Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Déduction de la taxe payée en amont - Déduction de la taxe frappant des biens livrés et des services fournis aux fins de travaux d'investissement destinés à être utilisés dans le cadre d'opérations taxées - Modification législative postérieure à la fourniture de ces biens ou de ces services mais antérieure au début desdites opérations privant l'assujetti du droit de renoncer à l'exonération de celles-ci - Circonstance sans pertinence à l'égard du droit à déduction - Protection de la confiance légitime - Sécurité juridique

(Directive du Conseil 77/388, art. 17)

$$L'article 17 de la sixième directive 77/388 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires doit être interprété en ce sens que le droit, pour un assujetti, de déduire la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur des biens ou services qui lui ont été fournis en vue de réaliser certaines opérations de location reste acquis lorsqu'une modification législative postérieure à la fourniture de ces biens ou de ces services mais antérieure au début desdites opérations prive cet assujetti du droit de renoncer à l'exonération de celles-ci, même si la taxe sur la valeur ajoutée a été liquidée sous réserve d'un contrôle a posteriori. Les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent, en effet, à ce qu'une telle modification législative le prive, avec effet rétroactif, du droit à déduction qu'il a acquis.

(voir points 47, 53 et disp.)

Dans l'affaire C-396/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Bundesfinanzhof (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR

Finanzamt Paderborn,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1),

LA COUR

(sixième chambre),

composée de MM. J. C. Moitinho de Almeida (rapporteur), président de chambre, R. Schintgen, G. Hirsch, V. Skouris et Mme F. Macken, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

- pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing, Ministerialrat au ministère fédéral des Finances, et C.-D. Quassowski, Regierungsdirektor au même ministère, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. E. Traversa, conseiller juridique, et A. Buschmann, fonctionnaire national mis à la disposition du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR, représentée par M. B. Westermann, conseiller fiscal à Paderborn, du gouvernement allemand, représenté par M. C.-D. Quassowski, et de la Commission, représentée par M. J. Grunwald, conseiller juridique, en qualité d'agent, à l'audience du 2 décembre 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 16 décembre 1999,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 27 août 1998, parvenue à la Cour le 6 novembre suivant, le Bundesfinanzhof a posé, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la "sixième directive").

2 Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige opposant Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR (ci-après "Schloßstraße") au Finanzamt Paderborn à propos de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la "TVA") acquittée par Schloßstraße sur des biens ou des services qui lui ont été fournis en vue de réaliser certaines opérations pour lesquelles une modification législative intervenue postérieurement à la fourniture desdits biens ou services a supprimé le droit de renoncer à l'exonération.

La sixième directive

3 L'article 13 de la sixième directive dispose:

"...

B. Autres exonérations

Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

...

b) l'affermage et la location de biens immeubles...

Les États membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d'application de cette exonération;

...

C. Options

Les États membres peuvent accorder à leurs assujettis le droit d'opter pour la taxation:

a) de l'affermage et de la location de biens immeubles;

...

Les États membres peuvent restreindre la portée du droit d'option; ils déterminent les modalités de son exercice."

4 L'article 17 de la sixième directive prévoit:

"1. Le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible.

2. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a) la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti.

...

3. Les États membres accordent également à tout assujetti la déduction ou le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée visée au paragraphe 2 dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins:

a) de ses opérations relevant des activités économiques visées à l'article 4 paragraphe 2, effectuées à l'étranger, qui ouvriraient droit à déduction si ces opérations étaient effectuées à l'intérieur du pays;

b) de ses opérations exonérées conformément à l'article 14 paragraphe 1 sous i), à l'article 15 et à l'article 16 paragraphe 1 sous B, C et D et paragraphe 2;

c) de ses opérations exonérées conformément à l'article 13 sous B sous a) et sous d) points 1 à 5, lorsque le preneur est établi en dehors de la Communauté ou lorsque ces opérations sont directement liées à des biens qui sont destinés à être exportés vers un pays en dehors de la Communauté.

..."

5 Aux termes de l'article 20 de la sixième directive:

"1. La déduction initialement opérée est régularisée suivant les modalités fixées par les États membres, notamment:

a) lorsque la déduction est supérieure ou inférieure à celle que l'assujetti était en droit d'opérer;

b) lorsque des modifications des éléments pris en considération pour la détermination du montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration, notamment en cas d'achats annulés ou en cas de rabais obtenus; toutefois, il n'y a pas lieu à régularisation en cas d'opérations totalement ou partiellement impayées, en cas de destruction, de perte ou de vol dûment prouvés ou justifiés...

2. En ce qui concerne les biens d'investissement, une régularisation est opérée pendant une période de cinq années, dont celle au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué. Chaque année, cette régularisation ne porte que sur le cinquième de la taxe dont ces biens ont été grevés. Cette régularisation est effectuée en fonction des modifications du droit à déduction intervenues au cours des années suivantes, par rapport à celui de l'année au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué.

...

3. En cas de livraison pendant la période de régularisation, le bien d'investissement est considéré comme s'il était resté affecté à une activité économique de l'assujetti jusqu'à l'expiration de la période de régularisation. Cette activité économique est présumée être entièrement taxée pour le cas où la livraison dudit bien est taxée; elle est présumée être entièrement exonérée pour le cas où la livraison est exonérée. La régularisation se fait en une seule fois pour tout le temps de la période de régularisation restant à courir.

...

4. Pour l'application des paragraphes 2 et 3, les États membres peuvent:

- définir la notion de biens d'investissement,

- préciser quel est le montant de taxe qui est à prendre en considération pour la régularisation,

- prendre toutes dispositions utiles en vue d'éviter que les régularisations ne procurent aucun avantage injustifié,

- autoriser des simplifications administratives.

..."

La réglementation nationale en matière de TVA

6 L'article 4, point 12, sous a), de l'Umsatzsteuergesetz 1993 (loi relative à la taxe sur le chiffre d'affaires, ci-après l'"UStG") dispose:

"Parmi les opérations couvertes par l'article 1er, paragraphe 1, points 1 à 3, sont exonérés:

...

12. a) la location et l'affermage de terrains..."

7 L'article 9 de l'UStG précise toutefois:

"1. Un entrepreneur peut traiter comme taxable une opération exonérée aux termes de l'article 4, point... 12, lorsque ladite opération est effectuée pour un autre entrepreneur pour le compte de son entreprise.

2. La renonciation à l'exonération au sens du paragraphe 1 n'est admise... en cas de location et ou d'affermage de terrains [article 4, point 12, sous a)] que lorsque l'entrepreneur apporte la preuve que le terrain n'est employé ou destiné ni à des fins d'habitation ni à des activités autres que celles d'une entreprise."

8 Le Mißbrauchsbekämpfungs- und Steuerbereinigungsgesetz (loi relative à la simplification de la législation fiscale et à la lutte contre la fraude, ci-après le "StMBG"), du 21 décembre 1993 (BGBl. I 1993, p. 2310), a restreint, avec effet au 1er janvier 1994, l'étendue du droit d'option en matière de taxation de la location de terrains. L'article 9, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG, prévoit:

"La renonciation à l'exonération au sens du paragraphe 1 n'est admise... en cas de location ou d'affermage de terrains [article 4, point 12, sous a)] que si le destinataire de la prestation n'emploie ou n'a l'intention d'employer le terrain qu'en vue d'opérations n'excluant pas la déduction de la taxe en amont. Il appartient à l'entrepreneur d'apporter la preuve que ces conditions sont remplies."

9 Aux termes de l'article 18, paragraphe 3, de l'UStG, la déclaration de la taxe sur le chiffre d'affaires est effectuée comme en matière d'impôt.

10 L'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG, prévoit la disposition transitoire suivante:

"L'article 9, paragraphe 2, n'est pas applicable lorsque l'édifice construit sur le terrain

1. est employé ou destiné à des fins d'habitation et a été achevé avant le 1er avril 1985;

2. est employé ou destiné à d'autres fins, non liées à une activité d'entreprise, et a été achevé avant le 1er janvier 1986;

3. est employé ou destiné à d'autres fins que celles indiquées aux points 1 et 2 [fins d'habitation ou autres fins, ne se rapportant pas à l'activité d'une entreprise] et a été achevé avant le 1er janvier 1998;

et lorsque... dans les cas visés au point 3, la construction du bâtiment a été entamée avant le 11 novembre 1993."

11 Les articles 164 et 168 de l'Abgabenordnung (code des impôts, ci-après l'"AO") permettent une liquidation rapide de l'impôt en fondant celle-ci sur les seules déclarations de l'assujetti, mais autorise en contrepartie l'administration fiscale à rectifier cette liquidation sous tous ses aspects, tant au regard des faits que du droit.

12 En effet, l'article 164 de l'AO dispose:

"1. Les taxes peuvent, en attendant une vérification définitive, être liquidées, en général ou dans des cas particuliers, sous réserve de vérification, sans que cette liquidation ait besoin d'être motivée.

...

2. La liquidation peut être annulée ou modifiée tant que la réserve reste applicable...

...

4. La réserve de vérification devient caduque avec l'expiration du délai de liquidation..."

13 L'article 168 de l'AO précise qu'une déclaration d'impôt est assimilée à une liquidation de l'impôt sous réserve de vérification. Dès lors, conformément à l'article 18, paragraphe 3, de l'UStG, la déclaration de la taxe sur le chiffre d'affaires aboutit elle-même, en raison des dispositions législatives existantes et sous réserve de vérification, à une liquidation de la taxe, qui peut être modifiée à tout moment, sans qu'il soit nécessaire que d'autres conditions soient réunies.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

14 Schloßstraße est une société de droit civil qui a pour objet la détention d'un droit de superficie sur un terrain, la construction sur celui-ci d'un immeuble de bureaux et d'habitation ainsi que l'exploitation de cette propriété foncière à long terme.

15 Le 8 mars 1991, Schloßstraße a acquis le droit de superficie sur ledit terrain et, le 16 mars 1991, elle a introduit une demande de permis de construire. La conformité avec les règles d'urbanisme du projet de Schloßstraße ayant été contestée, ce permis ne lui a été délivré que le 27 mai 1993.

16 Il résulte d'une décision prise le 11 juin 1993 par les associés de Schloßstraße qu'ils étaient convenus de céder le permis de construire à un tiers immédiatement après sa délivrance. Toutefois, cette décision n'a pu être traduite dans les faits, faute d'acquéreur. Le 10 octobre 1993, Schloßstraße a conclu un contrat avec un architecte en vue de procéder à la construction de l'immeuble. Les travaux ont commencé en janvier 1994 et se sont terminés en décembre de la même année.

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